DES EXPERTS PLAIDENT EN FAVEUR DU PARTENARIAT HOMME/FEMME ET DE LA PRISE EN COMPTE DE LA MONDIALISATION POUR L'EVALUATION DU PROGRAMME D'ACTION DE BEIJING
Communiqué de Presse
FEM/1068
DES EXPERTS PLAIDENT EN FAVEUR DU PARTENARIAT HOMME/FEMME ET DE LA PRISE EN COMPTE DE LA MONDIALISATION POUR L'EVALUATION DU PROGRAMME D'ACTION DE BEIJING
19990315 Le Comité préparatoire de la session extraordinaire de l'Assemblée générale qui en juin de l'an 2000 examinera et évaluera les progrès réalisés dans la mise en oeuvre des stratégies prospectives d'action de Nairobi pour la promotion de la femme et l'application du Programme d'action de Beijing, a été cet après-midi le cadre d'un dialogue avec quatre experts sur la question des nouvelles mesures et initiatives à prendre pour réaliser l'égalité entre les sexes.Au nombre des raisons expliquant la persistance des inégalités et des obstacles à la mise en oeuvre du Programme d'action de Beijing, Mme Asma Jahangir, Rapporteur spécial des Nations Unies sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, a invoqué les facteurs religieux et culturels exacerbés par la pauvreté, le désengagement ou encore la complicité de l'Etat. Dans ce contexte, il est crucial, a souligné M. Hassan Keynan, chargé de recherche à la Commission norvégienne pour l'UNESCO, de comprendre la nature et la dynamique de la place des hommes et des femmes dans chaque société et de favoriser un partenariat homme/femme sans lequel la parité entre les sexes ne pourra pas être obtenue.
Aux yeux de M. Mihaly Simai, Professeur à l'Institut de recherches sur l'économie mondiale de l'Académie des sciences de la Hongrie, nous devons répondre aux conséquences négatives du phénomène de la mondialisation sur les femmes mais également à celles de la régionalisation et de l'urbanisation. En tout état de cause, a souligné Mme Patricia Licuanan, Présidente de Miriam College et Professeur de psychologie à l'Université Ateneo de Manille (Philippines), une mise en oeuvre plus efficace du Programme d'action passe par la mise en place de mécanismes d'évaluation des progrès et des méthodologies mais également du "bien-être psychologique des femmes comme indicateur intersectoriel des progrès réalisés".
La prochaine réunion du Comité préparatoire aura lieu mardi 16 mars à 10 heures et sera consacrée à un dialogue sur le même thème avec un deuxième groupe d'experts.
Dialogue avec les experts sur les nouvelles mesures et initiatives à prendre dans les domaines critiques du Programme d'action de Beijing en vue de réaliser l'égalité entre les sexes
Exposés
Mme PATRICIA B. LICUANAN, Présidente de Miriam College et Professeur de psychologie à l'Université Ateneo de Manille (Philippines), a déclaré que les rapports des gouvernements et ONG de la région Asie/Pacifique concernant l'application du Programme d'action de Beijing indiquent que les efforts ont été axés sur les domaines de la violence à l'égard des femmes et en particulier la violence domestique, le traite des femmes et le viol, des révisions de l'arsenal juridique, les femmes et l'économie et en particulier l'accès au micro-crédit, l'intégration des sexospécificités, les femmes et la santé et notamment la prévention contre le VHI/sida, l'éducation des femmes et des petites filles, les femmes et l'environnement, les femmes et la politique, les femmes et la pauvreté, l'égalité entre les sexes et l'autonomisation des femmes. Une analyse des rapports montre que cette mise en oeuvre n'est pas harmonieuse et tend à insister sur certains aspects tout en ignorant d'autres. Dans notre évaluation de la mise en oeuvre du Programme d'action, a ajouté l'experte, il nous faut non seulement identifier les schémas d'action et d'inaction mais également les raisons sous-jacentes et leurs conséquences.
Un des points qui mérite une attention particulière est la difficulté qu'il y a à établir un lien entre la mise en oeuvre du Programme d'action de Beijing et d'autres efforts de réforme. Dans notre région, les efforts visant à introduire les questions concernant les femmes au sein des institutions comme l'APEC ou comme la Coopération économique Asie-Pacifique en est un exemple. La prise de conscience de ces questions et la volonté politique ne se traduisent pas de la même manière au sein des différentes entités du même gouvernement. La mise en oeuvre du Programme d'action en Asie et dans la région du Pacifique doit en outre passer par une analyse de l'impact de la crise financière dans la région et sur les femmes. Puisque la crise touche plus durement les femmes que les hommes, il est à craindre qu'elle n'ait des répercussions négatives sur leurs gains économiques et sociaux. Des études ont déjà mis en lumière une baisse des revenus, l'accroissement de la pauvreté, le développement du travail des enfants, la prostitution des adolescentes, des coupes dans les services sociaux, une baisse importante des revenus dans le secteur informel et un regain du rôle traditionnel des femmes.
