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DH/244

LES DIX-HUIT EXPERTS DU COMITE ENTAMENT L'EXAMEN DU QUATRIEME RAPPORT PERIODIQUE DU COSTA RICA QU'ILS JUGENT "TROP THEORIQUE"

5 avril 1999


Communiqué de Presse
DH/244


LES DIX-HUIT EXPERTS DU COMITE ENTAMENT L'EXAMEN DU QUATRIEME RAPPORT PERIODIQUE DU COSTA RICA QU'ILS JUGENT "TROP THEORIQUE"

19990405 "L'existence depuis 1992 d'un Organe de défense des habitants, chargé de réglementer les questions de protection et de prévention des droits de l'homme ne rend pas nécessaire, pour l'heure, la création d'une commission des droits de l'homme", a expliqué Mme Monica Nagel, Ministre de la justice et de la grâce du Costa Rica. Le Ministre présentait ainsi aux dix-huit experts du Comité des droits de l'homme le quatrième rapport périodique de son pays sur la mise en oeuvre du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Les dix-huit experts du Comité des droits de l'homme ont rendu hommage à l'attachement du Costa Rica à la défense des droits de l'homme. Toutefois, plusieurs experts ont souligné que l'Etat costa-ricien ne suit pas de manière satisfaisante les directives du Comité pour établir son rapport. Ils ont ainsi regretté que le quatrième rapport périodique du Costa Rica soit davantage une explication théorique des procédures juridiques mises en place que le compte-rendu d'une mise en oeuvre pratique des dispositions du Pacte. Les experts ont posé des questions sur les procédures prévues en cas de violations des droits de l'homme, le rôle du Médiateur et la suite donnée aux plaintes soumises à l'Organe de défense des habitants. Ils ont demandé des précisions sur le nouveau Code de procédure pénale, entré en vigueur en 1999. Les questions ont porté sur la garde à vue, l'arrestation, le droit d'appel, les recours en cas de torture et de mauvais traitements ou encore les procédures d'appel.

La délégation du Costa Rica dirigée par Mme Monica Nagel, Ministre de la justice et de la grâce, était également composée de M. Bernd Niehaus, Représentant permanent auprès des Nations Unies, de M. Carlos Fernando Diaz, Conseiller et de Mme Marta Lora, Conseiller.

Outre la Présidente du Comité, Mme Cecilia Medina Quiroga (Chili), le Comité est composé des experts suivants qui siègent à titre individuel : M. Abdelfattah Amor (Tunisie); M. Nisuke Ando (Japon); M. Prafullachandra Natwarlal Bhagwati (Inde); M. Thomas Buergenthal (Etas-Unis); Mme Christine Chanet (France); Lord Colville (Royaume-Uni);

Mme Elizabeth Evatt (Australie); Mme Pilar Gaitan de Pombo (Colombie); M. Eckart Klein (Allemagne); M. David Kretzmer (Israël); M. Rajsoomer Lallah (Maurice); M. Fausto Pocar (Italie); M. Martin Scheinin (Finlande); M. Hipolito Solari Yrigoyen (Argentine); M. Roman Wieruszewski (Pologne); M. Maxwell Yalden (Canada); et M. Abdallah Zakhia (Liban).

Cet après-midi, à partir de 15 heures, le Comité poursuivra l'examen du rapport du Costa Rica.

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EXAMEN DU QUATRIEME RAPPORT PERIODIQUE DU COSTA RICA

Rapport (CCPR/C/103/Add.6)

Le rapport apporte des renseignements concernant l'application des 27 premiers articles du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. La Constitution du Costa Rica stipule d'ailleurs que les accords internationaux approuvés par l'Assemblée législative ont une autorité supérieure aux lois. En ce qui concerne l'article 2 sur le respect des droits reconnus par le Pacte, le rapport indique que la Constitution du Costa Rica garantit l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion et respecte toutes les croyances. Les auteurs d'actes ou de faits punissables qui constituent des violations des droits de l'homme sont condamnés à des peines conformément au droit costa-ricien. S'agissant de l'article 4 sur la possibilité de déroger aux dispositions du Pacte, le rapport souligne que la loi ne permet pas de déroger à l'obligation de respecter les droits fondamentaux. Toutefois "en cas de nécessité publique évidente", seule l'Assemblée peut suspendre les droits et garanties individuelles et ce, à la majorité des deux tiers au moins de la totalité de ses membres. S'agissant de l'article 6 concernant le droit à la vie, le rapport affirme que la peine de mort a été abolie en raison du système démocratique en vigueur et du fait que cette peine est considérée comme "allant à l'encontre des droits fondamentaux".

