UN SCHEMA DE SOCIETE PATRIARCAL, UNE TRES GRANDE PAUVRETE ET UN MANQUE DE FERMETE DES AUTORITES FONT OBSTACLE A LA PROMOTION DE LA FEMME AU NEPAL
Communiqué de Presse
FEM/1083
UN SCHEMA DE SOCIETE PATRIARCAL, UNE TRES GRANDE PAUVRETE ET UN MANQUE DE FERMETE DES AUTORITES FONT OBSTACLE A LA PROMOTION DE LA FEMME AU NEPAL
19990615 Les expertes insistent sur l'importance d'assurer le plus rapidement possible l'égalité de jure entre les hommes et les femmes"A l'aube du XXIe siècle, les femmes népalaises sont toujours sujettes au manque d'éducation, à des mesures juridiques discriminatoires, et mènent une existence précaire en raison du poids des traditions au Népal", a reconnu ce matin M. Tirtha Man Shakya, Secrétaire général du Ministère du Droit et de la Justice, lors de la présentation du rapport initial de son pays devant le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes. L'égalité des droits de tous les citoyens, hommes et femmes est un principe de base de la Constitution népalaise de 1990. Toutefois, le problème croissant de la pauvreté, qui touche la moitié de la population, est un obstacle majeur à l'amélioration de la condition des femmes qui n'ont pas ou très peu accès à l'emploi, l'éducation, la propriété, la vie politique ou aux postes de responsabilité. Le taux d'analphabétisme des femmes népalaises atteint 56%. Le Népal est aussi l'un des rares pays dans le monde où l'espérance de vie des femmes est inférieure à celle des hommes (53,4 ans contre 55,9 ans).
Pour faire face à ces défis, M. Tirtha Man Shakya a indiqué que depuis 1997, l'équité entre hommes et femmes fait l'objet d'un Plan national, englobant douze secteurs, parmi lesquels l'éducation, la santé, la violence, les conflits armés. Les autorités népalaises ont dans ce cadre l'intention de lancer une série de programmes visant notamment à améliorer l'accès des femmes à l'éducation via des bourses d'études ou une aide leur permettant de préparer les concours de la fonction publique. D'autres mesures sont prévues en faveur des femmes âgées ou encore pour diminuer les risques associés aux maternités. Les programmes de planification familiale seront élargis afin de faciliter l'accès à la contraception. Le représentant de l'Etat partie a aussi évoqué la création de centres de réhabilitation pour les femmes et les fillettes particulièrement vulnérables à la traite, afin de leur permettre
d'apprendre un métier et de se réinsérer dans la société. Les femmes sont en outre encouragées à participer à la vie politique, notamment suite à une loi de décentralisation, dans les 3900 comités de développement villageois du pays. Le représentant a rappelé que le Premier Ministre népalais a promis que le prochain Cabinet comptera pour la première fois un certain nombre de femmes ministres.
Les expertes ont félicité l'Etat partie d'avoir ratifié la Convention sans réserve et des efforts qu'il déploie pour renforcer la démocratie. Toutefois, elles ont jugé que la préférence accordée au sexe masculin est encore profondément ancrée au Népal, comme en témoigne le fait qu'aucune femme ne participe au Gouvernement actuel et que le rapport soit présenté ce matin par un homme. Les expertes ont souligné le fort décalage existant entre, d'une part, les principes de la Constitution et le discours du Gouvernement et, d'autre part, le contenu des textes de lois. Il semble que l'obstacle majeur à la promotion des femmes soit le manque de volonté des autorités de lutter contre les pratiques d'une société essentiellement patriarcale. Pour certaines expertes il est urgent de réviser un certain nombre de lois, parmi lesquelles celle sur la nationalité, sur la propriété et sur l'héritage. En effet, si l'égalité de jure ne suffit pas, elle demeure le premier pas indispensable vers la promotion des droits des femmes. Les expertes ont demandé aux autorités de définir des objectifs clairs et de fournir des dates-butoir à la mise en oeuvre des mesures antidiscriminatoires.