Un autre obstacle à la mise en oeuvre du Programme est l'absence relative de mécanismes d'évaluation et de méthodologie. La session extraordinaire doit accorder une importance à ce facteur qui a été négligé et promouvoir l'utilisation de nouveaux indicateurs créatifs à valeur ajoutée. Néanmoins, même les indicateurs les plus sophistiqués ne sont pas en mesure d'évaluer ce que nous pensons et ressentons. Pourtant, le capital confiance d'une femme, l'importance qu'elle accorde à sa participation à sa vie de
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famille et communautaire et son niveau de satisfaction en général sont tout autant importants. C'est la raison pour laquelle nous devons être en mesure d'évaluer le bien-être psychologique des femmes et d'utiliser l'évaluation psychologique comme un indicateur intersectoriel de la mise en oeuvre du Programme d'action. L'experte a en outre plaidé en faveur de l'évaluation systématique des stéréotypes au sein des différentes couches de la population.
Dans sa présentation, M. MIHALY SIMAI, Professeur à l'Institut de recherches sur l'économie mondiale de l'Académie des Sciences de la Hongrie, a indiqué que la mondialisation - même sans ses conséquences négatives et difficiles à gérer - ne constitue pas le seul processus qui caractérise les changements mondiaux. La régionalisation et la fragmentation sont également des tendances importantes qui doivent être prises en compte lorsque l'on analyse les caractéristiques complexes de la problématique hommes/femmes. La régionalisation peut constituer une pierre angulaire sur la voie de la mondialisation. L'existence de plus de cent arrangements sociaux et économiques régionaux reflète l'hétérogénéité du monde et a également des incidences importantes sur la mise en oeuvre de normes universellement acceptées qui influencent la position sociale et économique des femmes et par le biais de cette influence, le redéploiement du commerce et de la production. L'exemple de l'Union européenne illustre très bien cette situation. L'avenir du travail en Europe dépendra en général et en grande partie de la participation des femmes, mais une nouvelle crise de l'emploi pourrait affecter l'Union européenne.
Le processus de fragmentation exerce également une influence sur les changements à l'échelle mondiale. Il ne s'agit pas seulement de la désintégration des Etats multiéthniques. Dans certaines régions du monde, c'est la conséquence des efforts visant à rectifier les frontières artificiellement imposées par les régimes coloniaux. Des Etats "ethniques" en résultent.
L'urbanisation constitue un autre facteur très important, qui établit les conditions de vie et en particulier les modèles d'emploi de centaines de millions de personnes - hommes et femmes -, mais elle a une influence particulière sur les questions de parité des sexes. La transition démographique vers un monde dominé par des sociétés urbaines est en cours. Entre 2000 et 2025, environ 800-850 millions de nouveaux emplois urbains seront nécessaires dans les pays en développement en vue d'assurer des conditions de vie décentes à la population. Dans un monde où l'urbanisation évolue rapidement, la croissance économique durable constitue encore plus une nécessité pour une réduction durable de la pauvreté. Tandis que le développement humain, les investissements en matière d'éducation, la formation en matière de santé, les conditions - conditions meilleures dans les communautés urbaines que dans la plupart des zones rurales - sont nécessaires pour assurer que les femmes ne sont pas économiquement marginalisées par
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le biais de processus de croissance économique et de changements structurels, ils ne suffisent pas à garantir l'accès à de bonnes conditions de travail, à un salaire approprié et la non discrimination.
Les relations complexes entre les femmes, les marchés et les Etats ont de nombreuses particularités dans le monde urbain. Les administrations centrales et les collectivités locales devraient être plus sensibles aux problèmes et besoins des femmes. Dans un certain nombre de pays, les femmes sont cantonnées dans des emplois sédentaires, notamment dans les services publics. L'Etat pourrait jouer un rôle plus actif en éliminant cette ségrégation professionnelle et étendre l'égalité dans l'emploi. L'évolution technologique en cours constitue un facteur extrêmement important qui affecte pratiquement tous les autres facteurs et questions.