Passant à l'article 14 sur l'égalité devant les tribunaux et les cours de justice, le rapport indique qu'un nouveau Code de procédure pénale doit entrer en vigueur en 1999. Les changements principaux portent sur la création d'un tribunal pénal supérieur de cassation afin de constituer un deuxième degré de juridiction pour les décisions de justice qui jusqu'ici ne sont pas susceptibles d'appel. S'agissant de l'article 18 sur la liberté de pensée, de conscience et de religion, le rapport relève une certaine "dispersion" dans l'ordre juridique. Le texte de la Constitution réaffirme en effet la liberté de culte tout en disposant que la religion catholique, apostolique et romaine est religion d'Etat. De plus, si le libre exercice des cultes est garanti, des restrictions sont imposées pour des raisons d'ordre public. Les articles du Code pénal sanctionnent en effet les actes qui troublent la tranquillité d'autrui, le tapage et toute activité culturelle contraire à la civilisation ou aux bonnes moeurs. S'agissant de l'article 19 sur la liberté d'opinion et d'expression, le rapport souligne qu'au Costa Rica, cette liberté est de vaste portée et ne comporte de restrictions qu'en matière de secrets d'Etat ou dans des cas prévus par la loi. Cependant, la Constitution prévoit la responsabilité des auteurs en cas d'abus commis dans l'exercice de ce droit. Si la Constitution dispose que nul ne peut être inquiété ou poursuivi pour la manifestation de ses opinions pour un acte quelconque non contraire à la loi, elle interdit toutefois aux membres du clergé régulier ou séculier de se livrer à des propagandes politiques sous quelque forme que ce soit en invoquant des motifs religieux ou en utilisant des croyances religieuses.

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Terminant sur l'article 27 sur le droit des minorités, le rapport fait part d'une loi de 1973 portant création de la Commission nationale des affaires indigènes qui déclarent les réserves indigènes inaliénables et consacrées exclusivement à l'établissement des populations et à leur développement. Pour protéger les indigènes contre la discrimination, le Costa Rica a ratifié, en 1992, la Convention concernant les peuples indigènes et tribaux adoptée par la Conférence générale de l'OIT. Enfin, pour donner suite aux prescriptions de la Constitution et de la Convention, l'Assemblée législative a mis à l'examen un projet de loi sur le développement autonome des peuples indigènes. Le projet vise à doter les communautés indigènes d'une autonomie suffisante pour pouvoir décider de leur destinée en prévoyant la mise en place d'organes de représentation politique dotés d'une autorité suffisante pour imposer certaines conduites à l'intérieur des communautés. Le projet de loi vise aussi à doter les territoires indigènes d'une autonomie, en garantissant à leurs habitants la possession de leur territoire. Il prévoit enfin la création d'instituts de financement et de développement économique qui permettent aux indigènes un véritable développement social, en harmonie avec leur culture.

Liste de questions devant être abordées à l'occasion de l'examen du rapport (CCPR/C/65/Q/CRI/1)

Il est notamment demandé à la délégation du Costa Rica d'expliquer pourquoi la loi portant organisation de la juridiction constitutionnelle ne prévoit pas la possibilité de l'introduction d'un recours en habeas corpus et en amparo contre des actes émanant de sujets de droit privé; si l'Etat partie envisage de créer une commission des droits de l'homme indépendante; quelles sont les attributions du Médiateur et combien de plaintes son service reçoit-il par an ?

Dans le cadre de l'égalité entre les sexes et l'égale protection de la loi, les experts ont souhaité obtenir des détails sur la participation des femmes à la vie publique, l'éducation, l'emploi et l'égalité de rémunération dans les secteurs public et privé. Ils ont voulu savoir si le Code du travail s'applique à toutes les femmes qui travaillent ou à certains métiers seulement; quelle est l'incidence de la violence à l'égard des femmes, en particulier la violence conjugale ? Il a été demandé à la délégation de l'Etat partie d'expliquer l'existence apparente, au regard du Code de la famille, d'une inégalité d'obligations entre les hommes et les femmes.