Une experte s'est réjouie de voir la peine de mort abolie au Népal, elle a relevé cependant une certaine ironie dans le fait que l'avortement soit lui toujours criminalisé, compte tenu du fait que de nombreuses femmes perdent chaque jour la vie des suites d'un avortement pratiqué dans de mauvaises conditions sanitaires, ce qui conduit le pays à avoir le taux de mortalité maternelle le plus élevé de l'Asie du Sud-Est. Les expertes se sont aussi dites très préoccupées par l'ampleur du trafic dont les femmes, les jeunes filles et les enfants sont victimes. Evoquant également le problème de la violence, notamment domestique, plusieurs expertes se sont étonnées de l'absence de mesures visant à mettre fin à des pratiques qui, aux dires des ONG, sont très répandues.
Cet après-midi à partir de 15 heures, le Comité poursuivra l'examen du rapport initial du Népal.
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EXAMEN DU RAPPORT INITIAL DU NEPAL
Rapport (CEDAW/C/NPL/1)
La diversité topographique du pays se traduit par une grande variété culturelle et que l'on compte environ 20 groupes ethniques majeurs, parlant quelque 35 langues différentes. Toutefois le népalais, langue officielle, est parlé par la majorité de la population.
Afin de préparer le présent rapport, un comité constitué de neuf membres représentants du secrétariat de la Commission nationale de planification, du Ministère de la justice et de plusieurs organisations non gouvernementales a été formé sous la présidence du Secrétaire du Ministre de la justice. Au Népal, une fois ratifiés, les traités multilatéraux relatifs aux droits de l'homme sont appliqués au niveau national comme au niveau international. Bien que la Constitution reconnaisse l'égalité des droits entre les sexes, ce principe n'a pas encore fait l'objet d'une application intégrale.
Parmi les principales institutions gouvernementales chargées de la mise en oeuvre des activités liées aux femmes au Népal, on peut relever le Ministère de la femme et de la protection sociale, créé en septembre 1995, qui fait office de plaque tournante de toutes les activités concernant les femmes au Népal; le Conseil national pour le développement en faveur des femmes et des enfants, créé également en 1995; et les ministères comportant des services, des sections ou des départements chargés des questions liées aux femmes et au développement. Toute une série de dispositions constitutionnelles et juridiques interdisent toute discrimination de nature ou de forme, ou toute manifestation à l'encontre des femmes. Toutefois la Constitution et les lois comportent certaines dispositions discriminatoires du point de vue des droits et de la promotion des femmes. Ainsi, la loi sur les terres, datant de 1964, empêche les filles d'hériter des droits d'occupation détenus par leur père ou leur mère; la partie de la loi générale (Muluki Ain) relative au partage empêche les filles de bénéficier du partage des biens qui appartiennent à leurs ascendants, à moins qu'elles ne soient demeurées célibataires et qu'elles aient atteint l'âge de 35 ans. Les femmes sont par ailleurs tenues d'obtenir l'autorisation de leur père ou de leur fils adulte avant de disposer de leurs biens immeubles. La pauvreté, les coutumes ancestrales (mariage des enfants, polygamie, prostitution de caste, etc...) et les valeurs sociales traditionnelles contribuent par ailleurs aux inégalités et à la discrimination entre hommes et femmes.
Pour lutter contre la sous-évaluation générale des femmes et de leur travail, et le manque d'attention porté à leur éducation et leur formation, les autorités népalaises ont prévu quelques dispositions spécifiques. Ainsi tout parti ou organisation politique souhaitant obtenir sa reconnaissance par la Commission électorale est tenu de présenter un nombre de candidatures féminines devant représenter au moins 5% du nombre total de candidats.
