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FEM/1081

MALGRE L'INTERDICTION DE LA DISCRIMINATION DANS LA CONSTITUTION, LES SCHEMAS TRADITIONNELS FREINENT SERIEUSEMENT LA PROMOTION DES FEMMES DE BELIZE

14 juin 1999


Communiqué de Presse
FEM/1081


MALGRE L'INTERDICTION DE LA DISCRIMINATION DANS LA CONSTITUTION, LES SCHEMAS TRADITIONNELS FREINENT SERIEUSEMENT LA PROMOTION DES FEMMES DE BELIZE

19990614 Le Belize présente son rapport initial et son deuxième rapport périodique

"La population très jeune et la très grande diversité ethnique ont un effet positif important sur le développement et la mise en oeuvre des lois et des politiques visant à éliminer la discrimination à l'égard des femmes", a expliqué, ce matin aux 23 membres du Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, Mme Dolores Balderamos Garcia, Ministre du développement humain, des femmes et de la jeunesse du Belize. Présentant le rapport initial et le deuxième rapport périodique de son pays, Mme Garcia a néanmoins reconnu que si l'interdiction de la discrimination entre les sexes est bien ancrée dans la Constitution, dans les faits les femmes continuent d'avoir un accès inégal aux opportunités d'emploi et aux ressources, en raison de la persistance des pratiques et schémas traditionnels. De plus, la crise économique que traverse le pays, la pauvreté touchant 25% des ménages, a des effets dramatiques sur la population, et principalement sur les femmes.

La première conséquence de ces difficultés financières est que bien souvent les parents ne sont pas en mesure d'envoyer longtemps leurs enfants à l'école, et qu'ils font alors un choix favorisant majoritairement les garçons. Par ailleurs, le nombre élevé des grossesses précoces, constitue une discrimination supplémentaire à l'égard des jeunes filles. 23% des enfants sont mis au monde par des adolescentes et le système scolaire étant géré par le Gouvernement et l'Eglise, ces dernières se voient souvent interdire l'inscription dans les établissements scolaires. D'autre part, les femmes sont très peu représentés dans les institutions publiques et aux postes décisionnels. De plus, et même si elles ont généralement un meilleur niveau d'éducation que les hommes, les femmes actives sont moins bien rémunérées, étant cantonnées dans des emplois moins qualifiés. Les femmes sont aussi sont davantage victimes du chômage

et pour plus longtemps que les hommes. Mme Garcia a également indiqué que Belize est le plus pays d'Amérique centrale le plus touché par l'épidémie VIH/sida, un fléau qui affecte majoritairement les femmes. Les autorités ont lancé des programmes de sensibilisation à ce problème mais le pays manque de structures d'accueil destinées aux séropositifs.

L'avortement et le problème des mères adolescentes sont souvent revenus dans les observations et les questions des expertes, qui ont souhaité en savoir plus sur les mesures prises en la matière, afin notamment de permettre aux jeunes mères de reprendre leurs études après leurs maternités. Les expertes ont noté une certaine contradiction entre l'importance de ces phénomènes et la prégnance de l'Eglise catholique. Certains membres du Comité ont ainsi demandé si le fait que l'Eglise gère, conjointement avec l'Etat, plusieurs domaines de la vie publique, éducation et santé notamment, ne constituait pas un obstacle à l'établissement de politiques et de campagnes d'information adressant directement ces problèmes. La représentation des femmes dans les institutions publiques a aussi fait l'objet d'observations. Certaines expertes ont demandé en quoi consiste exactement le programme de lutte contre la discrimination et quel est son budget. La persistance des stéréotypes et des comportements traditionnels défavorables aux femmes a également souvent été relevée, tout comme la question de la prostitution. Plusieurs expertes ont suggéré aux autorités d'envisager une loi pour lutter contre l'exploitation sexuelle et la traite des femmes.

Cet après-midi, à partir de 15 heures, le Comité poursuivra son dialogue avec la délégation du Belize.

