LE CONSEIL DE SECURITE EXAMINE SANS SUCCES UN PROJET DE RESOLUTION SUR LE KOSOVO
Communiqué de Presse
CS/1036
LE CONSEIL DE SECURITE EXAMINE SANS SUCCES UN PROJET DE RESOLUTION SUR LE KOSOVO
19990326 Le Conseil de sécurité n'a pas été en mesure, ce matin, d'adopter le projet de résolution présenté par le Bélarus et la Fédération de Russie, en raison du vote négatif de douze de ses membres, dont trois permanents, la France, le Royaume-Uni et les Etats-Unis. Le projet exigeait qu'il soit immédiatement mis fin à l'emploi de la force contre la République fédérale de Yougoslavie et que les négociations soient reprises d'urgence sur la question.Expliquant leur vote négatif, les représentants ont expliqué que le projet de résolution ne reflète pas la réalité sur le terrain et que son adoption constitue une porte ouverte à la politique répressive et de nettoyage ethnique menée par Belgrade. Ce projet, ont-ils précisé, ignore les menaces posées à la paix et à la sécurité dans la région des Balkans qui sont à l'origine de l'adoption des résolutions 1199, 1203 et 1160 du Conseil de sécurité. Evoquant la légitimité de l'intervention militaire de l'OTAN, contestée par la Fédération de Russie et la Chine, le représentant des Etats- Unis a indiqué que la Charte des Nations Unies n'a jamais cautionné l'agression armée contre un groupe éthnique.
Le représentant de la Fédération de Russie, a estimé que la situation actuelle va à l'encontre de la Charte des Nations Unies, notamment l'article 24 qui accorde la responsabilité première au Conseil dans le domaine du maintien de la paix et de la sécurité internationales. Il a mis en garde contre les conséquences de telles actions qui déstabilisent et sapent le système des relations internationales.
Rappel des faits
Le Conseil de sécurité s'était réuni d'urgence, mercredi 24 mars, à la demande de la Fédération de Russie pour examiner la situation au Kosovo après que les forces de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN) eurent bombardé des installations militaires en République fédérale de Yougoslavie. L'OTAN déclare que ses bombardement visent à amener le Président de la Yougoslavie à accepter le plan de paix pour le Kosovo. Les Accords de Rambouillet fixent un cadre d'autonomie pour le Kosovo pour une période de trois ans dans le respect des frontières internationales de la République
fédérale de Yougoslavie et prévoient le déploiement d'une force militaire internationale au Kosovo. La question avait déjà fait l'objet de plusieurs résolutions dont une qui condamne l'usage excessif de la force par les Serbes et les actes de terrorisme commis par l'Armée de libération du Kosovo. Le Conseil avait en outre adopté la résolution 1199 qui exige un cessez-le-feu immédiat. Le Conseil a adopté la résolution 1203 par laquelle il avait approuvé les accords signés entre la République fédérale de Yougoslavie et l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), d'une part, et la République fédérale de Yougoslavie et l'OTAN d'autre part.
Les pays membres du Conseil ont pris la parole: Canada, Slovénie, Pays- Bas, Etats-Unis, Fédération de Russie, Royaume-Uni, France, Argentine, Malaisie, Bahreïn et Chine. Les pays suivants sont également intervenus: Ukraine, République fédérale de Yougoslavie, Bélarus, Cuba, Bosnie-Herzégovine et Inde.
