LE CARACTERE DE PLUS EN PLUS INTERETHNIQUE DES CONFLITS EXPLIQUE LE GRAND NOMBRE DE VICTIMES CIVILES ET LES ENTRAVES A L'ASSISTANCE HUMANITAIRE
Communiqué de Presse
CS/1027
LE CARACTERE DE PLUS EN PLUS INTERETHNIQUE DES CONFLITS EXPLIQUE LE GRAND NOMBRE DE VICTIMES CIVILES ET LES ENTRAVES A L'ASSISTANCE HUMANITAIRE
19990222 Respect du droit humanitaire, élimination du trafic d'armes et développement économique au nombre des solutions proposéesLe Conseil de sécurité a tenu ce matin et cet après-midi, le deuxième débat de l'année sur la protection des civils touchés par les conflits armés.
Les populations civiles représentent aujourd'hui 90% des victimes des conflits armés, alors que ce pourcentage n'était que de 45% pendant la deuxième guerre mondiale et de 5% seulement pendant la première guerre mondiale. Les intervenants ont expliqué cette tendance par le changement observé dans la nature des conflits qui ont pris la forme de conflits internes voire interethniques. Dans ce contexte, toute personne, civile ou belligérante, appartenant à un groupe ethnique donné devient la cible directe de la partie adverse. Il en va de même pour l'assistance humanitaire, qui en se portant au secours d'un groupe donné, est perçue par la partie opposée comme une entrave à la réalisation de ses ambitions. Cette situation a conduit les délégations à mettre l'accent sur le devoir de neutralité et d'impartialité de l'assistance humanitaire en appelant, pour certaines d'entre elles, à l'élaboration d'un code de conduite. L'aide humanitaire ne peut pas non plus servir de prétexte à une ingérence dans les affaires internes d'un pays et doit être fournie dans le respect de leur souveraineté nationale, ont averti pour leur part certaines délégations. Dans leur ensemble, les intervenants ont néanmoins reconnu que la protection des civils en situation de conflits passe d'abord et avant tout par le respect des instruments relatifs aux droits de l'homme et au droit humanitaire international, comme par exemple la Convention de La Haye et les Conventions de Genève. Ils ont donc souhaité qu'il soit mis un terme à la culture de l'impunité et se sont pour la plupart félicités des efforts actuels tendant à créer rapidement une Cour pénale internationale.
Pour certaines délégations, la protection des civils passe également par un règlement définitif de la question du trafic illicite d'armes, en particulier des mines antipersonnel et des armes légères. D'autres délégations ont établi un lien direct entre la question des armes légères et le phénomène de l'enrôlement des enfants.
(à suivre - 1a)
- 1a - CS/1027 22 février 1999
A cet égard, elles ont invité la communauté internationale à saisir l'occasion du dixième anniversaire de la Convention sur les droits de l'enfant pour avancer les travaux sur le protocole additionnel à l'article 38 de la Convention et faire passer l'âge minimum d'enrôlement de 15 à 18 ans.
Si comme l'a déclaré une délégation, les conflits trouvent aussi leur source "dans l'absence de responsabilité dans l'exercice du pouvoir", la plupart des délégations ont mis l'accent sur les causes économiques et sociales. Elles ont donc invité le Conseil à ne pas perdre de vue, dans l'exercice de son mandat, l'importance du développement économique, de la préservation et du renforcement du tissu social et de l'éducation, en faveur desquels des mesures doivent être prises dès le début d'une intervention. L'aspect économique a conduit une délégation à souhaiter l'élaboration d'un code de conduite pour les milieux des affaires qui bien souvent alimentent les conflits en étant demandeurs de telle ou telle matière première contrôlée par une partie au conflit. L'aspect économique a également permis à de nombreuses délégations de soulever la question de l'imposition des sanctions, qui ne sont un instrument approprié, que si leur cible est parfaitement déterminée. Ces délégations ont donc appelé à la création d'un mécanisme de contrôle de l'impact économique et social des sanctions sur les populations des pays concernés mais aussi sur celles des pays tiers. Compte tenu de la complexité de la protection des civils dans les situations de conflit, les délégations ont préconisé une approche intégrée qui doit être élaborée grâce aux efforts conjoints du Conseil de sécurité, du Conseil économique et social et de l'Assemblée générale.
Le Conseil avait déjà tenu un débat sur la question de la protection des civils touchés par les conflits armés, le 12 février dernier. Ces discussions avaient donné lieu à la publication d'une déclaration présidentielle par laquelle le Conseil se déclarait prêt à agir, conformément à la Charte des Nations Unies, en cas d'attaques contre les populations civiles et d'entrave à l'assistance humanitaire.
Les représentants des pays suivants ont fait une déclaration au cours du débat : Allemagne, Burkina Faso, Australie, Norvège, Pakistan, Japon, Bangladesh, Costa Rica, Nouvelle-Zélande, Inde, Ukraine, République de Corée, Indonésie, Togo, République dominicaine, Guatemala, El Salvador, Haïti, Azerbaïdjan, Egypte, Uruguay, Zambie, Iraq, Israël. Les Observateurs de la Palestine et de la Suisse sont également intervenus.
Les représentants des Etats-Unis, du Royaume-Uni, de la Fédération de Russie et de l'Iraq ont exercé leur droit de réponse.
Protection des civils touchés par les conflits armés
Déclarations
M. DIETER KASTRUP (Allemagne), prenant la parole au nom de l'Union européenne, des pays associés d'Europe centrale et orientale, de Chypre, de l'Islande et du Liechtenstein, a appelé à donner une nouvelle vigueur aux efforts internationaux visant à protéger les civils dans les conflits armés, tout en soulignant que la responsabilité première de leur protection incombe aux Etats et aux parties en conflit. Le Conseil de sécurité à aussi une responsabilité importante dans ce contexte. En effet, il lui incombe de coordonner correctement ses actions avec les autres organes pertinents. Parmi les mesures à prendre, l'Union européenne estime qu'il faut réduire l'écart entre les normes internationales existantes et leur respect. Même si les instruments relatifs aux droits de l'homme et au droit humanitaire nécessitent peut-être une certaine élaboration, l'objectif principal doit être d'assurer leur respect et leur mise en oeuvre intégrale. La diffusion des obligations relatives aux droits de l'homme et au droit international humanitaire parmi les forces de sécurité et les autres protagonistes des conflits armés dans des termes clairs et simples est particulièrement importante. Il faut, en outre, assurer l'accès inconditionnel des travailleurs humanitaires aux personnes dans le besoin. Leur présence permet, en effet, souvent de prévenir les pires atrocités et contribue à l'application du droit international. Il faut examiner ce qui peut être fait pour renforcer la sécurité du personnel humanitaire. Il importe aussi d'étudier des mesures plus efficaces en vue de protéger les enfants dans les conflits. L'Union européenne estime, à cet égard, qu'il faut envisager de relever l'âge limite de la participation des enfants aux conflits de 15 à 18 ans. Il faut également veiller à ce que l'identification des enfants constitue l'une des priorités des efforts visant à établir la paix et à résoudre les conflits.
De l'avis de l'Union européenne, il faut s'attaquer au problème des mines antipersonnel et de la prolifération des armes de petit calibre. Les sanctions doivent être bien ciblées et toucher les dirigeants pour avoir un véritable impact et éviter dans la mesure du possible des conséquences humanitaires négatives pour la populations. A cet égard, il importe que les embargos sur les armes soient appliqués strictement afin de stopper les flux d'armes vers les régions en conflit. Une autre priorité de l'Union européenne est de mettre fin à l'impunité pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité. Le Tribunal international pour le Rwanda, le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie et l'adoption du Statut de la Cour pénale internationale constituent des avancées importantes mais il est aussi essentiel que les Etats remplissent leurs obligations et prennent des mesures au niveau national. M. Kastrup a également souligné la nécessité de faire le maximum pour empêcher l'utilisation des médias en tant qu'instrument de conflit. Le Conseil de sécurité devrait avoir pour priorité la prévention des conflits. A cet égard, il importe de promouvoir le développement économique et social, la bonne gouvernance et le respect des droits de l'homme.
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Enfin, des mesures diplomatiques, politiques et militaires cohérentes doivent être complétées par des mesures économiques, humanitaires et en matière de développement dans le cadre de la résolution des conflits. Il est important, dans ce contexte, de développer plus avant le concept de cadre stratégique visant à guider les activités des diverses organisations de l'ONU, a déclaré M. Kastrup.