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EXAMEN DU RAPPORT INITIAL ET DEUXIEME RAPPORT PERIODIQUE DU BELIZE

Rapport (CEDAW/C/BLZ/1-2)

Le rapport, en date du 1er novembre 1996, récapitule les mesures constitutionnelles, législatives et administratives actuellement en vigueur au Belize, et décrit les programmes institués depuis l'adhésion de ce pays à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, en mars 1990. Au Belize, pays qui compte environ 200 000 habitants, 22% des ménages ont une femme à leur tête. Les principales institutions gouvernementales favorisant la promotion de la femme sont : le Département des affaires féminines; la Commission nationale de la femme; le Bureau de la santé, de l'éducation et de la participation communautaire; et le Conseil consultatif national social et économique. Il existe également une quinzaine d'institutions non gouvernementales chargées de cette question.

Le Belize n'a pas promulgué de loi définissant avec précision la discrimination à l'égard des femmes. Néanmoins, en tant que signataire de la Convention, il accepte l'engagement qui en découle de prendre des mesures appropriées pour mettre fin à toute discrimination fondée sur le sexe, et sa Constitution stipule qu' "aucune personne ne doit faire l'objet d'un traitement discriminatoire de la part d'une autre personne ou d'une quelconque autorité". L'égalité entre hommes et femmes est également garantie par la Constitution.

Certains programmes nationaux visent à combattre les stéréotypes sexuels. Le rapport note que les femmes savent qu'elles ont davantage d'obstacles à surmonter que les hommes en matière d'éducation et d'emploi. On observe également que les hommes comme les femmes approuvent les stéréotypes sexuels concernant la famille, alors qu'ils ne sont pas d'accord avec l'affirmation "les femmes ne peuvent pas travailler à l'extérieur car elles doivent s'occuper de leur famille". Sur le plan législatif, le rapport précise que l'une des mesures à privilégier est la prise en compte des sexospécificités dans l'enseignement public, à tous les niveaux. En collaboration avec la Commission nationale de la femme, le Département des affaires féminines coordonne et exécute un plan d'action qui a pour principal objectif d'informer les fonctionnaires de haut niveau des facteurs qui contribuent à l'émergence de préjugés sexistes dans différents domaines. Au Belize, aucun texte législatif n'interdit expressément et spécifiquement le trafic de prostitution ou l'exploitation de prostituées. La seule exception est la détention de professionnelles du sexe ayant immigré illégalement au Belize. Dans ces cas, les établissements qui emploient ces femmes sont passibles d'amendes, mais la loi n'est pas strictement appliquée. D'après les études réalisées, les maisons closes tendent à employer exclusivement les femmes immigrées hispanophones sans papiers, qui reçoivent temporairement des revenus qu'elles ne pourraient obtenir par aucun autre moyen.

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S'agissant de l'accès aux postes de décision de haut niveau, le rapport note que les femmes béliziennes sont très en retard. Au niveau parlementaire, deux femmes ont siégé à la Chambre des représentants, au cours de la période 1980-1994. Au Sénat, qui comporte neuf membres désignés, il y avait une femme en 1980, deux en 1985 et 1989 et trois en 1994. La sous-représentation des femmes aux plus hauts niveaux de responsabilité est particulièrement manifeste aux postes de commande de l'Administration et de la fonction publiques, ainsi que de l'entreprise privée. Les persistances des rôles traditionnels dévolus aux deux sexes et le cantonnement des femmes dans la sphère domestique découragent et empêchent les femmes de choisir des filières conduisant aux sphères du pouvoir. Les partis politiques n'offrent pas non plus aux femmes la possibilité de faire carrière ni ne les incitent à se présenter sur les listes électorales. Une évolution des mentalités et une réforme des structures politiques seraient nécessaires pour faciliter la représentation proportionnelle et/ou la représentation de membres multiples dans les administrations publiques locales et nationales, afin d'offrir des chances égales aux femmes d'être élues à certains postes.