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Projet de résolution (S/1999/328)
Le Conseil de sécurité,
Rappelant que la Charte des Nations Unies lui confère la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationales,
Profondément préoccupé de ce que l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN) ait usé de la force militaire contre la République fédérale de Yougoslavie sans son autorisation,
Affirmant que ce recours unilatéral à la force constitue une violation flagrante de la Charte des Nations Unies, en particulier des Articles 2, paragraphe 4, 24 et 53,
Considérant que l'interdiction par l'OTAN des vols civils dans l'espace aérien d'un certain nombre de pays de la région constitue, au regard de l'article premier de la Convention de Chicago relative à l'aviation civile internationale, une violation flagrante du principe de complète et exclusive souveraineté de chaque État sur l'espace aérien surjacent à son territoire,
Rappelant toutes ses résolutions et décisions pertinentes, en particulier la déclaration de son Président en date du 29 janvier 1999 (S/PRST/1999/5), dans laquelle il a notamment indiqué qu'il apprécierait que les membres du Groupe de contact le tiennent informé des progrès qui auraient été accomplis dans le cadre des négociations sur un règlement politique de la situation au Kosovo (République fédérale de Yougoslavie), et attendant qu'il lui soit fait rapport à ce sujet,
Réaffirmant son attachement à la souveraineté et à l'intégrité territoriale de la République fédérale de Yougoslavie,
Considérant que l'emploi de la force par l'OTAN contre la République fédérale de Yougoslavie constitue une menace contre la paix et la sécurité internationales,
Agissant en vertu des Chapitres VII et VIII de la Charte,
1. Exige qu'il soit immédiatement mis fin à l'emploi de la force contre la République fédérale de Yougoslavie et que les négociations soient reprises d'urgence;
2. Décide de demeurer activement saisi de la question.
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Explications de vote
M. ROBERT FOWLER (Canada) a déclaré que la résolution demande la cessation des hostilités et un retour de toute urgence à la table de négociation. Qu'a donc fait l'ensemble de la communauté internationale depuis le début de la crise humanitaire au Kosovo, si ce n'est négocier d'urgence et activement pour éviter cette escalade. Nous avons dépêché plusieurs missions diplomatiques et d'envoyés spéciaux à Belgrade, sous les auspices de l'ONU, de l'OTAN, et de l'OSCE. Nous avons également lancé plusieurs initiatives bilatérales dans le but de convaincre le Président Milosevic du sérieux de nos intentions. Nous avons déployé une force de surveillance internationale et organisé une grande conférence de paix, a rappelé M. Fowler. Le Conseil de sécurité a adopté plusieurs résolutions et déclarations présidentielles demandant justement que le Président Milosevic mette fin à la répression brutale perpétrée à l'encontre de ses concitoyens. Pendant ce processus, le Président Milosevic s'est servi des bonnes dispositions de la communauté internationale pour poursuivre et même intensifier ses tactiques de répression au Kosovo - même lorsque les négociations étaient en cours - en violation évidente des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et des engagements qu'il avait pris en octobre dernier.
Sans vouloir revenir sur l'étendue de la crise humanitaire au Kosovo, M. Fowler a rappelé aux membres du Conseil que des milliers de personnes sont mortes, que des centaines de milliers se retrouvent sans abris, à la merci des rigueurs de l'hiver. Le nombre des victimes augmente d'heure en heure. Leurs maisons et leurs fermes ont été pillées, brûlées et leur bétail tué. Ceux qui soutiennent cette résolution se placent en dehors du consensus selon lequel il est temps de mettre un terme à la violence perpétrée par le Gouvernement de la République fédérale de Yougoslavie contre son propre peuple. Plutôt que de soutenir cette résolution non productive, destinée à détourner l'attention des problèmes humanitaires, il serait plus utile que ces pays consacrent leur énergie à convaincre les dirigeants de Belgrade de mettre un terme à la violence exercée contre leur peuple et d'accepter l'Accord de paix de Rambouillet.
M. DANILO TURK (Slovénie) a indiqué que son pays votera contre le projet de résolution présenté aujourd'hui dans la mesure où ce texte constitue une tentative insuffisante de régler la situation. Il manque d'objectivité compte tenu du fait qu'il ignore la menace posée à la paix et à la sécurité dans la région et les condamnations par le Conseil de sécurité des violations commises par la République fédérale de Yougoslavie. Il semble que le texte ait pour intention de redéfinir la situation factuelle décrite dans les résolutions 1199 et 1203 du Conseil. Le texte ne tient pas compte des circonstances sur le terrain et de la nécessité de l'action militaire ainsi que des raisons ayant motivé cette action. Le représentant a indiqué que le recours à la
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force du Gouvernement de Belgrade a créé la situation actuelle. La Slovénie aurait préféré que ce recours à la force eu l'approbation du Conseil, mais, malheureusement, cela n'a pas été le cas. Il est vrai que le Conseil a la responsabilité primordiale, mais non exclusive de la paix et de la sécurité internationales.
