LE CONSEIL SOULIGNE L'URGENCE DE LA PREVENTION DU COMMERCE ILLICITE DES ARMES LEGERES ET DENONCE L'UTILISATION INCONSIDEREE DE TELLES ARMES
Communiqué de Presse
CS/1096
LE CONSEIL SOULIGNE L'URGENCE DE LA PREVENTION DU COMMERCE ILLICITE DES ARMES LEGERES ET DENONCE L'UTILISATION INCONSIDEREE DE TELLES ARMES
19990924Une conférence internationale sur la question est prévue pour l'an 2001
Réuni sous la présidence de M. Jozias van Aartsen, Ministre des affaires étrangères des Pays-Bas, à la demande de son Gouvernement, le Conseil de sécurité a tenu ce matin un débat au niveau ministériel sur la question des armes légères.
Le contrôle des armes légères constitue une condition sine qua non pour garantir le succès d'un processus de restauration de la paix et pour assurer la prévention des conflits, a déclaré le Secrétaire général, M. Kofi Annan, lors du débat, qui a invité le Conseil à accorder une attention particulière à la prévention des conflits et à jouer un rôle efficace dans ce domaine.
Les délégations, dans leur ensemble, ont souligné l'importance de la prolifération des armes légères dans le monde, aussi meurtrières que les armes de destruction massive. Afin de lutter contre ce fléau, des mesures doivent être prises aux niveaux mondial et régional en s'attaquant à la fois à la production, au commerce et à l'utilisation inconsidérée de ce type d'armement, ont-elles souligné. Elles ont plaidé pour la convocation d'une conférence internationale sur le commerce illicite des armes sous tous ses aspects, au plus tard en 2001.
Les personnalités suivantes, représentant les Etats membres du Conseil ont fait une déclaration: M. Charles Josselin, Ministre délégué à la coopération et à la francophonie de la France; M. Robin Cook, Secrétaire d'Etat aux affaires étrangères et au Commonwealth du Royaume-Uni; M. Boris Frlec, Ministre des affaires étrangères de la Slovénie; M. Datuk Seri Syed Hamid Albar, Ministre des affaires étrangères de la Malaisie; M. LLoyd Axworthy, Ministre des affaires étrangères du Canada; M. Guido di Tella, Ministre des affaires étrangères de l'Argentine; M. Luiz Felipe Lampreia, Ministre des affaires étrangères du Brésil; M. Wang Guangya, Vice-Ministre des affaires étrangères de la Chine; Shaikh Mohammed Bin Mubarak Al-Khalifa, Ministre des affaires étrangères du Bahreïn; M. Jean Ping, Ministre des affaires étrangères, de la coopération et de la francophonie du Gabon;
(à suivre 1a) - 1a - CS/1096 24 septembre 1999
M. Momodou Lamin Sedat Jobe, Secrétaire d'Etat aux affaires étrangères de la Gambie; Mme Madeleine Korbel Albright, Secrétaire d'Etat des Etats-Unis; et M. Jozias van Aartsen, Ministre des affaires étrangères des Pays-Bas. Les représentants de la Fédération de Russie et de la Namibie sont également intervenus.
A l'issue du débat, le Président du Conseil de sécurité, au nom des membres du Conseil, a fait la déclaration suivante :
Le Conseil de sécurité rappelle que la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationales lui incombe en vertu de la Charte des Nations Unies et qu'il est ainsi inévitablement appelé à se pencher sur le problème des armes légères, qui sont les plus fréquemment employées dans la majorité des conflits armés récents.
Le Conseil note avec une vive préoccupation que l'accumulation déstabilisatrice des armes légères a contribué à accroître l'intensité et la durée des conflits armés. Il constate également que le fait de pouvoir se procurer facilement de telles armes est un facteur qui peut contribuer à porter préjudice aux accords de paix, à compliquer les activités de consolidation de la paix et à entraver le développement politique, économique et social. À cet égard, il reconnaît que le défi constitué par les armes légères présente de nombreux aspects, qui touchent à la sécurité, au secteur humanitaire et au développement.
Le Conseil se déclare vivement préoccupé par le fait que les pays qui sont engagés dans des conflits armés prolongés, qui en sortent ou qui en sont menacés souffrent d'une vulnérabilité particulière à la violence causée par l'emploi indifférencié des armes légères. À cet égard, il rappelle le rapport du Secrétaire général sur la protection des civils en période de conflit armé, en date du 8 septembre 1999 (S/1999/957), et sa résolution 1265 (1999) du 17 septembre 1999.
Le Conseil souligne qu'il conviendrait de tenir pleinement compte du droit de légitime défense, individuelle ou collective, reconnu à l'Article 51 de la Charge des Nations Unies ainsi que des exigences de tous les pays en matière de sécurité. Il reconnaît que les armes légères entrent dans les échanges mondiaux à des fins commerciales et de sécurité légitimes. Compte tenu du volume considérable de ces échanges, il souligne qu'il est d'une importance capitale de réglementer efficacement au niveau national les transferts d'armes de ce genre. Il invite également les gouvernements des pays exportateurs d'armes à manifester pleinement le sens de leurs responsabilités dans le cadre de ces transactions.
Le Conseil souligne que la prévention du commerce illicite des armes légères est une question importante et urgente pour ce qui est de chercher les moyens permettant de freiner l'emploi inconsidéré de ces armes dans le monde, notamment par les terroristes.
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Le Conseil se félicite des diverses initiatives actuellement prises, aux niveaux mondial et régional, pour remédier à ce problème. Sur le plan régional, ces initiatives comprennent le moratoire de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest sur la production et le commerce d'armes légères, la Convention interaméricaine contre la fabrication illicite et le trafic d'armes à feu, munitions, explosifs et autres matériels connexes, l'Action commune de l'Union européenne sur les petites armes et le Code de conduite de l'Union européenne concernant les exportations d'armes. Au niveau mondial, le Conseil accueille avec satisfaction le processus de négociation en vue de l'élaboration d'une convention internationale contre la criminalité organisée transnationale, y compris un projet de protocole contre la fabrication et le commerce illicites des armes à feu, munitions et autres matériels connexes.
Le Conseil souligne l'importance de la coopération régionale pour lutter contre le trafic d'armes légères. Certaines initiatives, notamment celles de la Communauté de développement de l'Afrique australe et de l'Organisation régionale de coordination des directeurs de police d'Afrique australe, montrent bien comment la coopération régionale peut être mise au service de la lutte contre la prolifération des armes légères. Le Conseil reconnaît que, si certaines régions peuvent parfois tirer parti de l'expérience acquise dans d'autres régions, cette expérience ne saurait être utile sans qu'il soit tenu compte des diversités régionales.
Le Conseil note également avec satisfaction et encourage les efforts visant à prévenir et combattre l'accumulation excessive et déstabilisatrice des armes légères ainsi que leur trafic et invite les États Membres à y faire participer la société civile.