En matière d'éducation, le taux de scolarisation global des enfants de 5 à 14 ans ne fait pas apparaître de différence entre les sexes. Parmi les raisons de l'abandon scolaire en primaire, on peut citer la nécessité où sont les enfants de travailler très jeunes ou de s'occuper des frères et soeurs cadets. Des organisations non gouvernementales citent également des études selon lesquelles les adolescents, en particulier les filles, abandonnent l'école en raison de difficultés économiques plutôt que par manque d'intérêt. Les grossesses précoces sont à l'origine d'un grand nombre de ces abandons, sachant que les établissements scolaires renvoient souvent les élèves ou ne les réadmettent pas après l'accouchement. La principale raison de l'expulsion des élèves enceintes est la pression exercée par les parents des autres élèves. Les enseignantes non mariées peuvent également perdre leur travail en cas de grossesse.

Pour ce qui est de l'emploi, une enquête de 1993 note que la population féminine a un niveau d'instruction plus élevé que la population active masculine, mais elle est moins bien rémunérée, a moins de chances d'obtenir un emploi et risque davantage d'être en chômage de longue durée. En 1994, 84,4% des femmes en âge et capables de travailler avaient un emploi, et le taux d'emploi des femmes était plus élevé dans les zones urbaines que dans les zones rurales. Le principe "à travail égal, salaire égal", n'est vrai, d'une façon générale, qu'en ce qui concerne la fonction publique, qui est le plus gros employeur du pays et engage des hommes et des femmes. Dans les autres secteurs, la division du travail est telle que la plupart des femmes ayant un emploi sont concentrées sur des métiers à dominance féminine qui sont traditionnellement mal considérés et peu rémunérés. A l'exception des enseignantes et des fonctionnaires, les femmes exerçant un métier ne sont pas syndiquées.

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En matière de santé, le rapport indique que près de 19% des nouveaux-nés sont mis au monde par des mères de moins de 20 ans, mais selon les statistiques du Ministère de la santé, le pourcentage serait de 32% en 1990. L'avortement est puni par le Code pénal. Il est légalement prévu sous certaines conditions, mais il est extrêmement difficile d'obtenir les autorisations requises, de sorte que le nombre d'avortements licites est négligeable. En fait, sur quelque 700 avortements intervenus au cours des quatre dernières années (soit 20% environ d'un montant estimatif de 3 500 avortements, fausses couches comprises), il semble qu'il n'y ait eu qu'un seul cas légalement autorisé. Par ailleurs, depuis 1992, le Belize se place au deuxième rang des pays d'Amérique centrale, après le Honduras, par le nombre de cas de VIH/sida.

La législation du Belize ne fait pas de distinction entre les hommes et les femmes en matière d'accès aux prêts bancaires, aux prêts hypothécaires et/ou aux crédits financiers. Les institutions financières n'exigent pas le consentement de l'époux ou du concubin pour accorder des prêts aux femmes. Les mères de famille ont droit en leur propre nom aux prestations familiales et à une pension alimentaire. Aucune loi n'interdit aux femmes de participer aux activités récréatives, aux sports et aux autres aspects de la vie culturelle. Le Belize reconnaît la même capacité juridique aux femmes qu'aux hommes. La loi sur la violence familiale a été promulguée en 1993 et son application relève de la responsabilité du Tribunal de la famille créé en 1989. De mai à novembre 1993, soit en six mois seulement, 103 affaires portant sur la violence familiale ont été portées devant cette instance. L'idée selon laquelle les questions familiales relèvent du domaine privé étant profondément ancrée dans les mentalités, le rapport indique qu'il est indispensable d'utiliser tous les moyens disponibles (médias, établissements d'enseignement) pour sensibiliser non seulement les forces de police mais aussi la société tout entière à ce problème.

Présentation du rapport par l'Etat partie

Mme DOLORES BELDERAMOS GARCIA, Ministre du développement humain, des femmes et de la jeunesse du Belize depuis septembre 1998, a présenté le rapport initial et le deuxième rapport périodique de son pays au Comité. Depuis mars 1990, date à laquelle il a adhéré à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, le Belize a pris des mesures modestes mais cohérentes pour garantir les droits aux femmes, conformément aux dispositions de la Convention. Le rapport est le fruit d'un effort commun du Gouvernement et des ONG, une collaboration qui existe aussi quand il s'agit de la mise en oeuvre de la Convention. Créée en 1982, la Commission nationale des femmes du Belize, qui dépend du Ministère du développement humain, des femmes et de la jeunesse, est le principal organe chargé de veiller à l'application de cet instrument.