M PETER VAN WALSUM (Pays-Bas) a déclaré que son pays avait accueilli avec espoir la résolution 1203 du Conseil de sécurité qui permettait de penser que le Président Milosevic accepterait une solution pacifique au problème du Kosovo. Le représentant a déclaré que l'action de l'OTAN, auquel son pays a pris part, constitue la suite directe du non respect flagrant par la République fédérale de Yougoslavie de la résolution 1203 et qu'une telle action ne saurait être considérée comme un recours unilatéral à la force. Si le Conseil demandait un arrêt de l'action engagée par l'OTAN, ce serait, une fois de plus, encourager le Président Milosevic à aller plus loin au kosovo. C'est pour cette raison que les pays-Bas voteront contre le projet de résolution présenté par la Fédération de Russie a affirmé le représentant.
M. PETER BURLEIGH (Etats-Unis) a déclaré que cette résolution devait être rejetée dans la mesure où elle ne constituait qu'un encouragement au Président Milosevic à poursuivre sa répression militaire à l'encontre de la population civile du Kosovo. L'adoption de ce texte compromettrait les perspectives d'un règlement négocié. Clairement ce texte ne sert pas la cause de la paix dans les Balkans. Nous avons lancé, avec nos alliés, une action militaire à contrecoeur après que toutes les options diplomatiques aient été épuisées. Belgrade a choisi la guerre en rejetant le plan de paix et en accentuant sa répression sur le peuple du Kosovo, en violation des résolutions du Conseil de sécurité. Nous avons reçu des témoignages alarmants, selon lesquels les forces serbes se servent des populations civiles comme boucliers humains, que les non-combattants sont regroupés et que certains sont exécutés sommairement, a-t-il indiqué. Les tentatives visant à vérifier ces témoignages se sont heurtées au refus du Gouvernement de Belgrade qui s'est mis à harceler et à expulser la presse et les groupes de défense des droits de l'homme, a indiqué en outre le représentant.
Plus de 60 000 personnes ont été forcées à fuir leurs foyers depuis le début de la dernière série de pourparlers menés en France et ce nombre augmente tous les jours. Actuellement, l'on compte plus de 250 000 personnes déplacées. Il s'agit là d'une catastrophe humanitaire, a souligné le représentant. Un nombre important de réfugiés s'est déversé dans les pays voisins. La stabilité de l'Albanie, de la Bosnie-Herzégovine, de l'ex- République yougoslave de Macédoine et du reste de la région est en jeu. Le représentant a fait part de son appréciation pour les efforts déployés par la Fédération de Russie en faveur de la cause de la paix dans le cadre du Groupe de contact. La voie à prendre est claire. Les résolutions 1199 et 1203 du Conseil de sécurité ont indiqué le chemin à suivre à Belgrade qui a néanmoins choisi de mettre au défi la communauté internationale. La résolution qui nous est soumise aujourd'hui affirme que l'OTAN agit en violation de la Charte des Nations Unies. Néanmoins, a précisé le représentant, la Charte des Nations
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Unies ne cautionne pas l'agression armée contre des groupes éthniques ni le fait de détourner le regard d'une catastrophe humanitaire. Les actions de l'OTAN sont tout à fait justifiées et sont indispensables pour mettre un terme à la violence.
M. SERGEY LAVROV (Fédération de Russie) a déclaré que les activités militaires qui se poursuivent ont déjà fait des victimes et provoqué de graves dommages. Elles vont à l'encontre des efforts pour trouver une solution politique à la crise, puisque tous les Etats ont l'obligation de respecter le droit international. La Fédération de Russie a demandé une réunion d'urgence des membres du Groupe de contact afin de faire cesser les hostilités. L'attitude agressive contre un Etat souverain va à l'encontre de la Charte des Nations Unies, notamment l'article 24 qui impose au Conseil de maintenir la paix et la sécurité. De telles actions déstabilisent et sapent le système des relations internationales a déclaré M. Lavrov qui a indiqué que les pires craintes se réalisent : le virus de l'illégalité s'empare de domaines sans cesse nouveaux dans les relations internationale. L'OTAN veut prendre des décisions à la place d'Etats souverains; or chaque Etat est maître de l'espace aérien de son territoire.