Le Conseil note avec satisfaction que les organismes des Nations Unies accordent une attention croissante au problème lié à l'accumulation déstabilisatrice des armes légères. Il se félicite que le Secrétaire général ait créé le Mécanisme de coordination de l'action concernant les armes légères, dans le but d'assurer, au sein du système des Nations Unies, une démarche cohérente et coordonnée à l'égard de la question des armes de ce genre.
Le Conseil note que, malgré la gravité évidente de l'impact humanitaire des armes légères dans les situations de conflit, aucune analyse détaillée n'est disponible à ce sujet. Il prie par conséquent le Secrétaire général d'inclure, dans les études qu'il entreprend actuellement, les incidences humanitaires et socioéconomiques de l'accumulation et du transfert excessifs et déstabilisateurs des armes légères, y compris leur production et leur commerce illicites.
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Le Conseil demande que les embargos sur les armes décrétés conformément à ses résolutions pertinentes soient effectivement mis en oeuvre. Il encourage les États Membres à fournir aux comités des sanctions les informations disponibles sur les allégations de violation de ces embargos et recommande que les présidents de ces comités invitent les personnes compétentes des organes, organisations et comités du système des Nations Unies, ainsi que des organisations intergouvernementales et régionales et autres parties concernées, à communiquer des informations sur les questions relatives à la mise en application des embargos sur les armes.
Le Conseil demande également que soient prises des mesures en vue de décourager les mouvements d'armes à destination de pays ou de régions qui sont engagés dans des conflits armés ou qui viennent d'en sortir. Il invite les États Membres à élaborer et appliquer des moratoires volontaires nationaux et sous-régionaux sur les transferts d'armes, en vue de faciliter le processus de réconciliation dans ces pays ou régions. Il rappelle les précédents existant dans ce domaine ainsi que l'appui international qui a été accordé pour la mise en oeuvre de ces moratoires.
Le Conseil constate qu'il est important d'inclure, avec le consentement des parties, dans le cadre d'accords de paix spécifiques, le cas échéant, et de manière adaptée aux différents mandats de maintien de la paix des Nations Unies, des modalités précises touchant le désarmement, la démobilisation et la réinsertion des ex-combattants, y compris la destruction en temps voulu et sans danger des armes et des munitions. Le Conseil prie le Secrétaire général de fournir à ceux qui négocient des accords de paix un dossier indiquant les pratiques optimales qui ont été appliquées sur le terrain.
Le Conseil prie le Secrétaire général d'élaborer un manuel de référence sur les méthodes de destruction des armes sans danger pour l'environnement afin de mieux permettre aux États Membres d'éliminer les armes volontairement remises par la population civile ou récupérées auprès des ex-combattants. Il invite les États Membres à faciliter l'établissement de ce manuel.
Le Conseil se félicite des recommandations du Groupe d'experts gouvernementaux sur les armes légères (A/54/258), y compris la convocation d'une conférence internationale sur le commerce illicite des armes sous tous ses aspects, au plus tard en 2001, et prend acte de l'offre de la Suisse qui a proposé de l'accueillir. Il invite les États Membres à participer activement et de manière constructive à la conférence et à ses réunions préparatoires, compte tenu des recommandations figurant dans la présente déclaration, afin que la conférence puisse apporter une contribution importante et durable à la réduction du trafic d'armes.
(à suivre 1d)
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Informations de base
Les armes légères sont le plus souvent utilisées dans de nombreux conflits contemporains, en particulier dans les luttes internes et entre Etats. Leurs victimes appartiennent surtout à la population civile et elles sont utilisées en violation du droit international humanitaire. Il en est résulté des millions de morts et de blessés, des déplacements de populations, des situations de détresse et un climat d'insécurité dans plusieurs régions du monde. Des centaines de milliers d'enfants comptent parmi les victimes des armes légères ou sont enrôlés dans les conflits où celles-ci sont employées. Même si des régions telles que l'Afrique et les Amériques ont été touchées plus que d'autres, la prolifération des armes légères ne connaît aucune frontière. Le commerce et la circulation illicites des armes légères au niveau mondial compromettent non seulement la sécurité, mais aussi le développement socioéconomique. L'Organisation des Nations Unies a joué un rôle de premier plan pour ce qui est de mieux faire comprendre le caractère déstabilisateur de l'accumulation et du transfert excessifs de ces armes, et de promouvoir les efforts internationaux en vue de faire face à ce problème. En 1995, l'Assemblée générale avait prié le Secrétaire général d'établir, avec l'aide d'un Groupe d'experts, un rapport sur la nature et les causes de l'accumulation et du transfert excessifs et déstabilisateurs d'armes légères et sur les moyens de prévenir ces activités et d'en réduire l'ampleur. Dans son rapport de 1997, ce Groupe a constaté que presque tous les organismes des Nations Unies s'occupaient des conséquences directes et indirectes des récents conflits dans lesquels sont utilisées essentiellement les armes légères. Ce rapport a persil d'inscrire la question des armes légères au premier plan des préoccupations internationales, et l'ONU a continué d'encourager et d'appuyer tous les efforts visant à faire face au problème que posent ces armes.
A sa cinquante-troisième session, l'Assemblée, dans sa résolution 53/77 a décidé de convoquer une conférence internationale sur le commerce illicite des armes sous ses aspects, au plus tard en 2001. Il est estimé que plus de 500 millions d'armes légères existent dans le monde. Ces armes continuent d'être produites en grand nombre. Il est particulièrement préoccupant de constater que des centaines de milliers d'enfants sont parmi les victimes des armes légères et qu'en 1999, on estime à plus de 300 000 le nombre d'enfants de moins de 16 ans ayant participé à des conflits dans lesquels de telles armes ont été utilisées.
La question figure abondamment à l'ordre du jour du Conseil et mérite toute son attention, notamment à la suite du rapport du Secrétaire général sur les causes des conflits et la promotion d'une paix et d'un développement durables en Afrique. Dans sa résolution 1209 (1998) du 19 novembre 1998 sur les mouvements illicites d'armes à destination et à l'intérieur de l'Afrique, le Conseil a encouragé le Secrétaire général à étudier, en consultation avec les Etats Membres, les moyens permettant de rassembler, d'échanger et de diffuser des informations, notamment techniques, sur les mouvements illicites
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d'armes légères et leurs effets déstabilisateurs, afin d'améliorer la capacité de la communauté internationale de prévenir l'exacerbation des conflits armés et des crises humanitaires. Dans son rapport en date du 9 août 1999, le Groupe d'experts gouvernementaux sur les armes légères recommande que le Conseil prenne toutes les mesures appropriées pour assurer l'application effective des embargos relatifs aux armes légères. L'ONU devrait, avec l'assistance des Etats Membres en mesure de le faire, promouvoir et appuyer les initiatives visant à fournir des informations systématiques sur les meilleures pratiques ainsi que sur les ressources disponibles pour la gestion du stockage, la collecte et l'entreposage dans des conditions sûres des armes légères et la destruction des surplus.