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Indépendant depuis 1981, le Belize est le seul pays anglophone d'Amérique centrale et compte environ 237 000 habitants. L'exode rural est fort dans le Belize, et les habitants sont aussi nombreux à émigrer vers l'Amérique du Nord. Les habitants sont pour la plupart mestizos (44%) ou créoles (31%). En 1996, 61% de la population avait moins de 25 ans. Le taux de fécondité du Belize est l'un des plus élevés de la région; environ 19% des enfants naissent de mères adolescentes et 59% naissent hors des liens du mariage.

Le Belize est de plus en plus vulnérable à la mondialisation et le taux de croissance de l'économie diminue lentement. La crise a eu des conséquences directes sur le chômage et la pauvreté. En 1996, un quart des ménages étaient pauvres et plus de 9% vivaient dans l'extrême pauvreté. La religion a une grande influence sur la manière d'aborder la problématique hommes/femmes.

La Constitution du Belize prévoit de lutter contre les traitements discriminatoires. Pourtant, bien que la loi interdise la discrimination, les femmes ont toujours du mal à avoir accès aux mêmes ressources et activités que les hommes et, à cet égard, le poids des traditions et coutumes est très fort. Faisant référence à l'Article 3 de la Convention, la représentante a affirmé que la Constitution du Belize exige des politiques d'Etat visant à éliminer les disparités parmi les citoyens du Belize, notamment en raison de leur sexe. La politique du Gouvernement actuel prévoit de réserver au moins 30% des postes de haut niveau de la fonction publique aux femmes. De son côté, la Banque des petits agriculteurs accorde des crédits aux femmes en priorité. Au niveau national, il n'y a pas de système de quotas.

La loi prévoit des congés de maternité avant et après l'accouchement. Par ailleurs, un programme contre la violence domestique a été mis en place, et des salles de consultations pour les victimes sont prévues dans les commissariats. La violence familiale, la violence, la santé, la participation aux prises de décision et la pauvreté sont les thèmes retenus par les autorités pour mettre en oeuvre le programme de Beijing. Depuis 1991, ces dernières oeuvrent à l'élimination des stéréotypes des manuels scolaires. Un programme de formation a été mis en place pour sensibiliser les parents aux droits de l'enfant.

Prenant la parole sur l'Article 6 de la Convention relatif à la suppression de l'exploitation de la prostitution, Mme ADELE CATZIM, Coordinatrice des ressources pour le développement, a indiqué que la législation interdit la gestion des maisons closes ou la location de locaux à cet effet. Toutefois, les maisons closes continuent d'exister sous couvert d'hôtels, de restaurants ou de bars. La prostitution est considérée par la loi comme un délit mineur, pour lequel une amende ou une peine de prison peut être appliquée. Les prostituées sont essentiellement des immigrées venant

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d'Amérique centrale ou des îles Caraïbes hispanophones. Le système est submergé par les plaintes et le Gouvernement est de plus en plus préoccupé par la prostitution, d'autant que le pays a le taux le plus élevé de transmission du VIH/sida en Amérique centrale.

Au Belize, les femmes représentent la majorité des électeurs, mais leur représentation dans les organes publics ne correspond nullement à cet état de fait. Il y a toutefois eu une augmentation lente des femmes candidates à des élections locales et régionales. Le problème est que la plupart des groupes ethniques considèrent les femmes incapables en politique. Aucun parti politique n'a adopté de mesure visant à augmenter le nombre de femmes en son sein. Sur les 9 membres du Sénat, aujourd'hui 2 sont des femmes. D'un point de vue culturel, les femmes sont considérées comme insuffisamment fermes et formées pour faire de la politique ou représenter le pays au plan international, a expliqué Mme Catzim.

