En cours au Siège de l'ONU

CS/1086

LE CONSEIL DE SECURITE ENVISAGE, DANS LE CADRE D'UN DEBAT, LES DIVERS MOYENS DE METTRE FIN AU CONFLIT EN AFGHANISTAN

27 août 1999


Communiqué de Presse
CS/1086


LE CONSEIL DE SECURITE ENVISAGE, DANS LE CADRE D'UN DEBAT, LES DIVERS MOYENS DE METTRE FIN AU CONFLIT EN AFGHANISTAN

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"Cela fait trop longtemps que la communauté internationale accorde le bénéfice du doute au Pakistan, dans l'espoir que ce dernier répondra à ses tentatives de paix en Afghanistan en mettant un terme à ses interventions dans le pays", a déclaré M. Abdullah, Vice-Ministre des affaires étrangères de l'Afghanistan au Conseil de sécurité qui, sous la présidence de la Namibie, tenait aujourd'hui un débat sur la situation en Afghanistan. Le représentant afghan a regretté que cette réaction intervienne seulement à la suite d'une récente résurgence d'une implication militaire étrangère en Afghanistan, confirmée fin juillet par l'Envoyé spécial du Secrétaire général, M. Lakhdar Brahimi, et après que les Taliban aient lancé une nouvelle offensive militaire au nord de Kaboul. Cette situation exige du Conseil de sécurité qu'il accorde son attention à la question "pakistano-talibane" et impose des sanctions immédiates à la fois contre les Taliban et leur protecteur, le Pakistan, affirmé le représentant.

Le Secrétaire général adjoint aux affaires politiques, M. Kieran Prendergast, a présenté au Conseil les derniers événements survenus sur le terrain et, notamment, l'offensive militaire lancée par les Taliban au lendemain de la réunion du Groupe des 6+2 à Tachkent. Il a indiqué que les Nations Unies n'ont malheureusement pas reçu la permission officielle des Taliban de prendre contact avec les personnes déplacées à l'intérieur des frontières et a mis le Conseil en garde contre les conséquences dévastatrices de ce conflit sur l'ensemble de la région.

La grande majorité des délégations a estimé que la déclaration de Tachkent, adoptée le 19 juillet à la suite de la réunion du Groupe des 6+2, constitue la meilleure base pour parvenir à une paix négociée. Elles ont insisté sur la nécessité d'en appliquer pleinement les principes fondamentaux qui sont l'arrêt de la fourniture d'armes, l'entrée en vigueur d'un cessez-le-feu immédiat et l'échange des prisonniers guerre, ajoutant qu'à cette fin, il est important que s'arrête l'ingérence extérieure en Afghanistan. La communauté internationale doit aussi, aux yeux de plusieurs intervenants, prendre des mesures efficaces pour lutter contre les trafics d'armes et de drogues qui se déroulent à l'intérieur et à l'extérieur de l'Afghanistan. A plusieurs reprises, l'idée d'un embargo sur les armes,

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qui serait imposé par le Conseil, a été avancée. Des délégations ont souligné la menace que constitue pour la région ainsi que pour la paix et la stabilité internationales l'existence dans plusieurs régions du pays de camps d'entraînement de groupes terroristes internationaux.

Pour sa part le représentant du Pakistan a déclaré que la réalité de l'Afghanistan est qu'aujourd'hui les Taliban contrôlent 90% du territoire, y compris la capitale Kaboul et qu'en vérité, la communauté internationale, comme le Pakistan, devrait reconnaître et admettre ce fait. Il a affirmé qu'une paix durable n'est réalisable que sur la base d'un consensus inter- afghan et a qualifié les accusations selon lesquelles son pays participerait au conflit de fallacieuses et mal intentionnées.

Outre le Secrétaire général adjoint aux affaires politiques, le représentant de l'Afghanistan, et ses 15 membres, le Conseil a entendu les déclarations des représentants des pays suivants : Finlande (au nom de l'Union européenne et des Etats associés), Kazakhstan, Norvège, République islamique d'Iran, Inde, Japon, Tadjikistan, Ouzbékistan, Egypte, Turkménistan, Pakistan, ainsi que le représentant de l'Organisation de la Conférence islamique.

Rappels des faits

L'Afghanistan est le théâtre d'un conflit depuis plus de 18 ans, qui de manière complexe et volatile associe crise politique, problème des droits de l'homme et urgence humanitaire. Depuis leur offensive militaire massive lancée sur le nord du pays, en août 1998 et qui avait entraîné le départ en novembre 1998 du personnel international des institutions du système des Nations Unies, on estime que les Taliban contrôlent désormais plus de 75% du territoire. Ce n'est qu'en mars de cette année, que l'ONU a rétabli une présence constante à Kaboul ainsi que dans divers endroits du pays et le 10 avril dernier, des conseillers militaires de la Mission sont retournés dans la capitale pour le première fois depuis la fin août 1998. Toutefois, depuis le début du printemps, on enregistre une nette détérioration de la situation militaire, les deux belligérants - d'un côté les Taliban et de l'autre le Front uni, dont le commandant militaire est Ahmad Shah Massoud - ayant durci leurs positions et intensifiant les combats dans le nord et le centre du pays. La capitale, Kaboul, est régulièrement l'objet de pilonnage d'artillerie.

Au niveau politique, l'approche des Nations Unies, par le biais de l'envoyé spécial du Secrétaire général en Afghanistan, M. Lakhdar Brahimi, et de la Mission spéciale des Nations Unies en Afghanistan a été de maintenir le dialogue. L'ONU a aussi rassemblé les pays voisins de l'Afghanistan, à savoir la Chine, l'Iran, l'Ouzbékistan, le Pakistan, le Tadjikistan et le Turkménistan, ainsi que la Fédération de Russie et les Etats-Unis, dans le cadre d'un groupe de contact, dénommé le Groupe des 6+2, pour inciter les parties à négocier. Pour créer un climat plus propice à la reprise

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des pourparlers, le Conseil de sécurité, par une déclaration à la Presse le 19 avril dernier, a demandé à la Mission de poursuivre l'examen de l'adoption de mesures de confiance avec les deux belligérants. Après une interruption des pourparlers à la mi-avril, les Taliban, indiquent qu'ils ne reprendront le dialogue que si l'opposition accepte le système de l'Emirat. Ce à quoi le commandant Massoud répond en affirmant que les Taliban n'étant investis d'aucun mandat populaire ou légal les autorisant à gouverner, le système de l'Emirat n'est pas acceptable. Les efforts les plus récents du Groupe des 6+2 ont toutefois permis la tenue en juillet d'une réunion à Tachkent qui a rassemblé les membres du Groupe ainsi que des représentants du Front uni et des Taliban. En Décembre 1998, le Conseil avait déjà décidé de créer un groupe des affaires civiles au sein de la Mission, chargé des droits de l'homme et exige des parties qu'elles reprennent les négociations. Une mission d'évaluation pour la création de ce Groupe est actuellement en cours sur le terrain.

En avril 1999, le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme en Afghanistan, M. Kamal Hossain, a présenté son rapport à la 55ème session de la Commission des droits de l'homme. Il note notamment que la fourniture ininterrompue d'armes destinées à toutes les parties au conflit est "un facteur critique qui contribue à perpétuer les atteintes aux droits de la personne en faisant des habitant pratiquement des otages dans leur propre pays". Il se déclare particulièrement préoccupé par la situation des femmes et des enfants et indique que les droits civils font l'objet de graves violations, des informations ayant fait état, en particulier, d'exécutions sommaires des non-combattants, y compris des femmes et des enfants. En réponse, le Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme a envoyé sur le terrain une équipe chargée de mener une enquête sur les allégations faisant état de massacres et d'autres violations massives des droits de l'homme et du droit international humanitaire dans le nord et le centre de l'Afghanistan en 1997 et 1998.

Parallèlement à ces événements, la situation humanitaire n'a cessé de se détériorer. L'Afghanistan reçoit actuellement 200 millions de dollars d'aide internationale annuelle, dont la moitié est fournie par le système des Nations Unies sous forme d'aide humanitaire. Si environ 4 millions de personnes ont pu retourner dans le pays, on estime que 2,6 millions de réfugiés demeurent encore dans les pays voisins et que 500 000 personnes au moins ont été déplacées à l'intérieur même du territoire afghan ces deux dernières années (140 000 pour le seul mois dernier, conséquence de l'offensive militaire lancée par les Taliban après la réunion de Tachkent). Le conflit continue d'affecter tous les aspects de la vie civile dans de nombreuses régions du pays et l'approvisionnement alimentaire reste presque partout précaire. A Kaboul, on estime qu'un quart de la population, qui se chiffre à 1 million d'habitants, reçoit une assistance humanitaire internationale sous une forme ou une autre.