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En outre, trois sièges au moins sont réservés aux femmes à l'Assemblée nationale, qui en compte 60 au total. L'emploi d'au moins une enseignante est exigé dans chaque école primaire et le Gouvernement prend en charge la gratuité des manuels scolaires pour les filles jusqu'à la fin de l'école primaire. Une autre disposition offre dans chaque district des récompenses en espèces à l'école qui réalise le taux de scolarisation des filles le plus élevé.
Au Népal, le trafic d'êtres humains, l'esclavage, le servage, le travail forcé, la prostitution et le viol, sous quelque forme que ce soit, sont interdits et punis par les lois. Toutefois, des jeunes filles et des femmes, en particulier originaires des districts pauvres, font l'objet d'un trafic vers l'Inde. Une loi de 1986 sur la traite des êtres humains prescrit des peines strictes pour les personnes impliquées dans un aspect quelconque de la traite des êtres humains en rapport avec la prostitution. Le problème est que la loi semble peu appliquée, puisque 345 cas seulement ont été enregistrés en 2 ans. Le Gouvernement n'a pas d'autre programme pour endiguer ce problème. En association avec les ONG et les médias, il s'efforce cependant de sensibiliser le public par le biais de publications, de séminaires et de programmes d'action. Les institutions des Nations Unies préparent actuellement une campagne nationale visant à sensibiliser davantage à cette question.
La Constitution et les lois népalaises donnent aux femmes des droits politiques identiques à ceux des hommes. Toutefois, les femmes népalaises ont été dans l'impossibilité de participer pleinement à ce type d'activités, en partie à cause de leur retard par rapport aux hommes en matière de niveau d'études. D'après une ordonnance de 1997 concernant les instances locales et la loi sur les élections, le taux de participation des femmes aux élections a été fixé à 20%. Les lois confèrent aux femmes l'égalité des droits avec les hommes en matière d'acquisition, de changement ou de conservation de la nationalité. Néanmoins, il faut la citoyenneté népalaise d'un père, d'un frère ou d'un mari du demandeur pour conférer la citoyenneté à un fils, une fille, un frère ou une épouse.
En matière d'éducation, le Népal a mis en oeuvre divers moyens pour permettre aux femmes d'avoir des droits identiques à ceux des hommes. Ainsi, le taux d'alphabétisation a atteint 25% en 1991, contre 3,9% en 1971. Malgré tout, le taux de scolarisation des femmes reste très faible (39% au niveau primaire et 31% au niveau secondaire). Actuellement les initiatives en matière d'éducation prises par le Gouvernement visent à élever le niveau d'instruction des femmes, en octroyant des bourses d'étude aux jeunes filles dans les régions isolées, en augmentant le nombre total de postes offerts aux enseignantes ou encore en renforçant le niveau de qualification des enseignants. Dans certaines zones rurales, des centres de puériculture ont été créés pour libérer les fillettes plus âgées de la garde des enfants et pour leur donner ainsi la possibilité de fréquenter l'école.
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Sur le plan de l'emploi, les femmes constituent 46% de la population active totale et près de 90% d'entre elles travaillent dans le secteur de l'agriculture. Lorsqu'elles sont employées dans le secteur industriel, les femmes sont confinées aux activités peu qualifiées. Le pourcentage des femmes qui occupent des postes de décision est très faible. Le Ministre du travail dirige actuellement des programmes d'acquisition des compétences à l'intention des femmes d'une durée de neuf mois, pour les inciter à exercer une activité professionnelle.
