En cours au Siège de l'ONU

SOC/4473

UNE TABLE RONDE DE LA COMMISSION DU DEVELOPPEMENT SOCIAL RECOMMANDE DE FIXER COMME OBJECTIF : DES SERVICES SOCIAUX POUR TOUS PARTOUT DANS LE MONDE

9 février 1999


Communiqué de Presse
SOC/4473


UNE TABLE RONDE DE LA COMMISSION DU DEVELOPPEMENT SOCIAL RECOMMANDE DE FIXER COMME OBJECTIF : DES SERVICES SOCIAUX POUR TOUS PARTOUT DANS LE MONDE

19990209 Les services sociaux pour tous doivent être l'objectif à atteindre pour tous les peuples dans tous les pays, ont recommandé les experts qui participaient cet après-midi à une Table ronde organisée par la Commission du développement social dans le cadre du suivi du Sommet mondial pour le développement social. En assurant l'accès universel aux services sociaux, la promotion d'un meilleur niveau de vie est assuré qui renforce à son tour les capacités de chacun à prendre en charge son avenir. Un des principaux défis à relever à cet égard est d'identifier les besoins prioritaires, en particulier dans les pays en développement où les besoins traditionnels ne sont pas encore satisfaits de manière adéquate, alors que de nouveaux besoins apparaissent constamment et que les ressources disponibles connaissent une diminution constante. Il a été souligné que, dans un certain nombre de pays, comme les pays en transition, l'accès aux services sociaux dépend d'une meilleure répartition des fruits de la croissance économique. Cela exige une véritable volonté politique de la part des gouvernements concernés qui ont la responsabilité de garantir la justice sociale. Dans les pays les plus pauvres, il importe de mettre en place des mécanismes novateurs permettant même aux plus démunis de bénéficier de ces services. Il a été suggéré d'étendre le système mis en place par la banque Grameen au Bangladesh dans le domaine du crédit, aux services de santé et d'éducation.

Les experts qui ont participé à la Table ronde étaient : Mme Funmi Togonu-Bickersteth, Spécialiste en sciences sociales, Professeur adjoint et titulaire de la chaire de psychologie de la "Obafemi Awolowo University" à Ife-Ife (Nigéria), auteur de nombreux articles sur la fourniture des services aux groupes désavantagés, en particulier les handicapés et les personnes âgées; Mme Nawal Ammar, membre de la Faculté de justice pénale, à la "Kent State University" (Ohio), qui lance en ce moment un projet d'évaluation des services juridiques et sociaux destinés aux femmes victimes d'abus migrantes aux Etats-Unis; Mme Silvia Saborio, Consultante indépendante à Washington, D.C., auteur de nombreuses publications sur le commerce, le développement et la finance; et M. Siddique Rahman Osmani, Professeur d'économie du développement, "University of Ulster" (Royaume-Uni), auteur de nombreuses publications dans les domaines de la pauvreté, de la faim, de la nutrition et de la sécurité sociale.

La Commission poursuivra ses travaux le mercredi 10 février à partir de 10 heures. Elle entamera son débat général sur le thème prioritaire des services sociaux pour tous.

TABLE RONDE D'EXPERTS SUR LES SERVICES SOCIAUX POUR TOUS

Présentations

Mme FUNMI TOGONU-BICKERSTETH, Spécialiste en sciences sociales, Professeur adjoint et titulaire de la chaire de psychologie de la "Obafemi Awolowo University" à Ife-Ife au Nigéria, a estimé que l'un des principaux défis est de parvenir à une définition exacte de ce que l'on entend par "services sociaux". En fonction du niveau de développement du pays, ce concept couvre une gamme plus ou moins large de services. Pour Mme Togonu-Bickersteth, les services sociaux doivent comprendre trois groupes de services : les services destinés à satisfaire les besoins essentiels de la population à tout moment, comme l'éducation, la santé, l'eau potable; ceux qui s'appliquent à divers cycles de la vie, comme l'enfance, l'adolescence, la vieillesse; et ceux dont ont besoin des groupes particuliers, comme les handicapés, les personnes touchées par le virus du sida. L'objectif des services sociaux pour tous vise à assurer un meilleur niveau de vie pour tous, ce qui permet aux personnes de mieux planifier leur avenir. Un préalable important dans ce domaine est de définir les besoins prioritaires, en particulier dans l'hémisphère sud où les besoins traditionnels ne sont pas encore satisfaits de manière adéquate, alors que de nouveaux besoins apparaissent constamment et que les ressources disponibles pour les satisfaire sont en contraction constante. De nombreux facteurs provoquent la naissance de nouveaux besoins, tels que le vieillissement de la population, la pandémie du VIH/sida, les conflits armés et la mondialisation. En outre, les besoins sont par nature dynamiques et à chaque besoin correspond toute une gamme de réponses possibles.