C'est pourquoi, avec le Bélarus et l'Inde, la Fédération de Russie demande la fin de l'emploi de la force contre la République fédérale de Yougoslavie et la reprise des négociations de paix. C'est ce que doit faire la communauté internationale, si elle souhaitait mettre fin à cette crise. D'un côté de la balance, il y a le droit, de l'autre il y a l' illégalité, a résumé M. Lavrov. Soit on défend les principes de l' ONU et la liberté des peuples, soit on accepte que la force dicte les conduites. Il a rappelé que les membres du Conseil ont une responsabilité particulière devant leur propre peuple mais aussi face à la communauté mondiale et à tous les membres des Nations Unies. Il faut faire cesser la violence et faire régner le droit, c'est-là le message à faire passer. La capacité du Conseil de faire respecter la Charte de l'ONU est importante pour l'avenir même de l'ONU. Le choix pris aujourd'hui par le Conseil se fait aux yeux de toute la communauté internationale.
M. STUART ELDON (Royaume-Uni) a déclaré que la communauté internationale avait déployé des efforts importants pour trouver une solution diplomatique à la crise au Kosovo. Ces efforts n'ont pas été couronnés de succès. Le Président Milosevic a permis à ses forces de continuer leur répression violente à l'encontre de la population civile du Kosovo et a ignoré les appels en faveur d'un règlement négocié. Il a agi en dépit de la volonté du Conseil de sécurité. Comme l'ont reconnu les résolutions 1199 et 1203 du Conseil, la politique de Belgrade au sujet du Kosovo est à l'origine de la menace à la paix et à la sécurité dans la région. Compte tenu de ces circonstances, l'intervention militaire est justifiée et constitue une mesure exceptionnelle visant à prévenir une catastrophe humanitaire de grande ampleur. L'adoption de cette résolution aujourd'hui constituerait une porte ouverte à l'action répressive du Président Milosevic. C'est la raison pour laquelle, le Royaume- Uni votera contre ce projet.
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M. ALAIN DEJAMMET (France) a évoqué l'adoption des résolutions 1160 1203 et 1199 par le Conseil de sécurité dans la cadre de l'application du Chapitre VII de la Charte et le non respect de leurs dispositions par Belgrade. A lieu de cela, nous avons assisté à l'escalade de la violence de la part du Gouvernement du Président Milosevic. Le projet de résolution soumis aujourd'hui allait à l'encontre de notre jugement et c'est la raison pour laquelle la France a voté contre.
M. FERNANDO ENRIQUE PETRELLA (Argentine) a déclaré que la décision de l'Argentine de voter contre le projet se fonde sur la nécessité de tout mettre en oeuvre pour mettre un terme aux violations très graves des droits de l'homme dans la province du Kosovo. Ces violations font l'objet de preuves innombrables. Le respect des normes juridique et du droit humanitaire international sont une obligation pour tous. Cette obligation est d'autant plus urgente que des crimes internationaux extrêmement graves, y compris des actes de génocide, ont été perpétrés dans cette région. L'Argentine est présente dans les Balkans depuis 1992. Sa position d'aujourd'hui se fonde donc sur l'expérience acquise directement sur le terrain. L'Argentine ne peut pas accepter un projet qui ne mentionne pas les résolutions précédentes du Conseil, qui ne tient pas compte des précédents qui ont eu lieu dans cette région et qui ne reconnaît pas la réalité humanitaire sur le terrain. Le représentant permanent a engagé tous ceux qui une influence dans la région, en particulier la Fédération de Russie, à poursuivre leurs efforts pour trouver un règlement définitif afin de promouvoir une paix durable et d'alléger la souffrance des populations, en particulier les réfugiés dont bon nombre ont perdu pour toujours leur foyer.