Les experts ont souhaité que le Costa Rica fournisse des informations détaillées sur les mesures prises par les pouvoirs publics pour enquêter sur les allégations de torture, y compris les mauvais traitements qui auraient été infligés à des paysans expulsés de terres dont la propriété était contestée sur les motifs invoqués pour placer une personne en détention provisoire;

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les circonstances dans lesquelles les détenus sont mis au secret et comment peut-on contester les décisions prises en la matière; le grave problème du surpeuplement des prisons; le rôle du Service de défense des droits de l'homme des détenus.

Une autre série de questions porte sur le droit à un procès équitable; le droit de n'être soumis à aucune immixtion arbitraire dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance; la liberté de pensée, de conscience et de religion; la liberté d'expression; la liberté d'association; les droits des enfants; le droit à l'autodétermination, discrimination et droits des minorités; la diffusion d'informations sur le Pacte. Au sujet du droit à l'autodétermination, les experts désirent savoir quelles mesures ont été prises pour lutter contre la discrimination à l'égard des Costa-Riciens d'origine africaine.

Réponses apportées par la délégation du Costa Rica

Mme MONICA NAGEL, Ministre de la justice et de la grâce du Costa Rica, a répondu à la liste de questions écrites préparées par les experts, en soulignant d'abord que son pays jouit d'une démocratie plus que centenaire et s'efforce d'investir tous ses efforts dans les domaines de l'éducation et de la santé. Répondant à la question sur la création éventuelle d'une commission des droits de l'homme, le Ministre a indiqué qu'aucun projet n'existe en ce sens étant donné qu'il existe déjà d'autres instances comme l'Organe de défense des habitants, créé en 1992 pour réglementer tout ce qui concerne la protection et la prévention en matière des droits de l'homme. Le Ministre a expliqué que cet organe a également l'objectif capital de promouvoir et de diffuser les droits des habitants. En conséquence, depuis sa création, l'Organe a vu augmenter le nombre des affaires qui lui ont été soumises en raison de la connaissance accrue que la population acquiert de la question des droits de l'homme. Ainsi les plaintes sont passées d'une moyenne de 84 à 2200 en 1997. En ce qui concerne les efforts entrepris pour assurer l'égalité entre les hommes et les femmes, le Ministre a indiqué que son pays a effectué des progrès remarquables en la matière comme le montre la composition politique du pays. Les deux vices-présidences sont occupées par des femmes, le Gouvernement compte quatre femmes et le Parlement est composé de 25% de femmes. De plus, un des partis majoritaires du pays a décidé de réserver 40% de postes élus aux femmes. En 1998, le Gouvernement a créé, pour la première fois dans le pays, un Ministère de la femme en remplacement de l'Institut national des femmes. Un plan pour l'égalité des chances, un plan pour la prévention de la violence dans la famille et un plan de lutte contre la pauvreté qui inclut un volet dévolu spécifiquement aux femmes ont été mis en oeuvre. Le Ministère de la femme a ainsi pour objectif de protéger les droits des femmes, de prévenir les problèmes d'inégalité entre les sexes, et de coordonner et de superviser les politiques sociales et de développement humain menées par les différents ministères. Le Ministre a aussi mentionné,

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dans ce contexte, les attributions de la Délégation de la femme qui est une institution qui relève désormais du Ministère de la femme alors qu'auparavant il relevait du Ministère de la justice. Le Ministre a également cité l'Organe de défense de la femme qui est une autre institution importante qui travaille conjointement avec l'Organe de défense des habitants.

Evoquant les dispositions du Code du travail relatives à la condition de la femme, le Ministre a souligné que dans son pays l'égalité dans le travail est garantie par la Constitution elle-même; le principe de base étant "à travail égal salaire égal". En ce qui concerne la violence à l'égard de la femme, le Ministre a cité l'adoption d'une loi en 1994 et la promulgation de plusieurs décrets. Elle a en outre indiqué la création d'une Commission au sein des structures de santé chargée de traiter du problème de la violence à l'égard des femmes. De plus, le Ministère de la justice comprend désormais un Conseil de prévention de la violence. Des plans nationaux et des plans régionaux ont en outre été mis en oeuvre. S'agissant de l'égalité de droits et d'obligations au sein de la famille, le Ministre a indiqué que le Code de la famille adopté en 1973 a été un pas important vers la reconnaissance de l'égalité entre les hommes et les femmes. Le nouveau code a ainsi été épuré de nombreuses normes discriminatoires. En outre, la loi sur la promotion de la femme de 1990 a conduit à la modification de plusieurs articles du Code de la famille, pour ce qui concerne, par exemple, les biens immobiliers.