M. MICHEL KAFANDO (Burkina Faso), au nom de l'Organisation de l'unité africaine (OUA), a cité les chiffres du HCR selon lesquels 90% des victimes des conflits sont des civils. Il a jugé affligeant que l'Afrique soit le continent qui paie le plus lourd tribut, du fait du nombre des guerres qui s'y déroulent et des problèmes économiques, qui entravent toute réinsertion efficace. Le représentant a également évoqué la phénomène des enfants soldats, dont, a-t-il dit, l'enrôlement est proportionnel à la prolifération des armes légères. Avec l'assistance des Etats Membres, du HCR, du CICR et d'organisations gouvernementales et intergouvernementales, l'OUA a dépêché des missions dans plusieurs pays africains pour enquêter sur la situation des réfugiés, des rapatriés et des personnes déplacées. Selon l'enquête, environ 6 millions de réfugiés et 20 millions de personnes déplacées dont la majorité sont des femmes et des enfants ont été dénombrés. Parallèlement, le Secrétariat général de l'OUA a organisé des réunions régionales sur la question dans le but de sensibiliser les politiques et les populations africaines et aussi la communauté internationale.
Pour le représentant, le problème de la protection des civils dans les conflits armés demeure complexe. Il met aux prises des préoccupations humanitaires avec des considérations politiques. Il met en conflit parfois des souverainetés et des susceptibilités. La protection des victimes implique, en effet, le devoir d'ingérence que bien des gouvernements assimilent à une ingérence dans leurs affaires intérieures. Pour l'OUA, la protection du personnel humanitaire dans les situations de conflits exige la prise en compte des aspects humanitaires dans l'élaboration des politiques de règlement des conflits, l'enseignement du droit international humanitaire et sa diffusion et, la ratification des instruments pertinents. La protection des populations civiles exige plus particulièrement le règlement de la situation des enfants soldats. L'OUA appuie fermement l'action de bon nombre d'ONG visant à relever l'âge d'enrôlement à 18 ans.
La protection des civils, a poursuivi le représentant, nécessite également que les Etats deviennent rapidement partie à la convention sur l'interdiction complète des mines antipersonnel. Pour le représentant, il est, par ailleurs, nécessaire que l'action des organisations humanitaires soit sécurisée. Il a toutefois souligné la nécessité pour ces organisations de suivre un code de conduite car, a-t-il insisté, l'assistance humanitaire doit rester neutre et impartiale.
( suivre)
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M. JOHN CRIGHTON (Australie) a estimé que des organisations telles que le CICR, le HCR et l'UNICEF ont contribué, de manière décisive, à la protection des populations civiles en situation de conflits ou après les conflits. Dans ce domaine, a ajouté le représentant, la place des droits de l'homme et du droit humanitaire international doit être centrale. Il ne faut épargner aucun effort pour renforcer les protections prévues par ces instruments, non seulement en ce qui concerne les femmes et les enfants mais aussi lorsqu'il s'agit d'enrôler les enfants. A cet égard, l'Australie appuie fermement l'élaboration d'un Protocole additionnel à la Convention sur les droits de l'enfant, qui vise à renforcer les dispositions de l'article 38 en élevant l'âge minimal d'enrôlement. Le renforcement du cadre législatif international est crucial, a dit le représentant, et doit aller de pair avec les efforts d'observation des droits de l'homme et du droit humanitaire international.
Le représentant a poursuivi en soulignant la nécessité pour la communauté internationale de disposer d'institutions judiciaires efficaces pour traduire en justice les responsables des crimes contre l'humanité. Il a estimé, à cet égard, que la création d'une cour pénale internationale est un pas dans la bonne direction. Le représentant a rappelé les propos tenus par sa délégation en décembre 1997, sur la nécessité pour l'ONU d'adopter une approche plus intégrée dans la réponse qu'elle apporte aux situations de conflits. Il a souligné une nouvelle fois que, pour son pays, la protection des civils doit être considérée comme un élément important de cette réponse.
M. OLE PETER KOLBY (Norvège) a estimé que le bien-être des individus et de leurs communautés doit constituer le cadre de référence des efforts du Conseil de sécurité pour prévenir et régler les conflits. Les derniers mandats multidimensionnels confiés par le Conseil et les divers appels conjoints illustrent parfaitement le caractère global et universel de la question de la sécurité humaine. La communauté internationale doit donc aller plus loin et définir des mécanismes internes de suivi. Elle doit également poursuivre sa réflexion sur la manière d'améliorer l'efficacité des sanctions et de les rendre plus ciblées. Les victimes les plus vulnérables des conflits étant les enfants, la Norvège estime qu'il faut saisir l'occasion du dixième anniversaire de la Convention sur les droits de l'enfant pour adopter de nouvelles mesures de protection. Un accord sur un Protocole additionnel à la Convention sur les droits de l'enfant, qui élèverait l'âge d'enrôlement des enfants de 15 à 18 ans, constituerait un pas dans la bonne direction. En ce qui concerne la situation des enfants en situation de conflits, la Norvège appuie une approche fondée sur les droits de l'homme, en particulier sur le droit à l'éducation.
S'agissant de l'accès du personnel humanitaire aux populations dans le besoin et des attaques perpétrées contre ce personnel, le représentant a rappelé que devant ces faits, la Norvège a créé récemment un Fonds d'affectation spécial des Nations Unies sur la sécurité du personnel de l'ONU, servant à financer les programmes de formation et de gestion de la sécurité.
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Pour le représentant, le respect des normes du droit international relatives à la protection des populations civiles, exige qu'il soit mis un terme à la culture de l'impunité lorsqu'il s'agit d'actes de génocide, de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre. A cet égard, les Tribunaux internationaux pour l'ex-Yougoslavie et le Rwanda ainsi que les efforts visant à créer une cour pénale internationale sont des étapes importantes pour renforcer la pertinence des normes internationales. Il faut à tout prix améliorer la protection des civils grâce à une approche globale et coordonnée, a conclu le représentant.
M. AHMAD KAMAL (Pakistan) a déclaré qu'à côté de l'Afrique, où se déroulent la plupart des conflits armés, d'autres régions sont également touchées par de telles situations qui font des victimes civiles et causent de graves violations des droits de l'homme, comme c'est le cas au Cachemire occupé par l'Inde. La communauté internationale ne peut pas rester indifférente à des situations qui durent si longtemps. Il est frustrant de constater que les civils subissent des traitements cruels malgré l'existence d'un cadre international juridique et de principes importants concernant la protection des civils, des réfugiés et du personnel humanitaire. Nous avons la responsabilité collective d'assurer le respect effectif de ces instruments juridiques par les Etats Membres des Nations Unies. Il faudrait déployer des efforts concertés pour susciter une prise de conscience concernant la responsabilité des autorités de l'Etat pour ce qui est de la protection des civils dans les conflits armés. A cet égard, le Pakistan exprime l'espoir que la création d'une cour pénale internationale ouvrira la voie à une nouvelle ère de justice pour les populations et à l'instauration d'une société mondiale juste.
Le Pakistan appuie les vues exprimées par le Secrétaire général concernant l'élaboration d'une approche globale et coordonnée des Etats Membres et des organisations et organes internationaux pour aborder le problème de la protection des civils dans les conflits armés. M. Kamal a souhaité que le Secrétaire général présente des recommandations pratiques à cet égard, et en particulier des mesures visant à traiter les causes profondes des conflits, dans le rapport qu'il doit présenter au Conseil de sécurité en septembre prochain. La nécessité d'améliorer les conditions socioéconomiques des sociétés dans les situations d'après-conflit doit également être considérée avec l'attention voulue afin de garantir des résultats effectifs. Le Pakistan estime que le rapport du Secrétaire général ne doit pas seulement mettre l'accent sur le rôle que doit jouer le Conseil de sécurité pour améliorer la protection physique et juridique des civils dans les conflits armés. Ce rapport, a-t-il préconisé, doit être exhaustif et doit identifier le rôle de tous les organes et agences concernés.
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M. YUKIO TAKASU (Japon) a souligné la convergence de vues sur la nécessité d'adopter des mesures pour renforcer l'application du droit international humanitaire, pour prévenir les déplacements internes et lutter contre le phénomène des enfants-soldats. Il a préconisé la limitation des armes de petit calibre, des armes légères et des mines, et une plus grande protection du personnel humanitaire. Il a reconnu que certaines mesures sont déjà appliquées, mais qu'il restait bien davantage encore à faire. Pour sa part, le Japon a l'intention de contribuer à hauteur de 10 milliards de yens, environ 80 millions de dollars, aux opérations de déminage dans le monde, au cours des cinq prochaines années. Le Japon a également joué un rôle actif dans les efforts visant à limiter les armes de petit calibre et les armes légères, ainsi que pour la création rapide d'une cour pénale internationale. De l'avis du Japon, les mesures de protection des civils dans les situations de conflit sont importantes et constituent une partie intégrante des questions relatives à la sécurité humaine. Le Japon est sur le point de verser une contribution financière aux Nations Unies pour appuyer ses activités dans ce domaine.