LA SITUATION EN AFGHANISTAN

Déclarations

M. KIERAN PRENDERGAST, Secrétaire général adjoint aux affaires politiques, a rappelé que depuis un mois l'Afghanistan vit de violents combats. Le 28 juillet, les Taliban lançaient une offensive qui a donné lieu immédiatement à une contre-offensive. La Mission spéciale de l'ONU a constaté un nombre important de victimes. Le Commandant Massoud s'est servi de moins en moins de ses facilités. Le Front uni aurait capturé quelque cinq districts au nord du pays. La semaine dernière, l'aviation des Taliban a attaqué la population civile. De nombreuses recrues semblent venir des écoles religieuses du Pakistan. Le Groupe des 6+2 a tenu une réunion en juillet à Tachkent. En dépit de nombreuses demandes de renseignements sur la reprise des négociations formulées par la Mission de l'ONU, les Taliban n'ont pas été en mesure de répondre. Le Front uni a rejeté en public les propositions faites par le Pakistan, qu'il soupçonne d'appuyer fortement les Taliban. Les victimes des atrocités commises par les Taliban ont fait appel à l'aide des Nations Unies mais les Taliban n'ont reconnu que la destruction de quelques maisons. Les fonctionnaires des Nations Unies affectés à la Mission spéciale des Nations Unies qui étaient détenus par les Taliban ont tous été relâchés à l'exception d'un seul.

Les Nations Unies n'ont pas reçu la permission officielle des Taliban de prendre contact avec les personnes déplacées à l'intérieur des frontières. Quelque 60 000 personnes sont déplacées. De nombreuses familles campent à ciel ouvert, n'ayant pu trouver d'autre refuge. La destruction a été menée non seulement dans les zones stratégiques mais également dans des régions de culture. Il est extrêmement troublant de constater que les violents combats lancés par les Taliban ont repris immédiatement après la réunion du Groupe des 6+2 tenue à Tachkent. S'il n'est pas mis fin à cette guerre insensée en Afghanistan, elle aura des conséquences dévastatrices pour l'ensemble de la région. Les dissensions politiques au sein du Groupe des 6+2 ne contribuent pas à faire progresser les travaux sur toute mesure visant à calmer la situation en Afghanistan.

M. A. ABDULLAH, Vice-Ministre des affaires étrangères de l'Afghanistan, s'est réjoui que les Nations Unies ont été enfin en mesure de réaliser que le Pakistan est intervenu en Afghanistan, intervention qui ne date pas d'aujourd'hui. Il a regretté que cette réaction intervienne seulement à la suite d'une récente résurgence ouverte d'une implication militaire étrangère en Afghanistan, ainsi que l'ont confirmé les remarques formulées fin juillet par l'Envoyé spécial du Secrétaire général, M. Brahimi, qui a indiqué que des milliers de ressortissants pakistanais armés combattent aux côtés des Taliban. Ces derniers ont infligé des souffrances insurmontables à la population civile innocente dans les provinces de Parwan et de Kapisa, provoquant notamment

le déplacement forcé de 300 000 personnes et se traduisant depuis peu également par une politique de la terre brûlée. "Cela fait trop longtemps que la communauté internationale accorde le bénéfice du doute au Pakistan, dans l'espoir que ce pays répondra à ses tentatives de paix en Afghanistan en mettant un terme à ses interventions dans le pays et s'achetant ainsi une innocence. M. Abdullah a évoqué une interview récente où plusieurs responsables pakistanais ont admis que, d'un côté, ils envoyaient une délégation aux négociations de paix alors que de l'autre ils soutenaient la milice talibane. Cette situation exige du Conseil de sécurité qu'il prenne dûment en considération l'agression dont le Pakistan se rend coupable et adopte des mesures concrètes contre l'intransigeance, l'obstination et l'attitude de rejet des Taliban. Le gouvernements islamique lui demande d'accorder son attention à la question "pakistano-talibane" car aucune illusion ne peut expliquer la naissance d'un tel phénomène à l'aube du troisième millénaire, ni la participation d'éléments extrémistes venus de Chine, de Birmanie, du Bangladesh, de l'Ouzbékistan, de l'Algérie, du Yémen, de l'Arabie saoudite et de milliers de ressortissants pakistanais, tous prêts à mourir dans le cadre de ce qui a abusivement été dénommé "guerre sainte".

Le Vice-Ministre a énuméré un certain nombre de fondements juridiques qui, à ses yeux, justifient l'adoption de mesures par le Conseil de sécurité. Il a estimé que le paragraphe 4 de la Charte des Nations Unies, qui exige des Etats Membres de s'abstenir de menacer ou d'avoir recours à la force contre l'intégrité territoriale d'un pays, la définition de l'agression élaborée en 1974 par l'Assemblée générale, la résolution 53/108 de l'Assemblée générale sur les mesures visant à éliminer le terrorisme, qui enjoint les Etats de ne pas financer ou encourager les activités terroristes, ainsi qu'une résolution de l'Assemblée générale de décembre 1998 sur le recours à des mercenaires pour perpétrer des violations des droits de l'homme et empêcher les populations à exercer leur droit à l'autodétermination sont autant de textes violés de manière flagrante par l'Etat pakistanais. Il a aussi énuméré plusieurs faits témoignant de la participation militaire directe du Pakistan en Afghanistan, dont l'objectif est, a-t-il affirmé, de soumettre à sa volonté le "gouvernement taliban" pour ensuite s'approprier les richesses en pétrole et en gas qui se trouvent en Asie centrale. Le précédent Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l'homme en Afghanistan ainsi que l'ancien chef de la Mission spéciale des Nations Unies en Afghanistan ont admis la présence de ressortissants pakistanais et l'existence de camps d'entraînement terroristes en Afghanistan, a-t-il fait observer, ajoutant que les preuves obtenues par les autorités militaires de l'Etat islamiste de l'Afghanistan, comme par exemple l'interception de transmissions radios en langue pundjabi, permettent de dissiper tous les doutes qui pourraient encore subsister quant à la participation du Pakistan. Le Conseil de sécurité devrait donc considérer qu'il est de son devoir conformément à la Charte de maintenir la paix et la sécurité dans la région par le biais de mesures appropriées. Les Nations Unies ont déjà reconnu que l'attitude des Taliban

est obstinée, belliqueuse et intransigeante en vue d'imposer leur conception d'un Etat islamique. Cette attitude belliqueuse persiste puisque, le 19 juillet dernier lors de la réunion de Tachkent, ils n'ont fait aucun engagement en faveur de la paix, et ont même lancé quelques jours plus tard une nouvelle vaste offensive militaire au nord de Kaboul. Les prétentions de changement politique des Taliban se sont révélées fausses en plusieurs occasions, a poursuivi M. Abdullah, les qualifiant en fait de rhétorique fallacieuse et de propagande visant à amadouer le reste du monde. "Nous espérons donc que le Conseil de sécurité examinera la possibilité d'imposer des sanctions immédiates à la fois contre les Taliban et leur protecteur, à savoir le Pakistan et nous sommes disposés à maintenir des relations amicales avec tous les pays voisins, sans exception, sur la base de la coopération et du respect mutuel".

M. GENNADIY GATILOV (Fédération de Russie) a rappelé que son pays a soutenu la tenue du débat d'aujourd'hui pour permettre à toutes les délégations intéressées d'échanger des vues sur la situation en Afghanistan. Les pires craintes qui ont surgi, lorsque les Taliban ont pris la capitale de l'Afghanistan ne font que se confirmer. La Fédération de Russie s'est prononcée de manière résolue contre toute escalade militaire par les Taliban. Après la réunion du Groupe des 6+2 tenue en juillet à Tachkent, les Taliban ont lancé de nouvelles offensives, avec l'appui d'éléments venus du Pakistan. Les violations flagrantes des droits de l'homme et du droit international sont intolérables. La Fédération de Russie appelle les Taliban à mettre fin à ces exactions et à rétablir l'ordre dans le pays. Les conséquences négatives de la situation en Afghanistan affectent les pays de la région et même certains territoires de la Fédération de Russie. Le représentant a souligné que son pays et l'ensemble de la Communauté des Etats indépendants continueront de prêter leurs efforts à la communauté internationale pour aboutir à un règlement pacifique à la situation en Afghanistan. Il convient de réfléchir aux conséquences d'une politique de courte vue défendue par les Taliban et autres groupes. La délégation de la Fédération de Russie se félicite des efforts inlassables accomplis par le Secrétaire général et son Représentant spécial. Elle estime que le Groupe des 6+2 joue un rôle crucial dans la recherche d'un règlement de la crise afghane et prie donc le Conseil de sécurité de lui apporter tout l'appui nécessaire.