Au Népal, les femmes ne subissent aucune discrimination en matière de soins de santé. Cependant, leur situation sanitaire est peu satisfaisante, de même que l'infrastructure de prestation des soins. La plupart des hôpitaux et des médecins sont concentrés dans les zones urbaines. Le Gouvernement s'emploie donc à garantir que les femmes bénéficient de services appropriés en rapport avec la grossesse, l'accouchement et la période postnatale. Le Népal est en effet l'un des rares pays où l'espérance de vie des femmes est inférieure à celle des hommes, en raison du fort taux de mortalité maternelle (estimé à 515 par 100 000 naissances). Moins de 10% des femmes accouchent en présence d'un personnel qualifié. Concernant les soins de santé généraux, les projets du Gouvernement prévoient des postes paramédicaux dans tous les comités de développement villageois qui devraient fournir des services de soins, de promotion et de prévention, notamment de vaccination, de planification familiale, de protection de la santé maternelle et infantile, ainsi que l'éducation sur la santé, l'environnement, la nutrition et l'hygiène. Les agents sanitaires actuels, qui sont pour la plupart des hommes, n'ont pas fait preuve d'une efficacité en particulier pour les soins à destination des femmes et c'est pourquoi les autorités offrent désormais une formation à 65 000 volontaires féminins ainsi qu'à 30 000 accoucheuses traditionnelles.
Tenant compte du fait que la plupart des femmes vivent à la campagne, les programmes du Gouvernement sont axés sur les communautés de base. Ainsi, différents programmes d'activités rémunératrices spécialement définis à l'intention des femmes sont mis en oeuvre, en coopération avec les ONG. C'est le cas notamment du Programme de crédit à la production pour les femmes rurales, qui s'attache à renforcer l'autonomie des femmes en les aidant à poser les problèmes et à définir des solutions pour elles-mêmes et leur famille; du Projet de développement des petits exploitants agricoles; et du programme de microcrédit destiné aux femmes rurales.
Le développement des femmes rencontre donc encore de sérieux obstacles, parmi lesquels les contraintes sociales, le fardeau de la pauvreté et le niveau d'instruction généralement trop faible de la population. Parmi les obstacles administratifs figurent l'inadéquation des systèmes de surveillance et d'évaluation des programmes ainsi que les carences des modalités d'exécution des lois garantissant les droits des femmes.
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Cependant, différentes requêtes ont été déposées contre certaines dispositions juridiques discriminatoires, auxquelles la Cour suprême a répondu favorablement en sommant le Gouvernement de modifier les lois coupables dans un délai de deux ans.
Présentation du rapport par l'Etat partie
M. TIRTHA MAN SHAKYA, Secrétaire général du Ministère du Droit et de la Justice du Népal, a donné des informations sur les événements nouveaux survenus dans son pays depuis la rédaction du rapport en 1996. Il a indiqué également que le Népal vient d'abolir totalement la peine de mort. La Constitution du pays affirme le principe de l'égalité totale entre les hommes et les femmes, principe qui inspire tous les textes adoptés. Le problème est que la pauvreté est devenue un obstacle majeur à l'application de tous les instruments internationaux ratifiés par le pays. On estime que 50% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté et l'on sait que les droits inscrits dans les textes internationaux n'ont pas grande valeur s'ils ne se traduisent pas par des progrès socio-économiques concrets. C'est pourquoi le Népal axe sa politique sur l'éducation, la santé, la sécurité alimentaire, l'emploi et la nutrition.
Les femmes népalaises souffrent des lacunes de l'éducation et de textes juridiques encore discriminatoires, mais désormais elles sont considérées comme un élément clé dans les efforts pour le développement durable. Toutefois, la progression vers l'égalité ne sont pas satisfaisants. Malgré de nombreux programmes sectoriels et le renforcement des institutions en faveur des femmes, l'absence de suivi et de données précises empêche d'estimer le nombre de femmes bénéficiaires de ces actions. Les femmes n'ont pas encore pu obtenir l'accès à la propriété, à l'emploi et à l'indépendance économique. Elles n'ont toujours pas accès non plus à la vie politique et publique et à des postes élevés dans l'administration. L'espérance de vie des femmes est inférieur à celui des hommes, le taux de fécondité est élevé et le taux d'analphabétisme est de 56% (contre 48% en moyenne pour le pays).