M. Takasu a mis l'accent sur la nécessité de préserver les normes humanitaires traditionnelles de comportement, de même que le respect intégral des instruments humanitaires et des droits de l'homme pertinents. La disparition des normes traditionnelles de comportement conduit à une brutalité indescriptible contre les membres les plus vulnérables de la population. C'est pourquoi, il faut s'efforcer de préserver et de restaurer ces normes afin d'éviter d'autres tragédies et désastres humains. Il est aussi nécessaire de repenser notre approche en ce qui concerne les liens entre les conflits et les situations d'après-conflit. Avant même la résolution d'un conflit, il est nécessaire d'envisager de fournir non seulement une aide humanitaire mais aussi une assistance à la reconstruction de la société, pour donner aux populations suffisamment d'espoir dans un avenir stable et prospère et les convaincre qu'une paix durable est la seule réponse à leurs problèmes. Le représentant a relevé l'importance de l'éducation, à cet égard. Le Japon, premier donateur, a l'intention de continuer à veiller au renforcement de liens étroits entre l'assistance humanitaire et l'assistance au développement, et entre la prévention des conflits et le développement, tout en veillant à préserver les valeurs et traditions des populations locales concernées. M. Takasu a aussi souligné l'importance d'assurer le suivi adéquat des décisions adoptées par le Conseil sur la base du rapport du Secrétaire général sur les causes de conflits et la promotion d'une paix et d'un développement durables en Afrique, en particulier les résolutions sur la neutralité et la sécurité des camps de réfugiés et sur les flux illicites d'armes. Le représentant a souhaité que le Conseil, en collaboration avec les autres organes et organisations de l'ONU, adopte des mesures appropriées et efficaces pour assurer un monde meilleur au cours du prochain millénaire.
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M. ANWARUL KARIM CHOWDHURY (Bangladesh) a indiqué que le pourcentage des populations civiles victimes des conflits armés est passé de 5% à la première guerre mondiale à 90% aujourd'hui. Il a fait observer que les conflits actuels trouvent certes leur origine dans la pauvreté, la famine et l'ignorance mais aussi dans l'absence de responsabilités dans l'exercice du pouvoir. De même, l'héritage colonial continue d'entraver l'intégration sociale et politique et une distribution équitable des ressources. Une telle situation ne peut que nourrir les tensions au sein d'une nation, a estimé le représentant qui a invité la communauté internationale à aborder les causes originelles des conflits d'une manière globale et holistique. La pauvreté et l'injustice sociale, a-t-il insisté, constituent une source de frustration et une cause potentielle de nouveaux conflits. La stabilité, la sécurité, la démocratie et la paix doivent encore être consolidées dans la plupart des parties du monde. Pour le représentant, cette tâche exige que soit renversée de la tendance à la croissance des inégalités, au niveau international. Les enfants étant les principales victimes des conflits, le représentant a appuyé fermement l'idée selon laquelle les enfants doivent être traités comme "une zone de paix". De même, la Convention sur les droits de l'enfant doit être davantage invoquée et respectée.
Selon le représentant, la protection des populations civiles en situation de conflits exige l'adoption de mesures appropriées et efficaces pour mettre fin à la livraison d'armes aux belligérants. La fourniture et la prolifération des armes légères, en particulier, ont contribué de manière décisive, à mettre en danger la sécurité des civils. Le représentant a également estimé que la paix et la sécurité internationales ne peuvent être renforcées par les seules actions des Etats. Il faut aussi inculquer une culture de la paix. Il a souhaité, par conséquent, que le Secrétaire général accorde l'attention requise à cette question dans le rapport qu'il soumettra au Conseil sur la protection des civils dans les situations de conflits.
M. BERND NIEHAUS (Costa Rica) a estimé que les conflits actuels résultent souvent d'accumulations historiques de demandes insatisfaites, dans la majorité des cas, aggravées par des injustices sociales et économiques. L'Amérique centrale a été le témoin de nombreux conflits au cours desquels des civils innocents sont emportés par une violence qui leur est étrangère. Le représentant s'est déclaré particulièrement consterné par les chiffres traduisant la réalité tragique des enfants dans les conflits armés. La cessation des hostilités ne signifie pas la fin de la guerre, en particulier pour les enfants soumis à une culture de la violence. Il est en outre tout à fait possible que ces enfants reproduisent eux-mêmes cette violence lorsqu'ils deviennent adultes. M. Niehaus a dénoncé le vide moral profond et la disparition des valeurs éthiques. Les enfants, les femmes et les personnes âgées sont des victimes innocentes. C'est pourquoi, elles nécessitent des mesures de protection efficaces. Il est impératif que la communauté internationale agisse.
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De l'avis du Costa Rica, il est indispensable, en premier lieu, de visualiser le problème tel qu'il est et de reconnaître que la participation des enfants dans les conflits armés constitue une violation des droits de l'homme. Il faut d'urgence établir une législation internationale claire interdisant le recrutement d'enfants de moins de 18 ans dans les conflits armés. Le Costa Rica apporte, à cet égard, tout son appui à la conclusion rapide du deuxième Protocole additionnel à la Convention relative aux droits de l'enfant. Il faut une action claire, ferme et énergique en faveur de la bonne protection des civils dans les conflits armés, et en particulier des enfants. Même si la législation internationale représente une contribution énorme à cet égard, elle ne suffira pas à prévenir les situations dangereuses pour les civils, en particulier pour les enfants. C'est pourquoi à l'intérieur de chaque Etat il faut établir un cadre juridique et prendre des mesures sociales claires et efficaces pour que les enfants puissent exercer leurs droits et contribuer au développement de leur pays et de l'humanité dans la paix, la justice et la liberté.
M. MICHAEL POWLES (Nouvelle Zélande) a fait part de la manière dont, selon sa délégation, les Nations Unies devraient traiter le problème de la protection des civils dans les conflits armés. Une telle question, a-t-il précisé, devrait être abordée d'un double point de vue : mise en place d'un cadre juridique général et action de la part du Conseil de sécurité.
S'agissant du cadre juridique, le représentant a réaffirmé la nécessité de distinguer les combattants de ceux qui ne prennent pas une part active au conflit, distinction fondamentale du droit international, a-t-il rappelé. Le droit humanitaire actuel, a précisé le représentant, contient tous les principes et règles de base nécessaires. A cet égard, il a affirmé que le Code de conduite sur les personnes déplacées devrait être intégré au corps de règles du droit international humanitaire et, à cet égard, il a exhorté tous les Etats qui ne l'ont pas encore fait, à ratifier la Convention sur la sécurité du personnel des Nations Unies et associés. En ce qui concerne ce dispositif, il s'est déclaré favorable à une discussion sur l'élargissement de son champ d'application à l'ensemble des travailleurs humanitaires. D'autre part, le représentant de la Nouvelle Zélande a indiqué que l'adoption du Statut de la Cour pénale internationale constituait une étape essentielle dans la voie d'une meilleure protection des civils pendant les conflits armés. Concluant son intervention sur ce premier point, il a affirmé que la communauté internationale devait à présent concentrer ses efforts sur la mise en oeuvre effective des normes en vigueur.
S'agissant du Conseil de sécurité et prenant pour exemple les situations de Bosnie et de Somalie dans le début des années 90, le représentant a affirmé que le Conseil lui paraissait de moins en moins sûr dans la gestion des catastrophes humaines. Aussi a-t-il déclaré que le Conseil devrait se soucier de réaffirmer son leadership et de développer une capacité d'innovation, avec notamment des actions de prévention des conflits. Soulignant la grande difficulté de la tâche du Conseil de sécurité, le représentant a affirmé que cet organe des Nations Unies devait rester la source ultime et essentielle d'autorité pour la paix et la sécurité dans le monde.