M. CHAN GUOFANG (Chine) a rappelé qu'il y a 20 ans que le cercle vicieux des négociations entamées durant l'hiver se poursuit et que celui-ci n'a pas empêché la reprise des combats en Afghanistan. La constatation d'une telle situation permet de se poser la question de savoir comment la communauté internationale peut encourager le processus de paix. La Chine estime que c'est le peuple afghan qui détient la clef d'un règlement définitif du problème. C'est pourquoi le Gouvernement chinois encourage les parties en conflit à placer l'intérêt de leur nation et de leur pays au-dessus de tout,

à cesser leurs combats fratricides et à établir un gouvernement d'ouverture acceptable par tous. La réalité présente de l'Afghanistan ne fait que confirmer l'inutilité du recours à la force et indique clairement que la seule solution est pour les parties de reprendre les négociations.

Pour sa part, la communauté internationale devrait s'efforcer de créer un environnement extérieur constructif et favorable à un règlement pacifique de la question, a poursuivi le représentant. Les pays disposant d'une influence non négligeable sur les parties en conflit devraient tout particulièrement s'efforcer de persuader les belligérants de s'asseoir à la même table de négociations et d'entreprendre un dialogue raisonnable et calme. De plus, les pays voisins de l'Afghanistan devraient immédiatement cesser leur fourniture d'aide militaire aux différentes factions combattantes, a expliqué M. Guofang. Les Nations Unies devraient envisager la possibilité de mettre en place un embargo sur les armes et d'établir un mécanisme de contrôle approprié. Toutefois, il faut être réaliste et prendre conscience que ce n'est pas en l'espace de 2 ou 3 réunions du Conseil de sécurité que nous allons trouver une solution définitive au problème, a fait remarquer le représentant. La Chine espère que les parties concernées vont faire preuve de volonté politique et travailleront de concert pour atteindre les objectifs fixés par la déclaration de Tachkent. Pour sa part, la Chine est disposée à poursuivre sa participation active au sein du Groupe des 6+2 dans ses efforts de promotion de la paix, car elle n'oublie pas que le peuple afghan aspire sincèrement et depuis trop longtemps à la paix et à la stabilité.

M. FERNANDO PETRELLA (Argentine) a estimé que la nouvelle escalade militaire en Afghanistan fournit amplement la preuve que la question est caractérisée par la répétition continue de combats chroniques qui perpétuent l'instabilité politique et exacerbent la misère de la population. L'Argentine déplore tout particulièrement le fait que la nouvelle offensive militaire des Taliban intervient juste après la réunion de haut niveau du Groupe des 6+2 de Tachkent. Le représentant a rappelé, à cet égard, que les membres du groupe se sont engagés à ne prêter aucune assistance militaire aux parties en conflit et à prévenir l'utilisation de leur territoire comme base d'entraînement à des fins militaires. Malheureusement, il semble bien que cette récente offensive ait reçu un appui extérieur massif, a ajouté le représentant. L'Argentine condamne l'intervention de forces extérieures dans le conflit. C'est pourquoi il faut se garder d'espérer obtenir des résultats trop élevés et prendre conscience que la communauté internationale devrait peut être envisager d'adopter une nouvelle stratégie. Pour le moins, la présente réunion indique que le Conseil de sécurité entend transmettre un signal clair et montrer sa disposition à prendre les solutions alternatives qui conviendront pour finalement contribuer au règlement de la question afghane.

M. JASSIM MOHAMMED BUALLAY (Bahreïn) a regretté que les factions belligérantes en Afghanistan reviennent à la guerre. La solution unique est de retourner aux négociations afin d'instaurer une paix durable. Il faut absolument que tous les pays s'abstiennent d'apporter un appui financier et militaire aux factions belligérantes. La crise qui sévit en Afghanistan a aggravé la situation des réfugiés. La délégation de Bahreïn demande à la communauté des donateurs d'augmenter l'aide humanitaire à la population civile afghane. Le représentant a appelé les parties au conflit à renoncer à la force et à oeuvrer en faveur de la paix afin de garantir une vie normale à la population afghane et la stabilité dans la région.

M. ROBERT FOWLER (Canada) a déclaré que son pays est très préoccupé par les rapports révélant que les combattants taliban forcent les civils afghans, notamment ceux qui vivent dans la plaine de Chamali, à se déplacer vers Kaboul, et regrette vivement les tactiques utilisées pour empêcher ces civils de rentrer dans leurs foyers, notamment la politique de la terre brûlée. Le Canada est également préoccupé par les informations selon lesquelles les Taliban tentent de séparer les femmes et les enfants déplacés des hommes de leur famille. Le déplacement forcé de civils et la destruction de biens civils sont une violation flagrante du droit humanitaire international et une atteinte aux droits de l'homme. Le Canada condamne de telles exactions et demande aux autorités taliban d'y mettre fin immédiatement.

La délégation canadienne est consternée par les rapports constants sur les atteintes atroces aux droits de l'homme qui y sont perpétrées et par la discrimination dont le système fait preuve à l'égard des femmes et des fillettes. Les droits des citoyens afghans, protégés en vertu des Pactes internationaux relatifs aux droits politiques et civils, économiques, sociaux et culturels, des Conventions de Genève et des autres instruments internationaux auxquels l'Afghanistan est partie, doivent être respectés, a souligné M. Fowler. Le Canada demande donc instamment aux parties en conflit de s'assurer que les besoins des personnes déplacées et des autres populations touchées par la guerre sont totalement satisfaits. M. Fowler a appelé toutes les parties de s'abstenir de recruter ou d'utiliser des enfants soldats et de garantir la sûreté, la sécurité et la liberté d'accès du personnel humanitaire aux populations démunies. Le Canada prie le Pakistan d'exercer ses bons offices et d'encourager les Taliban pour qu'ils mettent fin au déplacement forcé de civils et reprennent les pourparlers avec l'Alliance du Nord. La crise afghane devrait être résolue par des moyens pacifiques et, à cet égard, tous les pays devraient s'abstenir de fournir tout soutien financier ou matériel aux factions belligérantes en Afghanistan.

Mme NANCY DODERBERG (Etats-Unis) a noté avec regret que la dernière crise en Afghanistan a commencé le 28 juillet dernier lorsque les Taliban ont lancé une offensive contre les forces d'opposition du Front uni, quelques jours seulement après la signature par le Groupe des 6+2 de la déclaration de Tachkent, qui appelait à mettre fin au conflit par des négociations politiques

pacifiques. L'impact humanitaire de cette offensive est indescriptible. Au cours du mois dernier, des centaines d'Afghans sont morts ou ont été blessés et des milliers d'autres ont été déplacés. La délégation des Etats-Unis est profondément préoccupée par les informations concernant les atrocités commises par les Taliban. L'offensive des Taliban la plus récente a montré une nouvelle fois la futilité de la tentative de chaque partie d'imposer un règlement par la force en Afghanistan. Ce n'est que par la formation d'un gouvernement largement représentatif qui garantit l'intérêt de tous les Afghans qu'il sera possible de trouver un règlement durable au conflit. Les Etats-Unis appuient les efforts continus de l'Envoyé spécial du Secrétaire général, M. Lakhdar Brahimi, ainsi que du Groupe des 6+2, visant à réaliser cet objectif par le biais d'un cessez-le-feu, d'échange de prisonniers et de la reprise des négociations. Il est impératif que certains pays voisins mettent fin au cycle de la violence et à leur appui aux factions belligérantes. Il est essentiel que le processus politique progresse et, à cet égard, Mme Soderberg a appelé les factions à revenir à la table des négociations.

L'ingérence en Afghanistan porte atteinte aux droits de l'homme du peuple afghan. Comme le faisait observer le Rapporteur spécial sur les droits de l'homme en Afghanistan, M. Hossain, le peuple afghan devient otage sur son propre territoire ou réfugié. Le refus des droits de l'homme fondamentaux en Afghanistan est simplement inacceptable, a souligné Mme Soderberg. Il est également vital qu'il soit mis fin à l'appui au terrorisme pour permettre à l'Afghanistan de retrouver sa place au sein de la communauté internationale. A cet égard, les Etats-Unis sont profondément préoccupés par l'utilisation continue du territoire afghan, en particulier sous le contrôle des Taliban, pour abriter ou former des terroristes et programmer des actes terroristes. Les Etats-Unis ont imposé le mois dernier par voie de décret des sanctions contre les Taliban qui resteront en vigueur jusqu'à ce qu'ils expulsent ou procèdent à l'extradition d'Ousama bin Laden. Les Etats-Unis condamne toute forme de terrorisme quel qu'en soit le motif ou l'objectif.