En ce qui concerne les régions et sous-régions où les conflits touchent à leur fin et où la prolifération des armes légères pose déjà un grave problème requérant des mesures immédiates, l'ONU devra redoubler d'efforts pour étendre l'approche proportionnelle et intégrée en matière de sécurité et de développement qu'elle a lancée et appliquée en Afrique de l'Ouest. S'agissant de la crise prolongée au Kosovo, le Groupe recommande l'élaboration et l'adaptation des mesures pratiques de désarmement relatives à la collecte des armes légères. Il recommande également que les mécanismes de coordination de l'action concernant les armes légères poursuivent leur effort sur les activités pertinentes relatives aux armes légères au sein du système des Nations Unies et de fournir des informations pertinentes aux Etats Membres. L'ONU devra également continuer à faciliter la coopération avec la société civile dans le domaine concernant les armes légères.
Armes légères
Déclaration du Secrétaire général
M. KOFI ANNAN, Secrétaire général des Nations Unies, a déclaré que les armes légères sont les plus utilisées dans de nombreux conflits dans le monde. La prolifération de ces armes, des munitions et des explosifs a également aggravé la violence conjuguée avec le terrorisme et le crime organisé. Même dans les sociétés qui ne sont pas frappées par la guerre civile, la facilité à se procurer des armes légères a contribué à la violence et à l'instabilité politique, dans de nombreux cas. La guerre civile a ainsi compromis les perspectives de développement et mis en danger la sécurité humaine. Les armes légères ne constituent pas seulement l'instrument essentiel du meurtre de civils qui sont de plus en plus visés dans les guerres de notre ère. A la différence de leurs victimes, les armes légères survivent de conflit en conflit, perpétuant le cycle de la violence par leur simple présence. De nombreuses de ces armes sont même recyclées, transférées d'une région ou d'un conflit à un autre par des marchands d'armes sans scrupule, qui, dans de nombreux cas, tirent profit des vides juridiques ou des structures nationales de contrôle et d'exécution inappropriées. Dans un domaine où le monde ne sera plus tenu par le silence lorsque des violations flagrantes et systématiques sont commises, les Nations Unies s'engagent à répondre à la fois aux aspects de fourniture et de demandes du commerce des armes légères. Des Balkans à l'Asie de l'Est et à l'Afrique, les armes légères sont devenues l'instrument de choix des tueurs de notre temps. Nous devons, pour notre part, les priver de ces moyens de tuer.
Les Nations Unies ont joué un rôle moteur pour placer fermement la question des armes légères au centre de l'ordre du jour international. Le rapport sur les armes légères, présenté en 1997 par le Secrétaire général à l'Assemblée générale, a servi de catalyseur pour une série très étendue d'initiatives. En décembre dernier, l'Assemblée générale a décidé de convoquer une conférence sur tous les aspects du commerce illicite des petites armes d'ici l'an 2001. Le Conseil de sécurité a été également saisi de la question des petites armes, initialement dans le contexte de la mise en oeuvre du rapport du Secrétaire général sur l'Afrique. Depuis lors, en ce qui concerne l'Angola, ainsi que les enfants dans les conflits armés et la protection des civils dans ces conflits, le Conseil a fait preuve de sagesse en insistant sur la nécessité de mettre fin à la prolifération des armes légères si une de ces questions n'était pas réglée avec succès.
Dans son rapport présenté au Conseil de sécurité sur la protection des civils dans les conflits armés, le Secrétaire général avait déclaré que le contrôle des armes légères constitue une condition sine qua non du succès d'un processus de restauration de la paix, de même que pour la prévention des conflits. A cet égard, le Secrétaire général appelle le Conseil à consacrer une plus grande attention à la prévention des conflits et à assurer un rôle efficace dans ce domaine.
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Il a souligné l'importance d'inclure dans les accords de paix et les mandats de toutes les opérations de maintien de la paix des mesures spécifiques pour le désarmement et la démobilisation. Tandis que nous sommes confrontés à d'importants défis, on devrait noter un certain nombre de progrès dans la lutte contre la prolifération des petites armes, et en particulier le commerce illicite des armes. En Afrique, par le biais de l'initiative menée par le Mali, la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) a déclaré un moratoire sur la production et le transfert des armes légères, couvrant 16 pays. Le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) assiste la CEDEAO à mettre en oeuvre ce moratoire. L'Organisation de l'unité africaine (OUA) a décidé de tenir une conférence régionale sur les armes légères, dans le cadre de la préparation de la conférence internationale sur le commerce illicite des armes. En Europe, une action commune de l'Union européenne visant à prévenir et à lutter contre le commerce illicite des armes conventionnelles constitue une autre mesure prometteuse. Plus particulièrement, en Albanie, le PNUD, en étroite coopération avec le Département des affaires de désarmement, a mis au point un projet intitulé "Armes pour le développement". Le succès de ce projet pilote a encouragé le Gouvernement albanais à élaborer des projets similaires dans d'autres régions du pays. Dans les Amériques, l'Organisation des Etats américains (OEA) a adopté en novembre 1997, la Convention interaméricaine contre la fabrication et le commerce illicites des armes légères, des munitions, des explosifs et d'autres matériaux. La création, en ce début d'année, du Réseau international d'action sur les armes légères a contribué à préciser l'attention du public sur les armes légères. La communauté internationale doit mesurer l'opportunité offerte par la conférence internationale en l'an 2001 de montrer sa volonté politique pour mettre fin à la prolifération des armes légères. Le Secrétaire général s'est déclaré convaincu qu'avec le rôle du Conseil de sécurité et des efforts inlassables des gouvernements, le but que nous nous sommes fixés sera réalisé.
Déclarations
M. CHARLES JOSSELIN, Ministre délégué à la coopération et à la francophonie de la France, a fait remarquer qu'on assiste aujourd'hui à la multiplication des conflits internes où s'affrontent des groupes armés plus ou moins bien structurés et commandés, où la distinction entre combattants et civils s'estompe, où les actions de guérilla remplacent les combats frontaux. Ce type de conflits est le domaine de prédilection des armes légères et de petit calibre adaptées au terrain et aux actions menées, facilement transportables, disséminables et dissimulables. Force est de constater que, depuis plusieurs décennies, les petites armes ont fait beaucoup plus de victimes - civiles et militaires - que les armes dites de destruction massive. Ce nouveau défi nécessite une approche à la fois pluridimensionnelle et intégrée, a estimé M. Josselin, ajoutant qu'il distingue à cet égard plusieurs modes d'action, allant de la prévention à la consolidation de la paix après les conflits.
