LA DIVERSIFICATION DE L’INFORMATION PASSE PAR UN ACCES PLUS LARGE AUX NOUVELLES TECHNOLOGIES DE L’INFORMATION
Communiqué de Presse
NGO/316
PI/1180
LA DIVERSIFICATION DE LINFORMATION PASSE PAR UN ACCES PLUS LARGE AUX NOUVELLES TECHNOLOGIES DE LINFORMATION
19990917La Cinquante-deuxième Conférence Département de lInformation- Organisations non gouvernementales, consacrée aux Défis de la mondialisation : la recherche de nouvelles orientations, a abordé ce matin la question de la culture et des technologies de la communication sous langle de la responsabilisation et de la marginalisation. Les représentants du monde médiatique ont exploré le problème dune communication qui, si elle peut éduquer, rapprocher ou responsabiliser, est aussi susceptible disoler ceux qui nont pas la chance dy avoir accès. Les interventions ont surtout porté sur les potentialités considérables des nouvelles technologies dont Internet, vecteur de démocratisation de linformation, qui permet à lutilisateur dêtre à la fois le public et la source. Toutefois, les intervenants ont souligné que lInternet qui potentiellement peut être porteur dune diversification de linformation, a donné lieu au contraire à son uniformisation. Les intervenants ont imputé ce fait à laccès limité à Internet qui demeure un attribut des pays les plus développés. Revenant aux potentialités dInternet, certains intervenants ont argué que face à la démission de la presse écrite et de la presse audiovisuelle en ce qui concerne la couverture de sujets de fond, Internet, par la diversité quil peut se permettre, devient le média de lavenir. Les interventions ont également porté sur les aspects déontologiques dInternet et a appelé à la vigilance devant un média dont les sources ne sont pas toujours identifiables et contrôlables. Dans lensemble, les intervenants ont tous prôné un accès plus large à ce réseaux.
La table ronde était composée des personnalités suivantes : M. Peter Arnett, Correspondant principal de ForeignTV.com; M. Meraash Mahajuodeen, Producteur principal de Young Asia Television; M. Shashi Tharoor, Directeur des communications et des projets spéciaux au Cabinet du Secrétaire général de lONU; et Mme Victoria Jones, animatrice de la chaîne de télévision MSNBC et animatrice du débat de ce matin. Ne pouvant être présent à la Conférence, M. Ali Mazrui, Directeur de lInstitute of Global Cultural Studies à lUniversité de lÉtat de New York à Binghamton a envoyé un discours qui a été lu part Mme Jones.
La Conférence se consacrera cet-après midi à partir de 15 heures aux nouveaux partenariats et structures pour le XXIème siècle pour que tous puissent tirer le meilleur parti de la mondialisation.
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Culture et techniques de communication : responsabilisation et marginalisation
Mme VICTORIA JONES, animatrice de la chaîne de télévision MSNBC et animatrice de la séance de ce matin, sest réjouie tout dabord de la diversité de culture des intervenants. Puis elle a noté à quel point les nouvelles technologies comme lInternet, inaugurant de nouveaux modes de communication, montrent le pouvoir de la connaissance dans nos sociétés. A cet égard, elle a cité en exemple les pays en voie de développement qui nont pu encore, malgré leurs ressources, accéder aux richesses. Attirant lattention sur le cas des Etats-Unis, elle a considéré les différents niveaux dinformatisation des diverses populations qui révèlent la division des races tant en ce qui concerne léducation que la connaissance.
Exposés
M. ALI MAZRUI, Directeur de lInstitute of Global Cultural Studies à lUniversité de New York à Binghamton, dans une déclaration lue par Mme Jones, a traité principalement du possible impact de la réforme de linformation sur lIslam. En son temps, limprimerie fut au centre de la révolution et de loffensive culturelle comme elle constitua alors un défit lancé aux autorités religieuses marquant ainsi le début de la Réforme. La question est aujourd´hui de savoir si linformatique aura le même impact sur la société musulmane, M. Mazrui est davis que lIslam subira le même mouvement réformateur. Selon lui, les nouvelles techniques de linformation donneront à lIslam la possibilité de réaliser ses ambitions duniversalité. LIslam a toujours célébré le mouvement. En effet le temps islamique a débuté par le mouvement et lIslam possède trois villes saintes. Ainsi, lIslam a fait disparaître la distance par la foi.
