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SG/SM/7056

LA SESSION EXTRAORDINAIRE OFFRE UNE CHANCE UNIQUE DE RELEVER L'UN DES PLUS GRANDS DEFIS DU SIECLE A VENIR, OPTIMISER L'INTERACTION ENTRE DEMOGRAPHIE ET DEVELOPPEMENT

30 juin 1999


Communiqué de Presse
SG/SM/7056
GA/9572


LA SESSION EXTRAORDINAIRE OFFRE UNE CHANCE UNIQUE DE RELEVER L'UN DES PLUS GRANDS DEFIS DU SIECLE A VENIR, OPTIMISER L'INTERACTION ENTRE DEMOGRAPHIE ET DEVELOPPEMENT

19990630 On trouvera ci-après la déclaration prononcée aujourd'hui par le Secrétaire général, M. Kofi Annan, à la Session extraordinaire de l'Assemblée générale consacrée au suivi de la Conférence internationale sur la population et le développement :

La Conférence du Caire, dont nous célébrons aujourd'hui le cinquième anniversaire, n'était pas un événement isolé. Elle faisait partie intégrante de la série de grandes conférences organisées par les Nations Unies tout au long des années 90.

Je suis sûr que je n'ai pas besoin de vous rappeler les thèmes de ces conférences : l’environnement, les droits de l'homme, la population, le développement social, les femmes et les établissements humains.

Il s'agissait là de questions distinctes, mais qui avaient toutes des liens les unes avec les autres et un objectif central commun : le développement, celui des nations et celui des populations.

Toutes ces conférences visaient à parvenir à l'objectif fixé grâce à des efforts concertés mais libres. Des efforts collectifs à l'échelle de la planète, des efforts menés par des États souverains et une société civile oeuvrant de concert, des efforts guidés par une approche commune fondée sur des valeurs et principes universels que tous pouvaient adopter.

Le Caire n'a donc pas été seulement une conférence sur la population, mais plutôt une conférence sur la population et le développement s'inscrivant dans un processus entamé il y a 25 ans, voire plus, et qui nous a permis de comprendre que les perspectives de développement socio-économique d'une société, quelle qu'elle soit, sont intimement liés à sa démographie. Tous les États savent maintenant que s'ils veulent assurer à leurs citoyens l’accès à des services de santé appropriés et à l’éducation, ils doivent incorporer des politiques démographiques dans leurs stratégies de développement.

De nombreux travaux de recherche ont prouvé que la croissance économique et le développement ont des effets non négligeables sur la fécondité, la taille des familles, la pyramide des âges et la structure des mouvements migratoires. Par ailleurs, il n'est guère besoin d'entreprendre des recherches pour savoir que les conditions de vie au niveau local — famille et village — se reflètent dans le niveau de vie national.

En d'autres termes, il existe une interaction constante entre démographie et développement. Cela semble absolument évident aujourd'hui, mais, jusqu'au Caire, le monde ne l’avait pas tout à fait compris.

Depuis Le Caire, le monde a compris, tout comme il a compris que la population mondiale doit être stabilisée. Il y a une limite aux pressions que notre environnement peut supporter. Les modes de consommation constituent une forme de pression, mais la taille de la population mondiale en est une autre et sa répartition une troisième.

C'est là la dimension mondiale du problème. Mais il y a aussi une dimension individuelle. Chaque être humain aspire à la santé, à la sécurité et à la dignité, qui sont l'essence même des droits de l'homme, et nous comprenons désormais que la santé en matière de sexualité et de reproduction fait partie intégrante de ces droits.

Ne reconnaissons-nous pas tous comme universelle la souffrance de la personne qui perd sa femme ou sa mère en couches parce qu'elle n'a pu bénéficier de soins adéquats? Celle de l'adolescente dont l'horizon se bouche parce qu'elle tombe enceinte et abandonne ses études? De la femme qui doit continuer à avoir des enfants, bien qu'elle sache que sa santé est en danger? De la réfugiée qui a été violée, mais a trop peur, ou trop honte, pour demander de l'aide?

Une meilleure compréhension de ces questions a permis de changer la vie quotidienne de millions de personnes. Leurs choix se sont élargis et elles sont à même de prendre des décisions essentielles influant sur leur propre existence.

Laissez-moi vous donner quelques exemples de la façon dont les choses ont évolué depuis la première conférence sur la population, il y a 25 ans :

— À l'époque, les femmes des pays en développement avaient en moyenne cinq enfants. Aujourd'hui, elles en ont moins de trois;

— À l'époque, 30 % des couples avaient recours à la planification familiale. Aujourd'hui, 60 % l'utilisent, et la vaste majorité des gouvernements la soutiennent;

( suivre)

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— À l'époque, sur 1 000 enfants nés vivants, 140 mouraient avant de sortir de l'enfance. Maintenant, ce chiffre est tombé à 80;

— À l'époque, l'espérance de vie moyenne était de 59 ans. Elle est aujourd'hui passée à 66;

— Enfin, dans de nombreux pays, moins de femmes meurent en couches, même s'il est difficile d'obtenir des statistiques fiables sur la question et s'il s'agit très certainement d'un domaine où beaucoup reste à faire.