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Le premier consiste à rechercher un meilleur contrôle des transferts légaux des armes légères et de petit calibre, associé au développement de la coopération internationale en matière de lutte contre les trafics illicites. Il faut assurer un respect scrupuleux des embargos sur les armes décidés par le Conseil de sécurité pour faire pression sur les belligérants et tenter d'assécher le flux d'armes qui vient entretenir les conflits. En second lieu, le renforcement des cadres législatifs et réglementaires nationaux en matière de transferts d'armes légères et de petit calibre doit être envisagé. La prise en considération par les Etats de leurs responsabilités et de leurs devoirs en la matière permettra d'obtenir un meilleur contrôle de tous les transferts légaux et une application plus rigoureuse des embargos. C'est ensuite l'adoption de codes de conduite régionaux ou de moratoires volontaires sur ces transferts. L'Union européenne, pour sa part, a adopté en décembre 1998 une action commune relative à sa contribution à la lutte contre l'accumulation et la diffusion déstabilisatrices des armes légères. Sur cette base, la France et ses partenaires européens entendent poursuivre le dialogue dans ce domaine. D'autre part, l'Union européenne a adopté un code de conduite sur les exportations d'armes qui permet de conditionner la délivrance d'autorisations d'exportation au respect de critères relatifs aux droits de l'homme. Enfin, la conclusion du protocole relatif à la fabrication et au trafic illicite des armes à feu, de leurs munitions et autres matériels connexes, devrait nous permettre de disposer d'un instrument adapté à la lutte contre une forme particulièrement inquiétante de la criminalité.
Mais il faut aller plus loin. La tenue, au plus tard en 2001, sous l'égide des Nations unies, d'une conférence internationale sur le commerce illicite des armes légères et de petit calibre, sous tous ses aspects, que la Suisse se propose d'organiser à Genève, nous en donnera l'occasion. La France réfléchit à l'élaboration d'une convention internationale, aux effets juridiquement contraignants, relative au marquage des armes légères et de petit calibre afin d'en contrôler la production et la circulation. La gestion des situations post- conflits constitue un autre volet de la lutte contre les effets de l'accumulation et de la diffusion déstabilisatrices de petites armes. Cela veut dire collecter les armes souvent conservées par les ex-combattants et disséminées dans la population civile, les neutraliser et, de préférence, les détruire pour éviter qu'elles retombent entre d'autres mains. De tels programmes doivent être systématiquement prévus dans les accords de paix mettant fin à des conflits internes et inclus dans les mandats d'opérations de maintien de la paix. Les actions de collecte des armes doivent aller de pair avec la démobilisation des ex-combattants, auxquels il faut offrir des perspectives de réinsertion dans la vie civile. Ces opérations doivent bénéficier des moyens humains, techniques et financiers adéquats. Les contributions volontaires, trop aléatoires, ne peuvent constituer la seule source de financement. Il faut en outre accorder une attention particulière au sort des enfants soldats, à qui il faut apprendre qu'il y a d'autres valeurs dans la société que la violence et le maniement des armes.
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M. ROBIN COOK, Secrétaire d'Etat aux affaires étrangères et du Commonwealth du Royaume-Uni, a fait remarquer que la terrible menace que représentent pour la vie humaine les armes de destruction massive a fait l'objet d'intenses efforts diplomatiques et a été le thème de plusieurs grandes conférences internationales dans le but de circonscrire leur utilisation. Le fait que les armes nucléaires n'ont jamais été utilisées durant ces cinquante dernières années et que les armes chimiques l'ont rarement été est un hommage rendu à ces efforts. Durant cette même période, toutefois, c'est le fusil d'assaut qui est devenu une arme de destruction massive. Loin d'être contrôlées, les armes légères ont proliféré et leur utilisation s'est généralisée. Durant la dernière décennie, les conflits ont fait environ 3 millions de morts, des civils non armés pour la plupart. Face à ce drame, on ne peut plus utiliser le terme "armes légères". Nous devons tous reconnaître notre responsabilité dans cet état de fait, car si la plupart des conflits se produisent dans les pays en développement, la plupart des armes à feu sont fabriquées dans le monde industrialisé. Il faudra donc coopérer pour trouver une solution. Trois pistes de réflexion peuvent être considérées. Nous devons confisquer et détruire les armes à feu exemptes de tout contrôle; réguler et rendre plus transparent le commerce officiel des armes; et éradiquer le trafic illicite d'armes à feu. Il faut réduire le volume d'armes en circulation dans le monde, dont le nombre est estimé aujourd'hui entre 100 et 500 millions. Les armes légères sont peu coûteuses : avec 5 millions de dollars, on peut acheter environ 20 000 fusils d'assaut, ce qui est suffisant pour équiper l'armée d'un Etat de taille moyenne. Il faudra en outre trouver un moyen de récupérer les armes en circulation. En Albanie, le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) construit des routes aux communautés en échange des armes rendues. L'avantage est double : plus de développement et moins d'insécurité.
Il faut également s'assurer que le désarmement fait partie intégrante de tous les accords de paix. Cela dit, détruire les armes à feu ne suffit pas puisqu'elles peuvent être facilement remplacées. C'est pourquoi il est aussi important de s'attaquer à leur fabrication. Les pays concernés ont la responsabilité de prendre des initiatives en la matière. Le Code de conduite adopté par l'Union européenne stipule que tous les Etats membres doivent informer les uns les autres quand ils refusent de vendre des armes, estimant qu'elles pourraient être utilisées pour violer les droits de l'homme ou exacerber des tensions. La troisième tâche consiste à lutter contre le trafic illicite d'armes. Il faudra établir une norme internationale de marquage des armes à feu afin de pouvoir suivre leur mouvement. Le trafic illicite des armes est aussi meurtrier que le trafic de drogues et exige des efforts équivalents.
M. BORIS FRLEC, Ministre des affaires étrangères de la Slovénie, a estimé que la moyen permettant de gérer de manière efficace la question des armes légères réside dans la définition claire du problème et dans la détermination de mesures éventuelles pour y mettre fin. A cet égard, il faudra évoquer les mécanismes existants.
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La Slovénie fait pleinement sienne la position exprimée par l'Union européenne lors de l'adoption de son Action commune en décembre 1998. Le Gouvernement a l'intention de s'engager activement dans ce domaine et, dans ce contexte, se déclare favorable à l'adoption du projet de convention sur la question de la prolifération des armes légères et de petit calibre élaboré par le Canada. M. Frlec a espéré sincèrement que d'ici à l'an 2001, il sera possible de conclure un instrument international sur les petites armes qui soit efficace et juridiquement contraignant. La Slovénie participe également avec le Canada et d'autres pays à une initiative sur la sécurité humaine dont la question des armes légères en constitue une partie intégrante importante. Le surplus des armes légères et le contrôle insuffisant sur ce surplus constituent généralement la source du problème des armes légères. Une attention particulière doit être accordée à la gestion efficace et au stockage ainsi qu'à l'utilisation du surplus d'armes afin de prévenir le commerce illicite d'armes. Dans la plupart des cas, ces stocks exigent une assistance financière et technique.
