En cours au Siège de l'ONU

SG/SM/7071

LA COMMUNAUTE INTERNATIONALE NE DOIT LAISSER PERSONNE HORS COURSE DANS LA GRANDE AVENTURE DE L'EXPLORATION ET DE L'EXPLOITATION DE L'ESPACE, DECLARE LE SECRETAIRE GENERAL

21 juillet 1999


Communiqué de Presse
SG/SM/7071
OS/1753


LA COMMUNAUTE INTERNATIONALE NE DOIT LAISSER PERSONNE HORS COURSE DANS LA GRANDE AVENTURE DE L'EXPLORATION ET DE L'EXPLOITATION DE L'ESPACE, DECLARE LE SECRETAIRE GENERAL

19990721 On trouvera ci-après le texte de la déclaration prononcée par le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies, M. Kofi Annan, à Vienne, le 19 juillet, à l'occasion de la troisième Conférence des Nations Unies sur l'exploration et les utilisations pacifiques de l'espace extra- atmosphérique (UNISPACE III).

Je suis ravi d'être parmi vous aujourd'hui. De toutes les questions importantes et complexes auxquelles s'intéressent les Nations Unies, aucune n'excite peut-être autant notre imagination que celle de l'espace. Il suffit de regarder les étoiles dans le ciel pour se sentir envahi du même sentiment d'émerveillement que celui que ressentaient les hommes et les femmes qui se sont lancés dans la conquête de l'espace.

Cela dit, l'espace n'éveille pas seulement un sentiment d'émerveillement dans notre âme. Il revêt aussi un immense intérêt pratique pour l'humanité tout entière. C'est cet intérêt pratique qui motive votre présence en ce lieu. La Conférence UNISPACE III est la dernière grande conférence des Nations Unies avant le siècle prochain. Elle est de fait le symbole parfait des progrès réalisés au cours du siècle qui s'achève et de l'oeuvre des Nations Unies.

Nous arrivons à la fin d'un siècle au cours duquel des progrès sans précédent ont été faits dans les domaines de la science et de la technique. Par bien des côtés, le plus grand de ces progrès a été la naissance des techniques spatiales qui nous a enfin permis de réaliser notre rêve de toujours et de nous aventurer au-delà des limites de l'atmosphère terrestre. L'aventure spatiale a déjà révolutionné à bien des égards la vie sur notre planète. Elle nous a fait entrer dans l'ère des satellites qui a rendu possible l'apparition du phénomène connu sous le nom de "mondialisation". Chaque fois que nous regardons des images télévisées qui nous parviennent en direct par satellite d'autres continents; chaque fois que nous transférons des capitaux en appuyant sur les touches de notre ordinateur; et chaque fois que l'Internet nous fournit une foule d'informations nouvelles, c'est grâce aux efforts des pionniers de l'espace qui nous ont donné les moyens de vaincre l'obstacle de la distance.

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Les techniques spatiales ont d'autres applications moins connues mais tout aussi importantes. Ainsi par exemple, la télédétection nous a donné une meilleure connaissance de notre environnement grâce aux images de la couche d'ozone ou des phénomènes climatiques mondiaux qu'elle nous fournit. Ces techniques ont également conduit à des progrès dans des domaines aussi divers que le suivi des catastrophes naturelles et la mise au point de systèmes de navigation.

Ces exemples de retombées des techniques spatiales — certaines évidentes, d'autres moins — sont autant d'incitations qui nous poussent à poursuivre nos recherches fondamentales dans le domaine spatial. Notre savoir collectif pourrait s'en trouver enrichi au-delà de toutes nos espérances.

En attendant, nous pouvons nous servir bien davantage des connaissances actuelles :

* Nous pouvons faire en sorte que les communautés difficiles d'accès du monde entier disposent enfin des ressources pédagogiques et compétences médicales dont elles ont besoin. Si l'on considère que plus d'un milliard de personnes sont encore illettrées dans le monde, cet objectif doit de toute évidence figurer parmi nos priorités.

* Nous pouvons avoir accès à des informations qui nous permettent de localiser et de gérer comme il se doit les ressources naturelles existantes, application particulièrement utile pour faire face aux menaces croissantes qui pèsent sur notre environnement mondial.

* Nous pouvons améliorer nos prévisions météorologiques et nous en servir pour atténuer au minimum les effets des catastrophes naturelles.

* Nous pouvons avoir recours aux expériences dans l'espace pour mettre au point des techniques agricoles novatrices qui font cruellement défaut dans les régions du monde où les gens meurent encore de faim alors même que nous sommes censés disposer des techniques nécessaires pour nourrir beaucoup plus de personnes que ne compte la population mondiale actuellement.

* Nous pouvons aussi nous servir de la télédétection par satellite pour localiser les champs de mines et même les cultures de plantes servant à la fabrication de drogues illicites, comme le faisait remarquer avant moi le Président de l'Autriche, M. Klestl. De fait, notre propre Programme des Nations Unies pour le contrôle international des drogues (PNUCID), qui a son siège ici même à Vienne, a récemment signé un accord important dans ce sens avec l'Agence spatiale européenne.

