DEVANT LE COMITE DES DROITS DE L'HOMME, LE CHILI DEFEND SON "COMPROMIS INSTITUTIONNEL" COMME SEUL MOYEN D'ASSURER UNE TRANSITION PACIFIQUE VERS LA DEMOCRATIE
Communiqué de Presse
DH/236
DEVANT LE COMITE DES DROITS DE L'HOMME, LE CHILI DEFEND SON "COMPROMIS INSTITUTIONNEL" COMME SEUL MOYEN D'ASSURER UNE TRANSITION PACIFIQUE VERS LA DEMOCRATIE
19990324 Les experts du Comité terminent l'examen du quatrième rapport périodique du Chili, premier rapport depuis la fin de la dictature militaireLes dix-huit experts du Comité des droits de l'homme ont achevé cet après-midi l'examen du quatrième rapport périodique du Chili. Lors de la séance tenue ce matin, les experts avaient consacré une large partie de leurs interventions au "compromis institutionnel" mis en place après la chute de la dictature du général Pinochet, en 1988. Selon eux, ce compromis, qui consiste à faire participer les militaires au pouvoir politique et judiciaire, sans l'assentiment préalable du peuple, a eu pour conséquence néfaste de freiner les efforts gouvernementaux dans le domaine des réformes de démocratisation. Au lieu d'accélérer la démocratisation, le compromis a au contraire pour effet d'engendrer une "paralysie institutionnelle" que, pour les experts, le Gouvernement chilien doit tenter de résoudre notamment par la réforme de la Constitution. En réponse à ces critiques, les représentants du Chili ont d'abord souhaité placer les choses dans leur contexte et souligné que le choix du "compromis institutionnel" s'est très vite avéré être le seul moyen d'assurer une transition pacifique de 17 ans de dictature militaire à une démocratie. Au titre des efforts de démocratisation du Gouvernement, les représentants du Chili ont notamment fait part des travaux de la Commission nationale de la vérité et de la réconciliation, mise en place dès l'avènement du pouvoir démocratique, chargée de traiter des affaires de violations des droits de l'homme pendant le régime militaire, en avril 1990. La Commission a pour mission d'enquêter sur les violations les plus graves commises pendant la dictature. Ses décisions n'ont qu'une valeur morale mais toutes ses recommandations ont été mises en oeuvre par les deux Gouvernements démocratiques. La Commission a en outre transmis quelque 400 affaires aux tribunaux.
Les représentants ont souligné que dans leur pays, l'Etat de droit est en cours de consolidation. Une politique d'Etat existe qui défend les droits de l'homme et les libertés fondamentales. Les véritables obstacles à la démocratisation viennent plutôt des mentalités et des coutumes. Ils ont souligné que si une réforme fondamentale des institutions politiques
et judiciaires ne peut venir que d'un Parlement démocratiquement élu, le processus de réforme actuel s'est engagé avec le concours de l'opposition; la réforme de la procédure pénale ayant même été adoptée à une quasi unanimité. Les représentants ont également répondu aux questions des experts concernant l'éventualité d'un procès au Chili du général Pinochet. Ils ont ainsi souligné que jusqu'ici, le général Pinochet jouit d'une immunité parlementaire en sa qualité de sénateur à vie et que cette immunité ne peut être levée que par la Cour d'appel ou la Cour suprême. Ils ont ajouté que seules 19 plaintes ont été déposées contre le général Pinochet dont une majorité d'entre elles tombent sous le décret-loi d'amnistie. En ce qui concerne les autres plaintes, seuls les tribunaux compétents pourront décider de la suite à donner.
Les représentants ont également répondu aux questions concernant la création d'une commission des droits de l'homme, le Code de procédure pénale, la participation aux affaires publiques, la discrimination à l'égard des femmes, les droits des minorités autochtones, l'égalité dans le mariage, la liberté de religion ou encore la violence domestique.
La délégation du Chili était composée de M. Alejandro Salinas, Directeur de la Division des droits de l'homme du Ministère des affaires étrangères du Chili; de M. Eduardo Tapia, Premier Secrétaire à la Mission permanente du Chili auprès des Nations Unies; MM. Claudio Troncoso, Cristian Arevalo et Mme Carmen Bertoni, Conseillers.