Les petites armes jouent un rôle important dans le commerce international des armes, à la fois licite et illicite. L'absence d'une transparence efficace semble faire défaut. En vue d'améliorer cette situation, le Ministre a estimé que les directives pour les transferts internationaux d'armes, établies par la Commission du désarmement des Nations Unies, adoptées en 1996, devraient prendre effet. En outre, la récente expérience des Nations Unies en matière de maintien de la paix montre que des quantités considérables d'armes légères et de petit calibre en reste dans les régions affectées après les conflits constituent un obstacle grave à la restauration de la paix et à la reconstruction après les conflits. Les leçons tirées des situations telles que celle de la Bosnie-Herzégovine rappellent que le désarmement est souvent un des éléments les plus importants des activités post-conflit. Il appartient au Conseil de sécurité d'accorder une attention particulière au désarmement, à la collecte des armes et à leur destruction dans les mandats des opérations de maintien de la paix qu'il crée. Le rôle des petites armes et de petit calibre dans la mise en oeuvre des embargos sur les armes est un autre domaine d'importance directe pour le Conseil de sécurité. La question des mines antipersonnel tombe dans la catégorie des petites armes et de petit calibre. Le Fonds d'affection spéciale créé à cette fin, et qui siège en Slovénie témoigne de l'engagement du Gouvernement slovène de contribuer au renforcement à la paix et à la sécurité en Europe du Sud-Est par le biais de programmes de déminage.
M. DATUK SERI SYED HAMID ALBAR, Ministre des affaires étrangères de la Malaisie, s'est réjouit que les Nations Unies, et particulièrement le Conseil de sécurité, se saisissent enfin de l'important problème de la prolifération des armes légères. La dissémination de plus de 500 millions de telles armes dans le monde constitue une menace pour le maintien de la paix et de la stabilité, en particulier dans les pays qui sortent à peine d'un conflit. Une approche globale permettant de résoudre la question tant aux niveaux national, régional que global est indispensable, a ajouté le représentant.
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Les Nations Unies doivent continuer de servir de centre d'information et de forum d'échanges, ainsi que de lieu d'élaboration d'accords adaptés aux situations spécifiques des Etats Membres. Le représentant a soutenu la décision du Secrétaire général de créer un mécanisme de coordination de l'action concernant les armes légères. Il s'est félicité des différents engagements régionaux qui ouvrent la voie à une meilleure coordination et coopération entre Etats Membres dans la lutte contre la prolifération d'armes légères.
Concernant le rapport du Secrétaire général sur les armes légères, qualifié de "novateur", le représentant a noté que la mise en oeuvre de plusieurs des recommandations du Secrétaire général ne serait pas difficile, mais que toutefois d'autres méritent d'être examinées de façon exhaustive. La Malaisie soutient toute initiative des Nations Unies, de pays individuels et d'ONG qui traitera du problème, a-t-il encore ajouté, tout en observant qu'il est important de noter que plus de cent Etats Membres des Nations Unies ne produisent pas eux-mêmes d'armes et dépendent donc des importations. La question des armes légères n'est pas uniquement un problème de demande, mais aussi d'offre. Le représentant a pleinement soutenu la convocation d'une conférence internationale sur le commerce illicite des armes légères qui permettra d'approfondir l'analyse de tous les aspects de ce trafic hautement lucratif et de trouver des solutions orientées vers l'action.
M. LLOYD AXWORTHY, Ministre des affaires étrangères du Canada, a souligné qu'il est impossible d'assurer la protection des civils sans contrôler les armes légères. Ces armes sont de plus en plus utilisées dans les conflits d'aujourd'hui, - pour tuer, mutiler ou terroriser la population, pour la plupart des civils innocents. Il a rappelé qu'au cours de cette dernière décennie, 46 des 49 conflits qui ont éclaté dans le monde ont vu une utilisation massive de telles armes. L'impact sur les civils a été dévastateur. Les civils constituent plus de 80% des victimes dans un conflit armé. Aujourd'hui, plus d'un million de personnes meurent chaque année dans ces conflits et 90% des victimes le sont à cause de l'utilisation de telles armes. Les armes légères sont faciles à utiliser et à porter, aggravant la violence et la terreur. Elles permettent aux gouvernements corrompus et aux seigneurs de la guerre de faire des enfants innocents de véritables machines de la mort. Elles mettent en péril la sécurité du personnel international d'assistance militaire, de police et humanitaire dont le rôle essentiel est de venir en aide aux victimes. Les défis de les contrôler sont complexes et sont réduits à une question de fourniture et de demande, et en toute franchise, le courage politique d'agir. La demande des petites armes est assurée par ceux dont les ambitions visent à perpétuer la misère humaine. Ils sont aidés par les intérêts commerciaux douteux qui profitent du marché qu'offrent les conflits. Un des échecs de la mondialisation est qu'elle a permis la création d'une nouvelle guerre économique - où en échange des diamants et d'autres ressources naturelles, des sociétés fournissent aux seigneurs de la guerre les ressources financières nécessaires pour réaliser leurs sordides desseins.
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Le Canada et un certain nombre d'autres pays membres de l'Accord de Wassenaar ont oeuvré ensemble pour qu'ils respectent le Moratoire de la CEDEAO sur les petites armes et de petit calibre. Le Canada estime également qu'il faudra adopter des initiatives novatrices pour mieux répondre à ce problème. Il appuie la proposition du Groupe d'experts des Nations Unies sur les armes légères visant l'adoption d'une approche globale et systématique. Le Ministre a indiqué que son pays est prêt à accueillir une conférence préparatoire à la Conférence de l'an 2001. De l'avis de sa délégation, il faudrait adopter une approche pratique et c'est pourquoi, le Canada a appuyé le microdésarmement au Mozambique et en El Salvador, le désarmement et la démobilisation en Sierra Leone, ainsi que l'élaboration d'un protocole sur les armes de petit calibre dans le cadre de l'ECOSOC. Même au sein de l'OTAN, le Canada a appelé les nouveaux membres à assurer que leurs efforts de modernisation ne donnent pas lieu au transfert d'armes vers d'autres régions.
Le Canada et la Norvège ont accueilli une réunion de praticiens du microdésarmement en Sierra Leone, en El Salvador , au Mozambique et en Albanie. L'objectif visait à échanger les expériences et à déterminer comment les gouvernements et autres partenaires pourraient oeuvrer pour les appuyer. Des mesures plus dynamiques visant à limiter l'utilisation de ces armes meurtrières, à prévenir la nécessité de désarmement et de démobilisation en premier lieu, sont plus efficaces, a estimé M. Axworthy. Il est bien plus important que le Conseil de sécurité garantisse une mise en oeuvre pleine et efficace de ces mesures. C'est notamment l'élan qui a guidé les efforts du Canada dans le cadre de son mandat de Président du Comité des sanctions sur l'Angola.