Mme Simai a estimé que le monde du XXIe siècle fera face à un grand nombre de responsabilités et de défis sans précédent à l'égard de toutes les couches de la société. Il est nécessaire d'approfondir les recherches et les discussions pour mieux comprendre les aspects particuliers de ces défis liés aux femmes. Les individus feront face à des responsabilités d'adaptation personnelle et culturelle considérable, qui ne sera possible dans la partie la plus pauvre du monde qu'avec la participation active des gouvernements et des organisations de la société civile. Les gouvernements seront amenés à réformer leurs programmes, stratégies et institutions établis sur la base de modèles anciens. Les organisations intergouvernementales devront être plus sensibles à l'évolution de nouvelles réalités économiques et sociales mondiales et de leurs relations complexes dans le domaine des activités et politiques liées aux femmes.
Mme ASMA JAHANGIR, Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, a estimé qu'un effort particulier doit être fait pour remédier aux difficultés rencontrées par le mouvement des femmes. Pour assurer des progrès futurs, elle a proposé de suggérer des mesures spéciales pour les sociétés qui font face à des défis extraordinaires. Le changement du statut des femmes pose en effet un problème dans la plupart des sociétés traditionnelles. Tout d'abord, la situation en matière de promotion de la femme stagne depuis si longtemps qu'il est difficile de mobiliser suffisamment de volonté pour amener des changements. D'autant plus que cela conduirait à une évolution plus générale. De plus, le poids de la tradition, et souvent de la religion, font que la suggestion d'un changement passe pour un sacrilège, voire un blasphème.
Mme Jahangir a rappelé que les réserves émises à l'égard de certains articles de la Convention pour l'élimination de toute forme de discrimination à l'égard des femmes s'appuient souvent sur la loi de la famille, qui placent la femme dans une position du subordination. Dans ce cadre, la Commission de la condition devrait publier un rapport, à l'échelle de tous les pays, sur la condition des femmes, deux ou trois rapports annuels sur des pays
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particulièrement problématiques, et avancer des recommandations à l'intention des pays donateurs et des institutions sur les moyens d'introduire une perspective sexospécifique dans leurs travaux, et des conseils pour mettre en place une forme d'action positive pour parvenir à l'égalité des sexes. L'experte a indiqué que l'élimination de jure de la discrimination fondée sur le texte ne constitue pas une fin, mais permet de commencer à traiter le problème. Une limite dans le temps doit être fixée par les Nations Unies pour que des efforts sérieux soient entrepris pour la mise en place de cette importante étape. De plus, les médias et les artistes doivent être encouragés à partager leurs talents et leurs idées pour diffuser ce message dans le monde entier.
En matière de discrimination à l'égard des femmes, la disparité de droits au sein même de la famille constitue une barrière essentielle à l'émancipation de la femme. De plus, peu de pays sont parties à la Convention de la Haye sur l'enlèvement des enfants. Dans la plupart des cas, les femmes abandonnent les poursuites par manque de soutien et de ressources financières. Mme Jahangir a également insisté sur la variété des formes et l'étendue de la violence à l'égard des femmes, que la société permet et que l'état justifie ou pardonne. Dans ce cadre, elle a estimé que les cours de justice continuent à confiner les femmes dans des foyers alors que les gouvernements refusent de réorienter ces établissements dans le sens d'un soutien aux femmes vulnérables en respectant leurs droits humains les plus basiques. Quant aux cas où les femmes sont auteurs de violence, les sévices qu'elles ont subis ne sont toujours pas considérés comme une circonstance atténuante. Parallèlement, les crimes violents commis contre les femmes dans le cadre de la famille sont invariablement considérés avec indulgence. Dans ce contexte, le viol est un des crimes les plus communs, et le viol marital n'est pas considéré comme un crime dans de nombreuses juridictions.
En plus de la famille, les femmes sont aussi victimes de l'immobilité des mécanismes étatiques, qui gardent souvent le silence sur des pratiques inacceptables, manifestant ainsi leur résistance au changement. Ainsi, la pratique consistant à vendre les filles en mariage perdure, et les gouvernements négligent d'apporter leur soutien aux femmes qui possèdent la double nationalité.