M. RASTAM MOHD ISA (Malaisie) a déclaré que son pays souscrit pleinement à l'impérieuse nécessité de préserver le caractère sacré de la Charte des Nations Unies. Il a rappelé que tous les conflits devraient être abordés sous l'angle du dialogue et de la négociation politique, et non par l'usage de la force. Celle-ci ne devrait être employée qu'en dernier recours. Il s'est déclaré déçu que tous les efforts déployés pour résoudre le conflit au Kosovo de façon pacifique, aient été en vain. Cet échec, a-t-il affirmé, est pleinement imputable aux responsables yougoslaves, dès lors qu'ils continuent de rejeter les Accords de Rambouillet et se livrent à des attaques militaires contre le peuple du Kosovo. Le représentant de la Malaisie a regretté que le projet passe sous silence le fait que les forces de la République Fédérale de Yougoslavie ont renforcé leurs activités militaires, en ayant notamment recours à un usage démesuré de la force, exacerbant ainsi une situation humanitaire déjà suffisamment sérieuse.
La Malaisie est profondément préoccupée par l'aggravation de la situation sur le terrain et déplore les morts et destructions supplémentaires ainsi que le grand nombre de personnes déplacées qui résultent des offensives militaires serbes, ces derniers jours. Une réponse rapide et appropriée de la part de la communauté internationale s'impose, a-t-il notamment suggéré en faisant remarquer que les résolutions 1199 et 1203 se réfèrent toutes deux au chapitre VII de la Charte et reconnaissent que la situation au Kosovo
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constitue une menace pour la paix et la sécurité dans la région. Dans sa résolution 1199 le Conseil a demandé que les autorités yougoslaves prennent les mesures nécessaires pour améliorer la situation humanitaire. Le représentant a regretté que les dirigeants yougoslaves, non seulement ne se conforment pas aux résolutions du Conseil, mais qu'ils continuent de rejeter les Accords de Rambouillet. La Malaisie n'a pas d'autre solution que de voter contre le projet de résolution, a affirmé le représentant.
M. JASSIM MOHAMMED BUALLAY (Barheïn) a indiqué que son pays aurait préféré que le recours à la force se fasse dans le cadre du Conseil de sécurité. Cependant, le Gouvernement de Belgrade a disposé de nombreuses occasions pour trouver une solution pacifique au conflit. Malheureusement, la partie serbe a continué à utiliser la force dans la région du Kosovo, ce qui a provoqué une crise humanitaire de grande envergure. Face à cette situation, on ne saurait approuver le projet de résolution car cela équivaudrait à encourager la politique répressive des autorités de Belgrade.
M. QIN HUASUN (Chine) a déclaré que les bombardements intermittents de la République fédérale de Yougoslavie par l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord sous la conduite des Etats-Unis ont déjà fait de nombreuses victimes et de multiples dégâts. La situation dans les Balkans s'est sérieusement détériorée. Le Gouvernement chinois s'oppose fermement à une telle action qui viole les principes de la Charte des Nations Unies et le droit international, et qui constitue un défi pour le Conseil de sécurité. Il a réaffirmé l'opposition ferme de son pays face à cette action militaire. La Chine s'oppose à l'ingérence dans les affaires intérieures des pays sous quelque forme que ce soit. La crise au Kosovo devrait être réglée à l'intérieur de la République fédérale de Yougoslavie, elle-même. Il faut garantir les droits et les intérêts légitimes de toutes les ethnies du Kosovo. La Chine a voté en faveur du projet et a regretté vivement que le Conseil ne l'ait pas adopté.