Le Comité des droits de l'homme se réunira demain jeudi 25 mars à 10 heures pour poursuivre les observations générales sur l'égalité entre les hommes et les femmes prévue à l'article 3 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
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SUITE DE L'EXAMEN DU RAPPORT DU CHILI
Commentaires des experts
Mme ELIZABETH EVATT a déclaré qu'en dépit de progrès réels, le Chili n'est pas encore en mesure d'appliquer pleinement le Pacte. Des changements sont nécessaires, notamment dans la Constitution. Evoquant la question de l'avortement, Mme Evatt est revenue sur l'obligation pour le personnel hospitalier de révéler à la police l'identité des femmes cherchant à interrompre leur grossesse. Cela est contraire au respect de la vie privée et porte atteinte à la confiance entre le patient et le médecin. Est-il vrai que 300 femmes sont poursuivies chaque année pour ce motif et font l'objet de détention préventive, a-t-elle demandé. Pour Mme Evatt, de telles pratiques empêchent les femmes de recourir à l'assistance médicale et cela peut avoir de graves conséquences pour leur santé. L'expert aimerait avoir des informations également en ce qui concerne le droit des femmes à demander la stérilisation.
Réponse de la délégation chilienne aux questions des experts
Répondant à une question de M. Solari Yrigoyen concernant Carmelo Soria Espinoza, assassiné pendant la dictature militaire en 1976, M. ALEJANDRO SALINAS, Chef de la délégation chilienne, Directeur de la division des droits de l'homme au Ministère des affaires étrangères, a indiqué que la Commission nationale de la vérité et de la réconciliation s'est saisie de cette affaire et que les responsabilités ont été établies. Pendant le procès, il n'a pas été possible de prouver la qualité de haut fonctionnaire des Nations Unies de M. Soria, indispensable pour établir qu'il jouissait à ce titre d'une protection internationale. La Cour Suprême a donc estimé que la loi d'amnistie s'appliquait à ce cas, les faits remontant à 1976. Une fondation a été créée pour rendre hommage à Carmelo Soria Espinoza; le Gouvernement chilien y a contribué à hauteur d'un million de dollars. La Commission interaméricaine des droits de l'homme est actuellement saisie du dossier, à la demande de la famille de M. Soria, qui réclame une indemnisation. Aucune solution à l'amiable n'a pour l'instant été trouvée.
M. Salinas a apporté des précisions sur le mandat de la Commission de la vérité de la réconciliation créée en avril 1990 par le Président Patricio Aylwin. Cette instance a pour mission d'enquêter sur les violations les plus graves commises pendant la dictature militaire. Ses décisions n'ont qu'une valeur morale, mais une haute valeur morale puisqu'elles sont soutenues par le Président. Toutes les recommandations de la Commission ont été appliquées par les deux Gouvernements démocratiques Aylwin et Frei. Quelque 400 affaires ont été transmises aux tribunaux.
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M. Salinas a reconnu qu'il existe dans son pays une sorte d'impuissance ou plutôt une absence de capacité à résoudre les problèmes issus de la période militaire. Il a tenu à préciser que cela n'est pas faute de volonté de la part du Gouvernement, mais qu'il fallait procéder "en douceur" pour éviter tout retour de la violence. Certes, a-t-il reconnu, les autorités reconnaissent la Constitution de 1980 et une série d'entraves constitutionnelles établies lors de la période militaire, mais cette phase est nécessaire dans le processus évolutif permettant la transition entre un état militaire et un état démocratique. La présence de sénateurs désignés, d'un système électoral binominal ou d'un tribunal constitutionnel avec des pouvoirs limités : tous ces éléments ont empêché de progresser suffisamment rapidement, a reconnu M. Salinas, qui a également tenu à préciser qu'il existe au Chili un état de droit en cours de consolidation, et que les droits fondamentaux et les droits de la personne y sont respectés. Les citoyens ont pleine jouissance de leurs droits et il est important de reconnaître les progrès accomplis, a-t-il ajouté.
Répondant à une question de M. Klein, M. Salinas a fait part des efforts des autorités chiliennes pour faire un constat réaliste de la situation dans leur pays. Il a rappelé qu'il existe au Chili une politique d'état cherchant à défendre les droits de l'homme et les libertés fondamentales. Il est toutefois nécessaire de passer par un processus de changement des mentalités, des coutumes et de réformer les institutions politiques et judiciaires.
