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FEM/1059

LES MECANISMES NATIONAUX CHARGES DE LA PROMOTION DE LA FEMME DOIVENT JOUER UN ROLE DE CHEF DE FILE ET DE CATALYSEUR DES POLITIQUES

4 mars 1999


Communiqué de Presse
FEM/1059


LES MECANISMES NATIONAUX CHARGES DE LA PROMOTION DE LA FEMME DOIVENT JOUER UN ROLE DE CHEF DE FILE ET DE CATALYSEUR DES POLITIQUES

19990304 La Commission de la condition de la femme a entendu ce matin quatre expertes qui ont présenté des exposés sur les mécanismes institutionnels chargés de favoriser la promotion de la femme. Elles ont souligné la nécessité de préciser leur rôle et mandat. L'évaluation de leur efficacité doit également passer par la prise en compte des contextes politiques dans lesquels ils évoluent. Aux yeux des expertes, les mécanismes nationaux devraient assumer des fonctions de chef de file, de coordination, de catalyseur et de suivi des politiques et des plans nationaux. Pour renforcer leur efficacité, certaines ont plaidé en faveur de leur décentralisation et de la mise en place d'alliances avec des partenaires clés de la société comme les groupes de défense des femmes, les syndicats, les organisations non gouvernementales ainsi qu'avec les membres du gouvernement et de leur plus grande participation à l'élaboration des politiques. La prise en compte croissante de l'intégration sexospécifique tournera à l'avantage des mécanismes, a estimé une experte, dans la mesure où cette approche leur fournit une stratégie de coopération sans entraîner nécessairement plus de dépenses. Elles ont également évoqué le rôle des organes législatifs et judiciaires dans le renforcement des mécanismes institutionnels.

Les expertes suivantes ont pris la parole et répondu aux questions des délégations : Mme Rounaq Jahan, Chercheur à la Faculté des affaires publiques et internationales de Colombia University, Mme Jaraslova Moserova, Vice-Présidente de Comité pour l'intégration européenne au Sénat du Parlement de la République tchèque, Mme Glenda Simms, Directrice exécutive du Bureau des questions féminines de la Jamaïque et Mme Shirin Rai, Conférencière sur des questions politiques et féminines à l'Université de Warwick au Royaume-Uni.

La Commission reprendra ses travaux à 15 heures 30. Elle conclura son débat sur la question des mécanismes institutionnels.

Suivi de la Quatrième Conférence mondiale sur les femmes : réalisation des objectifs stratégiques et mesures à prendre dans les domaines critiques : les mécanismes institutionnels chargés de favoriser la promotion de la femme

Exposés et débat avec les experts

Mme ROUNAQ JAHAN, Chercheur, School of International and Public Affairs à Colombia University, New York, a mis l'accent sur huit stratégies pour améliorer l'efficacité des mécanismes nationaux afin de progresser dans l'intégration des sexospécificités. La premier défi est de préciser le rôle des mécanismes et leur fonction. Il existe en effet des disparités dans la performance de ces mécanismes. Il faut définir leur rôle qui devrait être de mettre au point, de contrôler et de catalyser les programmes en faveur des femmes. Le personnel de ces mécanismes doit engager un dialogue avec les autres Ministères et agences pour une meilleure compréhension de leur rôle respectif et de leur mandat. Le deuxième défi consiste à obtenir l'appui des protagonistes importants du pays. Bien souvent en effet, les mécanismes travaillent seuls et se marginalisent ainsi ces alliés clés peuvent être des membres du gouvernement ou de la société civile. La troisième stratégie consiste à impliquer davantage les mécanismes nationaux dans la mise au point des politiques et pour cela ceux-ci doivent entamer un dialogue politique avec les ministères et institutions.