M. YVES DOUTRIAUX (France) a estimé que la situation en Afghanistan n'a connu aucune évolution positive en ce qui concerne l'arrêt des opérations militaires et a subi, au contraire, une nette dégradation au cours des dernières semaines à la suite de la nouvelle offensive menée au nord du pays, et ce, au mépris de la Déclaration de Tachkent du 20 juillet dernier. Le représentant a constaté que le refus des Taliban d'engager un dialogue constructif avec le Front uni constitue un obstacle majeur à la mise en oeuvre d'une solution pacifique. Il a fait part de sa préoccupation face aux souffrances subies par les populations et condamné les mesures attentatoires aux droits de l'homme, notamment à l'encontre des femmes et des jeunes. A cet égard, il a condamné particulièrement les opérations menées à l'encontre de certains groupes ethniques ou religieux, en se déclarant profondément troublé par les déportations de civils tadjiks organisées ces dernières semaines dans la plaine du Chamali. Réitérant son appui aux efforts déployés par la

Mission des Nations Unies, par le Représentant spécial du Secrétaire général et par tous ceux qui oeuvrent à une solution pacifique du conflit, le représentant a exigé une nouvelle fois des différentes factions afghanes qu'elles cessent d'héberger et d'entraîner des organisations terroristes et qu'elles fassent cesser la production et le trafic des drogues illicites. Il a aussi demandé que cessent immédiatement toutes les ingérences étrangères et notamment l'envoi avéré d'armes et de volontaires aux côtés des factions en présence.

M. DAVID RICHMOND (Royaume-Uni) a déclaré que les événements survenus au cours de ces dernières semaines montrent qu'il ne peut y avoir de règlement militaire à la situation en Afghanistan. En dépit d'un mois marqué par de violents combats, aucune partie belligérante n'a remporté de victoire. Alors que cette guerre déchire le pays, c'est le peuple d'Afghanistan qui en souffre le plus. Les Afghans sont épuisés par ce conflit et la pauvreté. La délégation du Royaume-Uni est particulièrement préoccupée par les informations concernant les violations des droits de l'homme commises par les Taliban dans les régions affectées. Des dizaines de milliers de personnes ont été déplacées, dont de nombreuses ont été forcées par les Taliban. Les pays voisins de l'Afghanistan et le monde en général sont également affectés par les risques d'instabilité qu'engendrent le conflit et la menace du terrorisme ainsi que le trafic illicite des stupéfiants. Le Royaume-Uni espère que l'échec de l'objectif clé de la dernière offensive des Taliban fera comprendre aux Taliban et à leurs sympathisants que de nouveaux combats seront futiles. Les Taliban et l'Alliance du Nord doivent placer au premier plan les intérêts du peuple afghan.

Les voisins de l'Afghanistan doivent reconnaître ces faits et s'engager sérieusement en faveur d'un règlement négocié. La première étape devrait viser à mettre fin immédiatement à l'appui militaire. Les Taliban n'auraient pas dû être autorisés à lancer cette dernière offensive. Tous ceux qui peuvent exercer une influence sur les parties doivent faire tout leur possible pour les encourager à reprendre les négociations. Le Pakistan, qui a une influence unique sur les Taliban, a un rôle particulièrement important à jouer.

M. PETER VAN WALSUM (Pays-Bas) a noté avec une grande préoccupation que la dernière réunion des 6+2 à Tachkent n'a pas conduit à la reprise du dialogue inter-afghan. Il est déconcertant, a-t-il ajouté, que pendant ces discussions, les Taliban préparaient déjà une autre offensive. Pour le représentant, la Déclaration de Tachkent du 20 juillet dernier, constitue une base fiable pour une solution au conflit, voire la meilleure perspective de paix. Il a lancé un appel aux parties pour qu'elles déposent les armes et reprennent sans délai le processus de négociations sous les auspices des Nations Unies, l'objectif devant être la création d'un gouvernement multiethnique, élargi et représentatif. Le représentant a également

jugé essentiel que les pays voisins respectent de même les résultats de la réunion de Tachkent; toute initiative de paix devant être prise dans le cadre strict du processus 6+2. Le représentant a estimé que l'appui apporté par l'Afghanistan aux terroristes internationaux comme Osama bin Laden constitue une autre source de préoccupations. Il a lancé un appel à toutes les factions, en particulier aux Taliban, pour qu'ils coopèrent aux efforts tendant à traduire en justice les responsables d'actes terroristes.

Dénonçant les souffrances infligées aux populations et les violations des droits de l'homme, le représentant a appelé les factions à accorder une attention particulière aux droits des minorités ethniques, des femmes et des jeunes filles ainsi qu'à ceux des personnes déplacées et des réfugiés. Il a accueilli avec satisfaction l'enquête de l'ONU sur les tueries de 1997 et 1998 à Mazar-i-Sharif et dans le nord de l'Afghanistan. Il a insisté pour que le Rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme soit autorisé à enquêter et à surveiller la situation sur le terrain pour en faire rapport au Conseil de sécurité. Appelant les pays voisins à s'abstenir de refouler les réfugiés afghans, le représentant a lancé un appel aux factions pour qu'elles facilitent l'acheminement de l'aide humanitaire. Il a condamné la production et le commerce de drogues illicites par les Taliban et le Front uni.

M. HASMY AGAM (Malaisie) a déploré l'enracinement en Afghanistan d'un cycle vicieux de la violence dans lequel l'incapacité des factions à conclure un accord est à la fois la cause et la conséquence de l'ingérence d'acteurs extérieurs. Déplorant la situation économique et sociale alarmante du pays du fait de 20 ans de guerre, le représentant a estimé que les seules leçons que l'on puisse en tirer sont que la paix en Afghanistan ne peut se conquérir sur les champs de bataille mais bien à la table des négociations. Cette réalité, a dit le représentant, doit être acceptée par toutes les parties afghanes. Ils doivent dépasser leurs propres intérêts et abandonner le vain espoir d'une victoire militaire illusoire qui viendrait régler le conflit une fois pour toutes. La signature de la Déclaration de Tachkent a été vue comme une contribution importante à la recherche d'une paix durable au conflit, a poursuivi le représentant avant de regretter que la reprise des hostilités militaires ait fini par mettre en doute la pertinence de ce document. "La poursuite du conflit et l'implication d'acteurs extérieurs ont fait de la Déclaration une farce", a dit le représentant en ajoutant qu'en dépit de l'engagement du Groupe des 6+2 de ne fournir aucun appui militaire aux factions afghanes, une livraison massive de matériel militaire soit venue exacerber la situation.

Le représentant a pourtant estimé qu'en dépit de cela, le Groupe demeure un forum et un mécanisme utiles du processus de paix et doit, en conséquence, bénéficier de l'appui de la communauté internationale et du Conseil de sécurité. Il a donc appelé les membres du Groupe à faire taire leurs divergences et à réitérer leur engagement à la Déclaration de Tachkent. Il a toutefois appelé les parties afghanes à reconnaître que la recherche de la paix doit commencer et s'achever avec eux. La paix ne peut être imposée de l'extérieur et elle ne saurait résister à l'épreuve du temps si elle n'est pas appuyée par les parties elles-mêmes, a souligné le représentant avant de conclure que la durée du conflit en Afghanistan s'explique, dans une large mesure, par l'implication d'acteurs externes. Il a donc jugé important que la communauté internationale, et le Conseil de sécurité en particulier, exerce son influence sur toutes les parties concernées pour que la paix et la stabilité reviennent en Afghanistan.

M. DENIS DANGUE REWAKA (Gabon) a déclaré que les parties afghanes rivales se sont engagées dans des opérations militaires, montrant qu'elles préféraient un règlement militaire à une solution pacifique. Il a appelé toutefois les parties concernées à renoncer à la force et à opter pour des moyens pacifiques afin de parvenir à un règlement définitif. Le représentant a réaffirmé qu'il appartient en premier lieu aux Afghans de régler leurs problèmes. Comme le soulignait M. Prendergast ce matin, des milliers de personnes, en particulier des femmes et des enfants, ont été déplacées. A cet égard, M. Dangue Rewaka a appelé les factions afghanes à autoriser le libre accès aux organisations humanitaires pour fournir l'aide humanitaire à la population civile.