Le Népal est décidé à appliquer les recommandations adoptées au niveau international en faveur de la promotion de la femme, telles qu'inscrites notamment dans les Programmes de Beijing ou du Caire. La promotion à long terme des femmes est clairement inscrite dans le neuvième plan national. L'un des objectifs est de créer une société développée en favorisant la prise de participation et la responsabilisation des femmes. Les femmes sont la cible des programmes de réduction de la pauvreté. Il s'agit de les faire participer dans les différents secteurs du développement, d'accroître leur accès à la vie politique, économique et sociale et de réformer le système juridique en leur faveur. Le Gouvernement s'efforce de mobiliser les femmes. Dans le cadre de son action, il a décidé de modifier le système de comptabilité nationale
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afin de tenir compte du travail effectué par les femmes dans le cadre de la famille. Les structures institutionnelles vont être renforcées, développées et élargies et une coordination sera établie entre tous les organismes, organisations et instances chargées de la promotion des femmes. Enfin, des statistiques ventilés par sexe vont être utilisées pour effectuer le suivi des mesures déjà prises.
M. Shakya a indiqué que les lois discriminatoires faisaient l'objet d'une révision. Les discriminations économiques et sociales existantes seront progressivement réduites avec l'adoption de programmes positifs. Les organisations gouvernementales et les ONG, ainsi que les organismes locaux vont être réformés, pour combattre notamment la violence contre les femmes. Les droits humains de la femme seront protégés et des campagnes d'information et de sensibilisation seront aussi lancées. Pour favoriser la participation des femmes à la prise de décisions au plan local, le système juridique a été modifié grâce à une loi de décentralisation.
Les femmes au Népal ont des problèmes de santé important, le taux de mortalité maternel est très élevé et le Gouvernement a décidé de multiplier ses efforts pour défendre leur droit à la vie. Les femmes allaitantes et enceintes, ainsi que les femmes âgées seront la cible de ces efforts. Les services sanitaires vont être développés, notamment les services de planification familiale. Le Népal envisage aussi de relever le niveau d'instruction des femmes, grâce à des bourses d'études et des programmes d'enseignement technique. Ces mesures devraient permettre aux femmes de profiter des emplois dans les secteurs touristiques et de l'industrie, a estimé M. Shakya. L'un des objectifs est aussi de faire passer à 60% la proportion de femmes enseignantes. L'accès des femmes aux technologies nouvelles, notamment en matière agricole, sera aussi assuré. Toujours dans le domaine agricole, des programmes de crédit pour les petits exploitants seront institutionnalisés dans toutes les régions. Pour donner aux femmes le droit à la propriété foncière, la loi sera modifiée.
Depuis 1997, l'équité entre hommes et femmes fait l'objet d'un Plan national, englobant 12 secteurs, notamment l'éducation, la santé, la violence, les conflits armées, l'environnement, les mesures institutionnelles et les enfants. Un tribunal familial va être mis sur pied. Pour lutter contre tout type de violence et de crime à l'égard des femmes, des programmes vont aussi être mis en place, prévoyant un système de sanction, de réhabilitation et de sensibilisation du public. A cette fin, les ONG seront largement mises à contribution. Un autre objectif du Plan national est aussi d'alléger le travail des femmes à la maison, par le biais de séminaires promotionnels. Le Ministère chargé des femmes sera renforcé pour devenir le point focal en matière de promotion des femmes. Depuis la rédaction du rapport, des centres de réhabilitation destinés aux femmes et aux fillettes particulièrement vulnérables à la traite ont été établis. Les femmes présélectionnées vont
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y recevoir une formation. Par ailleurs, le nombre de procès intentés pour trafic de femmes ne cesse d'augmenter depuis quelques années. Le Ministère de la protection sociale et de la femme a formé un Comité pour coordonner les programmes de développement des femmes mis en oeuvre par les agences gouvernementales. Le Ministère a aussi examiné l'ensemble de la législation pour en éliminer toutes les dispositions discriminatoires, malheureusement en raison de la dissolution du Parlement, ce projet de loi, visant notamment à rétablir le droit à l'héritage pour les femmes, n'a pas été adopté et il faut recommencer la démarche à zéro. Le souci est aussi d'intégrer une démarche soucieuse de l'égalité entre les hommes et les femmes dans toutes les politiques adoptées. Il est aussi recouru à la discrimination positive en faveur des femmes par le biais de la promotion du nombre de postes occupés par des femmes dans le Gouvernement et l'administration, même s'il n'y a toujours pas de femme Ministre. Désormais, les partis politiques doivent présenter au moins 10% de femmes parmi les candidats.