La quatrième stratégie pour améliorer l'efficacité des mécanismes nationaux est d'utiliser pleinement les ressources des autres institutions en incluant dans les politiques de ces dernières les questions de l'intégration sexospécifique. La cinquième stratégie serait de renforcer la fonction de coordination et de contrôle des mécanismes qui souvent n'ont pas de contacts entre eux. L'on pourrait inclure dans leur ordre du jour le contrôle de l'exécution des plans d'action. La Sixième stratégie consisterait a faire des mécanismes eux-mêmes une source d'intégration. Ceux-ci n'ont pas besoins de disposer de compétences dans tous les domaines mais en revanche, il doivent être une source d'informations exhaustives. La septième stratégie serait de mettre l'accent sur la responsabilité publique des mécanismes. Huitièmement, les mécanismes doivent jouer le rôle de chef de file et pour cela ils doivent dégager une vision et être en mesure de rallier un appui. Dans le futur, il faut comme objectif prioritaire évaluer la réalisation des objectifs et identifier les mesures pratiques qui seront nécessaires pour atteindre les objectifs fixés. L'idée de l'intégration des sexospécificités pourrait tourner à l'avantage des mécanismes dans la mesure où elle leur fournit une stratégie de coopération sans entraîner plus de dépenses.

Mme JARASLOVA MOSEROVA, Vice-présidente de la Commission de l'intégration européenne au Sénat du Parlement de la République tchèque, et Présidente de la Commission tchèque de l'UNESCO, a rappelé l'histoire de son pays, sous l'angle de la promotion des droits de la femme. A travers les différents événements du XXe siècle, la promotion de la femme n'a accompli

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que très peu de progrès, a-t-elle regretté. La situation concernant l'égalité hommes/femmes a cependant évolué après 1995, grâce en particulier aux organisations internationales telles que les Nations Unies ou les structures européennes. Les progrès les plus importants ont été accomplis sur la pression des ONG, qui ont contribué à la prise de conscience par les femmes de la nécessité de gagner de l'influence afin de prendre part à la formation de la société.

Mme Moserova a indiqué qu'à la suite de la tenue de la Conférence de Beijing, le Gouvernement tchèque a confié l'application du Programme d'action au Ministère du travail et des affaires sociales, et a attiré l'attention de tous les ministères sur la promotion de la femme. Le gouvernement a également entériné un document sur les Priorités et les méthodes d'assurer des chances égales aux hommes et aux femmes. Malgré ces améliorations, ni l'application des droits constitutionnels, ni des sanctions pour répondre à la discrimination à l'égard des femmes ne sont encore prévus dans la législation tchèque.

Mme Moserova a également indiqué que la pauvreté des femmes est de plus en plus apparente dans son pays, et que le chômage des femmes est en hausse. La violence contre les femmes reste un problème qui n'est pas véritablement pris en compte. De plus, face au nouveau phénomène du trafic des femmes, il faut identifier et appliquer des méthodes de détection. Etant donné la situation dans la région, de nombreuses femmes réfugiées arrivent des pays voisins en guerre et requièrent une attention particulière. Le problème principal reste cependant la représentation faible des femmes à toutes les positions de prise de décision, principalement dans le gouvernement et au Parlement, soit en raison de la peur des femmes d'avoir à sacrifier leur vie privée, soit à cause de la résistance masculine.

L'experte a enfin attiré l'attention de la Commission sur le pouvoir des médias, et en particulier la télévision et la publicité, qui transmettent une image de la femme lourde de préjugés. La télévision publique devrait encourager les agences de publicité à élaborer des messages qui contribueraient à l'élimination de ces préjugés. Mme Moserova a observé que les femmes ont des responsabilités qui sont liées au pouvoir réel qu'elles ont aujourd'hui, mais qu'elles n'en sont pas toujours conscientes et qu'elles ne utilisent pas assez ce pouvoir.