M. BABOUCARR-BLAISE ISMAILA JAGNE (Gambie) s'est déclaré convaincu que le processus développé par le Groupe des 6+2 constitue le cadre le mieux approprié pour répondre à la crise afghane. Le cycle vicieux de la violence prévaudra et toute la région demeurera tributaire de la situation en Afghanistan, tant que toutes les parties concernées ne parviendront pas à s'entendre. Dans cette situation de quasi-paralysie, le Conseil de sécurité devrait faire preuve d'ingénuité et adopter une nouvelle approche à la crise afghane. Sans sous-estimer la complexité de la situation, la délégation gambienne est d'avis qu'il faudrait en premier lieu régler les problèmes politiques sous-jacents. Ce n'est qu'ensuite qu'il sera possible de créer un climat propice pour faire face aux autres questions telles que les violations des droits de l'homme, le terrorisme et le trafic illicite des stupéfiants. C'est pourquoi, la délégation gambienne attache une grande importance au processus des 6+2 et appelle toutes les parties concernées à revenir sans tarder à la table des négociations.

M. SAMUEL ZBOGAR (Slovénie) a souligné que les Taliban, respectant leur tradition d'un cycle annuel de combats, viennent, une fois encore, de faire fi des efforts de la communauté internationale en lançant, au cours de cet été, une nouvelle offensive militaire. Il s'est montré préoccupé par la présence aux côtés des Taliban de milliers d'étrangers; par l'enrôlement de jeunes étudiants en prévision de nouvelles offensives; par les chiffres alarmants de personnes déplacées; les nombreuses violations des droits de l'homme et du droit humanitaire international, et par les pratiques de nettoyage ethnique. De plus, a déploré le représentant, la situation en Afghanistan se trouve exacerbée davantage par la production et le trafic de drogues illicites ainsi que par l'appui au terrorisme international. Des rapports fiables ont établi la responsabilité des Taliban dans l'émergence de ces "maladies sociales, humanitaires et politiques" dont les conséquences dangereuses vont bien au-delà des frontières nationales. Regrettant les échecs des efforts déployés par le Groupe 6+2, le représentant a estimé que la crédibilité de ce mécanisme a été largement affecté, au mois de juillet dernier, après la réunion de haut niveau de Tachkent à laquelle ont participé le Front uni et les Taliban. Il semble aujourd'hui que parallèlement à cette réunion, certaines parties préparaient déjà l'action militaire qui s'est produite depuis.

Le représentant a estimé qu'il faudra se rappeler les leçons du passé, qui, selon lui, sont au nombre de quatre. Premièrement, le mécanisme des 6+2 ne doit pas faire oublier la pertinence du principe de règlement pacifique du conflit que le Groupe est censé défendre. Deuxièmement, le règlement de la crise afghane est aussi à chercher dans ses aspects extérieurs, à savoir l'ingérence de certains pays. Il faut donc les inviter à mettre fin à cette politique. Troisièmement, il faut souligner davantage que les avancées militaires des Taliban ne sauraient constituer une base légitime de gouvernement. Un gouvernement ne peut tenir sans un minimum de légitimité auprès de la population. Cette légitimité doit d'ailleurs inclure le respect des normes du droit international, notamment du droit humanitaire et

des droits de l'homme. Enfin, il faut examiner, de manière précise et responsable, l'impact déstabilisateur de la situation en Afghanistan sur les pays voisins. Il faut accorder toute l'attention requise au "cancer" que constitue le trafic d'armes et le terrorisme qui a un effet perturbateur bien au-delà de la région et même dans les régions qui nourrissent traditionnellement une certaine sympathie pour les Taliban.

M. GELSON FONSECA (Brésil) a exprimé une nouvelle fois l'inquiétude de son gouvernement à l'égard du conflit afghan qui perdure et son caractère déstabilisateur pour l'ensemble de la région. La reprise des activités militaires cet été est particulièrement préoccupante, étant donné la sombre situation humanitaire du pays, où des milliers de civils innocents sont déplacés et où émergent de plus en plus les preuves des violations des droits de l'homme. C'est pourquoi, il est doublement regrettable que les efforts considérables de la communauté internationale en faveur d'un règlement durable entre les parties en conflit n'aient pas obtenu les résultats escomptés.

Le Brésil persiste à croire que la déclaration faite par le Groupe des 6+2 le mois dernier à Tachkent représente la meilleure base pour aller de l'avant et d'espérer un tant soit peu en une paix durable. Il est à la fois nécessaire et urgent que ses principes fondamentaux, à savoir l'arrêt de la fourniture d'armes, l'entrée en vigueur d'un cessez-le-feu immédiat et l'échange des prisonniers de guerre, recueillent l'adhésion. Pour ce faire, il faudra mettre fin à l'ingérence extérieure en Afghanistan, a insisté le représentant, ajoutant que c'est seulement de cette manière que l'on entrera dans la voie de la réconciliation nationale et de l'établissement d'un gouvernement multiethnique et démocratique qui permettront de rétablir la paix, la tolérance et l'espoir non seulement à la population afghane, ravagée par la guerre, mais aussi à l'ensemble de l'Asie centrale.

M. MARTIN ANDJABA (Namibie) a fait part des très fortes préoccupations de sa délégation devant la persistance et l'escalade de la guerre en Afghanistan. "Nous sommes particulièrement inquiets des souffrances endurées par la population civile depuis tant de temps", a souligné le représentant, ajoutant que les récents rapports faisant état d'une dramatique détérioration de la situation humanitaire devraient convaincre les parties combattantes à cesser immédiatement les hostilités et à retourner à la table de négociations. La Namibie lance aussi un appel aux auteurs des violations des droits de l'homme pour qu'ils cessent leurs pratiques et respectent les normes internationales dans ce domaine.

De l'avis de la Namibie, il n'est pas possible d'obtenir une solution complète du problème par la guerre et c'est pourquoi elle estime que la seule voie vers une paix durable est la reprise des négociations et l'établissement d'un gouvernement d'ouverture nationale pleinement représentatif et acceptable par l'ensemble de la population afghane. La Namibie salue le travail et les efforts déployés par l'Envoyé spécial en Afghanistan, M. Brahimi, et

par la Mission spéciale des Nations Unies. Pour les aider dans ces efforts, le Groupe des 6+2 devrait être encouragé à redoubler ses démarches en vue de trouver une approche commune à la résolution du conflit. Pour cela, il est indispensable de lever les doutes quant à son efficacité pour le processus de paix, ce qui doit se traduire notamment par la mise en oeuvre complète des engagements inscrits dans la Déclaration de Tachkent.

Mme MARJATTA RASI (Finlande), au nom de l'Union européenne et des pays associés, a réaffirmé le ferme engagement de sa délégation à la souveraineté, à l'indépendance, à l'intégrité territoriale et à l'unité nationale de l'Afghanistan. L'Union européenne condamne en termes vifs toute ingérence étrangère en Afghanistan et demande instamment que la fourniture d'armes, de munitions et d'autres équipements militaires aux factions belligérantes ainsi que la participation de personnel militaire, paramilitaire et des services d'intelligence étrangers prennent fin. En outre, l'Union européenne appelle les factions afghanes à cesser tout recours aux mines antipersonnel et à appuyer et à prendre part aux programmes de déminage en Afghanistan. Aucune société ne peut réussir à instaurer la paix, la justice et la stabilité si elle ne respecte pas pleinement les droits de l'homme et les libertés fondamentales.

L'Union européenne appelle toutes les factions afghanes, et en particulier les Taliban, à reconnaître, protéger et promouvoir tous les droits de l'homme et les libertés fondamentales, y compris le droit à la vie, à la liberté et à la sécurité des personnes. L'Union européenne dénonce la discrimination continue à l'égard des femmes et prie instamment les factions afghanes, et en particulier les Taliban, à mettre fin à ces pratiques et à reconnaître les droits de l'homme à l'ensemble de la population. Rappelant que pendant des années, l'Union européenne a été un des contributeurs les plus importants à l'assistance humanitaire, Mme Rasi a souligné que la Commission européenne a dût suspendre le financement de projets à Kaboul en juillet 1998 car il était devenu de plus en plus difficile pour les institutions d'acheminer l'aide humanitaire de manière efficace et suffisante, en particulier dans les secteurs de la santé et de l'éducation. Ayant repris ses activités humanitaires au début de l'année 1999, l'Union européenne souhaite poursuivre son aide au peuple afghan mais précise qu'il faut donner libre accès aux institutions humanitaires pour leur permettre de s'acquitter de leur mandat. Par ailleurs, l'Union européenne réitère son appel aux Taliban pour enquêter de manière approfondie sur les meurtres du personnel des Nations Unies ainsi que des diplomates iraniens à Mazar-e-Sharif. Elle prie instamment toutes les parties afghanes de s'abstenir de financer, de former ou d'abriter des organisations terroristes et de traduire en justice les responsables d'actes terroristes.