Evoquant le problème de la torture, M. Salinas a fait savoir que les cas de mauvais traitements restent isolés et font l'objet d'enquêtes et de sanctions. Des organisations internationales comme Amnesty Internationale ont par ailleurs constaté que la situation s'est améliorée de façon substantielle. En ce qui concerne la peine de mort, M. Salinas a précisé que le Chili est abolitionniste de facto depuis plus d'une décennie. Le Gouvernement a parrainé un projet de loi qui vise à abolir la peine capitale.
M. Salinas a reconnu l'incompatibilité de la justice de son pays avec l'article 14 du Pacte en raison du pouvoir excessif de la justice militaire au Chili. Il faut selon lui que la compétence des tribunaux militaires se limite strictement aux délits militaires. Il a expliqué que la Cour Suprême, qui compte 21 membres, comprend 5 membres civils ainsi qu'un observateur militaire dans certains cas. Ce représentant de l'armée n'assiste aux débats que lorsque le procès revêt une dimension militaire. M. Salinas a reconnu qu'au Chili, il n'y a pas de délimitation claire entre tribunaux militaires et civils.
Evoquant le décret-loi d'amnistie, M. Salinas a expliqué que les affaires qui n'ont pas été réglées continuent de faire l'objet d'une investigation. Le décret d'amnistie a été déclaré compatible avec la Constitution par la Cour Suprême en 1990. M. Salinas est également revenu sur les différentes interprétations de la loi concernant les violations
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des droits de l'homme durant la période couverte. Il a estimé qu'il faut poursuivre les enquêtes afin de déterminer les faits et établir les responsabilités. Il incombe ensuite aux tribunaux de décider de la suite de la procédure et d'adopter les décisions qui s'imposent. En ce qui concerne les possibilités de modification en la matière, M. Salinas a indiqué que le Gouvernement chilien a l'intention de continuer de se battre pour honorer ses responsabilités internationales. Le problème sera évoqué lors de la prochaine campagne électorale. Selon lui, le seul moyen de débloquer la situation ne peut venir que grâce à l'action d'un Parlement démocratiquement élu.
Pour M. Salinas, les Tribunaux chiliens sont aujourd'hui à même d'appliquer le droit de façon impartiale et indépendante. Les défauts structurels sont en passe d'être supprimés. Le processus de réforme s'est engagé avec le concours de l'opposition. La réforme de la procédure pénale a été adoptée presque à l'unanimité par les élus.
M. Salinas a poursuivi sur le nouveau système judiciaire qui devrait entrer en vigueur l'année prochaine et qui prévoit notamment l'institution d'un Bureau du Procureur indépendant. Il a également fait part de l'intention de son gouvernement d'instituer des cours de justice pour connaître des questions des droits de l'homme et d'inclure un cours sur les droits de l'homme dans le programme de l'Académie judiciaire. M. Salinas est en outre revenu sur la question de la procédure pénale qui, a-t-il précisé, se fonde sur le principe de la présomption d'innocence. Il a ainsi expliqué que cette procédure prévoit que l'instruction et le jugement relèvent du même juge. Le temps maximum de détention préventive étant de cinq jours, le juge décide à l'issue de ce délai de la libération ou de la poursuite du prévenu. Aujourd'hui 46% des personnes en détention préventive font l'objet de chefs d'accusation avérés. Pour ce qui est des procès menés en vertu de la loi antiterroriste de 1990, M. Salinas a indiqué qu'une prison spéciale a été créée pour les personnes responsables d'actes de terrorisme. Il a précisé que les détenus ont tous été reconnus responsables de crimes commis après l'arrivée du pouvoir démocratique et non pendant le régime militaire.
Prenant la parole à son tour, Mme CARMEN BERTONI, Conseiller à la Division des droits de l'homme, est revenue sur la question de l'avortement. Elle a indiqué que les efforts sont dirigés vers la prévention conformément au principe de respect de la vie de la personne humaine. Elle a ajouté que jusqu'ici le gouvernement a eu beaucoup de difficultés à prendre des mesures de dépénalisation de l'avortement, le débat national ayant montré l'opposition de la majorité de la population à cette dépénalisation. L'explication pourrait être que la longue durée du régime autoritaire a eu pour effet de figer les positions "traditionnelles". Abordant la question des grossesses précoces, la représentante a indiqué que les chiffres en la matière sont passés de 10,5% en 1960 à plus de 14% en 1978. En plus d'autres mesures, une circulaire du Ministère de l'éducation a été appliquée en 1992 pour empêcher que les jeunes filles enceintes ne soient renvoyées de l'école.