Mme GLENDA P. SIMMS, Directrice du Bureau des Affaires féminines de la Jamaïque, a déclaré que la question des mécanismes institutionnels concernait tant les organisations relevant de la sphère gouvernementale que les Groupes de femmes dans la société civile. L'intervenante a affirmé que, dans toute société, le degré de promotion de la femme dépendait de l'interaction entre ces deux types d'organisation. En Jamaïque, la question des rapports entre institutions gouvernementales et non-gouvernementales fait l'objet d'un débat constant. Compte tenu de la petite taille de notre Etat, a-t-elle indiqué,

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il ne saurait y avoir de véritable séparation entre les mécanismes institutionnels de promotion de la femme de nature gouvernementale et les autres. Le Gouvernement doit jouer un rôle de leadership et débloquer les ressources financières nécessaires à l'action. L'experte a déclaré que l'approche pour laquelle son pays a opté, directement inspirée du Programme de Beijing, était soucieuse de mettre en oeuvre des actions qui soient adaptées aux besoins réels des femmes. Elle a indiqué que la priorité était accordée, à l'heure actuelle, à l'éradication de la pauvreté, à la violence à l'encontre des femmes, à l'éducation, la santé et à la participation des femmes aux décisions politiques.

L'experte a déclaré que le chemin était encore très long pour parvenir à la parité entre les sexes. Elle a précisé que le Bureau des Affaires féminines s'efforce de traduire en actions concrètes les réflexions d'ordre théorique sur la parité entre les sexes. Elle a affirmé que le Gouvernement s'assurait que le Bureau des Affaires féminines soit doté des ressources nécessaires à l'accomplissement de sa mission. L'intervenante a indiqué que le Bureau hébergeait nombre d'ONG et attachait beaucoup d'importance à la mise en place d'un partenariat efficace avec la société civile. Elle a cité en exemple du renforcement de ce partenariat l'action menée avec l'Association jamaïcaine des travailleuses au foyer, soulignant le fait qu'il était important que l'association conserve son autonomie.

L'experte a déclaré que les mécanismes institutionnels de promotion de la femme devraient établir des liens entre eux. Ainsi, elle a indiqué qu'un programme de liaison entre les différents bureaux des Affaires féminines des Caraïbes était à l'étude. Elle a précisé que les différents bureaux échangent désormais des informations. L'intervenante a déclaré que l'efficacité des mécanismes institutionnels dans son pays était ralentie par la faiblesse des ressources, les effets de la mondialisation, le manque de croissance économique. Toutefois elle s'est dit convaincue que la mise en place de stratégies novatrices pouvait faire progresser l'action en faveur des femmes.

Mme SHIRIN M. RAI, Conférencière à l'Université de Warwick, Royaume-Uni, a abordé la question de la responsabilité des mécanismes institutionnels. Elle a déclaré que la principale conclusion de son étude sur la Commission nationale de l'Inde pour les femmes était de nature pessimiste. La Commission, qui a entamé son action avec beaucoup de bonne volonté s'est avérée incapable de soutenir l'action des organisations de la société civile. De plus, la Commission s'est trouvée en situation marginale au sein du système politique. L'experte a affirmé que le problème de la légitimité des mécanismes institutionnels soulevait la question de leur responsabilité. Elle a déclaré qu'il est important de noter que, finalement, les mécanismes institutionnels s'inscrivent dans un cadre plus large de relations socioéconomique et dans un système politique qui ont un impact sur leurs conditions de fonctionnement. Aussi, différents types de mécanismes institutionnels seraient mieux adaptés aux différents contextes dans lesquels ils agissent.

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Abordant la question de la définition même des mécanismes institutionnels, et rappelant en ce sens les termes du Programme d'action de Beijing, l'intervenante a fait référence au travail de M. Maxime Molyneux qui introduit une distinction entre les "besoins pratiques" des femmes et les "stratégies". Les intérêts pratiques reflètent les demandes immédiates des femmes s'agissant, par exemple, des conditions de travail, d'égalité des chances. Les intérêts stratégiques, d'ordre plus général, relevant quant à eux d'une nécessité de changement dans les paradigmes de pouvoir.