Dans le domaine de l'éducation, des progrès importants sont récemment intervenus. Les femmes commencent à accéder à l'éducation supérieure. Un programme vise désormais à assurer l'égalité de scolarisation entre les filles et les garçons. Le problème n'est pas que les enfants ne veulent pas aller à l'école, mais que les parents n'ont pas les ressources financières pour les y envoyer. S'il y a plus de filles scolarisées à l'université nationale du Belize, c'est que les parents tendent à envoyer les garçons faire leurs études supérieures à l'étranger, a également expliqué Mme Catzim. L'un des obstacles à la scolarisation des filles est le nombre élevé des grossesses des adolescentes. Ces dernières lorsqu'elles sont enceintes sont en effet souvent renvoyées de leur école. Si les règlements prévoient que le garçon responsable de la grossesse peut être également renvoyé de l'établissement, cette disposition est rarement appliquée dans les faits. Les écoles qui fonctionnent dans le système Etat/Eglise ont aussi le droit de congédier les enseignantes non mariées qui sont enceintes avant d'avoir atteint l'ancienneté leur permettant d'avoir droit à des congés de maternité. Le Gouvernement n'a pas encore de politique spécifique pour régler cette question, sur laquelle un débat national a néanmoins lieu en ce moment.

La Coordinatrice du réseau chargé des problèmes des femmes au Belize, Mme GAYLA FULLER, a ,quant à elle, rappelé que la Constitution interdit expressément la discrimination fondée sur le sexe. Ce principe devrait appliquer la législation du travail, mais dans les faits on constate encore de nombreuses attitudes discriminatoires. Par exemple, les femmes actives sont généralement plus éduquées que les hommes, sans que cela ne se traduise par une rémunération supérieure. Les femmes continuent en fait de travailler dans des emplois moins qualifiés. Ainsi dans le secteur de la santé, elles sont plus souvent infirmières que médecins. En outre, les femmes sont les premières victimes du chômage et pour plus longtemps que les hommes.

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Le Belize a plusieurs dispositions concernant le salaire minimum, mais le problème est qu'il varie selon le secteur d'activités. Ainsi, les employés de maison, secteur traditionnellement très féminisé, sont moins rémunérés que les personnes qui travaillent dans les industries d'exportation. Les ONG préoccupées par les questions féminines mettent actuellement au point, en coopération avec différentes instances gouvernementales, une campagne sur l'emploi des femmes. La Direction de la femme a désormais pleinement conscience de la nécessité d'améliorer la situation économique des femmes, en promouvant notamment des emplois non traditionnels. Mme Fuller a également indiqué que la Loi sur le harcèlement sexuel de 1996 est actuellement révisée pour permettre aux victimes de pouvoir plus facilement porter plainte.

Suite de la présentation du rapport

Reprenant la parole, Mme DOLORES BALDERAMOS GARCIA a fait savoir que 95% des femmes enceintes reçoivent des soins médicaux. En 1998, 23% des enfants sont mis au monde par des femmes de moins de 19 ans. Le nombre d'avortements, illégaux au Belize, est en augmentation. Aucune législation n'interdit la contraception mais les convictions religieuses sont très fortes à ce sujet. Selon des données de 1991, le principal moyen de contraception était la ligature des trompes, loin devant la pilule et le préservatif. Toujours en matière de santé, la représentante a rappelé que les principales causes de mortalité sont le cancer du sein et le cancer cervical. Le Belize possède également le plus fort taux de transmission du VIH/sida de l'Amérique centrale, un fléau qui touche plus les femmes que les hommes (un chiffre statistique qui résulte peut-être du fait que les femmes sont plus souvent dépistées, à l'occasion des maternités). Le Gouvernement a mis en place une politique spéciale et lancé des programmes de prévention, mais le pays manque de structures pour le traitement des personnes séropositives.

Pour ce qui est de l'égalité des chances économiques, les femmes, qui ne peuvent pas présenter de titres de propriétés, ont en général plus de mal que les hommes à obtenir des crédits, et sont mal informées sur le système de prêts. Le Ministère des femmes a récemment organisé un programme de formation à leur intention. Les femmes participent peu aux activités sportives mais s'illustrent dans les domaines artistiques. Par ailleurs, les manuels scolaires ont été revus et toutes les illustrations ou les textes transmettant une image inférieure des femmes ont été modifiés. Il existe peu de données ventilées par sexe concernant les femmes rurales, qui sont en général moins éduquées et plus fécondes que les femmes urbaines. Des ateliers sur la planification familiale, le violence domestique ou encore les soins de santé ont été organisés à leur intention. Les femmes rurales sont aussi encouragées à entrer aux conseils municipaux, mais elles demeurent pénalisées par le manque d'appui de la part de leurs partenaires ou de leurs époux. Dans certains districts, des soirées de sensibilisation ont été organisées à ce sujet pour les femmes et leurs partenaires.