Concernant le droit à la vie, la prévention de la torture et des mauvais traitements, et notamment les allégations de mauvais traitements infligés à des paysans expulsés de leurs terres dans la région de Golfino, Mme Nagel a indiqué que le Gouvernement s'est adressé aux tribunaux et, parallèlement au processus judiciaire, a pris des mesures techniques visant à rétablir la tranquillité dans la région. L'une des raisons des troubles étant l'absence dans cette région de plan systématique de distribution des terres et l'absence de cadastre des fonds ont été débloqués pour établir des plans de distribution contrôlés. Des groupes de gardes civils ont été établis dans la région et on a tenté de régler les différends de manière pacifique. Depuis deux ans il n'y a plus de problèmes dans cette zone, a précisé Mme Nagel.

S'agissant de la tentation préventive et pour maintenir les gens en détention préventive le moins longtemps possible, les procédures judiciaires ont été améliorées et accélérées. Une personne ne peut être ainsi maintenue en détention que dans les cas de flagrant délit ou lorsque les preuves à son encontre sont suffisamment convaincantes. Par ailleurs, une décision judiciaire dûment fondée est indispensable. Le délai de détention maximum est de 24 heures pour le Ministère public et les autorités de police ont le droit de procéder à une garde à vue seulement pendant 6 heures - durée qui peut être prolongée uniquement sur demande expresse auprès d'un juge -. Des peines de remplacement à l'emprisonnement, notamment des services d'intérêt général, peuvent être appliquées aux personnes ayant commis un délit passible

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d'une peine de détention inférieure à 3 ans. Une personne peut être gardée au secret pendant 48 heures sur décision fondée d'un juge. Si le juge possède des preuves catégoriques, il peut prolonger cette garde jusqu'à 10 jours, pendant lesquels le détenu a cependant le droit de rencontrer son avocat.

Pour ce qui est du droit des détenus, Mme Nagel a expliqué qu'outre la privation de liberté, tous les autres droits, y compris le droit de vote, sont respectés, tant pour les personnes en détention préventive que pour les condamnés. Les détenus peuvent déposer plainte et dénoncer les abus auprès des autorités judiciaires. Le Ministère de la justice veille au respect des droits de l'homme des personnes incarcérées. En outre, le droit d'appel est garanti dans tous les cas et toutes les personnes privées de liberté peuvent y avoir accès. Elle a précisé ensuite que le Costa Rica doit faire face à un problème de surpeuplement des prisons, lié à un manque d'infrastructure, ce qui conduit notamment à l'impossibilité de séparer les personnes encore sous le coup d'une enquête des personnes déjà jugées et condamnées. Pour faire face à cette situation, le Gouvernement a entrepris de construire plusieurs prisons supplémentaires. Toutefois en raison du sous- développement, les crédits publics vont prioritairement aux services d'éducation et aux services sociaux et c'est pourquoi un système de concession à des entreprises privées locales ou étrangères pour la construction de nouveaux centres de détention a été récemment développé.

Questions des experts

Mme PILAR GAITAN DE POMBO a souligné que dans le cas du Costa Rica, il fallait tenir compte du contexte extrêmement favorable dont bénéficie le pays, qui se caractérise par une situation macroéconomique saine et une grande stabilité politique permettant le respect des droits économiques et politiques et des droits de l'homme. Elle s'est réjouie que des mesures aient été prises garantissant la primauté du droit international sur le droit interne et que la peine de mort ait été abolie. Elle a souligné le caractère tout simplement unique, de la décision prise par le Gouvernement costa-ricien de supprimer l'armée. L'experte a demandé ensuite quels sont les pouvoirs de la garde civile et quelle est sa capacité d'action. Elle a également souhaité obtenir des informations sur la situation dans laquelle se trouvent les 350 000 réfugiés issus d'Amérique centrale et sur leurs possibilités d'intégrer le marché du travail ?