Déclarations
M. VOLODYMYR YEL'CHENKO (Ukraine) a indiqué que son pays était prêt à faire tout son possible pour éviter les conséquences de la situation actuelle. Il a informé le Conseil de sécurité, organe ayant la responsabilité première de la paix et de la sécurité internationales, de la visite que rendra le Ministre des affaires étrangères de l'Ukraine à Belgrade. Cette mission de paix constitue une autre preuve de la volonté de l'Ukraine de contribuer à la cause de la paix et de la stabilité dans la région des Balkans. Au cours de ses négociations, le Ministre des affaires étrangères fera un certain nombre de propositions qui pourraient conduire à la cessation des attaques militaires de l'OTAN, la reprise des négociations entre les parties, le retour de la mission de vérification de l'OSCE, le règlement de la question des réfugiés, la préservation de l'intégrité territoriale de la République fédérale de Yougoslavie et l'octroi de l'autonomie au Kosovo. L'une des propositions spécifiques que fera le Ministre portera sur la question des garanties à mettre en place pour garantir le règlement politique de la situation et
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notamment la question du déploiement d'une force multinationale de maintien de la paix dont la composition devrait être acceptée par toutes les parties. Entre-temps, a souligné le représentant, toute solution pacifique passe par le respect de la part des autorités de la République fédérale de Yougoslavie et de la communauté albanaise du Kosovo des résolutions 1160, 1198 et 1203 du Conseil de sécurité.
M. VLADISLAV JOVANOVIC (République fédérale de Yougoslavie), a déclaré que la machine de guerre de l'OTAN a transformé un Etat souverain et pacifique en champ de bataille au nom de la volonté de faire valoir une suprématie militaire. En faisant preuve d'une haine violente contre la population serbe, l'OTAN et les Etats-Unis ont jeté le trouble et lancé des attaques très violentes contre la population serbe. Ils ont manifesté leur soutien aux séparatistes terroristes. Ils cherchent de façon honteuse à manipuler le public pour faire entériner leur agression. Les forces de l'OTAN ont permis la reprise des agressions des FLK contre les Serbes. Nous n'avons d'autre choix que de nous protéger en faisant valoir les principes de la Charte des Nations Unies, a ajouté le représentant. Pour la troisième fois au cours de ce siècle, la population serbe s'est vue dans l'obligation de subir un ultimatum, celui de l'OTAN. Elle n'a que deux choix : renoncer à une partie de son territoire ou voir ce territoire pris par la force. L'action de l'OTAN est injustifiable. Si l'agression se poursuit, la République fédérale de Yougoslavie continuera de se défendre sur la base de l'article 51 de la Charte. Quand l'agression aura cessé, nous serons prêts de reprendre les discussions sur la base des principes décidés le 10 janvier dernier et du document signé à Paris. L'ONU ne doit pas permettre que l'on viole les droits de la République fédérale de Yougoslavie. Il est du pouvoir du Conseil de faire cesser cette agression. S'il décide le contraire, il sera responsable de la destruction du système des relations actuel. Le Conseil va prendre une décision importante pour son propre avenir. Il peut garder son rôle de maintien de la paix ou remettre cette responsabilité entre les mains de l'OTAN. Aujourd'hui vous avez fait votre choix, a conclu le représentant.
M. ALYAKSANDR SYCHOV (Bélarus) a fait part de sa profonde préoccupation quant aux actions militaires menées par l'OTAN. Se fondant sur la responsabilité primordiale du Conseil de sécurité en ce qui concerne la maintenance de la paix et de la sécurité internationales, le Bélarus avait été parmi ceux demandant la réunion d'urgence du Conseil. Nous sommes convaincus que des possibilités pour la poursuite du dialogue pourraient être définies dans le cadre des réunions du Conseil. Nous considérons que la décision du Conseil de rejeter le projet de résolution présenté aujourd'hui est contre- productive. Nous sommes par ailleurs en droit de mettre en cause la logique des dirigeants de l'OTAN a sujet d'un soit disant règlement d'une crise humanitaire au Kosovo par le recours à la force. La décision de mener une intervention militaire ne peut être prise que par le Conseil de sécurité. Les conséquences de ce type d'activité sont prévisibles et risquent de porter
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atteinte aux relations internationales et à l'autorité de l'ONU. Le représentant a demandé la reprise des travaux du Groupe de contact. Les événements actuels donnent l'occasion de montrer au monde entier la primauté des principes contenus dans la Charte des Nations Unies.