Au niveau mondial, le taux d'accroissement de la population a diminué de façon spectaculaire, tombant de 2 à 1,3 % par an. Dans 25 ans, il devrait être descendu à 0,8 %.

Chaque année, 78 millions d'individus viennent encore grossir la population de la planète, mais ce chiffre devrait également diminuer lentement, dans un premier temps, puis plus rapidement au cours de la deuxième décennie du XXIe siècle.

Voilà des changements positifs auxquels toutes les nations peuvent se targuer d’avoir contribué. L'action des États s'est inspirée de principes internationalement reconnus et de valeurs et priorités nationales. La plupart des pays sont parvenus à une croissance démographique moins rapide et plus équilibrée, non pas en ayant recours à des moyens de coercition mais en renforçant les libertés individuelles.

Nous pouvons tous nous féliciter d'avoir atteint cet objectif grâce au consensus international et à la coopération entre les pays sous les auspices de l'Organisation des Nations Unies. Il nous faut également reconnaître que le mérite n'en revient pas aux seuls États. Les ONG et d’autres entités de la société civile ont apporté une contribution importante. Elles ont propagé des idées, se sont employées à infléchir les politiques et ont mobilisé les populations en faveur des initiatives nationales.

Avons-nous donc appliqué toutes les recommandations de la Conférence du Caire? Non. Il reste encore beaucoup à faire :

— Dans de trop nombreux pays, les filles n'ont pas les mêmes possibilités que les garçons en matière d'éducation;

— Trop de femmes ne peuvent toujours pas choisir si et quand elles veulent être enceintes.

- Trop de femmes sont victimes de violences sexuelles, en particulier dans les situations de conflit.

( suivre)

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- Trop d'entre elles avortent dans de mauvaises conditions. Trop d’entre elles sont encore victimes de mutilations génitales et d’autres pratiques traditionnelles préjudiciables;

— Trop d'hommes continuent d'ignorer leurs responsabilités vis-à-vis de leur famille, notamment en matière de reproduction, ou y restent indifférents;

— Trop de personnes sont encore exposées aux maladies sexuellement transmissibles;

— Bien trop de pays sont ravagés par le sida;

— Les habitants des pays en développement meurent encore trop jeunes; il en va de même dans les anciens pays communistes, où l'espérance de vie a parfois même diminué;

— Etc.

L'enjeu pourrait difficilement être plus important. Si seulement nous pouvions mettre en oeuvre intégralement le Programme du Caire, nous pourrions modifier radicalement la situation en matière de droits de l'homme, faire naître un espoir de prospérité et utiliser sans déprédation les ressources naturelles disponibles.

Nous devons absolument appliquer ce programme. Mais pour cela, nous avons besoin de fonds.

Au Caire, chacun était convenu de la nécessité de mobiliser de nouvelles ressources financières, au sein des pays en développement, mais également auprès de la communauté internationale.

Depuis lors, les pays en développement ont fait la preuve de leur détermination. Toutefois, ils sont cruellement limités dans ce qu’ils peuvent faire sans aide extérieure.

Trop souvent, il faut le reconnaître, ils sont également limités par les effets de conflits, par des dépenses militaires excessives ou par le fait que les autorités ne jouent pas leur rôle.

Mais trop souvent aussi, ils doivent donner la priorité au service de la dette ou à des mesures d'austérité budgétaire draconiennes imposées au nom de "l'ajustement structurel".

Dans tous les cas, ce sont les populations qui souffrent. Elles sont en droit d’attendre plus de compassion, et plus d’aide, de la part des pays plus favorisés.

( suivre)

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Je sais qu'il est plus facile de parler que d'agir. Même dans les pays riches, il y a beaucoup de pauvres, et les gouvernements doivent faire face aux pressions concurrentes qui s'exercent sur les ressources dont ils disposent. Mais que pourrait-il y avoir de plus important que d’aider la population mondiale à contrôler sa croissance en permettant à tous les habitants de la planète de prospérer et en leur offrant des choix plus vastes?

Nous pouvons y arriver. Grâce à la Conférence du Caire, nous savons comment y arriver. Maintenant, nous devons réaffirmer les engagements que nous avons pris.

Au cours des prochains jours, des propositions concrètes vous seront présentées. Elles sont le fruit de cinq années d'expérience et se fondent sur les principes convenus dans le Programme du Caire.

Cette session extraordinaire nous donne une chance unique de relever ce qui est sans aucun doute l'un des grands défis - et peut-être même le principal défi - du siècle à venir. Vous êtes ici réunis au sein de l’instance idéale: l'Organisation des Nations Unies, seul forum à vocation véritablement mondiale. Le Secrétariat de l’ONU et le FNUAP sont là pour vous aider.

Je vous souhaite plein succès dans vos délibérations. Je nous souhaite à tous plein succès dans la mise en oeuvre du Programme du Caire au cours des cinq prochaines années.

Je vous remercie.

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