M. MAXWELL YALDEN a regretté que l'Etat partie, dans son rapport, consacre davantage d'attention au cadre constitutionnel, institutionnel et juridique qu'à la jouissance effective et pratique des droits énumérés dans le Pacte. Ce point avait pourtant fait l'objet d'une recommandation du Comité lors de l'examen du troisième rapport périodique, a-t-il rappelé. M. Yalden a demandé à connaître les résultats des plaintes déposées auprès de l'ombudsman.

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Il a rappelé, à cet égard, qu'un défenseur du peuple ne peut faire que des recommandations et qu'il appartient au Ministère public de les mettre en oeuvre. Le défenseur du peuple est-il compétent également concernant les violations des droits dont un individu peut être victime dans le secteur privé ? S'agissant de la condition des femmes, l'expert a regretté que le rapport ne donne pas de données concrètes sur la participation des femmes à la population active et sur la place qu'elles occupent aux postes de décision. Existe-t-il des organismes de surveillance indépendants qui examineraient les questions d'égalité entre les sexes dans l'emploi et dans la participation à la vie publique ? M. Yalden a également demandé des précisions quant à la formation en matière de droits de l'homme reçue par le personnel de police et des prisons.

M. THOMAS BUERGENTHAL a rendu hommage à l'attachement du Costa Rica à la dimension des droits de l'homme en relevant toutefois certains problèmes. Il a notamment soulevé la question de la procédure d'extradition des ressortissants du Venezuela qui avait d'ailleurs suscité des plaintes de la Cour suprême. Il a donc demandé quelle suite à été donnée aux initiatives de la Cour suprême. En matière judiciaire, l'expert a demandé si la législation costa-ricienne comprend des dispositions relatives à la libération sous caution en souhaitant aussi en connaître davantage sur les procédures de garde à vue. M. ROMAN WIERUSZEWSKI a lui aussi regretté que le rapport périodique du Costa Rica ait plus une portée théorique que pratique. Il a désiré savoir comment par exemple, la Cour suprême contribue-t-elle à une meilleure compréhension des dispositions du Pacte et quelle est la suite donnée aux plaintes soumises au Médiateur. Dans quelle mesure les personnes qui ne sont pas ressortissantes du Costa Rica peuvent-elles recourir à ce dispositif, a insisté l'expert en demandant un organigramme des différents organismes relatifs à la protection des droits de l'homme. Evoquant le nouveau Code de procédure pénale, l'expert a voulu savoir comment est mis en oeuvre le principe de présomption d'innocence.

LORD COLVILLE a renouvelé sa demande de renseignements sur la manière dont les droits énoncés dans le Pacte sont protégés en pratique. Quels sont les recours effectifs pour les personnes dont les droits sont violés ? L'expert a également soulevé la question de la détention préventive, qui selon lui est un "problème fréquent dans la région". Qu'en est-il du droit d'être traduit en justice sans délai injustifié, a demandé l'expert. M. ECKART KLEIN est lui revenu sur l'article 6 du Pacte relatif au droit à la vie en jugeant inhabituel qu'un pays, comme c'est le cas au Costa Rica, ne dispose d'aucune législation concernant le port d'armes par la police qui peut pourtant entraîner mort d'hommes. Il a aussi demandé s'il existe un droit à un niveau minimum de subsistance reconnu et, dans l'affirmative, s'il s'applique aussi à des personnes qui ne sont pas ressortissantes du pays. En ce qui concerne la liberté de mouvement, l'expert a demandé quelle est la situation des résidents permanents et dans quelles circonstances ces derniers peuvent-ils considérer que le Costa Rica est leur propre pays.