M. RODRIGUEZ PARILLA (Cuba) a déclaré que le Conseil de Sécurité vient de laisser passer, lors de ce vote honteux, une occasion historique. Le représentant a lu le communiqué publié par son gouvernement au début des actions militaires de l'OTAN contre la République fédérale de Yougoslavie. Selon ce texte, la guerre déclenchée par l'OTAN relance les craintes de l'humanité à l'égard d'un empire guerrier qui s'est érigé en police mondiale, capable de perpétrer les actions les plus éhontées. Cuba dénonce les actions conduites par les Etats-Unis à l'encontre de la République fédérale de Yougoslavie, à qui on devrait, au contraire, donner les moyens de reprendre la voie de la négociation. L'agression risque d'étendre le conflit à d'autres endroits de la région. Ses conséquences sont imprévisibles pour l'Europe et toute l'humanité.
Le représentant a estimé que le Conseil de sécurité est l'instrument des Etats-Unis. Nous avons aujourd'hui assisté à la capitulation du Conseil, qui devrait pourtant ne pas plier devant la superpuissance et faire appliquer le droit international. Que vont devenir les Nations Unies ? Dans la salle du Conseil, la grande majorité des nations est toujours ignorée. L'ONU, au lieu de devenir le Gouvernement d'une démocratie mondiale, est en passe de devenir un instrument répressif au service des plus puissants. Personne ne pourrait oublier que c'est le destin de tous qui est en jeu. Personne ne peut oublier non plus le rôle des Serbes pendant la deuxième guerre mondiale et leur combat contre les nazis. L'Histoire a montré que seule la négociation permet de construire la paix. Il faut que ce dialogue reprenne, a conclu le représentant de Cuba.
M. MUHAMED SACIRBEY (Bosnie-Herzégovine) a indiqué que le recours à l'option militaire n'est jamais souhaitable mais sur la base des événements au Kosovo, il faut parfois conclure qu'un tel recours est la seule option possible. Nous pensons qu'il faut faire cesser l'action militaire si Belgrade accepte les propositions de paix. Néanmoins, la campagne répressive, menée par le Gouvernement du Président Milosevic contre sa propre population témoigne de la poursuite des stratégies de nettoyage ethnique de Belgrade. Après l'expérience de la Bosnie, il est insultant de voir des condamnations s'élever contre des actions militaires visant à mettre un terme à un nettoyage ethnique. Le représentant a estimé que l'adoption de la résolution aurait constitué une porte ouverte à la politique répressive des autorités de Belgrade qui l'aurait utilisée comme un instrument de guerre. Cela aurait également sonné la fin de la paix en Bosnie-Herzégovine. Le représentant s'est demandé si le Conseil de sécurité allait être utilisé comme une institution marginale pour empêcher de choisir la seule option permettant d'aboutir à la paix. Lors de la guerre en Bosnie, l'ONU a été critiquée pour son inefficacité. Il ne faut pas dans le futur que l'ONU devienne un obstacle à la cessation des abus des droits de l'homme.
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M KAMALESH SHARMA (Inde) s'est déclaré profondément préoccupé par les attaques répétées de l'OTAN contre la République fédérale de Yougoslavie et par l'impuissance du Conseil de sécurité dans ce conflit. Il a rappelé que sa délégation souhaite que le Conseil exerce pleinement son autorité pour permettre un retour de la paix, malheureusement compromise par les bombardements récents. Il a déclaré que sa délégation partage sans réserve les objectifs du projet de résolution préparé par la Fédération de Russie qui vise à mettre fin aux violences injustifiées et à rétablir l'autorité du Conseil dans cette affaire. Le représentant a déclaré que pour ces raisons, son pays se porte coauteur du projet de résolution présenté par la Fédération de Russie. Il a profondément regretté que le Conseil n'ait pas adopté ce projet de résolution, estimant que le retour d'une paix souhaitée par la communauté internationale s'en trouverait compromis.
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