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M. KAMALESH SHARMA (Inde) a déclaré qu'aussi émouvants soient-ils, les problèmes doivent être réglés sur la base des faits et du pragmatisme. C'est pourquoi il s'est déclaré quelque peu surpris par certaines libertés prises avec l'histoire dans les déclarations qui ont été faites. Prendre les civils pour cible n'est en effet pas une innovation des années 90, a-t-il affirmé, précisant que les principales victimes de l'ère coloniale ou de la doctrine militaire d'utilisation des armes nucléaires furent des civils. Pour ces raisons, des mesures devraient être prises pour bannir le recours aux armes nucléaires. Malheureusement, nous savons que le Conseil ne prendra pas de recommandation dans ce sens, la question étant hautement politisée, a déploré le représentant. L'Inde s'inquiète de voir que dans de nombreux cas, l'assistance humanitaire devient un problème entre les gouvernements concernés, les agences humanitaires et les pays donateurs et que la protection des civils devient le prétexte de revendications politiques. Dès lors, l'assistance humanitaire devient une part du conflit, elle devient un outil et un moyen de diminuer l'autorité existante, a expliqué M. Sharma. La Quatrième Convention de Genève ne pose pourtant pas de manière automatique le droit à l'accès aux populations pour les agences humanitaires. Celui-ci peut être interdit lorsque la situation militaire l'exige et passer outre serait une violation à la fois du droit humanitaire international et de la souveraineté des Etats. Le représentant a également fait part de son inquiétude quant aux recommandations faites par plusieurs experts visant à recourir à des sanctions ciblées pour garantir la protection des civils et punir ceux qui violent leurs droits. Le rapport du Secrétaire général devrait examiner ces problèmes de manière objective et approfondie.
Il revient au Conseil d'examiner la manière dont les instruments internationaux de protection des civils peuvent être pleinement respectés, a poursuivi M. Sharma. Le défi posé est que la plupart des violations sont perpétrées par des éléments qui n'ont signé aucun de ces instruments. Le Conseil n'a que très peu d'influence sur les actions des forces irrégulières, terroristes ou des seigneurs de la guerre. Comment distinguer les civils des combattants sans uniforme ? s'est interrogé le représentant, prenant pour exemple le fait que les camps de réfugiés sont désormais considérés par les belligérants comme un capital de guerre, et constituent un gisement de recrutement de combattants. M. Sharma a également estimé que les gouvernements devaient prendre leurs responsabilités en matière de contrôle et d'arrêt du trafic des armes alimentant les conflits, ajoutant que certains comportements méritent à ce titre d'être contrôlé et qu'il serait intéressant de voir ce que le Conseil peut faire dans ce domaine. Au titre des problèmes rencontrés en matière de protection des civils, il a aussi évoqué le rôle de certaines entreprises du secteur privé qui trouvent parfois un intérêt à fomenter et financer les conflits; le racisme et le recours à des mercenaires. Toutes ces remarques ne signifient pas que nous sous-estimons le travail et les efforts des agences humanitaires, a expliqué le représentant en conclusion, elles visent simplement à exposer la complexité du problème et la nécessité de prendre en compte les paradoxes qui se posent.
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M. VOLODYMYR YEL'CHENKO (Ukraine) a estimé qu'avant de formuler des recommandations sur la protection de la population civile en situation de conflits, le Secrétaire général doit d'abord analyser les causes des conflits actuels. Pour le représentant, ces conflits sont, dans la plupart des cas, des guerres interethniques n'ayant aucun caractère international et dont l'objectif principal n'est pas de prendre le pas sur un groupe rival mais de l'éliminer ou de le bannir. Dans un tel contexte, les populations civiles ne sont plus seulement des victimes collatérales mais une cible directe. C'est pour les mêmes raisons que les organisations humanitaires se voient souvent rejetées par les responsables des tueries en masse ou du nettoyage ethnique. Le nombre croissant des conflits armés ainsi que leur cruauté ont souvent pour conséquence la pauvreté et le déclin des ressources. A cet égard, il est important de ne pas perdre de vue l'importance du développement économique durable, de la préservation et du renforcement du tissu social et de l'éducation dans l'élimination des causes des conflits et leur prévention.
En situation de conflit, les sanctions économiques constituent un instrument puissant qui, selon le représentant, doit néanmoins être manipulé avec précaution. Il a appuyé fermement l'idée selon laquelle les sanctions doivent viser les responsables et éviter d'accroître les souffrances des femmes, des personnes âgées et des enfants, principales victimes des conflits. Ainsi, avant toute imposition de sanctions, le Conseil de sécurité doit accorder l'attention requise à leur impact économique et social sur les populations des pays concernés et des pays tiers. En même temps que l'imposition des sanctions, le Conseil doit charger le Secrétaire général de surveiller les effets de celles-ci sanctions en vue de présenter des options de changements au régime des sanctions afin de dissiper ses effets secondaires. Le représentant a conclu sa déclaration en apportant l'appui de son pays aux deux Protocoles additionnels des Conventions de Genève et à la création d'une cour pénale internationale. Appelant à la ratification universelle de la Convention sur les mines antipersonnel, le représentant a informé le Conseil de la décision de son gouvernement de signer la Convention avant le 1er mars 1999.
M. CHO CHANG-BEOM (République de Corée), a déclaré que la fin de la guerre froide n'avait pas mis fin aux détresses dont souffrent les populations civiles. Dans plusieurs parties du monde, les conflits armés et les souffrances des populations civiles continuent avec une intensité alarmante et une fréquence croissante. Les femmes, les enfants et d'autres groupes vulnérables, sont victimes d'attaques et d'abus déplorables, et de plus, un nombre croissant de volontaires qui se dévouent pour apporter de l'aide aux civils dans les situations de conflit, voient leurs vies menacées ou sacrifiées. Notre délégation pense que le moment est venu pour la communauté internationale de mobiliser sa volonté collective pour faire face à ces défis. C'est dans cette optique que lors de notre présidence du Conseil de sécurité au mois de mai 1997, nous avons pris l'initiative d'organiser le premier débat ouvert sur la question de la protection de l'assistance humanitaire des réfugiés et des autres populations dans les zones de conflits.
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Durant la séance d'ouverture sur cette question, le 12 février dernier, des suggestions constructives ont été faites par les intervenants et par les membres du Conseil sur la façon de promouvoir la protection des civils affectés par les conflits. Pour nous, la première responsabilité du Conseil dans le maintien de la sécurité et de la paix internationales ne devrait pas être limitée à son engagement dans le concept traditionnel de la sécurité des Etats. Car la sécurité des Etats ne peut être pleinement assurée si celle des peuples qui y vivent ne l'est pas. Le Conseil devrait donc prendre une approche proactive pour augmenter son engagement sur les questions de la sécurité humaine et de la fourniture de l'assistance et de la protection aux civils en zones de conflits. Notre deuxième souci concerne, lui, le renforcement du cadre juridique international, en vue de combattre la culture de l'impunité. En ce cinquantième anniversaire des Conventions de Genève et en ce centenaire de la première Conférence de la paix de La Haye, le Conseil doit directement s'impliquer dans la punition des crimes de guerre et autres violations du droit humanitaire international dans l'ex-Yougoslavie et au Rwanda. Enfin, nous aimerions que le Conseil de sécurité porte une plus grande attention aux diverses causes originelles des souffrances des populations civiles dans les zones en conflit, notamment le trafic illicite des armes et les mines terrestres antipersonnel.
M. ARIZAL EFFENDI (Indonésie) a estimé qu'il fallait mettre l'accent sur la mise en oeuvre du droit humanitaire international, des instruments relatifs aux droits des personnes déplacées, des réfugiés et des droits de l'homme des civils dans les situations de conflits armés. En outre, de l'avis de l'Indonésie, il est important de trouver un équilibre entre le droit international et le droit national afin de ne pas violer la souveraineté nationale des Etats, tout en respectant les buts et principes fixés par la Charte de l'ONU. Il faut également assurer la protection du personnel humanitaire si l'on veut que cet aspect du travail de l'Organisation puisse se dérouler dans de bonnes conditions. A cet égard, l'Indonésie appuie le Président du Comité international de la Croix-Rouge lorsqu'il dit que la condition minimum pour toute action des organisations humanitaires est de recevoir l'accord de chaque partie concernée.
Tout en mettant l'accent sur l'importance de traiter les causes profondes des conflits, le représentant a rappelé les liens entre le développement social et économique d'une part et la paix et la stabilité, d'autre part. L'Indonésie estime que des mesures efficaces devraient être prises à cette fin au travers d'une coopération étroite entre le Conseil de sécurité, l'Assemblée générale et le Conseil économique et social. Aucun de ces organes n'est équipé pour traiter seul de ces questions et de manière globale, a-t-il déclaré. Pour le Mouvement des pays non alignés, les opérations de maintien de la paix et l'assistance humanitaire sont deux choses différentes et constituent des réponses différentes à des situations différentes, a-t-il poursuivi.
( suivre)
- 12 - CS/1027 22 fvrier 1999
Les opérations de maintien de la paix ont, en effet, peu de chance de succès lorsqu'elles visent à faire face à des situations humanitaires, alors qu'il est difficile pour des organisations humanitaires de maintenir leur impartialité et leur neutralité lorsqu'elles sont escortées par des gardes armés. Ce dilemme n'est pas neuf et l'ONU est équipée pour faire face à cette question difficile mais importante, a estimé M. Effendi.