Soulignant la capacité dattraction dune ville comme la Mecque, M. Mazrui sest demandé si, un jour, les pèlerins feront communion à travers lInternet. LIslam a déjà été préparé à lâge de la simultanéité qui sera dabord marqué par la réduction de la souveraineté et lélimination des distances. LIslam a toujours considéré les deux sexes séparés. Certes, la mère dun homme est toujours une femme et la séparation est donc atténuée par les liens familiaux. Cependant les sociétés musulmanes ont toujours vu deux portes différentes vers la connaissance, lune réservée aux hommes, lautre réservée aux femmes. Selon M. Mazrui, les nouvelles techniques de linformation permettront de faire disparaître cette distinction car les informations refuseront de passer le filtre de la discrimination sexuelle. De même, le voile sera peut-être détruit par les nouvelles techniques, a-t-il suggéré dans ce texte. Ainsi les nouvelles techniques prononceront une sentence de mort sur la vieille tradition du Harem et la forme de réclusion ne survivra pas à une technique qui permettra aux femmes de faire valoir leurs droits.
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Enfin il sest penché sur la quatrième composante de cette révolution musulmane suggérant quelle pourrait résider dans une évolution de la théocratie vers un système centré non seulement sur Dieu mais aussi sur les êtres humains.
M. PETER ARNETT, Correspondant principal de ForeignTV.com, a rappelé quil y a peu de temps encore, les Etats-Unis ne disposaient que de quelques chaînes de télévision. Aujourdhui avec plus dune centaine de chaînes, le paysage audiovisuel est caractérisé par une concurrence féroce qui a fini par entraîner une baisse de la qualité des programmes pour des raisons de productivité. Passant aux nouvelles technologies de linformation et à Internet, M. Arnett a estimé quavec ces dernières, on peut espérer une certaine démocratisation dans le monde de la communication. Mais pour lui, lInternet demeure un instrument à double tranchant. En Asie par exemple, il est évident que les nouvelles technologies suscitent une certaine crainte chez les dirigeants du fait quelles permettent une circulation presque incontrôlable de linformation. Dun autre côté, ce caractère incontrôlable comporte quelques dangers puisque les nouvelles technologies peuvent servir également à véhiculer des idées ou des informations discutables. La technique peut faire beaucoup mais il ne faut pas ignorer les écueils.
M. Arnett a poursuivi sur la désintermédiation qui, pour lui, constitue lun des grands thèmes de cette fin de siècle. Cette théorie consistant à se débarrasser des intermédiaires est prônée par des personnes comme Bill Gates qui défendent un lien plus direct entre le produit et le consommateur. M. Arnett, en revanche, a estimé que les journalistes, intermédiaires en matière dinformation et de communication, ont toujours un rôle à jouer de par leur expérience et leur professionnalisme. Ils sont en fait la valeur ajoutée de linformation et de la communication.
Abordant le thème de la marginalisation, M. MERAASH MAHAJUODEEN, producteur principal de Young Asia Television, a souligné lampleur du développement que connaîtront dans le futur les techniques de communication. La communication de masse est dépassée, elle devient en effet sélective, a-t- il déclaré.
Insistant ensuite sur le rôle de Young Asia Television, M. Mahajuodeen a expliqué que cet organisme tentait datteindre les jeunes populations, 50% des trois milliards dhabitants de lAsie ayant moins de 24 ans. En outre, il existe un nombre croissant de problèmes liés aux jeunes et provoqués par les changements de technologie, qui devront bientôt être traités, a-t-il expliqué, pour déplorer ensuite une tendance chez les jeunes populations à oublier une culture plus ancienne. De ce fait, il sest demandé sil était juste que les jeunes asiatiques soient déracinés en raison seulement dune guerre culturelle avec lOuest.
Insistant sur linfluence exercée par les programmes de télévision M. Mahajuodeen a indiqué que Young Asia Television, qui existe depuis quatre ans, tente de revitaliser la culture asiatique en travaillant notamment en
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collaboration avec lUNICEF, avec la Banque asiatique de développement, avec les enfants eux-mêmes. La chaîne leur fournit léquipement pour quils puissent produire leurs propres reportages. Cest une première solution contre la marginalisation, a-t-il ajouté. Toutefois, au Sri Lanka, 40% de la population na pas accès à l´électricité. Il est donc évident que lévolution des communications risque aussi dexclure davantage ceux qui sont déjà en retard.