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Mme MAGALI MARIN, Conseillère juridique, a indiqué que, sans disposer pour l'instant de données très précises, on sait que la plupart des terres sont aux mains des hommes. Les femmes et les hommes du Belize peuvent se marier à partir de 14 ans avec le consentement de leurs parents (à partir de 18 ans sans le consentement parental). Une femme mariée peut demander la séparation légale pour certaines raisons (cruauté, adultère, abandon, maladie mentale, inculpation de viol, de sodomie ou de bestialité). Un divorce à l'amiable est aussi possible si l'on constate que les époux sont séparés depuis au moins trois ans. Une loi est en cours d'élaboration pour faire disparaître l'exception selon laquelle les époux ne peuvent pas être poursuivis pour viol. Chacun des époux a un droit identique en ce qui concerne la garde de l'enfant. En dehors des liens du mariage, la garde revient directement à la mère. Une femme mariée peut demander une pension alimentaire, ce qu'une concubine ne peut pas faire. Les femmes vivant en union libre sont également défavorisées en matière d'héritage.

Selon Mme JOAN MUSA, Présidente de la Commission nationale pour les femmes et Première Dame du Belize, hommes et femmes sont engagés à assumer les mêmes responsabilités face aux enfants mais il s'avère dans la pratique que ce rôle incombe essentiellement aux femmes. La représentante a reconnu que certains domaines - harcèlement sexuel, égalité des salaires, services de santé pour les femmes, prostitution, violence domestique - exigent une plus grande attention de la part des autorités. D'une manière générale, la législation doit être appliquée de façon plus stricte. Les comportements discriminatoires et inéquitables semblent enracinés dans les mentalités des habitants du Belize, et la modification des attitudes prendra du temps. Il faut, en priorité, éduquer la population et ne pas se satisfaire d'un statu quo, a conclu Mme Musa.

Observations et questions des expertes

Prenant la parole pour formuler des commentaires généraux, Mme ROSALYN HAZELLE, experte de Saint-Kitts-et-Nevis, a félicité l'Etat partie pour la franchise dont il a su faire preuve. Elle s'est déclarée fortement préoccupée par le taux élevé des personnes atteintes du VIH/sida, le nombre élevé des avortements, la montée de la prostitution, ou encore le nombre important d'enfants naissant hors mariage. Elle a noté une certaine contradiction entre ces phénomènes et le fait que de nombreux domaines de la vie sociale soient gérés conjointement par l'Eglise et l'Etat. Se pourrait-il qu'en raison de cette situation, il soit plus difficile d'aborder directement ces problèmes par le biais de campagnes d'information et de politiques spécifiques ? L'experte a jugé par exemple que l'Etat est tout simplement incapable d'intervenir et de faire respecter la législation dans le domaine scolaire. Ignorant la Constitution, les écoles continuent en effet de refuser l'entrée aux jeunes filles enceintes ou aux mères adolescentes. Mme Hazelle a déclaré ne pas très bien saisir l'engagement du Gouvernement de Belize en ce qui concerne la violence à l'égard des femmes et la mise en oeuvre du Programme de Beijing.

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L'experte du Ghana, Mme CHARLOTTE ABAKA, s'est dite très favorablement impressionnée par la présence de la Première Dame du Belize dans la délégation de l'Etat partie. Elle s'est également réjouie du fait que Belize a ratifié sans réserve la Convention, ce qui, a-t-elle précisé, renforce encore plus les obligations qui en découlent. Elle s'est en revanche dite préoccupée par les relations entre l'Eglise et l'Etat. Le pays est laïc, mais malgré tout dans plusieurs domaines, notamment l'éducation et la santé, le caractère séculier du pays disparaît. De plus, malgré l'importance de l'Eglise dans la vie de tous les jours, le taux des grossesses précoces est très élevé. Cette situation semble contradictoire dans un pays aussi catholique, a noté l'experte. Rappelant que les mesures d'ajustement structurel ont aggravé la disparité dans les revenus, elle a demandé à connaître ce que fait le Gouvernement pour atténuer les incidences négatives de cette situation sur les femmes.