M. YERZHAN KAZYKHANOV (Kazakhstan) a regretté que la guerre civile en Afghanistan continue de poser une menace à la sécurité et à la stabilité des autres Etats de la région. Sa délégation fait siennes les préoccupations du Secrétaire général selon lesquelles les combats risquent de s'amplifier et qu'il sera difficile d'empêcher le conflit de s'étendre au-delà des frontières. A cet égard, le Kazakhstan réaffirme son ferme engagement en faveur des accords conclus dans le cadre du Sommet d'Almaty du 4 octobre 1996 et de la réunion des ministres des affaires étrangères et de la défense du Kazakhstan, de l'Ouzbékistan, du Kirghizistan et du Tadjikistan tenue à Tachkent le 22 août 1998. Le représentant a estimé qu'il faudrait continuer à déployer des efforts pour convaincre les parties au conflit qu'il n'existe aucune solution militaire au conflit et que le recours à la force n'a aucun avenir.

La délégation kazakhe exprime sa ferme conviction que les efforts internationaux visant à régler la situation en Afghanistan doivent être déployés sous les auspices des Nations Unies - médiateur impartial pour instaurer la paix et rétablir la réconciliation nationale en Afghanistan - sur la base des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et de l'Assemblée générale. Le Kazakhstan attache une grande importance aux efforts collectifs des pays voisins de l'Afghanistan et des autres Etats visant à instaurer la paix dans le pays. Dans ce cadre, le Gouvernement du Kazakhstan souligne l'importance de la réunion du Groupe 6+2 tenue à Tachkent en juillet dernier qui a adopté une déclaration sur les principes fondamentaux pour un règlement pacifique du conflit en Afghanistan. Il condamne par ailleurs fermement toute ingérence étrangère dans les affaires intérieures de l'Afghanistan et appuie l'appel du Conseil de sécurité pour une cessation immédiate de livraisons d'armes et d'appui aux factions en Afghanistan. Le Gouvernement kazakh souligne la nécessité de prendre des mesures concrètes pour lutter contre le trafic illicite des stupéfiants.

M. ARNE HONNINGSTAD (Norvège) a lancé un appel urgent aux parties en conflit en Afghanistan, en particulier aux Taliban, pour qu'elles reprennent les négociations relatives à la formation d'un gouvernement élargi, multiethnique et représentatif à Kaboul. Il a souligné l'importance de la coopération régionale dans le règlement de la confrontation militaire en cours. A cet égard, le représentant a qualifié de "pas dans la bonne direction" la Déclaration de Tachkent du 20 juillet dernier. Il a exhorté le Groupe des 6+2, en particulier les Taliban, à respecter les Principes fondamentaux du règlement pacifique du conflit en Afghanistan et à traduire en actes leur engagement déclaré en faveur d'un règlement politique du conflit. De même, le représentant a appelé les pays de la région à s'en tenir à leur commun accord de ne fournir d'appui militaire d'aucune sorte aux parties en conflit. Il a appelé à la cessation des violations des droits de l'homme, du droit humanitaire international et du trafic d'armes, en dénonçant, par ailleurs, le recrutement d'enfants par les groupes armés.

Dans ce contexte, il les a invité à respecter les instruments internationaux pertinents. Rappelant, d'autre part, aux parties leur responsabilité vis-à-vis des personnes déplacées, le représentant leur a lancé un appel urgent pour qu'elles assurent l'accès à ces populations des organisations humanitaires. Il ne saurait y avoir de paix durable en Afghanistan dans un contexte de détérioration constante de la situation humanitaire, a affirmé le représentant qui a appuyé les Nations Unies qui placent, à juste titre, l'assistance humanitaire dans le contexte plus large du processus politique et de réconciliation.

M. MEHDI DANESH-YAZDI (République islamique d'Iran) a fait observer que la dernière offensive militaire lancée par les Taliban et les échecs des parties concernées ont montré une fois encore qu'il ne peut y avoir de règlement militaire au conflit afghan. L'Afghanistan est une société multiethnique, gouverné pendant des siècles dans l'harmonie ethnique et par un mécanisme délicat de partage des pouvoirs qui permettait à tous les groupes ethniques et linguistiques de jouer un rôle. L'histoire afghane ainsi que les expériences de sociétés similaires illustrent que la conquête ou la perte d'un territoire par des opérations militaires ne pourront jamais régler une crise aussi profonde et rétablir la paix. Il faudrait donc reconnaître que la politique militariste adoptée par les Taliban et leurs sympathisants étrangers cherchant la domination de la société afghane par un groupe est une politique naïve. Le déplacement forcé des habitants tadjiks de la région et la mise à feu de villages et des cultures pour les empêcher de revenir constituent des violations flagrantes du droit humanitaire international commises par les Taliban. La même politique a été appliquée contre le peuple d'Hazara au cours de ces dernières années. Des centaines de milliers de civils disposent du strict minimum pour survivre. C'est pourquoi, la délégation iranienne appelle la communauté internationale à fournir une assistance par le biais des Nations Unies aux populations désespérées de ces régions. Le Conseil de sécurité doit prendre des mesures concrètes afin de forcer les Taliban à renoncer à leur campagne insensée menée contre la population civile.

Le recours à la violence par les Taliban contre des groupes ethniques vise à polariser davantage la société multiethnique afghane et en conséquence à aggraver la situation. La voie empruntée par les Taliban pourrait mettre en jeu la stabilité de l'Afghanistan, ainsi que des pays voisins. L'Iran souligne la nécessité de respecter la souveraineté, l'intégrité territoriale et l'indépendance de l'Afghanistan et appelle toutes les parties concernées à s'abstenir d'adopter une politique qui irait à l'encontre de ces principes. L'attitude intransigeante des Taliban, adoptée en violation des résolutions pertinentes de l'Assemblée générale et du Conseil de sécurité, a été la cause même de l'agonie et des souffrances du peuple afghan au cours de ces dernières années et elle a, en fait, perpétué l'instabilité et créé de nouvelles difficultés pour la région et même au-delà. L'Iran continue d'être affectée par les conséquences négatives découlant de cette situation chaotique et

de l'illicéité qui sévit en Afghanistan. Pour lutter contre ces menaces, le Gouvernement en a payé le prix en termes de ressources humaines et financières et se dit prêt à coopérer avec la communauté internationale pour trouver un règlement juste et durable au conflit en Afghanistan. A cet égard, M. Danesh-Yazdi a indiqué que son pays souhaite continuer à oeuvrer en étroite coopération avec l'Envoyé spécial du Secrétaire général pour persuader les groupes afghans, en particulier les Taliban, à renoncer aux hostilités et à s'engager dans des négociations politiques sérieuses. La délégation iranienne souligne que son pays est déterminé à poursuivre vigoureusement l'examen de la question de l'enquête sur le meurtre du personnel du consulat général iranien à Mazar-e-Sharif par les forces des Taliban en août 1998.

M. KAMALESH SHARMA (Inde) a fait remarquer que la réunion d'aujourd'hui intervient à un moment où se multiplient les manifestations prouvant que les Taliban continuent de poursuivre leur rêve d'une solution militaire en Afghanistan. Ainsi leur récente campagne dans les plaines du Chamali, qui a reçu l'aide de personnels militaires étrangers, a démontré à quel point les Taliban font fi des efforts de paix de la communauté internationale. Or ces actions sont non seulement contraires mais tout simplement répugnantes aux yeux de la tradition afghane, ce qui montre qu'elles sont inspirées de l'extérieur du pays. Le Conseil de sécurité doit prendre, en conséquence, des mesures efficaces et appropriées. Il ne saurait y avoir de solution militaire à la guerre civile en Afghanistan, a poursuivi le représentant, estimant que l'avenir résidait dans la tenue de discussions et de négociations pacifiques, auxquelles le Président Rabbani, le Commandant Massoud et d'autres dirigeants du Front islamiste pour la défense de l'Afghanistan se sont déjà dits prêts à participer. La solution passe également par la formation d'un gouvernement d'assise nationale large, représentant réellement toutes les forces politiques et les groupes ethniques en présence, indépendant et autonome et s'attaquant à l'urgente tâche de reconstruire le pays. "Les Taliban et leur protecteur étranger ne peuvent pas être autorisés à perpétuer ainsi un clivage ethnique, simplement pour servir leurs intérêts cachés". L'union, l'indépendance, la souveraineté et l'intégrité territoriale sont vitales pour le peuple afghan, ainsi que pour la paix, la stabilité et le développement économique de l'ensemble de la région, dont l'Inde fait partie. La communauté internationale doit donc agir pour que ceux qui mettent en péril la paix de la région par le biais d'une idéologie obscurantiste, de violences extrêmes et d'un détournement de la foi soient forcés de s'arrêter. La cessation de l'ingérence provenant de la frontière sud du pays est fondamentale.

