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SG/SM/7004

LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL MET L'ACCENT SUR LE PARTENARIAT ENTRE LE MONDE DES AFFAIRES ET L'ORGANISATION DES NATIONS UNIES

21 juin 1999


Communiqué de Presse
SG/SM/7004


LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL MET L'ACCENT SUR LE PARTENARIAT ENTRE LE MONDE DES AFFAIRES ET L'ORGANISATION DES NATIONS UNIES

19990621 On trouvera ci-après le texte de l'allocution que le Secrétaire général, Kofi Annan, a prononcée devant le Club des dirigeants d'entreprise de la Svenska Dagbladet à Stockholm (Suède), le 25 mai :

Je suis heureux à plus d'un titre de me trouver aujourd'hui parmi vous. L'Organisation des Nations Unies a dans la Suède une fidèle partenaire et une alliée de longue date. Sa relation avec le monde des affaires est, en revanche, nouvelle. Aujourd'hui, j'ai le privilège de rencontrer ces deux partenaires en un même lieu. Et comme il n'est point besoin de s'étendre sur la relation déjà ancienne, permettez-moi de vous parler du nouveau partenariat.

L'Organisation des Nations Unies a besoin du monde des affaires, et ce comme défenseur de la coopération internationale et promoteur des investissements, des échanges et de l'ouverture des marchés, comme agent capable de l'initiative et du dynamisme voulus pour promouvoir le développement grâce à des investissements dans les technologies et au transfert de ces dernières vers les pays en développement et, enfin, comme partenaire du dialogue engagé sur les questions économiques et sociales et sur les questions qui s'y rattachent.

Mais si le monde des affaires est un partenaire indispensable pour l'Organisation des Nations Unies, celle-ci, à son tour, a beaucoup à lui apporter, et de plusieurs manières : en offrant une "infrastructure souple" propre à faciliter les transactions économiques; en préparant le terrain aux investissements dans les pays en développement, notamment dans des secteurs tels que la bonne gouvernance, l'éducation et la santé; en luttant contre la misère et en s'attaquant à ce que nous appelons les "problèmes sans frontières" — qu'il s'agisse de la dégradation de l'environnement, du sida ou de la criminalité organisée; et en oeuvrant en faveur de la paix et de la primauté du droit.

Le monde des affaires et l'Organisation ont de plus en plus souvent tendance à conjuguer leurs efforts. Le premier fait entendre sa voix dans les débats que l'Organisation consacre à l'économie ou au développement, tandis que le programme d'action de l'Organisation bénéficie du soutien du monde des

affaires lorsque les principaux intérêts des deux entités convergent. C'est ainsi que des compagnies d'assurances collaborent avec le Programme des Nations Unies pour l'environnement en vue de réduire les risques écologiques.

Dans les pays en développement, de nombreuses formes nouvelles de coopération concrète se font actuellement jour. Grâce aux nouvelles technologies que les entreprises mettent à la disposition de ces pays, les secours alimentaires d'urgence sont acheminés plus efficacement jusqu'à leurs destinataires. Certaines entreprises collaborent avec la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED) en vue de promouvoir les investissements en Afrique. Des philanthropes tels que Ted Turner et le Rotary Club donnent des fonds pour l'alimentation des enfants dans le besoin et l'éradication des maladies.

Afin de vous aider à vous retrouver dans l'Organisation des Nations Unies et pour faciliter la recherche de projets de partenariat viables, nous avons créé un nouveau site Web — www.un.org/partners — qui, en un guichet unique, propose un service de relations avec les entreprises. Les programmes des Nations Unies, les institutions spécialisées, les institutions financières internationales et l'Organisation mondiale du commerce y décrivent l'intérêt que revêt leur action pour le monde des affaires et indiquent quelles pourraient être les modalités d'une collaboration entre eux et les entreprises.