M. SERGEI LAVROV (Fédération de Russie) a déclaré que son pays reconnaît l'importance de la question des petites armes et de petit calibre qui menacent la paix et la sécurité à la fois au niveau régional et au niveau international. L'ONU doit jouer un rôle crucial pour coordonner les mesures visant à lutter contre la prolifération et le commerce illicite de telles armes. Il faudra tenir compte des points de vue des fournisseurs et des acheteurs. La Fédération de Russie réaffirme qu'il faut résoudre les problèmes actuels en tenant compte des priorités. Les livraisons illégales d'armes au Kosovo et dans d'autres pays de la région des Balkans constituent une question préoccupante pour la Fédération de Russie. Ces livraisons illicites d'armes constituent des menaces graves pour les populations civiles innocentes de la région. Il faudra mettre au point des normes qui limiteraient la livraison aux gouvernements et à d'autres entités. Différentes lois et règlements sont entrés en vigueur en Fédération de Russie en vue de contrôler plus efficacement les armes légères et de petit calibre. Le représentant a indiqué que son pays adhère à toute initiative efficace et non discriminatoire visant à lutter contre la prolifération incontrôlée des armes légères.
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Parfois, il est difficile d'établir une limite entre les livraisons licites et illicites d'armes légères, a noté M. Lavrov. Les propositions sur l'enregistrement des transferts internationaux d'armes n'ont pas eu de suite. Il a espéré que la conférence de l'an 2001 sur le commerce illicite des armes permettra d'apporter des solutions à ce problème.
M. GUIDO DI TELLA, Ministre des affaires étrangères, du commerce international et du culte de l'Argentine, a évoqué la nécessité d'adopter des politiques visant à remplacer la "culture de la violence" par celle de "la paix et du développement". Le problème des armes légères est d'abord humanitaire, sachant que ces armes sont très faciles à obtenir surtout par les enfants et les adolescents. Il s'agit aussi d'une question économique, puisque les ressources consacrées à l'achat d'armes ne vont pas au développement. En terme de sécurité, le problème a une incidence aux plans régional et mondial, avec des spécificités locales auxquelles il faut répondre de manière précise. Prenant l'exemple de la partie sud de l'Amérique, qui comprend l'Argentine, M. Guido di Tella a fait remarquer que, bien qu'il ne s'agisse pas d'une zone à haut risque pour ce qui est de l'accumulation excessive d'armes légères, les Etats sont confrontés à des problèmes de délinquance et de sécurité publique. Un engagement très ferme existe, toutefois, entre les pays de la région pour ce qui est de la lutte contre la fabrication et le trafic illicites d'armes légères. A la Convention interaméricaine contre la fabrication et le trafic illicites des armes à feu, munitions et explosifs et autres matériels connexes, une déclaration, signée par les Présidents du Mercosur, de la Bolivie et du Chili, a créé un mécanisme commun d'enregistrement des acheteurs et des vendeurs de ces armes. Nous avons mis en place un système d'échange et d'informations, approuvé par la Commission interaméricaine pour le contrôle du trafic de drogue de l'Organisation des Etats américains, a poursuivi le Ministre, ajoutant qu'il faut lutter contre le trafic des armes légères sans pour autant toucher au droit de légitime défense reconnu par la Charte. La question doit être examinée sous tous ses aspects, a conclu M. Guido di Tella, insistant sur la nécessité d'établir un système mondial de réglementation des armements. M. LUIZ FELIPE LAMPREIA, Ministre des affaires étrangère du Brésil, a estimé, lorsque l'on propose des mesures pour résoudre le problème des armes légères, qu'il faut garder à l'esprit les besoins légitimes de défense et de sécurité des Etats. En raison de ses dimensions multiples, humanitaire, criminelle, liées au désarmement et à la sécurité, cette question requiert une approche globale et intégrée. Pour sa part, le Brésil a pris toutes les mesures nécessaires pour appliquer pleinement les embargos sur les armes imposés par le Conseil de sécurité. Il considère que le Groupe d'experts gouvernementaux sur les armes légères, créé par le Secrétaire général, permettra de déblayer la voie au vu de la diversité de perceptions de cette question difficile. Ainsi, le Groupe a pris note qu'il n'existe pas de définition internationalement acceptée de ce qu'est une approche proportionnelle et intégrée de la sécurité et du développement.
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Le Brésil appuie la convocation, en 2001, par l'Assemblée générale d'une conférence internationale sur le commerce illicite des armes sous tous ses aspects. Cet événement fournira le cadre idéal pour envisager des mesures pour la poursuite de l'application efficace des recommandations du Groupe d'experts gouvernementaux de l'ONU. Le Brésil et le Canada ont proposé à la Commission des Nations Unies sur la prévention du crime et la justice pénale de négocier un protocole sur la production et le commerce illicites d'armes à feu, de munitions et autres matériels connexes à la Convention sur la criminalité transnationale organisée. Ces négociations sont bien avancées. Avec la Norvège, le Brésil a, en outre, stimulé le débat sur la question du marquage des armes légères qui est d'importance fondamentale pour tracer leur origine.
De l'avis du Ministre, il faudra que les initiatives mondiales aillent de pair avec les initiatives régionales. La Convention interaméricaine contre la fabrication illicite et le trafic d'armes à feu, de munitions, explosifs et autres matériels connexes, dont le Brésil a été l'un des pays initiateurs, peut représenter une expérience que les autres Etats voudront considérer. En tant que région qui ne connaît pas de grands conflits internationaux, l'Amérique du Sud peut traditionnellement se targuer de bas niveaux de dépenses militaires. La question des armes légères nous préoccupe essentiellement de par ses liens avec les activités criminelles, alors que dans d'autres régions ce sont ses liens avec la construction de la paix après les conflits qui constituent la priorité. Ces différentes préoccupations doivent être prises en considération et unifiées pour qu'une vision globale et acceptable par tous puisse être forgée lors de la conférence de 2001. La déclaration présidentielle que nous sommes sur le point d'adopter reflète de manière objective et claire notre responsabilité d'appuyer les aspirations de l'opinion publique dans ce domaine. Elle constitue aussi un élément supplémentaire des efforts de la communauté internationale en vue de l'élimination de la prolifération des armes légères. Cette déclaration doit dès lors être considérée comme un signe de la volonté du Conseil de sécurité de se joindre à d'autres instances multilatérales sur cette question pressante.
M. WANG GUANGYA, Ministre adjoint des affaires étrangères de la Chine, a affirmé que le rapport établi par le Groupe d'experts sur les armes légères donne une image objective de l'état de la question telle qu'elle se pose à l'heure actuelle. Ce rapport constituera une aide précieuse en vue de la préparation de la conférence internationale sur les armes légères en 2001. Assurant que son pays est prêt à participer de façon active aux efforts qui seront déployés par la communauté internationale pour résoudre ce problème, le représentant a fait un certain nombre d'observations. Ainsi, il a déclaré que la question des armes légères devrait être traitée de façon prioritaire par le Département des affaires de désarmement, la Première Commission, l'Assemblée générale et les autres institutions compétentes.