Pour Mme EMNA AOUIJ, experte de la Tunisie, l'Etat partie a certes fourni des efforts très louables, mais les résistances culturelles et religieuses demeurent encore trop fortes pour rendre les mesures prises véritablement efficaces. Elle a rappelé que par la signature de la Déclaration de Beijing, Belize s'est engagé notamment à considérer la contribution au Produit intérieur brut que font les femmes aux foyers ou à lutter fermement contre la violence domestique dont les femmes sont victimes. Malgré ces engagements, les lois et politiques appropriées tardent à voir le jour et la situation est préoccupante dans un certain nombre de domaines où les droits fondamentaux des femmes sont tout simplement mis en péril, par exemple en matière de santé génésique.

Abordant l'Article 2 relatif à l'interdiction de la discrimination par les pouvoirs publics, l'experte de l'Allemagne, Mme HANNA BEATE SCHOPP- SCHILLING, a demandé si les lois du pays ont fait l'objet d'une révision et s'il existe encore des dispositions discriminatoires dans certaines d'entre elles. Le Gouvernement de Belize entend-il formuler une législation spécifique en matière de lutte contre la discrimination à l'égard des femmes ? Rappelant que les discriminations dont les femmes sont victimes sont souvent exacerbées par les discriminations raciales, elle a également suggéré à l'Etat partie d'adopter une politique à cet égard. Mme Schöpp-Schilling a aussi demandé quelles sont les ressources financières allouées au Plan national pour l'application du Programme de Beijing. Si le pays décide d'adhérer au système de gestion du Commonwealth quelles seront les conséquences pratiques, a-t-elle aussi demandé.

L'experte de Cuba, Mme YOLANDA FERRER GOMEZ, a déclaré que le tableau dressé par le rapport fait apparaître que la femme est discriminée par rapport à l'homme dans de nombreux domaines. Elle a demandé si on a bien diffusé la Convention dans le pays et si les femmes sont au courant des droits qui sont les leurs en vertu de la Convention. L'experte s'est également enquise de la situation des femmes immigrées, dont une grande majorité vit dans la pauvreté. Ont-elles les mêmes droits et quels sont les problèmes principaux qu'elles rencontrent ?

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A propose de l'Article 3 sur les mesures appropriées, y compris les dispositions législatives prises en faveur des femmes, Mme AHOUA OUEDRAOGO, experte du Burkina Faso, s'est réjouie de l'existence d'un Ministère et d'un Comité national pour la promotion des femmes. Elle a demandé à en connaître le budget et à savoir comment les ressources disponibles étaient distribuées. Y a-t-il aussi des difficultés pour mobiliser les fonds, une fois les plans et les programmes établis ? L'experte a demandé s'il existe à Belize une politique nationale globale de promotion et de développement des femmes. Dans l'affirmative, les ONG féminines ont-elles été associées à son élaboration et des objectifs quantifiés ont-ils été définis ? Mme Ouedraogo a aussi mis l'accent sur l'importance de l'évaluation des politiques mises en place.

En ce qui concerne les mesures temporaires spéciales, Article 4 de la Convention, Mme ABAKA a félicité l'Etat partie d'avoir établi des quotas en faveur des femmes handicapées. Elle s'est demandé en revanche comment le Gouvernement peut prendre de nombreuses mesures positives sans avoir une politique nationale en faveur des femmes. Cette situation découle-t-elle d'une opposition de la population ou de certains partis politiques ? Mme Abaka a jugé urgent de prendre des mesures spéciales en faveur des mères-adolescentes, afin notamment de leur permettre de poursuivre leurs études. Sur le même article, Mme ANNE LISE RYEL, experte de la Norvège, a mis l'accent sur le rôle clef que peuvent jouer les femmes occupant des fonctions de responsabilité. Il est très important d'assurer la participation des femmes à des organes de décision et ainsi de les rendre "visibles" ou d'en faire des modèles. A ce sujet une politique peut être une bonne chose, mais en raison de son caractère éphémère, une loi serait préférable, a suggéré l'experte, ajoutant que l'on pourrait envisager une loi posant que les organes publics, nationaux, locaux ou régionaux, doivent compter au-moins 40% de femmes en leur sein.