Mais nous pouvons et devons faire davantage. L'interdépendance croissante des peuples et des nations redéfinit nos perspectives. Plus que jamais, la richesse et la pauvreté divisent notre monde. Et ni les outils dont nous disposons pour affronter les problèmes mondiaux ni notre volonté de concrétiser le partage des responsabilités ne sont à la hauteur de la situation.

Manifestes dans bien des domaines, ce décalage et les risques qu'il comporte sont encore plus visibles sur les marchés mondiaux, où la capacité d'adaptation des gouvernements et des sociétés est dépassée par les événements. La crise qui a récemment secoué le monde nous a montré à quel point il nous faut conjuguer nos efforts pour réduire les risques. Ce n'est qu'à cette condition que nous pourrons éviter de prendre un retard coûteux, dont les inconvénients tendent à nuire davantage à ceux qui sont le moins aptes à y faire face.

À l'instar des marchés nationaux, les marchés mondiaux doivent être réglementés. Bien mieux, ils doivent s'insérer dans un système commun de valeurs et de responsabilités assumées.

C'est sur ces valeurs que se fondent les marchés, car les lois ne peuvent ignorer l'attente et les aspirations de la société. Ce raisonnement nous est familier à l'échelon national; nous savons en effet que les économies les plus prospères sont celles qui sont fondées sur un régime de droit en

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phase avec la volonté des individus. Il nous faut toutefois arriver à appliquer ces enseignements aux marchés mondiaux.

Le partage des responsabilités est tout aussi essentiel. Les marchés répondent à une demande et non à des besoins. Ils ne peuvent d'eux-mêmes résoudre tous les problèmes. C'est aux pouvoirs publics qu'il incombe de créer l'environnement qui convient et de s'attaquer résolument aux problèmes qui échappement à l'influence des marchés. Mais les autres protagonistes, et en particulier les milieux d'affaires internationaux, ont un rôle civique à jouter, car plus leur emprise et leur rayonnement se renforcent plus leur responsabilité se trouve engagée. Il nous faut trouver de nouveaux moyens de les mobiliser à nos côtés.

C'est dans cet esprit que j'ai proposé un "pacte mondial" au Forum économique mondial de Davos, en janvier dernier. J'ai exhorté les dirigeants d'entreprise à adopter les principes de portée universelle qui sont au coeur des droits de l'homme, des normes de travail de base et de l'environnement humain. Le respect de ces principes donnerait incontestablement un visage humain au marché mondial.

Ces principes émanent de la Déclaration universelle des droits de l'homme, du Sommet mondial de Copenhague et du Sommet planète Terre de Rio. Adoptés par la communauté internationale, ils constituent les points d'appui de toute action conçue pour répondre aux aspirations des peuples.

Du seul point de vue de leur intérêt propre, les entreprises qui se laissent guider par les principes en question se trouvent mieux armées pour affronter de manière constructive les pressions exercées par les différents groupes d'intérêt. Mais elles y ont un avantage plus grand encore. Ce n'est qu'à la condition de respecter ces principes qu'elles pourront préserver leurs marchés et élaborer des règles nouvelles dans des domaines tels que les investissements. Je suis convaincu qu'en procédant de la sorte elles feront preuve non seulement d'un sens aigu des affaires mais aussi, tout simplement, de bons sens.

Vous êtes les pionniers de la mondialisation, et c'est vous qui en réglez le rythme. De plus en plus, votre action et votre esprit d'initiative façonnent la vie des peuples partout dans le monde. En joignant vos efforts aux nôtres vous pourriez jouer un rôle considérable, et ce en agissant sur trois plans différents :

Premièrement, vous pouvez militer pour une Organisation des Nations Unies forte et montrer que l'action qu'elle mène en faveur du développement, des droits de l'homme, de l'environnement et des questions sociales, loin d'entraver les échanges commerciaux, les facilite. Prôner le renforcement de l'autorité et des moyens de l'Organisation — notamment aux fins des initiatives qu'elle prend pour créer de meilleures conditions d'emploi, lutter contre les problèmes écologiques à l'échelle mondiale et

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défendre les droits de l'homme — n'est pas seulement la bonne attitude à adopter, c'est également la manière la plus rationnelle de se garder un accès aux marchés et d'assurer une meilleure répartition des avantages liés à l'interdépendance économique.