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Il a estimé que la communauté internationale, agissant dans le domaine des armes légères, devra pleinement respecter la souveraineté des Etats et se garder d'intervenir dans les affaires intérieures. Il a souligné que dans les efforts visant à éliminer les impacts néfastes liés à l'usage des armes légères, une attention particulière devra être accordée au droit à la légitime défense et aux nécessités de sécurité. Le droit légitime à posséder, fabriquer et transférer des armes légères devra être garanti, a-t-il souligné. Indiquant que son pays exerce un strict contrôle sur la fabrication et l'exportation des armes légères, le représentant a réitéré la volonté de la Chine de participer aux efforts qui seront déployés par la communauté internationale pour résoudre le problème posé par l'usage des armes légères.
SHAIKH MOHAMMED BIN MUBARAK AL-KHALIFA, Ministre des affaires étrangères du Bahreïn, a rappelé que la communauté internationale a conscience, depuis un certain temps déjà, du danger que représente la prolifération des armes légères. Les causes multiples du conflit sur le continent africain, a-t-il poursuivi, illustrent clairement la menace de l'emploi de ces armes, lesquelles se trouvent facilement à la disposition des groupes impliqués dans les conflits. Parmi les effets nocifs des armes légères, il convient de relever que leur utilisation entrave l'acheminement de l'aide humanitaire destinée aux réfugiés et aux personnes déplacées dans les zones de conflit. Rappelant que le Bahreïn a souscrit à la résolution adoptée par l'Assemblée générale sur les armes légères lors de sa cinquante- troisième session, M. Bin Mubarak Al-Khalifa a renouvelé son appel à mettre en place des règles spécifiques relatives au commerce des armes légères. Il est de notre devoir de réaffirmer notre ferme opposition au phénomène du terrorisme et du crime organisé et d'empêcher que les approvisionnements en armes et en fonds ne parviennent aux terroristes, a-t-il souligné. Pour ce faire, le représentant a suggéré qu'il faudra restreindre les actions des terroristes en renforçant la négociation sur l'immigration et la résidence. A cet égard, il est de bon augure que le Conseil de sécurité ait inclus cette question importante dans son ordre de jour, a indiqué M. Al-Khalifa qui a indiqué que son pays porte un intérêt soutenu à la question et qu'il souscrit à la déclaration du Conseil sur la question.
M. JEAN PING, Ministre d'Etat, Ministre des affaires étrangères, de la coopération et de la francophonie du Gabon, a déclaré que le trafic illicite des armes légères et de petit calibre constitue une réelle menace pour la paix et la sécurité internationales. Le recours à l'usage de ces armes paraît être justifié par leur maniement facile, leur coût moins élevé. Elles sont aussi facilement dissimulables et peuvent donc échapper à la vigilance des services des douanes et de sécurité. Il est urgent d'adopter aux niveaux national, régional et international, des mesures permettant de réguler la prolifération de ces armes, qui causent un nombre incalculable de victimes. Les gouvernements de la plupart des régions africaines ont pris des mesures pour combattre des mouvements illicites des armes de toutes sortes.
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Certains ont créé au niveau sous-régional un registre pour rendre transparent l'armement dont ils disposent pour les besoins de légitime défense; d'autres ont adopté des moratoires sur les armes légères et de petit calibre. L'Afrique est déterminée à apporter sa contribution face à ce problème; elle attend que le reste de la communauté internationale fasse preuve de la même détermination.
Pour sa part, le Conseil de sécurité doit veiller à la pleine application de sa résolution 1209 qui demande notamment aux Etats Membres ayant les compétences voulues de coopérer avec les Etats africains en vue de renforcer leur capacité à combattre les mouvements illicites d'armes, y compris en les identifiant et en interdisant les transferts illicites d'armes. Le représentant a suggéré qu'il faut inclure dans les mandats des missions des Nations Unies chargées des opérations de maintien ou de rétablissement de la paix, des dispositions précises concernant non seulement le désarmement des anciens combattants, la collecte et la destruction de leurs armes, mais aussi la surveillance du trafic illicite d'armes.
M. MOMODOU LAMIN SEDAT JOBE, Secrétaire d'Etat aux affaires étrangères de la Gambie, a fait part de sa préoccupation face à l'accumulation déstabilisatrice des armes légères, notamment sur le continent africain. Dans des sociétés qui sont confrontées à des problèmes sociaux, à la pauvreté et au crime, le fait de pouvoir se procurer facilement des armes légères contribue à exacerber les conflits. La question des armes légères soulève des considérations complexes qui touchent tous les niveaux de la société et se rapportent non seulement aux conflits internes et entre Etats, mais également au banditisme et au crime. La Gambie reconnaît qu'il existe un lien étroit, non seulement entre la prolifération des armes légères et la paix et la sécurité internationales, mais également entre la paix et la sécurité internationales et le développement durable. L'Afrique a besoin d'une paix durable pour se développer. Pour cela, il faudra mettre un terme à la prolifération des armes légères. Il est clair que le problème de la prolifération de ces armes ne peut être seulement pris en compte sur les plans national et régional. Une solution doit être trouvée grâce à une coopération internationale. Cela ne signifie pas que des efforts au niveau local ne sont pas nécessaires. Bien au contraire, car il est important de mettre en place au niveau local des programmes de collecte d'armes, de démobilisation et de réintégration d'anciens combattants dans des sociétés qui émergent d'un conflit. La coopération internationale doit permettre de renforcer les processus engagés aux niveaux local, national et régional. La sous-région de l'Afrique de l'Ouest a adopté une Déclaration sur le moratoire de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest relatif à la production et au commerce d'armes légères. Le Code de conduite de l'Union européenne concernant les exportations d'armes est un autre exemple des efforts entrepris au niveau régional.
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La Gambie se félicite de la création par le Secrétaire général du Mécanisme de coordination de l'action concernant les armes légères qui vise à assurer une approche cohérente et coordonnée de la question des armes légères dans le système des Nations Unies. Afin de trouver une solution efficace au problème de la prolifération des armes légères, il est indispensable de prendre des mesures pour améliorer les conditions sociales, économiques et politiques qui permettent d'assurer la sécurité des individus et des sociétés. Le Conseil de sécurité a un rôle crucial à jouer dans la recherche d'une solution au problème de la prolifération des armes légères. Des embargos sur les armes légères, dont l'application devra être plus efficace pourraient contribuer à réduire leur prolifération. La Gambie soutient la proposition concernant la participation des Etats africains au Registre des Nations Unies pour les armes conventionnelles et se félicite de la recommandation qui a été faite d'établir des registres régionaux. Tandis que les pays africains doivent poursuivre leurs efforts pour lutter contre la prolifération des armes légères, les pays producteurs d'armes doivent également s'efforcer de réduire leurs exportations d'armes vers les pays africains, particulièrement dans les zones de conflit.