Observations et questions des expertes
Mme CHIKAKO TAYA, experte du Japon, a félicité les autorités népalaises pour les efforts déployés en faveur du renforcement la démocratie.
Mme CHARLOTTE ABAKA, experte du Ghana, a rendu hommage au travail des Organisations non gouvernementales pour assurer la mise en oeuvre de la Convention au Népal. L'experte s'est dite particulièrement préoccupée par le problème de la traite des enfants, une pratique théoriquement punie par la loi, mais néanmoins en constante augmentation. Elle s'est aussi inquiétée du fort taux de mortalité maternelle.
L'experte de l'Italie, Mme IVANKA CORTI, a indiqué qu'elle aurait préféré voir la présentation du rapport du Népal confiée à une femme, même si la participation des hommes est également utile. Rappelant que le Népal compte une soixantaine de groupes ethniques parlant une centaine de dialectes, Mme Corti a voulu savoir comment ces différentes de cultures, de traditions, peuvent être surmontées pour que le Gouvernement puisse prendre des décisions bénéficiant d'un consensus de la part de toutes les castes. Elle a aussi souhaité savoir si les ONG ont été consultées durant la rédaction du rapport. La préférence au sexe masculin semble profondément ancrée dans le pays, a-t-elle constaté. Ainsi, aucune mesure ne semble être prise pour lutter contre le taux très élevé de prostitution parmi les jeunes filles et les fillettes, ce qui prouve un certain relâchement des autorités face à ce problème. L'absence de participation des femmes dans la vie politique est aussi inquiétante. Selon Mme Corti, le principal obstacle à la promotion des femmes réside dans l'absence d'efforts de la part des autorités pour supprimer les pratiques patriarcales au Népal.
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L'experte de la Tunisie, Mme EMNA AOUIJ, a relevé la suppression de la peine de mort au Népal, la criminalisation de l'avortement. Elle a noté que les interruptions volontaires de grossesse provoquent chaque jour le décès de six femmes et contribuent en grande partie au fort taux de mortalité féminine au Népal.
Abordant l'examen de l'Article 1 de la Convention, Mme CHIKAKO TAYA, experte du Japon, a demandé des précisions sur le projet de loi concernant l'héritage et les droits de propriété et souhaité savoir quand il allait être adopté. Quelles mesures sont prises pour amender les lois discriminatoires concernant notamment le mariage ou la bigamie, a aussi demandé l'experte.
Mme SILVIA ROSE CARTWRIGHT, experte de la Nouvelle-Zélande, a elle aussi insisté sur l'urgence de réviser la législation afin que les femmes aient le même droit d'héritage que les hommes, notant que la passivité de la Chambre des représentants en la matière montre combien la discrimination est ancrée dans les esprits. Les femmes ne peuvent pas contribuer au bien-être du pays et à celui de leurs enfants si elles n'ont pas accès à la terre. Mme Cartwright a aussi souhaité que l'âge légal du mariage soit le même pour les hommes et les femmes et jugé important de veiller à ce que les femmes ne se marient pas avant 18 ans. De même, le Gouvernement du Népal doit sévèrement réprimer les mariages d'enfants. La loi sur la nationalité doit être révisée afin que les enfants de femmes puissent obtenir la nationalité selon les même critères que les hommes. Il faut aussi amender le droit pour favoriser l'égalité de l'accès au divorce et éliminer les systèmes de dot qui avantagent les fils. Pour Mme Cartwright, l'absence de politique de lutte contre la violence subie par les femmes est inquiétante. L'experte a jugé encourageantes les mesures préliminaires prises en vue d'éliminer la traite des femmes.