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Mme CHRISTINE CHANET a elle regretté que "le Costa Rica considère comme acquis sa réputation en matière de droits de l'homme". Elle a plus précisément regretté que les directives du Comité des droits de l'homme n'aient pas été respectées et que les dispositions du Pacte soient considérées comme "des grands thèmes". Le rapport donne beaucoup d'informations législatives sans donner les informations pratiques requises, a insisté l'expert. Soulevant une question liée à l'article 4 du Pacte sur la dérogation aux dispositions prévues, Mme Chanet a demandé ce qu'il faut entendre par "nécessité publique évidente" lorsque le Pacte parle lui de "danger public exceptionnel". En ce qui concerne la torture, elle a souhaité en savoir davantage sur les mesures de prévention. Quelle est la politique du pays en matière de refoulement vers les pays où il existe un risque de torture, a-t-elle demandé. L'expert a également souhaité connaître les dispositions prévues en matière de garde à vue et d'arrestation et disposer davantage de renseignements sur la mise en oeuvre du principe de présomption d'innocence.

M. HIPOLITO SOLARI YRIGOYEN a rappelé qu'en Amérique du Sud, le Costa Rica sert souvent de modèle pour ce qui est de la solidité et de la stabilité de ses institutions politiques et de son économie. L'annonce de la ratification de la Convention américaine sur la disparition forcée des personnes est de bonne augure, a-t-il estimé, avant de se féliciter des mesures prises par les autorités costa-riciennes en faveur de la défense des citoyens. Il a rejoint les préoccupations de M. Yalden concernant certains aspects de la participation de la femme à la société. Il a également souligné que le rapport de l'Etat partie présentait certaines imprécisions et il a notamment souhaité savoir si le nouveau Code pénal est effectivement entré en vigueur à la date prévue. Evoquant les manifestations provoquées par la politique de privatisation lancée par le Gouvernement, il a demandé à la délégation de confirmer si ces événements avaient bien entraîné la mort de trois personnes. N'y a-t-il pas eu recours excessif à la force, s'est interrogé l'expert. M. Yrigoyen a également évoqué plusieurs cas précis de mauvais traitements commis par les forces publiques ou pénitentiaires et a demandé si les coupables avaient été punis.

M. FAUSTO POCAR a estimé que le Costa Rica avait pris très au sérieux les préoccupations et les recommandations formulées par le Comité lors de la présentation du troisième rapport périodique. S'il pourrait être plus fourni quant à la suite donnée aux actions entreprises par le Gouvernement ou les citoyens, le rapport n'en donne pas moins de nombreuses précisions qui permettent d'avoir une image claire de la situation pratique. L'expert a demandé à connaître les conditions de la détention au secret et à quel moment exactement la personne arrêtée peut prendre contact avec son avocat. Concernant le droit à l'appel, désormais assuré dans tous les cas, il a souhaité savoir si ce changement découlait du nouveau Code pénal évoqué. Ce nouveau code contient-il des dispositions transitoires, notamment concernant les cas où le délai au droit d'appel a déjà expiré ?

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M. RAJSOOMER LALLAH s'est déclaré déçu par certaines imprécisions du rapport, concernant principalement les recours devant la Cour de Cassation. Il s'est déclaré perplexe face aux explications données sur la construction des prisons, confiée à des sociétés privées. Il est notamment préoccupant que le Gouvernement rembourse les prêts contractés en fonction du nombre de détenus occupant le bâtiment. Est-ce à dire que l'autorité pénitentiaire a été privatisée, s'est interrogé M. Lallah, avant de rappeler que cela contreviendrait au Pacte.

Abordant tout particulièrement la question de l'égalité entre les hommes et les femmes, Mme ELIZABETH EVATT a demandé s'il y avait une amélioration véritable vers l'égalité des salaires et si cela avait été mesuré ? Les dispositions de l'ancienne législation prévoyant que les charges pour viol étaient abandonnées si la femme épousait le coupable sont-elles toujours en vigueur, a t-elle également demandé. Quels sont les motifs et les conditions permettant de bénéficier d'un avortement légal et y a-t-il eu des effets bénéfiques sur la mortalité maternelle ? Mme Evatt a en outre souhaité obtenir des précisions sur les conditions de détention des femmes.