L'experte a également évoqué les cas des femmes qui sont particulièrement désavantagées, telles que les femmes âgées, et les femmes appartenant à des minorités. Ces dernières souffrent en effet d'une double oppression, en tant que femme, et en tant que membres d'une minorité. Par ailleurs, dans les sociétés où il n'existe aucun système de soutien ni de services sociaux pour les populations désavantagées, les handicapés mentaux sont complètement abandonnés par l'Etat. Dans ce cadre, les femmes souffrent plus car elles sont plus vulnérables, elles sont victimes de sévices sexuels et ne reçoivent aucun soin en cas de grossesse.
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Enfin, dans les situations de tension et de peur, les femmes s'imposent elles-mêmes des restrictions dans leurs déplacements et leurs comportements, ce qui affecte leur capacité à être indépendantes et menace ainsi leur survie. Les femmes sont également souvent les cibles privilégiées des dictatures religieuses qui les marginalisent. Mme Jahangir a estimé nécessaire de forger des alliances dans la société civile entre ceux qui ont connu des persécutions religieuses, afin qu'ils partagent leurs expériences et proposent des stratégies de lutte dans le cadre d'un réseau.
M. HASSAN KEYNAN, Chargé de recherche à la Commission norvégienne pour l'UNESCO, a souligné l'importance de la question de l'inégalité entre les sexes dont les hommes sont pour la majeure partie responsables, comme le confirment certaines recherches portant sur la masculinité. Les efforts qui sont faits pour promouvoir la parité entre les sexes doivent tenir compte de ce facteur. Il faut que les hommes deviennent de véritables partenaires dans la lutte pour l'égalité des sexes au lieu d'être des spectateurs indifférents. La lutte pour l'égalité des sexes n'est ni un combat de femmes ni une campagne contre les hommes. C'est une lutte pour la justice, une lutte pour les droits de l'être humain. Même si les traditions et les pratiques peuvent être différentes, la discrimination à l'égard des femmes est présente dans presque toutes les cultures. Il est de ce fait crucial de comprendre la nature et la dynamique de la place des hommes et des femmes dans chaque société et chaque culture. Les questions relatives à la masculinité et à la parité entre les sexes sont inséparables. Il est nécessaire que les hommes soient associés à un effort pour promouvoir une réelle parité entre les sexes.
Précisions apportées par les experts en réponse aux commentaires et questions des délégations
Mme LICANUAN a expliqué qu'en matière d'alphabétisation des femmes, la situation est très diverse d'un pays à l'autre de l'Asie. Mais les femmes en Asie contribuent réellement à la vie économique, même si cela n'est pas encore reconnu. Le miracle économique en Asie a bénéficié de la contribution des femmes, éduquées ou non éduquées. En réponse à la délégation du Pakistan, l'experte a estimé que les rôles traditionnels des femmes dans les sociétés sont les obstacles majeurs aux changements de la condition des femmes. Elle a par ailleurs indiqué que l'accès aux technologies de l'information est essentiel à l'aube du XXIe siècle. C'est un domaine nouveau où les femme accusent un retard moindre que dans d'autres domaines, a-t-elle précisé. On peut donc espérer que les femmes seront bien placées dans ce domaine dans le futur.
M. SIMAI a expliqué que d'après les données statistiques, l'on peut dire que le monde est à mis-parcours sur le chemin de l'égalité entre les hommes et les femmes, ceci malgré tous les acquis et résultats obtenus. Il a expliqué que les raisons expliquant les disparités entre les sexes selon les régions
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du monde sont le résultat de plusieurs facteurs dont les facteurs religieux et culturel qui sont souvent exacerbés par la pauvreté, l'exclusion et le dénuement. Souvent la législation existe mais la volonté ou les instruments d'application font défaut. Le retrait de l'Etat de différents domaines d'activité est souvent négatif pour la femme en ce qu'il entraîne s'accompagne d'une diminution des dépenses sociales et de la fermeture d'entreprises publiques où nombre de femmes travaillaient. Dans les ex-pays socialistes, qui se targuaient de tenir compte des intérêts des femmes, la situation s'est détériorée avec la fermeture des usines d'Etat.
Mme JAHANGIR a expliqué qu'au Pakistan le gouvernement affirme que les femmes ont tous les droits mais qu'elle sont trop ignorantes pour les revendiquer. Cela prouve que les efforts déployés pour aider les femmes à prendre conscience de leurs droits sont insuffisants. Les quelques femmes qui luttent pour le respect de leurs droits sont très courageuses, car elles prennent un véritable risque. Selon l'experte, le manque de progrès en matière de promotion de la femme est dû au manque de véritable volonté politique.