M. ROLAND Y. KPOTSRA (Togo) a estimé que si l'on veut améliorer à terme le sort des populations civiles en cas de conflit armé, il faudrait avant tout promouvoir une large adhésion aux règles prescrites par les instruments juridiques relatifs à la protection des populations civiles et leur mise en application effective. Il importe aussi, à cet égard, de remédier à l'inexistence d'un cadre juridique pour ce qui est des personnes déplacées. De l'avis du Togo, l'on ne pourra garantir un meilleur respect des normes que si les parties au conflit, quelles qu'elles soient et quelle que soit la nature du conflit, savent qu'elles ne peuvent plus prétendre bénéficier de l'impunité. Pour cela, a déclaré M. Kpotsra, tout doit être mis en oeuvre pour amener les coupables d'exactions massives et systématiques à répondre de leurs crimes. Les acteurs des conflits ne sauront s'imposer des limites dans la conduite des hostilités que s'ils sont conscients du fait que la fin ne justifie pas toujours les moyens et que, leur victoire militaire ne supposera pas nécessairement la reconnaissance ou la consécration de la communauté internationale si, dans leur cheminement, ils ont fait fi des principes et règles humanitaires. C'est dans ce contexte que l'idée de la mise au point d'un code de conduite à imposer à la communauté des affaires doit être considéré, a estimé le représentant. Il est évident, a-t-il souligné, que le grouillement des milieux d'affaires auquel on assiste souvent lors des conflits contribue d'une manière ou d'une autre à alimenter la machine faisant des femmes et des enfants des victimes des exactions. Souvent dans l'esprit des protagonistes de conflits, peu importe l'image à cultiver et la bonne conduite dans les opérations du moment qu'ils sont assurés que le contrôle des secteurs du bois, des puits pétroliers ou des mines de diamants leur garantit des ressources et l'acquisition d'armes.
M. Kpotsra a également estimé impératif de tout mettre en oeuvre pour assurer aux enfants une plus grande protection dans les conflits armés. Il faut renforcer les normes de protection, mettre fin à leur utilisation dans des situations de conflit et admettre qu'ils ne puissent être engagés dans des opérations militaires qu'après 18 ans révolus. Enfin, la promotion de la sécurité des civils, y compris le personnel des organisations humanitaires, passe également par des mesures concrètes, décisives et courageuses tendant à enrayer l'afflux d'armes vers les zones d'instabilité et de conflits. Ici aussi, a-t-il estimé, il s'agira d'élaborer un code de conduite que les pays producteurs d'armes devront s'imposer à eux-mêmes et le faire respecter par leurs industries et sociétés travaillant dans ce domaine. Le représentant s'est étonné du fait qu'alors que les terroristes présumés sont traqués avec ardeur, rien de significatif n'a jamais été réalisé au plan national pour empêcher le recrutement et l'utilisation de mercenaires, en dépit des appels incessants lancés par la majorité écrasante des Etats.
( suivre)
- 13 - CS/1027 22 fvrier 1999
Mme CRISTINA AGUIAR (République dominicaine) a invité les membres du Conseil de sécurité à étudier soigneusement le Programme de paix et de sécurité pour les enfants préconisé par l'UNICEF, en tant que contribution à l'élaboration de mesures et de solutions éventuelles en faveur des enfants touchés par les conflits armés. Il faut, en outre, lorsque des sanctions sont imposées à un pays, évaluer leurs effets sur les enfants et les autres groupes de la population. Il est, en effet, inacceptable que les sanctions provoquent une augmentation du taux de mortalité des enfants dans certains pays. La représentante a déploré le refus d'appliquer le cadre juridique international relatif à la protection des civils. La recherche de solutions efficaces pour améliorer la protection des civils dans les situations de conflits passe par un mécanisme d'application et de sanctions en cas de non respect des normes du droit international humanitaire, couplé à des mesures visant à prévenir la violence et les abus.
L'objectif de nos actions doit être la protection humaine. A cette fin, il est important que l'action politique et l'action militaire éventuelle décidées par le Conseil de sécurité viennent en complément de l'action judiciaire des organes du système, a poursuivi la représentante. Aucune règle de droit n'est efficace si elle n'est pas assortie d'une sanction en cas de non respect, a-t-elle insisté. Tout individu doit donc être assujetti à une sanction judiciaire en cas de violation de ces normes internationales. L'adoption récente du Statut de la cour pénale internationale constitue une mesure concrète en vue d'une protection plus efficace des populations touchées par les conflits armés. Au-delà des mesures de prévention, l'interdiction de l'utilisation de certains types d'armes et du recrutement d'enfants-soldats, ainsi que la lutte contre l'impunité créent un nouvel espace d'espoir pour les sans défense. Il est vital que tous les Etats apportent leur concours pour que le Statut de la Cour puissent entrer en vigueur le plus rapidement.
Pour la République dominicaine, il est aussi vital de distinguer les mesures politiques et l'action humanitaire qui doit être menée sans condition. Elle a estimé que l'une des causes fondamentales des conflits est la pauvreté. Son élimination constitue une contribution fondamentale à la paix et la sécurité internationale. Les législations internationales doivent être suivies de mesures pratiques visant à fournir une aide à ceux qui en ont besoin, a souligné la représentante. Il faut aussi faire preuve d'un niveau de volonté suffisant pour trouver des solutions aux conflits en utilisant les moyens pacifiques à notre disposition, a-t-elle conclu.
M. GERT ROSENTHAL (Guatemala) a observé que la question de la protection des civils en situation de conflits suscite la préoccupation la plus vive au sein de la communauté internationale. Le Guatemala a, pour sa part, des raisons légitimes de manifester la plus vive préoccupation que suscite au sein de son peuple les questions dramatiques dont le Conseil discute aujourd'hui. En effet, ce n'est qu'à la fin de l'année 1996, que le Guatemala a clôt définitivement une période de 36 années au cours de laquelle sa population a souffert d'un affrontement fratricide. La fin de cet affrontement traumatisant a été obtenue grâce aux efforts des parties au conflit qui ont travaillé avec le concours des Nations Unies.
( suivre)
- 14 - CS/1027 22 fvrier 1999
Depuis, le Guatemala a entrepris, en collaboration avec l'ONU et la communauté internationale, la mise en oeuvre des accords de paix. Cependant, force est de constater que le conflit au Guatemala n'a pas constitué une exception mais une caractéristique des conflits actuels, à savoir le nombre considérable de victimes civiles. Le Guatemala, qui a lancé une politique de réinsertion des victimes civiles, demeure néanmoins conscient de la difficulté qu'il y a à gommer de la mémoire collective les souffrances endurées. Le Guatemala appuie donc l'appel du Conseil pour renforcer le respect du droit international et se félicite aussi de l'accent que le Conseil met sur les Conventions de La Haye relatives au droit coutumier de la guerre, les Conventions de Genève et leur protocole additionnel et la Convention sur les droits de l'enfant, étant donné le phénomène croissant de l'enrôlement des enfants. En ce qui concerne la circulation des armes légères, le Guatemala a tenu un séminaire sur la question, en collaboration avec les Nations Unies.
M. RICARDO G. CASTANEDA CORNEJO (El Salvador) a exprimé sa grave préoccupation face à la tendance actuelle des parties en conflit à viser les groupes de population les plus vulnérables. Pour lui, il est fondamental que tous les protagonistes des conflits respectent scrupuleusement les normes et les principes humanitaires internationaux. A cet égard, il a fait part de l'expérience acquise par son pays et a souligné l'importance de la volonté politique des parties à reconnaître la nécessité de respecter les Conventions de Genève sur la protection des civils dans les conflits armés et les instruments internationaux pertinents. Dans le cas d'El Salvador, les Accords de San José sur les droits de l'homme, signés avant la fin du conflit armé entre le Gouvernement et le Front Farabundo Marti pour la libération nationale le 26 juillet 1990, ont été respectés par les deux parties. La conclusion d'un cessez-le-feu, avant les Accords de paix, a permis d'engager des activités d'assistance à la population, notamment la mise en oeuvre de programmes de vaccination en collaboration avec l'UNICEF. La signature des accords de paix eux-mêmes qui sont venus complétés les premiers accords, ont témoigné de la volonté des parties de trouver une solution politique durable.