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Poursuivant, Mme Bertoni est revenue sur la discrimination à l'égard des femmes et du statut de la femme mariée en matière de propriété immobilière. Elle a fait état des dispositions relatives aux régimes de la communauté de biens, de la séparation de biens et au régime, instauré récemment, de participation aux acquêts. En ce qui concerne l'autorité parentale, la représentante a expliqué que depuis l'adoption de la nouvelle loi, l'autorité parentale ne revient plus automatiquement au père. Pour ce qui est de l'égalité entre les sexes, la représentante a indiqué qu'un Service national de la femme a été créé qui est à l'origine d'un certain nombre de réformes comme celle du Code du travail. Répondant sur la liberté de culte, M. AREVALO, Conseiller à la Division des droits de l'homme, a d'abord souligné que le Chili est un Etat laïc où, il est vrai, l'Eglise catholique apostolique et romaine et l'Eglise orthodoxe jouissent du statut de personne de droit public. Les autres cultes doivent eux se soumettre aux autorités administratives pour jouir d'une personnalité juridique. A cet égard, le Gouvernement a présenté un projet de loi visant à institutionnaliser une personnalité juridique pour tous les cultes. Répondant aussi sur la participation aux affaires publiques, M. Arevalo a concédé qu'aucune disposition n'existe en matière de partis politiques. Aucun interdiction ne frappe les partis, a-t-il dit, puisque la présidente du Parti communiste sera une des candidates aux élections présidentielles prévues en décembre 1999. Le parti socialiste mentionné dans la liste des questions des experts, fait lui partie de la coalition gouvernementale. Mme BERTONI a repris la parole pour donner les détails sur la politique de son gouvernement en matière de violence domestique.
M. SALINAS a évoqué la création de tribunaux de la famille permettant de régler des questions diverses telles que : la violence familiale, le régime matrimonial, les actions de filiation, les problèmes de pension alimentaire ou de garde d'enfant. Les autorités chiliennes sont en faveur d'une procédure orale et rapide avec un système préalable de médiation.
M. CRISTIAN AREVALO a évoqué le cas des minorités ethniques et annoncé la création d'un organe national chargé de protéger, d'encourager et de préserver les cultures des populations vivant sur le territoire chilien depuis l'époque précolombienne, en particulier les Mapuches. L'Etat a mis en place à cet égard un service public spécial appelé Société nationale de développement autochtone. Cet organe est doté d'un fonds destiné à acquérir des terres pour les populations autochtones. Ces terres appartenaient auparavant aux Mapuches, il s'agit donc de les leur restituer. Les fonds servent aussi aux Mapuches pour acheter de nouvelles parcelles de terre. La Société nationale de développement autochtone est proche de son objectif qui est d'acquérir toutes les terres ayant appartenu aux tribus autochtones. Une loi spéciale a contribué à donner aux minorités autochtones des organes consultatifs leur permettant de s'exprimer. Chaque ethnie, Mapuche ou autre, a ainsi été invitée à choisir des conseillers parmi ses membres. Cette même loi spéciale permet aussi à ces communautés de s'associer et de se réunir; elles sont reconnues comme associations à part entière.
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Evoquant la question de l'état d'urgence, M. SALINAS a indiqué que la disposition en vertu de laquelle les tribunaux ne peuvent se prononcer sur les motifs et les faits invoqués par les autorités pour déclarer l'état d'urgence est toujours en vigueur, tout en faisant remarquer que l'interdiction envisagée retombe sur une évaluation de la part de l'autorité en ce qui concerne l'importance des faits conduisant à l'état d'urgence. M. Salinas a également rappelé que les gouvernements démocratiques n'ont jamais eu recours à l'état d'exception. Par ailleurs, le Gouvernement chilien a créé le Bureau national du retour afin de favoriser le retour au pays des personnes en exil. Cette création a été complétée par des lois sur le logement et l'ouverture de crédits destinées à ces personnes.
Mme CARMEN BERTONI est revenue sur la question de l'éducation et de la formation portant sur le Pacte. La Commission de la vérité et de la réconciliation a ainsi publié et remis aux instances publiques, et notamment judiciaires, un document reprenant tous les textes de loi faisant référence aux droits de l'homme au Chili. La Constitution, ainsi que les traités internationaux en matière de droits de l'homme, ont également fait l'objet d'une publication. Toutes ces mesures visent à mieux informer les fonctionnaires publics, les avocats, les juges, ainsi que le grand public. L'académie judiciaire va créer un cours totalement consacré aux traités internationaux en matière de droits de l'homme. Dans les écoles de la police, des cours sanctionnés d'un examen portent également sur cette question.