Grâce à ses documentaires, a commenté M. Mahajuodeen, Young Asia Television espère prochainement toucher 250 millions de téléspectateurs en conservant la diversité culturelle du public tout en rapprochant les populations grâce à ses programmes. Tout peut-être combattu de manière novatrice en tenant compte des changements qui font évoluer notre société et en apportant à chaque être humain le respect qui lui est dû, a-t-il affirmé. Légoïsme napporte rien, cest le partage des ressources qui fait évoluer lhumanité, les peuples constituant une seule famille planétaire que nous pouvons rendre réelle, a-t-il conclu.
M. SHASHI THAROOR, Directeur des communications et des projets spéciaux au Cabinet du Secrétaire général des Nations Unies, a qualifié de «stupéfiante» la portée de la communication dans le monde actuel. Les nouvelles technologies de la communication, a-t-il constaté, ont fait du monde «un monde unitaire» et véritablement changé la manière de pratiquer le journalisme. La technologie numérique produit aujourdhui des caméras de plus en plus simples, de plus en plus légères qui peuvent être utilisées par un non professionnel, à savoir le reporter lui-même. Aujourdhui, il ny a plus dendroits assez reculés qui ne puissent être couverts par les médias. Ce devrait donc être la fin de lisolement et le sacre de louverture au monde. Or, on constate que la mondialisation sest accompagnée de la prépondérance des nouvelles locales. A New York, un incendie à Brooklyn est plus important quune explosion à Moscou. Ce phénomène est illustré dailleurs par une prolifération des produits locaux. Les incidences de ces tendances sont de plusieurs ordres, a poursuivi M. Tharoor. Il dabord a soulevé la question de linégalité de la couverture et regretté le fait que les journalistes accordent avant tout leur attention aux nouvelles qui intéressent leurs producteurs ou émetteurs. La crise en Bosnie-Herzégovine a, par exemple, été plus médiatisée que la crise au Mozambique. Il sagissait pourtant de deux guerres également meurtrières. Lon peut aussi comparer la couverture de lAngola à celle du Kosovo.
M. Tharoor sest ensuite arrêté sur le pouvoir de plus en plus important des médias, en constatant avec étonnement limpact réel des médias sur les décisions internationales, comme lont montré récemment les interventions au Kosovo. Dans un tel contexte, il nest pas étonnant que la chaîne américaine, CNN soit appelée seizième membre du Conseil de sécurité, a-t-il noté. Il a également relevé la réduction spectaculaire des nouvelles internationales dans les médias et une simplification accrue des informations fondées sur ladage si ça saigne, ça baigne. Les réussites des Nations Unies, par exemple, ne sont entendues nulle part. Il faut aussi se demander, a poursuivi M. Tharoor, qui fait linformation. Il a illustré ses propos en
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évoquant lhistoire dun journaliste pendant la guerre du Congo en 61-62, qui avait intitulé son livre Y-a-t-il quelquun qui a été violé et qui parle anglais, daprès la question quil posait lorsquil couvrait les violations des droits de lhomme pendant cette guerre civile. Qui fait linformation, sest interrogé M. Tharoor, linterviewé ou linterviewer? Il a conclu sur luniformisation des informations voire de la culture en espérant que la démocratisation que peuvent permettre les nouvelles technologies de linformation donnera lieu à une démocratisation respectant la diversité.
Remarques de lanimatrice
Dans une remarque finale, Mme Jones a souhaité souligner la difficulté de maintenir une objectivité dans linformation et, citant le procès passé de O. J. Simpson, a rappelé les trois sujets qui obsèdent actuellement lAmérique soit le sexe, la race et la célébrité. Ainsi un pays devient capable de se focaliser entièrement sur un sujet et docculter de plus graves tragédies comme cela fut le cas dans les Balkans. Tout est fait pour trouver le genre dinformation qui permettra de faire augmenter laudimat, a-t-elle déploré.