De l'avis d'El Salvador, il faut développer une culture de la paix et déployer des efforts au niveau mondial dans les domaines de l'éducation et de la formation pour promouvoir le dialogue et la négociation et donner à la population une meilleure capacité de tolérance et de respect des droits de l'homme. Il est indispensable d'obtenir que les parties en conflit respectent les normes des instruments internationaux relatifs à la protection des civils dans les conflits armés, et en particulier la Convention relative aux droits de l'enfant. Il faut promouvoir une reconnaissance universelle de l'âge minimum de recrutement des enfants dans les conflits, qui doit être fixé à 18 ans, et accélérer la démobilisation des enfants-soldats. Il faut aussi mettre fin à l'impunité. Il est aussi important d'intégrer les efforts du Conseil de sécurité avec ceux du Conseil économique et social en faveur du développement humain. Le renforcement de la coopération entre les divers organes de l'ONU permettra de mettre en oeuvre des actions plus efficaces en faveur de la protection des civils dans les conflits armés, a-t-il conclu.
( suivre)
- 15 - CS/1027 22 fvrier 1999
M. PIERRE LELONG (Haïti) a rappelé que son pays n'a jamais été victime d'une guerre civile mais la situation de crise qu'il a connue a néanmoins eu des résultats similaires aux situations de conflits. Les mesures adoptées par la communauté internationale à l'égard d'Haïti ont comporté certaines mesures coercitives qui ont été percues par les populations pauvres comme une injustice; les sanctions ne touchant que très peu les élites économiques et politiques. Fort de cette expérience, Haïti estime qu'il faut faire en sorte que les sanctions soient mieux ciblées et mieux évaluées et qu'elles fassent l'objet d'une évaluation périodique. Elles doivent être limitées dans le temps et tenir compte des progrès réalisés. Le représentant a, par ailleurs, mis l'accent sur les dysfonctionnement de l'action internationale. Il a ainsi dénoncer le manque de connaissance du terrain dans la mise en oeuvre des politique adoptées; le rôle pernicieux du personnel dépêché sur place; son insensibilité aux voeux des populations; et un roulement de personnel trop fréquent porteur d'un manque d'efficacité. La protection des civils repose d'abord et avant tout sur des efforts soutenus de développement. Le Conseil doit donc chercher à intégrer ses travaux à ceux du Conseil économique et social ainsi qu'à ceux d'autres acteurs. En toute chose, a conclu le représentant, il faut éviter la manipulation tant il est vrai que l'histoire des tueries et des massacres est bien souvent l'histoire de l'hypocrisie et de la duplicité.
( suivre)
- 16 - CS/1027 22 fvrier 1999
M. ELDAR KOULIEV (Azerbaïdjan) a estimé que la question de la protection des civils en situation de conflits comporte deux aspects. Le premier aspect concerne la protection physique et la sécurité des populations qui découlent du mandat du Conseil de sécurité, et le deuxième aspect concerne le problème plus complexe des normes et des dispositions du droit humanitaire international, des institutions autorisées à assurer les droits des populations civiles et de la fourniture de l'assistance humanitaire. Pour éviter des tragédies comme celle qu'a endurée l'Azerbaïdjan avec l'invasion arménienne en 1992, le Conseil de sécurité doit prendre des mesures politiques, diplomatiques et militaires et ce, à temps et de manière appropriée. Les conflits actuels, a affirmé le représentant, se caractérisent par la technique du nettoyage ethnique, consistant à "nettoyer" les territoires occupés en agressant les populations qui deviennent très vite des réfugiés sur leur propre sol. Aujourd'hui, 20% du territoire azerbaïdjanais sont occupés et 1 million de personnes sont réfugiées ou déplacées. La technique du nettoyage permet ainsi aux envahisseurs d'ignorer les Conventions de Genève et de faire vivre "le mot d'esprit" de Staline : "pas d'hommes - pas de problèmes". Devant ces faits, le représentant a souhaité que le Conseil de sécurité soit saisi de la question des personnes déplacées. Attirant également l'attention sur la nécessité de régler la situation des enfants dans les conflits armés, de lutter contre le trafic illicite d'armes et de respecter les embargos imposés par le Conseil, le représentant a conclu en encourageant le Conseil à tout mettre en oeuvre pour renforcer les dispositions du droit humanitaire international afin d'assurer leur application sur le terrain.
M. NABIL ELARABY (Egypte) a appelé le Conseil à ne pas s'enfoncer dans une démarche théorique mais à traiter de la question de la protection des civils dans les conflits armés dans le respect total de l'équilibre entre les organes principaux de l'ONU. Il serait souhaitable d'inscrire cette question à l'ordre du jour de l'Assemblée générale et du Conseil économique et social pour compléter ce qui se fait au Conseil, a-t-il suggéré. Que les civils soient délibérément pris pour cible ou incidemment victimes d'actes de violence collatéraux constitue une violation des droits de l'homme mais montre aussi que le Conseil n'a pas su accomplir sa mission. Il importe donc aujourd'hui de développer une approche globale visant à prévenir les conflits et les crises humanitaires graves. S'il existe effectivement un décalage sans précédent entre les instruments juridiques internationaux et leur application, ce n'est pas une raison pour revoir les règles de droit. Il faut plutôt que les Etats s'engagent à remplir les engagements qu'ils ont souscrits au titre des divers instruments. A cet égard, il est important de veiller à ce qu'il n'y ait pas de contradiction entre l'application du droit international humanitaire et les principes de la Charte. L'Egypte appuie, sous réserve du respect des principes de la Charte, la volonté du Conseil de réagir aux situations où les civils sont pris pour cibles ou où il est fait obstacle à la fourniture de l'aide humanitaire. Toutefois, cette aide doit être fournie dans le respect de la souveraineté des Etats.
( suivre)
- 17 - CS/1027 22 fvrier 1999
De l'avis de l'Egypte, il faudrait que la communauté internationale respecte le principe fondamental selon lequel la force ne peut être utilisée que lorsque le Conseil a établi qu'il y a eu menace ou rupture de la paix internationale ou qu'il y a un risque de menace ou de rupture de la paix internationale. Le représentant a appelé le Conseil à accorder une attention égale à toutes les situations indépendamment du lieu où elles se produisent et sans faire prévaloir des préoccupations individuelles sur des préoccupations collectives de tous les membres du Conseil.
M. Elaraby a appuyé le relèvement de l'âge minimum de recrutement des enfants à 18 ans. La protection des enfants nécessite des actions à divers niveaux. Outre le respect du droit international, il faut sensibiliser et former les belligérants aux règles de protection des enfants et veiller à la formation des agents humanitaires. Le représentant a appelé le Conseil à faire un bilan de l'impact des sanctions sur les populations civiles, et en particulier les enfants, et à examiner des mesures en vue d'acheminer une aide humanitaire dans ce type de situation. Dans les situations de crise, l'assistance humanitaire ne peut se substituer à l'action politique, a-t-il poursuivi. Il faut que les mandats donnés par le Conseil comportent des dispositions relatives au retour et à la réintégration des réfugiés. Il est également important de préciser les règles d'engagement des forces de l'ONU et d'y inclure notamment le droit à la légitime défense, la neutralité et la protection des locaux. Il a souhaité que le Secrétaire général présente à la fois devant le Conseil et devant l'Assemblée générale pour qu'ils puissent en assurer le suivi conjointement.
M. JORGE PEREZ-OTERMIN (Uruguay) s'est opposé à l'adjonction de nouvelles règles aux dispositions existantes du droit international en matière de protection des populations civiles en situation de conflits. Il a au contraire apporté l'appui de son pays au Conseil de sécurité dans l'exercice de son mandat en appelant les autres Etats Membres à ne pas perdre de vue l'article 24 de la Charte par laquelle ils donnent eux-mêmes au Conseil la responsabilité du maintien de la paix et de la sécurité internationales. Selon le représentant, la consolidation de la paix demeurera une tâche difficile tant que des efforts déterminants ne seront pas déployés dans le sens du développement économique et social. Il a donné son appui aux dispositions de la Convention sur les droits de l'enfant et à l'idée d'élever l'âge de conscription à 18 ans. Il a appuyé tous les efforts déployés en matière de déminage et de lutte contre les trafics illicites d'armes.
M. PETER KASANDA (Zambie) a estimé que toute discussion sur les souffrances des civils dans les conflits armés doit examiner le rôle joué par les armes de petit calibre et les armes légères. Il a également attiré l'attention sur l'expérience dévastatrice que constitue la guerre pour les enfants. Les enfants-soldats qui n'ont connu que la guerre et les tueries se retrouvent après la guerre sans formation, ni éducation et incapables d'être compétitifs sur le marché du travail, condamnés à une vie à la limite de la pauvreté abjecte.