Il importe donc, en premier lieu, de satisfaire les besoins qui auront un effet multiplicateur ailleurs et un effet positif en termes de qualité de vie pour tous. Il est aussi plus rentable de se concentrer sur les stratégies de prévention. Après l'identification des besoins, il faut concevoir les moyens de les fournir aux groupes cibles de manière acceptable, abordable, efficace et conviviale. Plusieurs stratégies administratives peuvent être mises au point à cette fin. L'important est de faciliter et optimiser l'accès aux services pour les groupes auxquels ils sont destinés. Il importe d'être objectif et transparent dans la fourniture des services. Enfin, les services fournis doivent être acceptables sur le plan culturel et il faut que les groupes puissent les utiliser de manière indépendante. A cet égard, la participation des groupes à toutes les étapes, depuis la conception des services, est importante.

Mme NAWAL AMMAR, Professeur à la "Kent State University" dans l'Ohio et spécialiste des questions juridiques et sociales touchant à la situation des femmes migrantes victimes d'abus aux Etats-Unis, a dit qu'une question très simple se pose, à savoir, comment seront financés les services sociaux pour tous au prochain millénaire ? La Division des services sociaux de l'ONU

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a écrit à ce sujet un mémorandum très important. Les fournisseurs des services doivent être sensibles à l'utilité et à l'adaptation de ces services aux utilisateurs potentiels. La prestation de services pour tous doit, quant à elle, être vue dans différents contextes. Des défis nombreux se posent sur le plan des ressources, dont on a traité dans le cadre de l'Atelier d'experts sur le financement des services. D'autres ont trait au particularisme et à l'universalisme de la conception et du contenu des services, sur lesquels on a beaucoup discuté. Des questions de démocratie et de droits de l'homme se posent aussi, de même que des réflexions liées à l'assistance technique et à ses coûts. Dans beaucoup de cas, quand les gouvernements ne fournissent pas eux-mêmes les services, il se pose des questions relatives au contrôle de qualité et au financement et à la gestion à long terme de ces services. Sur un autre plan, aujourd'hui les revenus de certains individus sont supérieurs au revenu de nombreuses nations, et on gardera à titre d'exemple le fait de certains milliardaires comme Bill Gates ou le Premier Ministre du Liban qui ont des fortunes personnelles leur permettant de mener des actions supérieures à celles que peuvent engager des Etats-Nations, la reconstruction de Beyrouth étant, par exemple, aujourd'hui assurée sur des fonds en grande partie privés. Un autre défi a trait à la prestation de services pour tous. Il faut reconnaître d'autre part clairement qu'à la fin du XXe siècle les femmes et les filles sont victimes de discrimination et de violence, et un équilibre devrait être rétabli en leur faveur à travers les prestations sociales.

La prestation des services représente elle-même aujourd'hui, un défi, de par la sophistication et la complexité des tâches et des demandes auxquelles il faut répondre. Est-ce à dire que ceux qui ne maîtrisent pas les dernières techniques et technologies sont condamnés à rester à la traîne ? Il faudrait, pour répondre à cette question, améliorer les flux de l'information et son accessibilité. Les conflits civils et militaires sont un problème grave qui entrave la dispensation des services, par l'impossibilité de fournir les services sociaux dans les zones de conflit où les travailleurs ne peuvent avoir accès qu'au risque de leur vie. Enfin il faudrait veiller à fournir les services dans un processus intégré, qui identifie les besoins, et les règles de façon générale. Dans le passé, on ne s'est pas préoccupé de voir l'aide que l'on accordait comme un tout. On donnait souvent un cachet d'aspirine à quelqu'un qui souffrait de la faim, et un morceau de pain à celui qui avait mal à la tête. C'est ce manque de logique et d'identification des vrais besoins qu'il faudrait corriger.