Mme ROSALYN HAZELLE a demandé des détails sur le contenu des programmes visant à supprimer les stéréotypes et a souhaité connaître le rôle des médias dans ces campagnes de sensibilisation.

L'experte de la Nouvelle-Zélande, Mme SILVIA ROSE CARTWRIGHT, a salué la mise en place d'un programme de lutte contre la violence domestique, un problème très grave au Belize. Peut-être serait-il utile de modifier la législation pour criminaliser les sévices physiques et psychologiques, a suggéré l'experte, jugeant indispensable la sensibilisation du public et de certains corps de métiers (police, magistrature, enseignement) à ce problème. Des mesures ont-elles été prises pour permettre aux victimes de porter plainte facilement, a-t-elle demandé.

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Pour MME IVANKA CORTI, experte de l'Italie, a reconnu que la suppression des stéréotypes est particulièrement difficile à réaliser dans une société multiraciale et pluriethnique. Cela demande un effort dans la durée et de longues négociations de la part des autorités. La séparation entre l'Eglise et l'Etat est-elle envisagée au Belize, a demandé l'experte. Poursuivant les observations concernant l'Article 5 sur l'élimination des stéréotypes, Mme YOLANDA FERRER GOMEZ, experte de Cuba, a demandé des précisions sur les programmes lancés par les autorités. Abordant l'Article 6 sur la prostitution, Mme Ferrer a souhaité savoir si les autorités ont cherché à connaître les raisons qui poussent les femmes à gagner leur vie de cette façon, et si un programme de formation leur était destiné. Qu'en est-il des proxénètes, des clients, quel est le rôle joué par la présence des bases militaires britanniques au Belize, a demandé l'experte.

Mme SAVITRI GOONESEKERE, experte du Sri Lanka, relevé l'approche non interventionniste des autorités face à des problèmes tels que la pandémie VIH/sida ou la prostitution.

L'experte de la Chine, Mme FENG CUI, a suggéré aux autorités du Belize d'envisager d'élaborer une loi particulière pour enrayer l'exploitation sexuelle et la traite des femmes.

Abordant l'Article 7 sur les mesures pour éliminer la discrimination dans la vie politique et publique, Mme ZELMIRA REGAZZOLI, experte de l'Argentine, s'est dite surprise par la très faible participation des femmes à la vie publique. Les autorités ont-elles l'intention de prendre des mesures positives du type de celles décidées en faveur des handicapés, a-t-elle demandé, estimant qu'une plus grande participation des femmes est nécessaire pour changer l'image, souvent négative, de la politique dans l'opinion.

S'agissant de l'Article 11 sur l'éducation, l'experte de l'Egypte, Mme NAELA GABR, a souhaité connaître le rôle du Conseil national d'éducation. A-t-il notamment pour mission d'éliminer les stéréotypes dont les femmes sont victimes dans le milieu éducatif ? A-t-il le pouvoir d'amender les programmes scolaires ? Le Gouvernement pourrait peut-être envisagé de présenter la Convention dans les écoles, a-t-elle suggéré. Reprenant la parole, Mme HAZELLE s'est dite préoccupée par l'application du droit à l'éducation et les politiques dans ce domaine. Il est particulièrement regrettable que le droit à l'éducation des mères adolescentes ne soit pas respecté, ce qui contrevient non seulement à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes mais aussi à celle sur les droits de l'enfant. Les autorités ont-elles essayé d'aborder ce problème, en entamant notamment un dialogue national. Le Belize pourrait par exemple s'inspirer des politiques prises en la matière par des pays voisins, tels la Jamaïque ou Saint-Kitts-et-Nevis. L'experte a fait observer également que la législation rendant la scolarisation obligatoire pour les enfants de 5 à 14 ans semblait mal respectée.

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