Aux Etats-Unis, la plupart des réseaux nont plus de correspondants étrangers et les décisions finales sont entre les mains dun nombre restreint de personnes qui les orientent en fonction de lintérêt de leurs actionnaires. Et tout ceci dans un pays qui se considère le plus libre du monde, sest-elle indignée. De lavis de Mme Jones, la plupart des sites Internet utilisent les mêmes sources qui, finalement, ne sont pas si nombreuses. Lopinion du public peut être connue mais ce qui est difficile dans la culture contemporaine, dominée par une poignée dhomme, cest de se faire entendre, a-t-elle affirmé. Il ne faut pas oublier que cest toujours laspect humain dun problème qui permettra douvrir les portes de la télévision ou du journal.
LInternet a déjà révolutionné le monde et toute cette technologie demeure à notre service, a-t-elle répété, mais cest la façon de lutiliser, les possibilités dy accéder qui la rendent bénéfique ou non. Convaincue du fait que, sur un plan spirituel, lidentité humaine existe, Mme Jones a encouragé chacun à introduire cette composante spirituelle dans lunivers matériel en dépit de la résistance des médias et ce pour susciter ces transformations extraordinaires dont ont déjà été riches les cinquante dernières années.
Réponses des experts aux questions des participants
Répondant à une question sur la manière dont les particuliers peuvent faire entendre sa voix sur Internet, M. Arnett a prôné une aide des gouvernements ou du secteur privé en citant lexemple de Bill Gates qui vient de consacrer plusieurs millions de dollars à la vulgarisation dInternet. Répondant à une autre question sur le rôle des médias dans la désinformation et la nécessité dun code déthique, il a rejeté ces accusations en arguant
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quen règle générale les médias aux Etats-Unis comme dans les pays occidentaux font du bon travail. Dans ces pays, les gouvernements et les décideurs ont compris depuis longtemps lintérêt quils ont de rendre des comptes aux médias. Pour sa part, M. Tharoor a estimé que les journalistes ne sont pas les seuls à blâmer en matière de désinformation. Ces dernières années, lutilisation des médias par des factions belligérantes a été un élément très important des guerres comme la montré le cas de la Radio des Mille Collines au Rwanda. Il ne sagit pas de censurer les médias ou de réprimer la liberté dexpression mais de garder à lesprit la Charte de lUNESCO selon laquelle la guerre commence dans lesprit des gens et cest dans lesprit des gens quil faut commencer à construire la paix. Il est donc utile de développer des médias libres et indépendants dans les pays politiquement fragiles, des médias libres mais qui soient aussi une force constructive dans leur société. M. Arnett a constaté, à cet égard, lexistence déjà affirmée dune presse courageuse et indépendante dans de nombreux pays en développement. Une autre question a été posée pour savoir si les journalistes doivent donner un jugement de valeur aux informations quils rapportent, Mme Jones a répondu par la négative en appelant plutôt au bons sens du public.
Répondant à une question sur la nécessité pour lONU davoir sa propre chaîne de télévision, M. Tharoor a dabord rappelé que lOrganisation dispose déjà dune chaîne qui peut être vue à New York. Mais dans lidéal, a-t-il estimé, il est plus important de transmettre le message de lONU par les chaînes traditionnelles qui ont déjà un public confirmé. Passant à une question sur Internet et la manière de contrôler cet outil, M. Arnett sest montré optimiste et a fait observer quil existe déjà une tendance très forte de responsabilisation des producteurs de sites sur Internet, médias quil a qualifiés de chance de lavenir de linformation. Il a, par exemple, estimé quaprès la démission de la presse écrite et de la presse audiovisuelle américaines sur les questions internationales, seul lInternet peut se permettre ce luxe puisquil peut atteindre par définition un public international. Il a été appuyé dans ses propos par Mme Jones.
Comment alors tirer parti de la presse écrite et de la télévision pour faire connaître le Forum du Millénaire, a demandé un participant. Le Forum doit se réunir du 22 mai au 26 mai dans la Salle de lAssemblée générale pour mettre au point une manifestation spectaculaire avant lAssemblée du millénaire des Nations Unies. Il faut utiliser les moyens traditionnels, a répondu M. Arnett en suggérant les communiqués de presse, les contacts téléphoniques ou encore les appels au Directeur des communications des Nations Unies. Les journalistes sont des gens paresseux, donnez-leur un sujet darticle, ils lécriront, à conclu en plaisantant Mme Jones.
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