M. MARTIN ANDJABA (Namibie) a indiqué que son pays, qui sort de la guerre, est toujours en prise au trafic d'armes. Il a estimé que l'accès très facile aux armes légères encourage le déclenchement et la poursuite des hostilités. Ces armes forcent les populations à vivre dans une atmosphère d'insécurité grandissante. Cette situation est due en partie à l'impunité dont jouissent les fabricants et les exportateurs d'armes, qui traitent avec des régimes corrompus, sans scrupules et non démocratique, connus pour leurs violations des droits de l'homme. Les "marchands de guerre", qui souhaitent s'enrichir en vendant des armes, ne se préoccupent pas des conséquences dramatiques de leur utilisation sur les pays en développement, particulièrement en Afrique sub-saharienne. Le trafic des armes et les conflits armés qui en découlent ont des effets dramatiques sur la vie sociale, politique et économique dans cette région, l'une des plus pauvres du monde en dépit de ses ressources naturelles. Il est donc impératif que la communauté internationale s'attaque à la culture d'impunité liée au trafic des armes. Les efforts visant à libérer l'Afrique de ces armes doivent être partagés entre les dirigeants africains et la communauté internationale. Les ventes d'armes à des forces irrégulières en échange d'argent, de diamants ou autres monnaies d'échange, fragilisent les régimes et conduisent à l'anarchie. Les acteurs non étatiques des conflits sont coupables de très graves violations du droit humanitaire et des droits de l'homme. L'argent utilisée pour l'achat des armes fait défaut aux services sociaux. Cela décourage les investissements étrangers et le tourisme, contribue à la montée du chômage, du crime organisé et de la pauvreté. Il convient de lutter contre la vente d'armes à des régimes irresponsables qui s'en serviront pour commettre des actes inhumains, tels que le nettoyage ethnique. Le représentant a lancé un appel aux gouvernements des pays producteurs d'armes et à ceux des pays acheteurs pour qu'ils manifestent le sens de leur responsabilité dans le cadre de ces transactions.
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Mme MADELEINE K. ALBRIGHT, Secrétaire d'Etat des Etats-Unis, a rappelé qu'au cours de l'année dernière, elle avait évoqué la question des armes légères et de petit calibre dans une série de réunions, déclarations et dans un rapport publié l'été dernier par le Département d'Etat. Elle s'est déclarée optimiste de voir que l'appui en faveur d'une action ferme ne fait que s'accroître. Elle a assuré qu'elle portera avec elle le message du débat d'aujourd'hui lorsqu'elle entamera, le mois prochain, un voyage officiel en Afrique. Bien que les armes soient faciles à obtenir, à cause de leur prix peu élevé, leur coût social en est élevé. Les pays qui figurent parmi les plus pauvres du monde dépensent des centaines de millions de dollars pour acquérir de telles armes et d'autres encore. Les ressources financières sont dilapidées et les aides financières en cas de secours d'urgence et autre sont volées pour financer les dépenses militaires. Dans chaque situation, c'est le peuple le perdant. C'est pourquoi, la communauté internationale doit développer une action intégrée et globale dans les pays d'origine et dans les pays en conflit, entre les acquéreurs, les fournisseurs et les courtiers, et avec les gouvernements ainsi que les organisations internationales et non gouvernementales.
Dans la déclaration présidentielle d'aujourd'hui, nous nous engageons à renforcer notre coordination, à promouvoir le désarmement dans les opérations de maintien de la paix et à améliorer la mise en oeuvre des embargos sur les armes. Les Etats-Unis appuient fermement ces mesures et s'engagent à s'abstenir de vendre des armes aux régions en conflit qui ne sont pas encore affectés par les embargos sur les armes, a indiqué Mme Albright. Le Gouvernement des Etats-Unis encourage les autres pays à établir et à respecter ces moratoires. Les Etats-Unis ont promulgué des lois déclarant l'illicéité en vertu du droit américain des transactions conclues quel qu'en soit le lieu. Mme Albright a indiqué que la législation américaine en vigueur déclare également illicites les négociations en la matière. Les Etats-Unis oeuvrent en étroite coopération avec l'Union européenne pour élaborer des principes d'abstention et un plan d'action commune. Ils appuient les efforts de l'Institut des Nations Unies pour la prévention du crime et ceux de L'Organisation des Etats américains et envisagent d'assister le Moratoire sur les armes légères d'Afrique de l'Ouest.
Se félicitant de l,important précédent que les Nations Unies ont établi en détruisant plus de 18 000 armes, et des millions de munitions, les Etats-Unis sont engagés à oeuvrer en vue de détruire ces stocks dans le monde entier. Mme Albright a observé que tous les gouvernements devraient s'engager à conclure les négociations sur le protocole des armes à feu à la Convention sur le crime transnational organisé d'ici à la fin de l'an 2000. Il est temps de s'attaquer à l'économie de guerre qui appuie la circulation illicite d'armes. Trop souvent, les profits réalisés financent la violence. Comment en Sierra Leone où les profits réalisés par le commerce illicite des diamants ont-ils permis au Front révolutionnaire-uni de se transformer en un groupe de 400 personnes avec une armée de plusieurs milliers de maraudeurs? a demandé Mme Albright.
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Les efforts déployés par le Président du Comité des sanctions en Angola - l'ambassadeur Fowler du Canada - offrent des enseignements importants pour les autres zones de conflit. Les Etats-Unis qui représentent 65% du marché mondial des pierres précieuses entendent jouer un rôle pour mettre fin aux transactions illicites.
M. JOZIAS VAN AARTSEN, Ministre des affaires étrangères des Pay-Bas, a souligné la nécessité d'adopter une approche cohérente pour répondre à la question de la prolifération des armes légères, en tenant compte de tous les aspects de cette question extrêmement complexe. La cohérence est indispensable pour exploiter des moyens concrets visant à faire face à l'utilisation illicite des armes légères. La cohérence devrait s'appliquer aux efforts de la communauté internationale, aux pays à titre individuel, aux organisations régionales ainsi qu'à la société civile. Des efforts sont accomplis dans le monde pour faire face à ce fléau qui affecte de si nombreux civils. A cet égard, le Ministre a attiré l'attention sur le Réseau d'action internationale sur les armes légères (IANSA). M. Van Aartsen a estimé que le Conseil de sécurité pourrait bénéficier de l'expertise de ce Réseau. Les Pays-Bas se déclarent prêts à donner un plus grand élan à ce processus extrêmement important. Sachant que cette volonté est partagée par de nombreux pays, il a suggéré que lorsque le moment sera venu, les Pays-Bas offriront leurs services. Un "Groupe d'amis de la Conférence" pourrait considérablement alléger les travaux préparatoires de la Conférence de 2001. Dans ce processus, le Conseil de sécurité peut jouer un rôle important en alertant les Etats Membres sur les conséquences négatives de la circulation d'armes illicites dans les zones de tension et les régions en conflit. Le Conseil devrait encourager les Etats Membres à s'abstenir de l'exportation de ces armes potentiellement dangereuses. La mise en oeuvre intégrale des embargos est essentielle. En outre, le désarmement, la démobilisation et la réintégration des anciens combattants constituent des mesures dont le Conseil de sécurité doit prendre en compte. Le Conseil de sécurité devra, lorsque cela est possible, intégrer des mesures appropriées dans les mandats des opérations de maintien de paix pour empêcher que la prolifération d'armes légères ne cause des souffrances supplémentaires à la fin des conflits.
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