L'experte d'Israël, Mme CARMEL SHALEV, a dit avoir pris connaissance du rapport de l'Etat partie avec un certain découragement. Pour en finir avec la discrimination constante dont les Népalaises sont victimes, elle a estimé que l'adoption de mesures juridiques était le premier pas le plus facile à prendre. Elle a insisté sur la nécessité urgente de modifier la Loi sur la famille, dont les dispositions sur la garde des enfants lors d'un divorce, sont particulièrement discriminatoires. En ce qui concerne l'avortement, l'experte a rappelé qu'aux termes de la Convention et de la recommandation générale sur la santé formulée récemment par le Comité, il est discriminatoire de refuser de fournir aux femmes certains services en matière de santé reproductive.
Poursuivant sur l'Article 2 de la Convention, Mme YOLANDA FERRER GOMEZ, experte de Cuba, a souhaité connaître les actions entreprises pour éliminer toutes les dispositions discriminatoires contenues dans les lois. Le Gouvernement a-t-il pour cela établi des priorités ? Elle a fait observer
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que selon les prérogatives de la Cour Suprême, il existe bien au Népal une procédure permettant de modifier rapidement les lois qui contreviennent aux droits fondamentaux des femmes en matière d'égalité. Mme SALMA KHAN, experte du Bangladesh, a estimé que le rapport montre que l'Etat partie est parfaitement conscient des obligations qui découlent des différents instruments internationaux qu'il a ratifiés. C'est pourquoi, il est encore plus difficile d'accepter l'existence de mécanismes sociaux et juridiques se renforçant l'un l'autre, ainsi en matière d'héritage, pour faire persister les pratiques discriminatoires à l'égard des femmes. Les autorités publiques doivent créer un environnement juridique favorable à l'égalité hommes/femmes. L'experte de la Turquie, Mme FERIDE ACAR, a, elle aussi, insisté sur la nécessité d'éliminer immédiatement toutes les dispositions législatives qui sont contraires aux instruments internationaux ratifiés par le Népal et constituent une discrimination directe à l'égard des femmes. Le premier pas indispensable est de poser l'égalité de jure entre les hommes et les femmes. L'experte s'est dite préoccupée par la résignation qui semble ressortir du rapport. Or le Gouvernement a le devoir de faire preuve d'une volonté politique ferme, surtout dans une société où la structure patriarcale est aussi forte. Mme ACAR a demandé à connaître les mesures prouvant l'engagement de l'Etat partie à honorer ses engagements face à la Convention.
Passant à l'Article 3 relatif aux dispositions législatives à prendre dans tous les domaines pour assurer le progrès des femmes, l'experte du Sri Lanka, Mme SAVITRI GOONESEKERE, a estimé que l'histoire récente du Népal témoigne de la capacité de la population à réagir et à obtenir ce qu'elle veut. Pour l'heure, les contradictions relevées par les autres expertes indiquent que les attentes de la population sont loin d'être satisfaites, puisque l'importance de la population féminine n'est pas réellement reconnue. Il importe que les autorités se fixent des dates butoirs et des objectifs précis, par exemple en matière d'éducation et de santé. L'experte a demandé s'il existait des projets à long terme en matière de promotion des femmes. Quels sont les scénarios envisagés pour qu'à l'avenir lorsque la Cour Suprême prend une décision, les dispositions législatives suivent immédiatement ? La situation actuelle où les décisions de la Cour ne sont pas suivies par l'exécutif va à l'encontre de la légitimité, a fait remarquer Mme Goonesekere, avant de regretter également le manque d'informations sur les incidences budgétaires des programmes mis en place pour les femmes.