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En un mot, le potentiel dans ce domaine est énorme. Les dangers, aussi, nombreux. Malheureusement, les aspects positifs de la mondialisation sont loin de profiter également à tous les êtres humains. Ainsi, par exemple, on estime à 1 000 milliards de dollars le chiffre d'affaires annuel de l'industrie des télécommunications et pourtant un tiers de la population mondiale ne s'est jamais servi d'un téléphone et 5 % seulement ont accès à un ordinateur. Avec les progrès de la technique, le fossé qui sépare ceux qui sont reliés au monde extérieur et ceux qui ne le sont pas s'est en fait encore agrandi.

Par ailleurs, il peut être très déconcertant de vivre dans une société qui s'ouvre tout d'un coup au monde moderne grâce à la technologie. Les pays et leurs populations doivent conserver leur culture et leur identité propres pour résister à la mondialisation. Cela dit, nous devons tous faire en sorte que le potentiel que représentent les technologies nouvelles tant dans l'espace que sur Terre, serve à promouvoir la tolérance, la confiance et le partage des valeurs et non pas à semer la haine ou la zizanie.

Nous devons avant tout nous prémunir contre une mauvaise utilisation de l'espace. Nous nous sommes rendus compte très tôt qu'il fallait créer un cadre juridique pour empêcher l'espace de devenir une nouvelle arène d'affrontement militaire. La communauté internationale s'est mobilisée de concert, dans le cadre des Nations Unies, pour qu'une utilisation pacifique soit faite de l'espace. Il n'en reste pas moins encore beaucoup à accomplir. Nous devons faire en sorte que la guerre et les autres fléaux qui ont si durement frappé notre siècle épargne le siècle prochain où les possibilités de la technique seront encore plus effrayantes. Nous ne devons pas considérer l'espace et son immensité comme un nouveau champ de bataille pour nos conflits terrestres.

Au contraire, nous devons nous assurer que chacun d'entre nous dans chaque pays jouit des fruits du progrès technique. Il s'agit là d'un aspect important de l'évolution de la situation mondiale et, partant, d'un domaine auquel s'intéressent directement les Nations Unies.

Nous devons trouver moyen de réduire le coût des techniques utilisées dans le domaine spatial et donner aux pays en développement la possibilité d'acquérir ces dernières. Nous devons également convaincre nos dirigeants d'admettre l'intérêt pratique que peuvent avoir les techniques spatiales pour le développement et d'en tirer parti.

Pour atteindre ces objectifs, il est essentiel de former des partenariats entre les nations. Mais aussi avec l'industrie, les entreprises commerciales et les organisations non gouvernementales. Je me félicite de voir que ces acteurs de la société civile sont aujourd'hui représentés ici à cette conférence sur un pied d'égalité.

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Allons plus loin encore : parlons donc de partenariats avec les générations futures. Le Forum Génération Espace qui se tient parallèlement à cette conférence est l'occasion rêvée d'associer les jeunes au débat sur l'espace. Les jeunes sont peut-être ceux qui sont le plus attirés par les promesses de la conquête spatiale et enclins de ce fait à espérer, rêver et oeuvrer ensemble. C'est dans les jeunes que nous devons placer nos espoirs de progrès scientifiques majeurs. Je suis sûr que nous comptons parmi nous aujourd'hui des dirigeants futurs de notre planète. Les enseignements qu'ils tireront de cette conférence — notamment grâce aux échanges d'informations et d'idées qui se produiront à l'occasion du séminaire et des ateliers du Forum technique de la Conférence — seront plus tard d'une valeur inestimable pour eux et, par leur intermédiaire, pour les générations à naître.

L'immensité sans fin du cosmos ne connaît ni frontière ni juridiction nationales. En découvrant l'espace, nous avons appris à voir la Terre pour ce qu'elle est par rapport aux galaxies qui l'entourent : un point minuscule, un havre de vie perdu dans l'espace sidéral sans fin. Soudain conscients de l'immensité de l'univers, nous ressentons souvent notre propre insignifiance. Ce que nous devrions ressentir avec encore plus de force c'est l'absurdité des conflits qui divisent notre petite planète.

L'espace est une ressource que nous pouvons tous mettre en commun. Nous devrons oeuvrer ensemble pour découvrir et exploiter ses secrets. Nous devons nous assurer que personne ne reste hors course dans la grande aventure de l'exploration et de l'exploitation de l'espace dans laquelle nous continuons de progresser. J'ai cru comprendre que cette conférence devait être l'occasion d'adopter un plan d'action prévoyant des moyens réalistes de tirer parti des techniques scientifiques et techniques appliquées à l'espace dont nous disposons. La Déclaration de Vienne qui sera adoptée ici ne doit pas être simplement un alignement de mots vide de sens mais générer une force créatrice qui changera la vie des générations futures.

Demain, dans le cadre de vos débats, vous célébrerez le trentième anniversaire des premiers pas de l'homme sur la lune pour la première fois. Que cette célébration soit pour vous une source d'inspiration au moment où vous vous apprêtez à entamer vos débats. En effet, si je peux me permettre de reprendre les mots de Neil Armstrong, les petits pas que vous ferez ici à Vienne pourraient bien être des grands pas pour l'humanité. Je vous souhaite à tous "bon courage".

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