Nouvelle série de question des membres du Comité
Evoquant la violence au foyer, Lord COLVILLE a souhaité savoir si les partenaires des couples non mariés jouissent de la même protection que ceux des couples mariés. L'expert a également voulu avoir des précisions sur l'attitude des tribunaux en cas de récidive. Dans ce cas, peut-on très rapidement faire face ou doit-on recommencer la procédure à zéro, a-t-il demandé.
M. MAXWELL YALDEN a souhaité savoir s'il existe une discrimination quelconque à l'encontre des homosexuels. Concernant les autochtones, il a souhaité savoir si l'on peut évoquer les termes "autodétermination" et "autonomie" en ce qui les concerne; il a également demandé des détails sur ce qui est fait pour ces populations en matière d'emploi et d'éducation notamment.
M. MARTIN SCHEININ a demandé des précisions concernant le consentement parental pour le mariage. Evoquant la liberté d'opinion, l'expert a souhaité connaître la manière dont sont traités les objecteurs de conscience. En ce qui concerne les droits des autochtones, M. Scheinin a souhaité en savoir plus sur d'éventuels projets d'extractions minières ou de barrages susceptibles de menacer la qualité de vie de certaines ethnies.
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Revenant sur la question de l'avortement, Mme ELIZABETH EVATT a déploré la poursuite de femmes ayant pratiqué une interruption volontaire de grossesse. L'expert a également évoqué la sous-représentation des femmes dans les institutions publiques et a voulu savoir quels étaient les obstacles à l'amélioration de cet état de fait. Mme Evatt a fait remarquer que la moitié des enfants chiliens naissent hors mariage et qu'il n'y a pas de régime de biens communs pour les personnes non mariées. En outre, une femme séparée ne peut pas divorcer et ne peut donc pas obtenir de prêt ou signer de contrat. Le pouvoir sur les enfants appartient au père seul. L'annulation du mariage, le seul recours possible, n'est-il pas réservé aux nantis, s'est-elle interrogée.
M. NISUKE ANDO a demandé des précisions sur les questions de liberté religieuse ainsi que sur le délit de "diffusion de fausses nouvelles". De quel genre de nouvelles s'agit-il ?, s'est-il interrogé. Il est également revenu sur la nécessité d'autorisation des autorités chiliennes avant toute réunion publique. L'expert a souhaité savoir quels sont les critères nécessaires à l'obtention de l'accord de la part des autorités. Il s'est également inquiété du droit d'association des fonctionnaires. Comment sont-ils protégés dans le cadre de la législation chilienne, a-t-il demandé.
M. RAJSOOMER LALLAH est revenu sur l'âge du mariage. Le Chili ne prend en considération que la maturité biologique des personnes qui peuvent se marier très jeunes. Le Pacte prend, lui, en compte les maturités biologique et mentale.
M. ABDELFATTAH AMOR a voulu savoir si la législation ou la jurisprudence chilienne offre une définition de la religion. Si le régime est de déclaration, reconnaît-il toutes les nouvelles religions ? Si le régime est d'autorisation, quels sont les critères retenus ?
M. SOLARI YRIGOYEN s'est à son tour étonné du très jeune âge à partir duquel les couples peuvent se marier. Il s'est aussi inquiété du sort des femmes détenues dans des prisons de haute sécurité qui ne disposent pas de conditions sanitaires acceptables. L'expert a également souhaité savoir si le Chili a ratifié la convention 169 de l'Organisation internationale des travaux (OIT) permettant aux fonctionnaires de négocier directement avec l'Etat.
M. ABDALLAH ZAKHIA a déclaré avoir constaté certaines contradictions dans l'article 64 du rapport consacré au service national de la femme et à la mise en place d'institutions chargées d'améliorer la condition de la femme.
Répondant à cette autre série de questions, M. SALINAS a souligné que les entités indépendantes s'occupant des droits de l'homme peuvent s'organiser librement et ont accès aux enceintes pertinentes pour présenter ou entendre des plaintes. De plus, le Parlement comprend une commission des droits de l'homme chargée des plaintes concernant des sévices contre les détenus.