Abordant l'Article 5 sur l'élimination des stéréotypes, Mme ROSALYN HAZELLE, experte de Saint-Kitts-et-Nevis, a jugé insuffisantes les peines punissant la polygamie au Népal. Elle a voulu savoir quels sont les plans envisagés pour punir les personnes qui arrangent les mariages entre enfants. L'experte de Cuba, Mme YOLANDA FERRER GOMEZ, est revenue sur le problème de la violence et souhaité savoir si des mesures sont mises en place pour venir en aide aux victimes. Abordant à son tour ce sujet, Mme SAVITRI GOONESEKERE, experte du Sri Lanka, a soulevé la question de la dot, qui constitue en soi une violence à l'égard des femmes.
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Rappelant qu'un système de castes existe au Népal, l'experte du Bangladesh, Mme SALMA KHAN a demandé si les autorités ont l'intention de réviser la loi qui régit les relations familiales au Népal. Remarquant à son tour que le rapport ne dit rien sur le problème de la violence à l'égard des femmes, en particulier familiale, l'experte a fait remarquer que les ONG font état de pratiques préoccupantes. Mme Khan s'est aussi inquiétée du taux très élevé de polygamie et de la traite des femmes et des jeunes filles. Environ 200 000 népalaises âgées de 16 à 20 ans travaillent comme prostituées en Inde et dans les pays voisins, et le tourisme sexuel existe aussi au Népal. Des mécanismes sont-ils développés pour lutter contre ces problèmes, a-t-elle demandé.
Mme KHAN a également relevé l'absence d'informations précises dans le rapport concernant la grande multiplicité ethnique du pays et le système des castes. Or certaines communautés ethniques et castes sont particulièrement victimes de discriminations. Le Gouvernement a-t-il des politiques ou même des lois pour améliorer le sort des femmes de ces communautés ? Y-a-t-il une loi interdisant la discrimination selon la caste ? L'experte a aussi demandé si les fonctionnaires sont éventuellement pénalisés pour avoir refusé certains services à des femmes issues de castes inférieures. Concernant le Plan national d'action contre la traite des femmes, elle a souhaité en connaître les principales mesures concrètes ainsi que les mécanismes de suivi qui ont été prévus. Mme KHAN a aussi mis l'accent sur l'importance de réaliser des campagnes d'information et d'éducation parallèlement à la promulgation des lois.
Sur l'Article 6 relatif à la lutte contre l'exploitation de la prostitution, Mmes TAYA et REGAZZOLI ont demandé quelles sont les actions entreprises par les autorités pour en finir avec le trafic des jeunes filles. Des contacts ont-ils été pris avec Interpol ? Mme REGAZZOLI a aussi demandé à connaître les mesures de réinsertion instituées en faveur des enfants et des jeunes filles victimes de ces trafic. Relevant l'importance des revenus générés par le tourisme, elle a demandé dans quelle mesure les femmes en profitaient et si des formations spécifiques leur sont offertes. Elle a fait observer que leur assurer un emploi dans ce domaine est un bon moyen de lutter contre le trafic. Mme CORTI a regretté que bien qu'il vise un problème pressant et généralisé, le programme national de lutte contre le trafic des femmes ne fixe aucun objectif quantitatif et aucune date butoir. Le rapport ne permet pas de savoir clairement si tous les projets évoqués sont déjà en cours d'application. Ainsi y-a-t-il déjà des exemples d'indemnisation des femmes victimes du trafic ? Mme CORTI a aussi demandé si d'ores et déjà les victimes bénéficient d'une aide juridique. Compte tenu du taux élevé d'analphabétisme des femmes, elle s'est demandée si les mesures visant à diffuser auprès de la population des brochures d'information étaient vraiment les plus efficaces.
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