( suivre)
- 18 - CS/1027 22 fvrier 1999
Le problème inquiétant de la protection des civils dans les conflits armés est une question urgente qui, dans des circonstances normales, serait un problème moins important si seulement les mécanismes mis en place au cours des 100 dernières années étaient respectés. La plupart des instruments internationaux ont été ignorés, en toute impunité, faisant des civils, et en particulier des femmes, des enfants, des personnes âgées et des malades, des victimes. La mise en place des tribunaux internationaux pour le Rwanda et l'ex-Yougoslavie ont constitué des avancées majeures dans les efforts visant à protéger les civils dans les situations de conflit.
La Zambie appuie la proposition visant à faire accepter universellement le relèvement de l'âge minimal pour le recrutement dans les forces armées à 18 ans et à introduire un âge minimal pour les forces de maintien de la paix et les forces de police civile internationales de l'ONU. La Zambie soutient aussi la proposition visant à faire du recrutement des enfants-soldats un crime de guerre. M. Kasanda a estimé que la mise en place de divers mécanismes en vue d'éliminer l'exploitation des femmes, des enfants et des personnes âgées ne suffisait pas. La meilleure solution est l'action préventive qui exige que l'on s'attaque aux causes profondes des conflits dans le monde entier, a-t-il dit. Le représentant a encore insisté sur le fait que le Conseil de sécurité doit examiner toutes les situations de guerre et de conflit de la même manière sans prendre en considération l'endroit où elles ont lieu.
M. SAEED HASAN (Iraq) a estimé que la question de la protection des civils revêt aujourd'hui une importance cruciale du fait de l'accroissement des victimes de ce type lors des conflits armés. Le traitement de la question de la protection des civils exige une approche qui tienne compte de plusieurs éléments. Il faut d'abord que les organisations humanitaires sur le terrain s'en tiennent à leurs compétences et ne débordent pas sur les compétences des autres acteurs. Le Conseil de sécurité doit s'abstenir de toute tentative d'empiéter sur les compétences des organisations humanitaires et de politiser leur action. Ensuite, les tentatives de plus en plus fréquentes d'invoquer le Chapitre VII de la Charte pour régler les conflits et protéger les civils est très dangereuse. Toute mesure prise dans le cadre de la protection des civils doit respecter le paragraphe 7 de l'article 2 de la Charte des Nations Unies tant il est vrai que le non respect en la matière ouvrirait la porte à des interventions injustifiées dans les affaires internes des Etats. Cela est d'autant plus dangereux que le monde a été témoin à plusieurs reprises de la sélectivité du Conseil et de sa règle de deux poids - deux mesures. Une vision partielle d'un conflit peut donner lieu à une solution prématurée qui risque d'empirer la situation. Les conflits aujourd'hui sont complexes. Ils trouvent leur source dans le colonialisme, l'absence de développement économique, le néocolonialisme et la structure de la scène économique et financière internationale. La communauté internationale doit donc avoir pour principe de respecter le droit des peuples de choisir leur mode de développement économique et politique.
( suivre)
- 19 - CS/1027 22 fvrier 1999
Le représentant a poursuivi invoquant la souffrance des civils due aux actions de certains membres permanents. Depuis 1991, les sanctions imposées par le Conseil à l'Iraq ont coûté la vie à 500 000 civils iraquiens et dévasté l'infrastructure socio-économique pour plusieurs générations. Ces sanctions représentent de toute évidence une sanction collective. Si le Conseil souhaite protéger les civils, la solution est simple. Il suffit pour cela de lever toutes les sanctions contre l'Iraq. Les faits montrent qu'à chaque heure qui passe, dix enfants iraquiens meurent du fait des sanctions. Le Conseil entend-il manifester plus de tolérance encore à l'égard de ce crime commis en son nom ? s'est interrogé le représentant. Il a poursuivi en considérant que deux Etats Membres du Conseil continuent de se placer au- dessus des lois et de penser que le droit international ne s'applique que lorsqu'il est conforme à leurs intérêts. Les dernières agressions contre l'Iraq en apportent la preuve, a dit le représentant en rappelant que le jour de l'agression, de nombreux membres du Conseil ont remis en question cette décision. L'agression a continué et a coûté la vie à des centaines d'Iraquiens.
Les faits montrent aussi que tous les enfants iraquiens sont victimes des horreurs provoquées par les attaques aériennes des Etats-Unis et du Royaume-Uni. Le Conseil doit saisir cette occasion pour protéger les civils iraquiens en interdisant le recours à la force par le Royaume-Uni et les Etats-Unis. Il appartient au Conseil de signifier à ces derniers que leur comportement illégal est en violation complète du droit international. De plus, les Etats-Unis viennent d'initier une nouvelle technique qui consiste à agresser l'Iraq par le financement d'émissions de radio hostiles. Il est donc grand temps que le Conseil procède à un examen global de la situation des civils en Iraq, a conclu le représentant.
M. DORE GOLD (Israël) a déclaré qu'en raison de son histoire, son pays se sent une responsabilité particulière dans la lutte contre le crime de génocide, les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre où qu'ils se produisent. Il a jugé paradoxal qu'alors que les Conventions de Genève ont reçu un appui quasi universel, leur mise en oeuvre sur le terrain demeure un défi. De l'avis d'Israël, certaines mesures peuvent être prises pour assurer un plus grand respect des dispositions de la Quatrième Convention de Genève. Tout d'abord, les Etats ont la responsabilité d'éduquer leurs populations sur l'importance du droit humanitaire et de diffuser des informations sur la Quatrième Convention de Genève avant même qu'ils ne soient impliqués dans un conflit armé. Cette Convention devrait figurer dans la formation des militaires, comme c'est le cas en Israël. Les Etats peuvent également recourir à leurs procédures juridiques pour élargir l'adhésion à cette Convention. Des conseils juridiques et une représentation devraient être accordés à tout civil qui se retrouve sous administration militaire résultant d'un conflit armé. En outre, les individus qui font l'objet d'une décision administrative de l'autorité militaire devraient avoir le droit de faire appel ou d'obtenir réparation, droit dont jouissent les habitants des territoires sous administration israélienne.
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- 20 - CS/1027 22 fvrier 1999
Il est également important de garantir le principe de la liberté d'accès. Les normes humanitaires ne sauraient être mieux protégées que par la transparence. C'est ce qu'Israël a fait en accordant au Comité international de la Croix-Rouge l'accès aux territoires sous administration militaire. Les Etats doivent prendre le risque de critiques, même injustes, plutôt que de compromettre cette liberté d'accès qui permet un contrôle essentiel sur la protection des droits de l'homme.
De l'avis d'Israël, la menace la plus grande qui pèse sur le droit humanitaire international est sa politisation. Il arrive, en effet, fréquemment que les Etats qui attirent l'attention sur leurs préoccupations à l'égard des droits de l'homme dans un cas, s'efforcent de détourner l'attention de violations graves du droit international humanitaire dans d'autres cas urgents. D'importants efforts internationaux peuvent ainsi être déployés concernant des cas discutables, alors que des violations massives des droits de l'homme sont complètement ignorées dans d'autres cas. Lorsque les droits de l'homme sont invoqués pour promouvoir des objectifs politiques spécifiques, alors que les droits de milliers d'autres personnes sont ignorés, les droits de l'homme sont niés, devant des intérêts politiques étroits plutôt qu'une norme universelle pour la protection de toute l'humanité. Les piliers de la protection humanitaire sont l'objectivité et la neutralité. Lorsque la neutralité des institutions humanitaires internationales est menacée, la protection des droits de l'homme est en danger. Il doit être absolument clair pour les puissances occupantes et les populations occupées que l'organe responsable de la surveillance du respect de la protection humanitaire internationale est guidé par une complète impartialité.
M. NASSER AL-KIDWA (Observateur de la Palestine) a souligné que pour le peuple palestinien, la question de la protection des civils en situation de conflits, n'est pas seulement une question essentielle mais une question de vie ou de mort. Il y a 50 ans, 500 000 Palestiniens sont devenus réfugiés et 20 ans plus tard, des milliers de civils palestiniens ont été contraints de quitter leur terre, devenant ainsi des personnes déplacées. Aujourd'hui, 3 millions de Palestiniens composent la population mondiale des réfugiés. Après son occupation de la Cisjordanie et de la Bande de Gaza, Israël a continué de violer les Conventions de Genève et la Convention de La Haye. Le Conseil a, pour sa part, adopté 24 résolutions réaffirmant l'applicabilité de la Quatrième Convention de Genève au territoire occupé par Israël. A cette date, Israël n'a jamais respecté les résolutions du Conseil participant ainsi à la culture de l'impunité. La réunion des experts de la Quatrième Convention de Genève qui s'est tenue du 27 au 29 octobre 1998, a elle-même conclu que les cas enregistrés dans les territoires occupés constituent tous des violations de la Convention. Aujourd'hui 330 000 colons sont installés dans 175 établissements des territoires occupés, dont 180 000 vivent à l'intérieur des frontières illégalement élargies de Jérusalem-Est occupé. Pour la première fois depuis 15 ans, l'Assemblée a tenu une session extraordinaire d'urgence pour examiner les mesures illégales prises par Israël.