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En outre, les procureurs des cours d'appel ont l'obligation juridique de vérifier auprès des instances pénitentiaires la situation des détenus. Pour ce qui est de la liberté de culte, M. Salinas a établit une distinction entre les entités religieuses elles-mêmes et leurs membres. Les dispositions juridiques prévoient l'octroi d'une personnalité de droit public. Toute entité peut déposer donc l'acte constitutif de l'association pour recevoir automatiquement la personnalité de droit public. En ce domaine, aucune restriction n'existe et il est permis aux organisations religieuses de posséder et de diriger des établissements d'enseignement. En ce qui concerne la situation des minorités ethniques, la législation leur reconnaît le droit de s'organiser au sein de communautés ou d'associations. Il suffit qu'un nombre donné de membres d'une ethnie se regroupent pour être autorisés à créer une association de défense de droits dans les domaines culturel, économique ou politique. Ces associations bénéficient d'une personnalité juridique du simple fait qu'elles ont remis leur acte constitutif à la Société de développement autochtone.
Dans ce contexte, la loi de l'environnement prévoit l'adoption de projets de soutien à l'environnement. Dans le cas cité par un expert, il s'agissait de la construction d'un barrage qui affectait près de 6% du territoire de deux communautés autochtones; le nombre de familles touchées par la construction de ce barrage étant de 86 familles. Les mécanismes prévues par la loi autochtone prévoient une permutation des terres. Sur les 86 familles, seules 8 familles ont refusé l'échange des terres offertes par la Société de développement autochtone.
S'agissant des mécanismes d'association de fonctionnaires, M. Salinas a indiqué que le premier gouvernement démocratique a pris le soin de promulguer une loi accordant aux fonctionnaires le droit d'association. Une convention de l'OIT a en outre été acceptée qui permettra aux fonctionnaires de négocier directement avec l'Etat. Chaque service possède sa propre association de fonctionnaires et une association existe aussi aux niveaux national et régional. Les seules restrictions prévues concernent les fonctionnaires s'acquittant de fonctions stratégiques qui ne jouissent pas du droit de grève. Les autres dispositions relatives au droit de grève n'ont pas été étudiées.
A son tour, Mme BERTONI a répondu à une question concernant le partage de la garde des enfants en indiquant que la loi sur l'affiliation prévoit que les époux décident eux-mêmes de ce partage. Revenant sur la question de l'avortement, elle a confirmé que son pays sanctionne l'interruption volontaire de grossesse en précisant toutefois qu'en cas de dénonciation, les poursuites judiciaires ne sont pas automatiques. En ce qui concerne l'âge du mariage, aucune réforme n'a jamais été entreprise en la matière. Il est tout de même question d'étudier une réforme afin d'établir une protection plus sûre des mineurs. Abordant la question de la violence domestique, elle a souligné qu'aucune discrimination n'existe en ce domaine et que la loi s'applique à toute personne victime de violence. La loi prévoit une procédure rapide
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pour donner suite aux plaintes. Il est possible de prendre des mesures immédiates pour protéger la personne affectée par la violence comme une mise à l'écart entre 60 à 80 jours de la personne coupable. Si les actes se poursuivent, les tribunaux compétents peuvent être saisis de l'affaire. En cas de persistance, les personnes condamnées sont inscrites dans un registre de personnes condamnées.
M. SALINAS a repris la parole pour répondre aux dernières questions. Il est ainsi revenu sur la question de l'objection de conscience en indiquant que le Ministère de la défense a prévu d'étudier cette question. Il a toutefois précisé que sur les 120 000 jeunes hommes âgés de 18 ans, 30 000 seulement sont appelés au service militaire. Il a donc estimé que le problème n'est pas urgent. Pour ce qui est de l'homosexualité, il a indiqué que le Code pénal sanctionne la sodomie mais a fait état d'une disposition qui dépénalise les relations sexuelles entre personnes âgées de plus de 18 ans et consentantes. Venant enfin à la question du jugement par les tribunaux chiliens du général Pinochet au Chili, M. Salinas a déclaré que le général Pinochet jouit jusqu'ici d'une immunité parlementaire en sa qualité de sénateur à vie. Cette immunité ne peut être retirée que par la Cour d'appel et la Cour suprême. Il a ajouté que 19 plaintes seulement ont été présentées contre le général Pinochet et que la majorité d'entre elles sont couvertes par le décret-loi sur l'amnistie puisque les faits remontent à la première période de la dictature. Pour ce qui est des autres plaintes, seuls les juges compétents peuvent juger de la suite à donner.
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