M. SIDDIQUE RAHMAN OSMANI, Professeur d'économie du développement à la "University of Ulster" (Royaume-Uni), a déclaré qu'il est tout à fait raisonnable de fixer l'objectif de l'universalité d'accès aux services sociaux minimums, sans que pour autant cela veuille nécessairement dire qu'il incombe à l'Etat d'assurer la fourniture des services à tous. Il est parfois nécessaire de cibler certains groupes de la population, en particulier les pauvres, afin de réaliser l'objectif de l'accès universel. Comme en témoignent de nombreux pays pauvres, comme le Sri Lanka, la Jamaïque,

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le Costa Rica, et l'Etat indien du Kerala, la fourniture universelle des services de base n'est pas hors de portée des capacités financières des pays les plus pauvres. Ces services demandent en effet une forte main d'oeuvre qui est bon marché dans ces pays. En réalité, plus le pays est pauvre, plus la main d'oeuvre est bon marché, et moins il est cher de fournir ces services. La Banque mondiale et le Fonds monétaire international reconnaissent aujourd'hui que la fourniture accrue de services sociaux fait partie intégrante de la réforme économique. Ces services offrent, en effet, un filet de sécurité contre les troubles qui pourraient surgir à court terme et contribuent, en outre, à renforcer le capital humain qui formera la base d'une croissance durable à long terme. Le climat idéologique est donc bien plus favorable aujourd'hui qu'il ne l'était il y a une vingtaine d'années pour atteindre l'objectif des services sociaux de base universels.

Il est toutefois essentiel que les subventions visent concrètement les pauvres, a poursuivi M. Osmani. Or, dans la plupart des pays pauvres, c'est souvent le contraire qui se passe, la part du lion des subventions dans les domaines de la santé et de l'éducation allant à des activités coûteuses, comme les pratiques d'une médecine sophistiquée et d'un enseignement supérieur, dont les riches sont les premiers bénéficiaires. Ces inégalités doivent être renversées et les dépenses publiques redistribuées afin qu'un accès plus facile puisse être assuré avec le même niveau de ressources. Les riches doivent payer pour les services onéreux. La solution idéale serait de mettre en place des mécanismes d'autosélection qui permettraient aux groupes ciblés de se sélectionner eux-mêmes pour réclamer les bénéfices, tandis que les riches s'exclueraient d'eux-mêmes dans leur propre intérêt. On trouve des exemples réussis de tels mécanismes dans le domaine du crédit (par exemple, le modèle de la Grameen Bank) et dans les programmes "nourriture contre travail" mis en place dans de nombreux pays en développement. De l'avis de M. Osmani, on pourrait étendre ces mécanismes à la santé et à l'éducation et mettre en place, en complément, des mécanismes institutionnels visant à faire participer la population à la formulation et la mise en oeuvre des cadres de fourniture des services.

Pour M. Osmani, il peut s'avérer nécessaire, lorsque les ressources sont particulièrement limitées, de prélever des redevances auprès des pauvres. Les pauvres sont souvent plus en mesure et plus désireux de payer que l'on ne le suppose, a-t-il affirmé. Il faut toutefois concevoir des mécanismes qui permettent aux pauvres de payer avec un minimum de difficultés. Une solution qui a connu un certain succès en Thaïlande, consiste à introduire des bons que les pauvres peuvent acheter au moment où ils en ont les moyens, par exemple après les récoltes, et peuvent ensuite utiliser pour payer des services. Une autre solution est de demander aux pauvres d'économiser de petites sommes régulièrement afin de pouvoir recevoir des services, comme le crédit, la formation. L'absence de ressources n'est toutefois pas toujours la principale raison de l'absence de services. Ainsi, les autorités sanitaires sont souvent

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très peu incitées à assurer que des médecins et des médicaments soient disponibles dans des régions reculées. A cet égard, une solution réside dans l'implication active de la population locale pour assurer que les services qui leur sont destinés leur soient réellement fournis.

M. Osmani a ensuite expliqué que les pays en développement à revenu moyen font actuellement face à de nouveaux problèmes de santé. L'expérience du monde occidental montre que la transition démographique s'accompagne généralement d'une transition sanitaire. De nouvelles maladies, plus onéreuses à soigner, font leur apparition. Or, dans certains pays en développement, la transition démographique et la transition sanitaire se superposent. Les anciennes maladies n'ont pas encore disparu que de nouvelles apparaissent qui ne se limitent pas seulement aux riches. Face à cette situation, des choix difficiles doivent être faits pour que les rares ressources publiques disponibles soient utilisées principalement au bénéfice des pauvres et non pour le traitement des riches.