M. DAVID KRETZMER a souhaité plus d'informations sur les recours concrets dont disposent les femmes victimes de violence dans le milieu familial. Venant à l'article 6 sur le droit à la vie, l'expert a demandé une définition précise de la peine de bannissement prévue pour ceux qui sont coupables de violation de ce droit. Pour sa part, M. ABDELFATTAH AMOR a estimé que le quatrième rapport périodique du Costa Rica a une telle profondeur au niveau de l'analyse que cette analyse devient totalement académique et masque parfois l'aspect pratique des choses. Soulevant la question des jeunes qui constituent la quasi totalité des responsables de délits, l'expert a demandé l'âge de la majorité pénale et des informations sur les mesures prises pour lutter contre la marginalité des jeunes. Abordant la question de la situation des femmes, l'expert a souhaité savoir si l'on a recours à des mesures positives en leur faveur. Il a souhaité connaître les statistiques relatives aux sanctions socio-éducatives. Y a-t-il une discrimination en matière d'emploi fondée sur la nationalité, a d'autre part demandé l'expert.

M. NISUKE ANDO est revenu sur les dispositions relatives à l'égalité dans le travail pour demander s'il existe des activités professionnelles dont les femmes sont exclues. Existe-t-il dans certains professions des différences d'horaire ? Quelle est la proportion des femmes qui travaillent par exemple dans les secteurs primaire, agricole, commercial ou d'éducation. L'expert a aussi souhaité connaître l'âge légal du mariage et les dispositions en matière de répartition des biens matrimoniaux. Abordant aussi la question relative aux actions en inconstitutionnalité, l'expert a demandé si la Chambre constitutionnelle connaît des affaires d'inconstitutionnalité des pactes et traités internationaux. A son tour, M. PRAFULLACHANDRA NATWARLAL BHAGWATI

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a regretté que le rapport du Costa Rica pêche par trop de "formules de style qui ne reflètent pas clairement la réalité sur le terrain". Il a souhaité savoir si la Chambre constitutionnelle peut également faire respecter les Pactes internationaux. Venant à la procédure pénale, l'expert a souhaité savoir quelle est en moyenne le délai pour qu'une personne arrêtée comparaisse devant un tribunal.

Suite des réponses de l'Etat partie aux questions écrites

Reprenant la parole Mme NAGEL a indiqué que la Constitution établit clairement l'égalité des individus devant la loi et qu'aucune discrimination en fonction des pratiques sexuelles n'est permise. Par ailleurs, la loi sur le Sida pose que toute personne coupable de discrimination en raison de l'état de santé ou des orientations sexuelles d'un individu est passible d'une peine d'emprisonnement allant jusqu'à deux mois ou d'une amende. Des personnes homosexuelles se sont plaintes devant les tribunaux contre deux membres de rang élevé du clergé. Même si la sentence prononcée a été en faveur des représentants de l'Eglise, il faut considérer que ces faits témoignent de l'action des autorités publiques contre la discrimination, a estimé le Ministre. Il n'existe pas non plus de discrimination sur la base de la religion, et même si la religion officielle du pays est la religion catholique, la liberté de culte est respectée. Un projet de loi est actuellement en circulation tendant notamment à amender le Code de l'éducation et permettant aux parents de demander que leurs enfants soient exemptés de tout enseignement religieux ou reçoivent un enseignement sur leur religion propre. Les détenus peuvent recevoir la visite de prêtres catholiques, mais également de représentants de toute autre religion. Un autre projet de loi prévoit de donner effet juridique au mariage civil et non plus seulement au mariage catholique.

En ce qui concerne la réforme du droit du travail assurant le droit à l'association, Mme Nagel a affirmé que les travailleurs peuvent adhérer à des syndicats ou à tout type d'associations, sans être victimes de discrimination. Si un employeur pose un obstacle à la liberté d'association du travailleur, ce dernier peut faire appel à la justice pour inconstitutionnalité.

Le Ministre de la justice et de la grâce a poursuivi sur la question de la prostitution infantile et des mauvais traitements infligés aux enfants. Elle a ainsi indiqué qu'une Commission mixte a été créée pour régler ce qui reste de ce problème. Le Président du Costa Rica a en outre créé un Conseil national de l'enfance qui assure une collaboration entre les pouvoirs publics et les ONG. De plus 24 organisations se sont fortement impliquées dans cette question en travaillant étroitement avec le Gouvernement. Par ailleurs, un nouveau Code de l'enfance a été élaboré. De son côté, le Parlement examine un projet de loi visant à punir le proxénétisme. Le Ministre a ajouté que depuis un an, un Office national de l'enfance a été créé comme institution directrice en matière d'enfance, d'adolescence et de la famille.

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