M. KEYNAN a estimé que la nature de la masculinité est la cause principale du manque de progrès en matière de promotion des droits de la femme. Il s'agit d'une conception du monde et du pouvoir qu'il faut étudier. De plus, les forces culturelles et religieuses influencent également les constructions sociales. Dans la religion, il faut examiner les textes, et les interprétations. L'expert a ajouté que l'Etat n'est pas toujours "mauvais", surtout lorsqu'un nombre suffisant de femmes participent au pouvoir.
M. KEYNAN a indiqué qu'il faut comprendre que masculinité et volonté politique sont étroitement liés afin de bien être conscient des enjeux des conflits liés au partage du pouvoir entre les hommes et les femmes.
Mme JAHANGIR a exprimé son relatif désaccord avec M. Keynan. Elle a regretté que les femmes aient toujours à faire le premier pas pour un partenariat et une compréhension mutuelle, mais elle a indiqué que cet effort doit aussi se faire en sens inverse. Elle a par ailleurs souligné que l'indulgence de l'Etat encourage souvent des hommes à tuer des femmes dans le cadre des meurtres d'honneur. Où est l'honneur des hommes quand on vend des jeunes filles à des hommes âgés ? Elle a rejeté l'idée d'un honneur des hommes qui serait plus valable que l'honneur des femmes. Il est temps d'organiser la réponse des femmes à la discrimination dont elles sont les victimes, a-t-elle ajouté. Elle a estimé qu'il faut amener les gouvernements à examiner les questions de parité et à introduire une perspective sexospécifique dans leurs politiques. L'établissement de rapports permettrait de récompenser les pays qui progressent, et d'identifier et de dénoncer les gouvernements qui résistent.
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M. SIMAI a précisé que la mondialisation n'est pas la seule tendance qui caractérise le monde actuel, il y a aussi une fragmentation en cours, qui pourrait prendre des dimensions importantes. Il a noté que le nombre de petits pays qui luttent pour leur survie quotidienne est déjà assez important. Dans ce cadre, les problèmes de droits des femmes deviennent plus difficile à traiter.
Pour ce qui est des effets de la mondialisation, l'expert a estimé que dans le monde actuel l'abandon des liens entre différents états est impossible, surtout pour les petits pays économiquement non viables. Ces problèmes touchent les hommes autant que les femmes, mais les femmes sont plus vulnérables à la mondialisation. La question est donc de savoir comment renforcer la position des pays pauvres du monde, et comment renforcer la situation de leurs populations les plus vulnérables. Dans ce cadre, une plus grande participation des femmes à la prise de décision est essentielle, plus encore qu'une amélioration du niveau d'éducation. L'habilitation des femmes est pluridimensionnelle, a-t-il ajouté. Il a rappelé que l'action des femmes elles-mêmes est essentielle pour les progrès de la lutte pour leurs propres droits.
Mme LICUANAN a répété que la mondialisation comporte des désavantages pour les femmes qui sont plus pauvres et plus faibles. Elle s'est prononcée en faveur d'une plus grande consultation avec toutes les organisations concernées par la lutte contre la discrimination à l'égard des femmes. En ce qui concerne la définition des objectifs, elle a estimé qu'ils ne sont pas assez précis, et qu'il faut donc décider d'indicateurs pour établir une évaluation réaliste. Dans le domaine de l'alliance entre les hommes et les femmes, l'experte a estimé qu'il ne faut pas avoir peur du pouvoir. Un partenariat entre hommes et femmes doit être mis en place sur un pied d'égalité.
M. SIMAI a expliqué au sujet des conséquences de la mondialisation, que les pays de l'Europe de l'Est n'ont pas eu les moyens de se prévenir des dérives liées à ce phénomène. Ils ont aussi connu le développement de la prostitution, de la traite des femmes, du trafic des drogues et du crime organisé. Il a par ailleurs suggéré au Secrétariat de tenir compte des exemples de parité réussie dans certains pays d'Europe de l'Ouest lors de l'évaluation de la mise en oeuvre du Programme d'action de Beijing.