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- 21 - CS/1027 22 fvrier 1999
La session a été convoquée après que le Conseil eut manqué d'exercer son mandat en matière de paix et de sécurité. La session extraordinaire a donné lieu à l'adoption de 5 résolutions exigeant toutes d'Israël l'application de jure de la Quatrième Convention de Genève et de toutes les résolutions pertinentes. Elle a également recommandé la convocation d'une conférence des Hautes parties contractantes de la Convention pour discuter des mesures visant à assurer la mise en oeuvre par Israël des dispositions de la Convention dans les territoires occupés, y compris Jérusalem. Selon la résolution, la Conférence devrait se tenir le 15 juillet prochain. L'importance de la conférence n'est pas diminuée par le fait qu'elle arrive si tard ni par le fait qu'il s'agit d'une première. Il est temps que la communauté internationale n'épargne aucun effort pour garantir l'application des instruments pertinents. Il en va de sa crédibilité.
Le représentant a évoqué la participation de sa délégation au débat du Conseil. Il a rappelé que la coutume instituée par le Conseil lui-même veut que l'OLP puis l'Autorité palestinienne participent au débat au même titre que les délégations non membres du Conseil. Le représentant s'est montré surpris que cette coutume n'ait pas été respectée aujourd'hui et a demandé au Conseil de revoir ses règles de procédure.
M. JENO C.A. STAEHELIN (Observateur de la Suisse) a déclaré que le droit humanitaire se fonde sur des valeurs universelles et vise à préserver un peu d'humanité dans les circonstances extrêmes que sont les conflits armés. Malheureusement, sa mise en oeuvre fait l'objet de nombreuses violations. En outre, l'apparition de nouveaux types de conflits, tels les conflits destructurés ou ceux dits identitaires, confrontent le personnel des organisations humanitaires à des défis particuliers. L'accès aux victimes est devenu plus difficile et le personnel lui-même est l'objet d'attaques parfois meurtrières. Compte tenu des nombreuses violations du droit humanitaire de par le monde, la répression revêt une importance particulière, a affirmé le représentant. Les difficultés auxquelles se heurte le respect du droit humanitaire peuvent être techniques ou financières, ou encore tenir à l'insuffisance des normes ou à leur méconnaissance, mais leur source principale réside dans la volonté de ne pas appliquer le droit. Ainsi, ce sont essentiellement des différends d'ordre politique et juridique portant sur l'applicabilité de la Quatrième Convention de Genève qui entravent l'application de cet instrument, a expliqué M. Staehelin. L'obligation de respecter le droit humanitaire a avant tout des effets sur le plan national, mais elle peut aussi avoir des conséquences sur le plan extérieur et fonder notamment la coopération internationale, bilatérale ou multilatérale.
De manière plus concrète, la Suisse estime notamment qu'il faut promouvoir l'application universelle du droit humanitaire, permettre aux parties intéressées d'établir un canal de communication approprié avec toutes les parties à un conflit armé, et garantir que l'obligation de réprimer les violations du droit humanitaire trouve un complément dans les efforts entrepris en vue d'une réconciliation nationale.
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- 22 - CS/1027 22 fvrier 1999
Il faut aussi poursuivre l'élimination des mines antipersonnel, établir un contrôle plus étroit sur les transferts d'armes légères et réduire substantiellement les stocks existants de telles armes, a poursuivi le représentant. De l'avis de la Suisse, il convient en dernier lieu de favoriser l'adoption rapide d'un instrument qui interdise le recrutement d'enfants et leur implication dans les hostilités en dessous de l'âge de 18 ans. Dans cet esprit, l'enrôlement de tels enfants doit être prévenu et la démobilisation des enfants recrutés favorisée. Les actions de l'ONU devraient, quant à elles, tendre à prévenir les conflits et à promouvoir la reconstruction des capacités locales au terme des hostilités, en contribuant à un développement économique, politique et social approprié. La Suisse considère aussi que le Conseil devrait tenir dûment compte des éventuelles répercussions négatives des sanctions économiques sur la population civile de l'Etat concerné et sur celle des Etats tiers. Elle estime également que le droit humanitaire, les besoins de la population civile et le problème particulier des enfants soldats devraient être pris en compte dans l'élaboration des mandats d'opérations de maintien de la paix.
Droits de réponse
M. PETER BURLEIGH (Etats-Unis) a déclaré que la responsabilité des difficultés que vit l'Iraq en ce moment incombe d'abord et avant tout aux autorités iraquiennes elles-mêmes. Selon lui, l'Iraq n'est victime d'aucune agression. Bien au contraire, le pays continue de proférer des menaces contre ses voisins comme il faisait déjà en 1990. Le représentant a précisé les choses et souligné que le recours à la force par les Etats-Unis et le Royaume- Uni n'est intervenu qu'après le refus de l'Iraq de renoncer à ses armes de destruction massive. Il a ajouté que les forces de coalition prennent toutes les précautions pour éviter les pertes civiles et les dommages collatéraux. La création des zones d'exclusion a été motivée par le fait que les Chiites du sud et les Kurdes du nord ont été les principales victimes du régime iraquien. Les informations collectées ce week-end indiquent que les populations ont fait l'objet de menaces de la part du régime de Bagdad. Les commentaires de la délégation iraquienne sont donc sans fondement et la vérité est simple : tant que le régime iraquien continuera ses actes de violence, les Etats-Unis feront tout leur possible pour protéger les populations iraquiennes contre ce régime brutal.
M. JEREMY GREENSTOCK (Royaume-Uni), concernant les décisions prises le 16 février, a renvoyé le Conseil à la déclaration faite le même jour. En ce qui concerne la création des zones d'exclusion aérienne, il a expliqué qu'il s'agit d'une disposition visant à protéger les populations du sud et du nord contre la répression de Bagdad, et ce, en appui aux résolutions du Conseil de sécurité. Les zones d'exclusion sont justifiées par le droit international en raison des besoins humanitaires considérables créés par le régime iraquien. Toute mesure prise par le Royaume-Uni dans ces zone relève de la légitime défense et découle directement des attaques ou des menaces iraquiennes.
( suivre)
- 23 - CS/1027 22 fvrier 1999
M. YURIY FEDOTOV (Fédération de Russie) a rappelé que son pays appuie toute initiative qui pourrait amener la paix dans la région du Golfe. La création des zones d'exclusion aérienne ne se fonde sur aucune résolution du Conseil de sécurité. Pour la Fédération de Russie, il faut adopter une démarche responsable qui créerait une atmosphère propice aux travaux au sein du Conseil en vue d'un règlement du problème iraquien. Des séances comme aujourd'hui ont pour objet de développer la transparence et de donner à un large groupe de pays l'occasion de faire part de leur évaluation d'une situation. Il peut y avoir des divergences mais c'est le prix à payer pour l'ouverture des travaux du Conseil, a-t-il dit.
M. SAEED HASAN (Iraq) a déclaré que tout en présentant une version des faits, les Etats-Unis ont fait savoir qu'ils mettraient leur droit de veto à toute levée des sanctions à l'encontre de l'Iraq. La coalition de 1991 a détruit les infrastructures iraquiennes et tué de nombreux civils. Le programme "pétrole contre nourriture" est un programme provisoire d'une grande lourdeur bureaucratique. Il faut plus d'un an pour qu'une demande soit satisfaite. A cela s'ajoutent les nombreux obstacles mis par les Etats-Unis. Quant aux zones d'exclusion aérienne, elles sont illégales de l'avis de plusieurs membres du Conseil. Un membre du Conseil peut-il utiliser la force en dehors d'une résolution du Conseil ? Et s'il le fait, ne doit-il pas subir les mêmes conséquences que celles imposées à d'autre ? M. Hasan a estimé que la déclaration du représentant du Royaume-Uni, affirmant que l'Iraq viole les zones d'exclusion aérienne, était une insulte à l'intelligence humaine. Peut- on dire, en effet, qu'un Etat viole son propre ciel aérien ? Ces deux pays ne font que verser des larmes de crocodile sur le sort des Iraquiens. Cette farce doit s'arrêter, a-t-il conclu.
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