DSG/SM/54

LA VICE-SECRETAIRE GENERALE SOULIGNE QUE NULLE TACHE N'EST INSURMONTABLE SI LES CITOYENS DU MONDE ENTIER SE MOBILISENT VRAIMENT

4 juin 1999


Communiqué de Presse
DSG/SM/54


LA VICE-SECRETAIRE GENERALE SOULIGNE QUE NULLE TACHE N'EST INSURMONTABLE SI LES CITOYENS DU MONDE ENTIER SE MOBILISENT VRAIMENT

19990604 Vous trouverez, ci-après, le discours prononcé par la Vice-Secrétaire générale des Nations Unies, Mme Louise Fréchette, à l'occasion de la remise des diplômes à l'Université d'Ottawa (Canada), le 5 juin 1999 :

Permettez-moi tout d'abord de vous remercier et, à travers vous, de remercier le Sénat de l'Université de m'avoir conféré ce doctorat honorifique. Cet honneur me fait d'autant plus plaisir que mon expérience en tant que membre du Bureau des Gouverneurs m'a permis de mieux connaître votre institution et d'en apprécier non seulement les mérites académiques mais aussi l'attachement à certaines valeurs fondamentales que sont le bilinguisme, le pluralisme culturel et l'ouverture sur le monde.

A vous, chers gradué(e)s, j’offre mes plus sincères félicitations. Vous avez toutes les raisons d’être fiers de ce que vous avez accompli et vos parents, vos professeurs et vos amis se réjouissent avec vous de vos succès. Je vous félicite et je vous envie un peu... Vous avez toute la vie devant vous, toute une vie pour réaliser vos rêves et contribuer à bâtir un monde meilleur. Et ce monde, au delà des frontières de votre ville, de votre province, de votre pays, exercera une influence grandissante sur votre vie. Plus que jamais auparavant, des événements se déroulant à l’autre bout de la planète ont un impact direct sur notre avenir et sur notre bien-être.

Je sais que vous êtes tous conscients de cette réalité. Dans votre vie quotidienne, dans vos choix musicaux, dans vos voyages et dans vos projets d’avenir, vous êtes profondément influencés par des idées et des tendances nées ailleurs. Mais plutôt que de m’étendre sur le sujet de la mondialisation - dont nous sommes probablement tous un peu las - je voudrais que nous nous posions des questions un peu différentes.

Ce que je voudrais que nous nous demandions, ce n’est pas pourquoi ou comment l’intégration progresse dans le monde, mais si une plus grande unité est possible dans la recherche de valeurs universelles telles que les droits de l’homme, la démocratie et l’état de droit, qui sont les fondements de la paix.

Ce que je voudrais que nous nous demandions, ce n’est pas pourquoi ou comment la mondialisation a transformé notre vie économique, mais si cette transformation peut contribuer à plus d’égalité et de justice sociale dans le monde.

L’Organisation des Nations Unies a été créée il y a plus de cinquante ans pour débarrasser le monde du fléau de la guerre. Cet objectif s’est révélé difficile à atteindre et, à maintes reprises, nous avons constaté combien le monde avait de mal à s’unir face à une agression. Le conflit du Kosovo a révélé de que la communauté internationale était profondément divisée quant à la meilleure façon de réagir. Au cours des années 90, la réaction aux conflits qui ont éclaté en Somalie et en Bosnie-Herzégovine et, surtout, au génocide perpétré au Rwanda, s’est révélée tragiquement déficiente.

De même, la lutte contre la pauvreté et le sous-développement peut parfois apparaître comme une mission impossible quand on sait que, depuis 1995, 300 millions de personnes sont venues grossir les rangs des plus déshérités; quand on constate que dans plusieurs pays, particulièrement en Afrique, plus de 90% de la population vit dans la pauvreté absolue; quand on découvre que, dans ce même continent, le fléau du SIDA touche déjà plus de 33 millions de personnes et que, dans certains pays, près de 40 % de la population adulte est atteinte.

Malgré ces constatations, le message que je souhaite vous transmettre est un message d’espoir, un espoir qui peut se transformer en réalité si les citoyens du monde dont vous êtes font entendre leur voix, s’ils sont prêts à investir ne serait-ce qu’une petite partie de leurs énergies dans la défense des principes auxquels ils croient.

Mon espoir, loin d’être utopique, se fonde sur les progrès réalisés au cours des dernières décennies.

S’il est vrai que la communauté internationale tolère encore trop de violations massives des droits de la personne, il est aussi vrai que beaucoup de barrières sont tombées depuis la fin de la Guerre froide. Il est désormais courant pour le Conseil de Sécurité de s’impliquer dans les conflits internes et bien peu de pays acceptent aujourd’hui que les Etats se cachent derrière leur souveraineté pour se livrer à des abus contre leurs propres citoyens.

De même, l’histoire de la lutte contre la pauvreté est plus encourageante qu’on ne l’imagine. Ainsi, on a fait plus de progrès sur ce front au cours des 50 dernières années que pendant les 500 années précédentes. Le taux de mortalité infantile a diminué de moitié depuis 1960. A cette époque, 90% des familles rurales n’avaient pas accès à l’eau potable. Ce pourcentage est maintenant d’environ 25%. Le taux de malnutrition a chuté d’un tiers. Plus de trois quart des enfants fréquentent l’école primaire alors que ce nombre ne dépassait pas les 50% il y a 40 ans.

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Ces progrès ont été enregistrés d’abord grâce au courage et à la détermination des peuples et des individus victimes de la pauvreté et de l’oppression. Mais ils se sont produits aussi parce que des gens comme vous et moi en ont fait leur affaire. Et, de plus en plus, ce qu’on appelle la société civile joue un rôle déterminant dans l’arène internationale.

Lorsque j’ai participé pour la première fois aux travaux de l’Assemblée générale à New York, l’ONU était exclusivement l’affaire des Etats. Je ne sais pas si le terme “ONG” avait déjà été inventé, mais les groupes qui existaient n’avaient certainement pas voix au chapitre dans les débats intergouvernementaux. L’un des changements les plus marquants qui se soient produits à l’ONU ces dernières années est l’influence qu’ont acquise les groupes représentant la société civile. Les politiques et les programmes d’action issus des grandes conférences organisées sous l’égide des Nations Unies dans les années 90 - que ce soit sur l’environnement, les droits de l’homme, ou la population - reflètent la participation très active d’acteurs non-gouvernementaux.

La Convention sur les mines terrestres signée ici-même à Ottawa nous a montré à tous que nulle cause n’est perdue et nulle tâche insurmontable si les citoyens du monde entier se mobilisent vraiment.

Oui, vous pouvez faire une différence si vous vous sentez suffisamment concernés pour investir un peu de vous-même dans la défense de vous idéaux.

Les valeurs que nous partageons comme Canadiens sont celles auxquelles aspirent des millions d’individus à travers le monde. Elles valent la peine d’être défendues, avec passion, avec courage, avec conviction. Je sais que vous saurez, chacun à votre façon, apporter votre contribution à cette entreprise exaltante.

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