Les territoires occupés désormais par les Taliban sont devenus une véritable pépinière du terrorisme international, a expliqué M. Sharma qui a indiqué que des groupes terroristes internationaux y trouvent à la fois refuge et camps d'entraînement. L'Inde en est l'une des victimes et c'est pourquoi, elle demande à la communauté internationale de prendre des mesures collectives contre les terroristes et leur protecteur. "Il faut qu'un message, fort et clair, sorte de cette salle aujourd'hui et indique aux Taliban que les auteurs des crimes auront à répondre des conséquences de leurs actes".

Les régions contrôlées par les Taliban se sont également transformées en principaux producteurs mondiaux de drogues, a-t-il poursuivi, soulignant les liens étroits qui existent entre les Taliban et les mafias opérant par-delà la frontière sud du pays. Pour toutes ces raisons, les efforts de la communauté internationale en faveur de la paix doivent être appropriés, volontaires et gérés par les Nations Unies. Ils doivent être le plus ouvert possible, tous les pays ayant un intérêt ou une influence en Afghanistan devant pouvoir y participer. Une approche étroite et segmentée ne saurait réussir, a mis en garde M. Sharma, avant de conclure sur la nécessité, notamment à l'approche de l'hiver, pour la communauté internationale d'assurer la fourniture régulière de l'aide au peuple afghan.

M. YUKIO TAKASU (Japon) a fait part de la profonde préoccupation de son Gouvernement à l'égard des développements récents en Afghanistan, marqués par l'intensification des combats et des déplacements de personnes et les souffrances croissantes de la population civile. Le représentant a exprimé son soutien aux efforts de l'Envoyé spécial du Secrétaire général, M. Brahimi, et de la Mission spéciale des Nations Unies, ainsi qu'aux efforts déployés par le Groupe des 6+2.

M. Takasu a indiqué qu'une solution pacifique à ce long conflit passe, selon lui, par la réalisation de quatre conditions fondamentales. En premier lieu, il faut que les Taliban et les autres factions cessent immédiatement les combats et reprennent le dialogue, dont l'objectif ultime serait l'établissement d'un gouvernement d'ouverture pluriethnique et représentatif. Pour ce faire, le Japon est disposé à accueillir une rencontre des parties afghanes qui leur permettrait d'entamer un dialogue vers la réconciliation dans un environnement neutre. Il faut ensuite que les pays concernés et notamment les pays voisins de l'Afghanistan s'abstiennent d'intervenir dans le conflit pour plutôt exercer leur influence en faveur de la cessation des hostilités. Il est d'une importance capitale de mettre un terme à l'assistance militaire et à la fourniture d'armes aux diverses factions en présence. Troisièmement et compte tenu des souffrances indicibles endurées par la population afghane, la communauté internationale doit poursuivre son aide humanitaire. Enfin, la communauté internationale devrait envoyer aux factions et au peuple afghans un message clair de sa volonté d'intensifier ses efforts en faveur de la reconstruction du pays dès que les armes se seront tues et qu'un gouvernement pluriethnique et représentatif aura été formé. L'établissement d'un tel gouvernement est en effet la condition sine qua non à la fourniture de l'aide internationale de reconstruction, a insisté le représentant.

M. RASHID ALIMOV (Tadjikistan) a rappelé que son pays est profondément préoccupé par la situation tragique qui sévit en Afghanistan, un de ses plus proches voisins. Des liens culturels, religieux et historiques lient les deux peuples, tadjike et afghan. Le conflit insensé de longue date qui déchire l'Afghanistan et qui cause des souffrances indescriptibles au peuple afghan

menace non seulement de déstabiliser l'Afghanistan, mais également tous les pays de la région. Le représentant a souligné la nécessité pour la population civile, en particulier les femmes et les enfants de voir leurs droits fondamentaux respectés. La maladie, la misère constituent des fléaux d'importance extraordinaire pour la population afghane. La déportation et la répression constituent des violations flagrantes et massives des droits de l'homme. En outre, le trafic illicite des stupéfiants et le terrorisme sont des menaces graves qui compromettent dangereusement la stabilité du pays. La responsabilité de cette situation d'impasse, dans laquelle se trouve entravée la mise en oeuvre des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et de l'Assemblée générale, incombe aux Taliban. La délégation tadjike appelle les Taliban à mettre fin à ses pratiques barbares et à ouvrir au peuple afghan la perspective de retrouver bientôt sa place au sein de la communauté internationale. Le Tadjikistan est convaincu que les Nations Unies, et en particulier le Conseil de sécurité, ne peuvent rester passifs devant cette situation tragique.

Toute politique myope des Taliban doit céder la place au respect des droits de l'homme et à l'application des résolutions du Conseil de sécurité et de l'Assemblée générale. A cet égard, le Tadjikistan est prêt à apporter son appui à tous les efforts déployés par les Nations Unies visant à mettre fin aux souffrances du peuple afghan et à convaincre les parties belligérantes à reprendre les négociations en vue d'un règlement juste et durable.

M. VOLKAN VURAL (Turquie) a rappelé les racines historiques qui lient son pays à l'Afghanistan et qui lui permettent de maintenir des contacts et de prendre des initiatives en faveur de tous les groupes afghans. Préoccupé par l'impact des combats sur la stabilité de la région, le représentant a invité tous les pays à s'abstenir de compromettre un équilibre interne déjà fragile en prolongeant le conflit. Il a manifesté son inquiétude face aux actions qu'il impute principalement aux Taliban, à savoir les violations des droits de l'homme, la pratique d'un extrémisme religieux, l'appui au terrorisme international et le trafic de drogues illicites. Le représentant a rappelé qu'en septembre 1998, son Gouvernement a pris l'initiative de nommer un coordonnateur en Afghanistan avec rang d'ambassadeur, pour établir des contacts avec les parties afghanes et les Etats concernés et contribuer ainsi à la recherche d'une solution pacifique à la question afghane. Les conclusions du coordonnateur ont montré à l'évidence la nécessité pour les parties de signer sans délai un cessez-le-feu. Ces conclusions ont aussi montré qu'une paix durable en Afghanistan réside dans la formation d'un gouvernement élargi et représentatif de toutes les couches de la société afghane. Le représentant a indiqué qu'en dépit de ses ressources limitées, la Turquie vient de lancer un programme d'aide humanitaire au profit de tous les Afghans. Le pays envisage de contribuer au Programme humanitaire des Nations Unies pour l'Afghanistan.

M. ALISHER VOHIDOV (Ouzbékistan) a estimé que la crise afghane est passée d'un conflit interne à un conflit d'ampleur régionale. Le représentant s'est déclaré, dans ce contexte, préoccupé par l'utilisation du territoire afghan pour des activités terroristes; par l'implication accrue de mercenaires dans le conflit; et par la production et le trafic de drogues illicites. Le représentant s'est également dit très préoccupé par la livraison continue d'armes aux belligérants et par l'ingérence d'autres Etats. Pour lui, la cessation de cette ingérence constitue un moteur important de la reprise d'un dialogue pacifique. Se félicitant du rôle des Nations Unies et du Groupe des 6+2 dans la recherche d'une solution à la crise afghane, le représentant a dit, à ce propos, que la position de son pays en ce qui concerne le problème afghan ne diverge en aucun point des dispositions de la Déclaration de Tachkent du 20 juillet dernier. La position de l'Ouzbékistan consiste à privilégier le règlement politique; à réaffirmer le rôle central et impartial des Nations Unies; à prôner la formation d'un gouvernement élargi, multiethnique et pleinement représentatif; à s'engager fermement en faveur de la souveraineté, de l'indépendance, de l'intégrité territoriale et de l'unité nationale de l'Afghanistan; et à appeler à la cessation des appuis militaires étrangers. La dernière escalade des actions militaires en Afghanistan montre à suffisance la nécessité d'une action coordonnée et renforcée au niveau international, a conclu le représentant après avoir rappeler la proposition de son pays de réunir, pour la deuxième fois, autour d'une table les Ministres des affaires étrangères du Groupe des 6+2 et ce, pendant le débat général de la 54ème session de l'Assemblée générale.