Deuxièmement, vous pouvez jouer un rôle très important dans votre propre sphère d'influence. Vous pouvez adopter les principes évoqués plus haut et y donner une suite concrète en les inscrivant dans votre projet d'entreprise et dans vos pratiques de gestion. Une telle démarche contribuerait non seulement à mieux faire prendre conscience des valeurs universelles et à donner ainsi aux marchés une assise plus stable, mais aussi à améliorer sensiblement la vie des individus que vous côtoyez dans votre travail ou dans les milieux où vous exercez vos activités. Vous découvrirez aussi à quel point ces principes et valeurs créent un sentiment d'union et le sens d'une communauté d'intérêts chez un personnel dont les membres peuvent avoir des origines culturelles et linguistiques différentes.

Troisièmement, vous pourrez bientôt examiner conjointement avec l'Organisation des Nations Unies la possibilité de traduire ces principes en une politique d'entreprise. L'Organisation internationale du Travail, le Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme et le Programme des Nations Unies pour l'environnement collaborent actuellement sous l'égide de mon Cabinet. Leur objectif premier est de promouvoir une citoyenneté d'entreprise à l'échelle mondiale et de favoriser la concrétisation de ces mêmes principes dans une véritable politique d'entreprise.

Le Pacte mondial n'est pas un code de conduite. Il ne représente pas non plus une tentative déguisée de relever certaines normes minimales, ou un instrument au service de groupes d'intérêt particuliers. Il traduit une volonté d'aider les marchés à jouer le rôle dans lequel ils excellent tout en contribuant à l'édification d'un monde plus humain.

Au cours de ces dernières années, nous avons assisté à l'apparition d'un phénomène entièrement nouveau qui est l'une des conséquences les plus heureuses de la mondialisation, à savoir l'éclosion d'un sentiment de responsabilité et de citoyenneté mondiales dans tous les secteurs de la société civile. Animés par des préoccupations communes, unis par les liens que favorise le développement des communications et soutenus par l'opinion publique internationale, particuliers et groupements ont donné naissance à un pouvoir populaire à l'échelle mondiale. Ils ont été les promoteurs du traité d'interdiction des mines antipersonnel, il y a deux ans, et du Statut portant création de la Cour pénale internationale, l'année dernière.

Le monde des affaires n'échappe pas à la règle. De plus en plus, les dirigeants d'entreprise se rendent compte que leurs actions engagent leur responsabilité, et aussi leurs intérêts, par le retentissement qu'elles ont non seulement sur leurs actionnaires mais aussi sur toute la vie de la planète.

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J'espère que d'autres parmi vous suivront le mouvement. Votre secteur dispose d'un important fonds de connaissances et d'expérience. Vous comptez dans vos rangs un nombre considérable de personnes talentueuses et clairvoyantes. Et de nombreuses entreprises ont lancé des projets utiles et novateurs dans des pays qui avaient besoin d'aide.

Ici, en Suède, où plusieurs entreprises sont plus anciennes que la plupart des pays, où l'on compte davantage de multinationales par habitant que dans la plupart d'entre eux et où les normes du travail sont plus élevées que pratiquement partout ailleurs dans le monde, le secteur privé est, de toute évidence, appelé à jouer un rôle moteur. J'espère donc que nous verrons de plus en plus de personnes riches en talent comme vous travailler en partenariat avec l'Organisation des Nations Unies. Nous aurons besoin de tout votre soutien pour faire du Pacte une réalité tangible. Je me tiens à votre disposition pour répondre à vos questions, en espérant que vous chercherez à contester les réponses que je vous proposerai.

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