La responsabilité des mécanismes institutionnels constitue une question essentielle, a déclaré l'experte. A cet égard, elle a souligné le fait que, sans engager de dialogue avec les différents groupes compétents, sans créer des liens entre les ONG et les groupes de femmes d'une part, et les mécanismes institutionnels d'autre part, ou sans engager un dialogue avec la société civile, les mécanismes institutionnels échoueront dans leur action. Elle a indiqué que de tels liens, en renforçant la légitimité des mécanismes institutionnels, leur confèrent une position plus forte. L'experte a déclaré qu'il était important de prendre en considération le contexte politique dans lequel les mécanismes institutionnels agissent pour répondre à la question de leur efficacité. Leur degré de légitimité est susceptible d'affecter le rôle qu'ils jouent aux différents niveaux de leur intervention.

Réponses apportées par les experts en réponses aux questions des délégations

Mme ROUNAQ JAHAN a, dans le cadre du renforcement de la fonction d'exécution des mécanismes institutionnels, évoqué ceux mis en place au Bangladesh dans les années 1970. A cette période, nous estimions que les mécanismes nationaux devaient avoir un rôle promotionnel et non pas d'exécution. Nous partions du principe qu'il existe des ministères qui sont chargés de l'exécution de tâches précises. Mais compte tenu de la pénurie des fonds, cette stratégie est-elle appropriée, s'est demandée l'experte. Les mécanismes nationaux ne peuvent néanmoins pas régler tous les problèmes mais peuvent entreprendre des projets particuliers. Evoquant la "crise d'identité" des revirements que connaissent certains pays où l'analyse des résultats des politiques mises en place dans les années 80 ont entraîné une remise en cause. Dans ce contexte, le partenariat avec les groupes de défense des femmes, les syndicats et d'autres représentants de la société civile sont importants. Pour leur propre survie, les mécanismes doivent s'allier aux organisations possédant un pouvoir politique.

Mme MOSEROVA a souhaité ajouter que le rôle des gouvernements est d'intégrer les perspectives sexospécifiques dans tous leurs domaines d'activités. Dans ce contexte, elle a souligné l'importance du Parlement, dans lesquels les femmes doivent être mieux représentés.

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Mme RAI a expliqué pourquoi la décentralisation des mécanismes institutionnels est nécessaire. Elle a souligné l'importance de la décentralisation au niveau de la responsabilité des mécanismes nationaux eux-mêmes, afin qu'ils aient un impact au niveau régional, grâce en particulier à la communication avec les organes locaux sur le terrain. Elle a estimé qu'il faut mettre en doute la véritable aspiration des gouvernements à mettre en place une perspective sexospécifique sans décentralisation. Il faut au contraire encourager les gouvernements locaux, ce qui n'est réalisable que par la décentralisation.

En ce qui concerne la distinction entre le secteur privé et le secteur public dans le cadre de l'introduction d'une perspective sexospécifique, Mme Rai a estimé que le secteur privé peut être utile : la capacité d'avoir un dialogue de plaidoyer avec les médias, par exemple, doit être développée. Par ailleurs, au niveau des conditions de travail de la femmes, elle a estimé qu'il est très utile d'établir des liens avec les petites et moyennes entreprises.

Mme SIMMS a répondu au sujet de la formation des femmes sur le terrain, dimension du travail pour la promotion de la femme qu'elle considère comme très importante. Il faut également favoriser les activités de formation qui peuvent exister dans divers ministères. Déplorant le trop grand nombre de doubles emplois, elle conseillé de tenter de faire économiser de l'argent aux gouvernements en harmonisant les différentes formations. L'utilisation des ressources gouvernementales doit être également déterminée avec rigueur.

Mme Simms a également souligné la nécessité de décentralisation, même dans une petite île comme la Jamaïque, car Kingston n'est pas la Jamaïque. Elle a ajouté qu'il ne faut pas supposer que la collectivité existe car souvent l'intégration n'est pas réalisée. Il faut donc construire une collectivité. Dans le travail de conseil du gouvernement, il est nécessaire d'aller sur le terrain pour avoir une prise réelle sur la réalité. Dans ce cadre, l'experte a conseillé la coopération avec les églises, les ONG, les individus, car aucune source d'information ne peut être négligée.

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