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Documentation
Rapport du Secrétaire général sur le cadre concernant de nouvelles mesures et initiatives qui pourraient être étudiées durant la session extraordinaire (E/CN.6/1999/PC/2)
Selon le cadre proposé, de nouvelles mesures et initiatives en vue d'accélérer la mise en oeuvre du Programme d'action de manière à englober les 12 domaines critiques pourraient être définies. Au lieu de formuler des nouvelles mesures initiatives spécifiquement dans chacun des domaines critiques, le cadre recommande de concevoir l'action de manière intégrée dans cinq catégories fonctionnelles. Dans le cadre de celles tendant à montrer la volonté politique et le souci de créer un cadre propice à la mise en oeuvre du Programme d'action, sont évoquées des mesures pour la réduction et l'élimination de la discrimination de facto, pour l'instauration d'un cadre juridique et réglementaire propice. L'engagement d'appliquer des politiques en faveur des femmes et des filles et la mise en place de cadres d'orientation soucieux d'équité entre les sexes sont également proposés, ainsi que la participation des femmes, sur un pied d'égalité, aux activités menées à tous les niveaux et dans tous les domaines.
La deuxième catégorie comprend les mesures pour renforcer des capacités en vue de la promotion et de l'intégration d'une démarche soucieuse d'équité entre les sexes.
La troisième comporte des mesures instituant l'obligation de rendre compte de la mise en oeuvre des stratégies et des mesures énoncées dans le Programme d'action. La responsabilité en matière de mise en oeuvre serait évaluée aux niveaux de l'intention, de l'action et de l'impact. Il s'agirait de définir clairement les objectifs, les critères et le calendrier de la mise en oeuvre. Il faut procéder à l'analyse des spécificités sexuelles et des effets sexospécifiques, établir des budgets soucieux d'équité entre les sexes, évaluer les résultats et établir des rapports. Il faudrait enfin mettre en place des règlements, procédures ou principes directeurs tenant compte des différences entre hommes et femmes.
La quatrième catégorie englobe les mesures destinées à instaurer une coopération et un partenariat pour la mise en oeuvre du Programme d'action, les partenariats entre le secteur public et le secteur privé, avec et entre les organisations féminines, entre les hommes et les femmes, sont cités. La coopération et la solidarité internationales sont également mises en valeur, ainsi que la coopération Sud-Sud.
Enfin, la cinquième catégorie traite des mesures visant à porter assistance aux femmes et aux filles actuellement victimes de discrimination ou défavorisées. Sont proposés dans ce cadre des programmes destinés aux filles qui ont besoin d'une protection spéciale, une aide d'urgence aux victimes
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de violences sexuelles, notamment dans les situations de conflit armé, et une assistance aux victimes de formes spécifiques de discrimination sexuelle et de désavantages, y compris des désavantages de nature économique.
Le rapport présente d'autre part quatre grands thèmes intersectoriels communs aux 12 domaines critiques, qui ont pris une importance particulière ou revêtent davantage d'intérêt depuis 1995. S'ils sont adoptés, ces thèmes pourraient être examinés par la Commission de la femme, notamment dans le cadre d'un programme de travail pluriannuel pour la période 2001-2005, ainsi que lors de l'Assemblée du millénaire. Il s'agit tout d'abord du thème de la non mondialisation et du renforcement du pouvoir économique des femmes, des femmes pauvres en particulier. Dans ce cadre, il faut travailler à surmonter les obstacles qui empêchent la productivité et les revenus des femmes d'augmenter. Il faudrait également déterminer des mesures de nature à multiplier les conséquences sexospécifiques positives de la mondialisation. L'étude du thème concernant les femmes, la science, la technologie et l'ère de l'information vise à ce que les femmes puissent influer sur le développement de la science et de la technologie et participer activement à la conception et à la mise au point des nouvelles technologies de l'information.
L'impulsion donnée par les femmes doit être reconnue et valorisée par une plus grande participation des femmes au gouvernement, au secteur public et à la société civile, notamment dans les domaines du règlement des conflits et du maintien de la paix. En ce qui concerne le thème de la sécurité collective et la protection sociale, il doit être admis que la règlement des questions de sécurité des femmes dépasse la solidarité ou la justice sociale et englobe la conscience d'un intérêt commun. La mise en oeuvre du Programme d'action dans son ensemble est largement tributaire des progrès qui seront accomplis dans le sens d'une meilleure compréhension et d'un renforcement de la sécurité des femmes.
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Rectificatif
Dans notre communiqué de ce matin (FEM/1067), page 8, il fallait lire la déclaration de la représentante du Cameroun comme suit :
"Mme CLAIRE NYANGANG (Cameroun) a soutenu une évaluation d'ensemble des douze domaines critiques du Programme d'action mais elle s'est demandée quelle sera la place des résultats des discussions des conférences régionales. Elle a estimé que cette évaluation faite à New York risque d'être partielle dans la mesure où le travail réalisé au niveau régional ne sera pas pris en compte".
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