M. AHMED ABOUL GHEIT (Egypte) a déclaré que son pays a suivi pendant de longs mois les confrontations militaires entre les différentes factions afghanes. Ces hostilités ont aggravé sensiblement la situation en Afghanistan et, en particulier, les souffrances de la population civile. L'une des parties afghanes pratique la politique de la terre brûlée, privant ainsi la population civile des ressources essentielles à sa survie. Il importe à l'Egypte que la région d'Asie centrale connaisse une stabilité qui lui permet de jouir de ses ressources naturelles et à sa population de mener une vie normale. L'Egypte demande à la communauté internationale de faire face aux violations graves des droits de l'homme et du droit international commises par les Taliban, et d'imposer à ces derniers le respect des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et de l'Assemblée générale. Il est impératif que l'on mette fin à la fourniture d'armes et de munitions aux factions belligérantes. La communauté internationale doit exercer toute son influence pour persuader les factions afghanes de renoncer à la violence. A cet égard, le représentant a souligné la nécessité de mettre en place un gouvernement largement représentatif, qui tienne compte des intérêts de l'ensemble du peuple afghan. La récente déclaration adoptée par l'Organisation de la Conférence islamique, ainsi que toutes les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, doivent être appliquées par les parties concernées, et en particulier les Taliban.

Mme AKSOLTAN T. ATAEVA (Turkménistan) a expliqué que la question à l'ordre du jour du Conseil revêt pour son pays une importance particulière en raison de sa proximité, géographique et historique, avec l'Afghanistan. Le Turkménistan a été et reste le seul pays disposant d'une présence permanente en Afghanistan, sous la forme de deux consulats. Il entend, en effet, entretenir des relations avec les Afghans indépendamment de savoir qui dirige le pays, car il respecte le choix de la population afghane. Nous partons pour cela du principe que les relations entre deux pays ne ressortent pas des privilèges de leur gouvernement respectif mais du désir de leur population, a expliqué la représentant, avant d'indiquer qu'il importe aujourd'hui d'élaborer avec la communauté internationale un programme d'aide à long terme au pays. Un dialogue direct a commencé et les premiers signes d'une possible entente directe sont apparus, malheureusement une mauvaise évaluation et un manque de préparation, ont conduit à son abandon pour rechercher d'autres solutions et voies. Il suffit qu'un processus soit confronté à des obstacles pour qu'on l'abandonne au profit d'un autre, a-t-elle déploré.

De l'avis du Turkménistan, les Nations Unies devraient insister sur la reprise du dialogue inter-afghan direct, sans évaluation ou bannissement de l'une des parties. Un rôle important dans le cadre des efforts des Nations Unies doit être joué par tous les Etats qui ont un intérêt, direct ou non en Afghanistan, y compris les 5 membres permanents du Conseil et les pays voisins de l'Afghanistan, a précisé la représentante, avant de conclure que le plus important est de respecter le choix des afghans qui ont la maturité nécessaire pour savoir ce qu'ils font.

M. INAM UL HAQUE (Pakistan) a rappelé qu'au lendemain du départ des troupes d'occupation, présentes pendant plus d'une décennie, la population afghane n'a pas vu ses espoirs de paix et de reconstruction se réaliser et au contraire a été laissée seule face à son destin, permettant ainsi le déclenchement d'une lutte interne pour le pouvoir, qui fait toujours rage aujourd'hui. Aussi ardent soit son désir de se tenir à l'écart des événements afghans, le Pakistan n'en a pas le loisir étant donné la frontière, poreuse, de 2 500 km qu'il partage avec l'Afghanistan. Outre les mouvements des groupes nomades, qui l'hiver se réfugient au Pakistan, la fin de l'occupation soviétique a été suivie d'un flot considérable de réfugiés. "Autant de réalités que nous ne pouvons pas ignorer" a affirmé le représentant, précisant que ces données marquent la différence fondamentale entre son pays et ceux qui, à distance, ont le conseil relativement et la négation des allégations faites à leur encontre relativement faciles. La réalité de l'Afghanistan est qu'aujourd'hui les Taliban contrôlent 90% du territoire, y compris la capitale Kaboul et en vérité la communauté internationale comme le Pakistan doit reconnaître et admettre ce fait. Il n'est pas de pays au monde qui pourrait bénéficier davantage du retour à la paix et à la stabilité que le notre, a poursuivi M. Ul Haque, car la persistance du conflit a imposé un lourd fardeau à notre pays, qui avec 1,8 millions d'Afghans, accueille sur son territoire le plus fort rassemblement de réfugiés au monde.

Le Pakistan n'a jamais cessé de soutenir les efforts des Nations Unies en vue d'une solution pacifique du conflit. Il s'est aussi réjoui de la création du Groupe des 6+2, auquel il participe activement. Il a aussi lui-même été à l'origine de certaines initiatives diplomatiques sur la question, dont la plus récente est la rencontre, par deux fois, d'une délégation pakistanaise avec le Commandant Massoud, ainsi que la rencontre à Kandahar du chef suprême des Taliban. Nos efforts bilatéraux visent à compléter ceux de la communauté internationale et non à les supplanter, a précisé le représentant. Le Pakistan estime qu'une paix durable n'est réalisable que sur la base d'un consensus inter-afghan. L'histoire nous est témoin en effet que la population afghane n'a jamais accepté la domination étrangère. Le Pakistan est conscient de cette réalité et n'a par conséquent aucun désir d'interférer dans les affaires internes du pays, ce qui serait pure folie. De même, le Pakistan n'apporte aucun soutien à aucune des parties au conflit. En revanche, il sait que certains pays voisins eux le font et leur conseille de renoncer à ces activités car ils ne font que perpétuer les souffrances de la population afghane. La communauté internationale doit dialoguer avec les deux parties afghanes et les encourager à réaliser la paix par l'établissement d'un gouvernement multiethnique de représentation large. Pour promouvoir ainsi un dialogue inter-afghan, il est impératif que cessent toutes les ingérences extérieures, a affirmé le représentant. La Pakistan a, à plusieurs reprises, proposé au Conseil de sécurité d'imposer un embargo sur les armes sur l'ensemble de l'Afghanistan. Aujourd'hui encore, nous pensons que cette proposition, formulée aujourd'hui par le représentant de la Chine, mérite un examen sérieux, puisqu'il s'agit du seul moyen de limiter les combats fratricides. Un tel embargo devrait être accompagné d'un vaste programme international de reconstruction du pays et de réinsertion des réfugiés, qui nous le croyons donnerait un véritable élan aux efforts de paix en Afghanistan.

Adopter une attitude de rejet et d'ostracisme à l'égard d'une ou plusieurs afghanes ne peut qu'alimenter les flammes de la guerre, a mis en garde le représentant, ajoutant que la communauté internationale doit se garder de prendre parti dans le conflit. Les Taliban ne semblent-ils pas en droit de s'interroger sur la partialité de la communauté internationale qui continue de refuser de reconnaître leur légitimité alors qu'ils contrôlent 90% du pays, y compris sa capitale, s'est interrogé M. Ul Haque. Pour ce qui est de certaines intentions au sein du Conseil d'imposer un régime de sanctions aux Taliban, le Pakistan estime qu'une telle décision serait contre-productive, ne faisant qu'exacerber les extrémismes. Le représentant a qualifié ensuite de "malheureuse" la reprise des hostilités après la réunion des 6+2, ajoutant que son pays la déplore mais ne souhaite pas entrer dans l'argument futile de savoir qui en a été à l'origine. De manière générale, le Pakistan condamne le terrorisme, quels qu'en soient les auteurs et les formes qu'il prend. Lui même victime de ce fléau, il n'a pas de leçon à recevoir de la part de pays qui affligent illégalement la plus dure oppression sur

des Etats, a affirmé le représentant. Cependant, le Pakistan estime que la communauté internationale ne devrait pas jeter les armes en raison de ces dernières hostilités. La reprise des combats a donné l'occasion à certains de déclarer que des ressortissants pakistanais participaient aux hostilités. Cette accusation est fausse et mal intentionnée. Toutefois, il se peut que de jeunes réfugiés afghans, ou des Pakistanais de leur propre initiative, aient franchi la frontière pour participer aux combats, mais en aucun cas on ne saurait accuser l'Etat pakistanais de participer au conflit afghan, a déclaré le représentant en conclusion.

M. MOKHTAR LAMANI, représentant de l'Organisation de la Conférence islamique (OCI), a déclaré que sa délégation ressent une grande douleur face à la situation tragique que connaît le peuple afghan. Les violations des droits de l'homme, en particulier à l'égard des femmes, sont intolérables. Dans sa résolution 1126 (1999) le Conseil de sécurité avait appelé les parties concernées en Afghanistan à renoncer à tout recours à la force. L'OCI a réaffirmé à plusieurs occasions la nécessité pour toute puissance étrangère de ne pas s'ingérer dans les affaires intérieures de l'Afghanistan. L'Organisation de la Conférence islamique appuie toute mesure visant à parvenir à un règlement politique négocié de la crise en Afghanistan. A cet égard, l'OCI salue les efforts inlassables déployés par le Secrétaire général et par son Envoyé spécial, M. Lakhdar Brahimi. Le représentant a appelé les factions afghanes à se conformer à toutes les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.

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