Mme SYLVIA SABORIO, Consultante indépendante à Washington et auteur de nombreuses publications dans les domaines du commerce, du développement et de la finance, a déclaré que pour atteindre les objectifs du Programme d'action de Copenhague, il faut consentir des investissements énormes. Même les pays de l'OCDE à ce jour, n'ont pas encore en matière sociale réussi à dégager les ressources financières requises par le Sommet. Ces dépenses sont cependant liées à des investissements nobles, et pourraient être satisfaites par des opérations d'emprunt. En ce qui concerne les pays en développement, les objectifs humains et nobles permettent l'obtention des crédits nécessaires. Mais on peut aussi atteindre des objectifs de santé satisfaisants si on adopte une organisation rationnelle et rigoureuse et il n'est pas douteux qu'une évaluation systématique des expériences positives menées dans certains pays serait utile à la communauté internationale. Dans les régions les moins développées, le rythme rapide de l'innovation en matière de télécommunication et d'information, peut permettre de faire des sauts qualitatifs substantiels. L'information facilement disponible permettrait, par exemple, d'améliorer la qualité des enseignements sans devoir au préalable recycler les corps enseignants locaux, opération qui prendrait le temps de toute une génération.

Sur le plan financier on peut éliminer certaines dépenses pour les reporter dans le domaine social, comme l'a fait le Costa Rica en éliminant ses budgets militaires pour les transférer vers le social. Quant à l'éducation on pourrait réduire les sommes consacrées au domaine universitaire pour développer plutôt l'enseignement de base pour tous, et de même, en matière de santé, pourquoi dans des pays pauvres, dépenser des fortunes en faveur de certains citoyens privilégiés que l'on envoie se soigner, sur les budgets nationaux, dans les pays occidentaux, alors que la grande masse des populations de ces pays ne bénéficient même pas de prestations sanitaires minimums. Plus de place devrait aussi sans doute être accordée au secteur

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privé. Quant aux sources et procédures de financement, la structure des fonds publics montre de grandes différences dans l'effort fiscal des différents groupes de pays. Dans les pays de l'OCDE, une plus grande part du revenu des travailleurs est consacrée aux règlements fiscaux par rapport aux pays du sud. Comment peut-on dès lors dans ces derniers, assurer une meilleure couverture sociale publique si, en même temps, les impôts sont en diminution. On ne peut donc demander à ces gouvernements d'assurer un rôle public hors de leur portée.

Que veut-on en fait redéfinir ? Est-ce la demande ou est-ce l'offre en services sociaux ? Faut-il davantage s'occuper des ressources que des résultats ? Des efforts internationaux seraient les bienvenus pour répondre à ces questions, une étude pays par pays s'avérant trop coûteuse. Concernant les prestations, les usagers devraient, eux-mêmes, mettre au point un système d'information facilitant les évaluations, et il faudrait reconnaître les différences de perception de la satisfaction vis-à-vis des services dans les pays développés et dans les pays en développement. Les marchés financiers semblant être la seule source d'emprunt de ressources en vue de développer des services, mais les pays pauvres ne pouvant y avoir facilement accès, les institutions financières internationales multilatérales devraient leur accorder les financements dont ils ont besoin.

Dialogue avec les délégations

Répondant aux observations et questions soulevées par les délégations, Mme FUNMI TOGONU-BICKERSTETH a souligné l'importance de pouvoir disposer d'indicateurs. Pour réaliser l'objectif de services sociaux pour tous, il faut disposer d'une base de données qui permette de recenser les besoins. Or, dans de nombreux pays, même les données relatives aux naissances et aux décès sont incomplètes. Elle a estimé que faire le choix de ne pas fournir des services de base pour tous était intolérable.

Mme SYLVIA SABORIO a estimé, pour sa part, que les ressources publiques devraient être réorientées vers l'éducation primaire car ses bénéfices sociaux sont très élevés. Il est beaucoup plus sensé de recourir aux fonds publics pour financer l'enseignement primaire que pour subventionner l'enseignement supérieur, pour lequel on peut éventuellement recourir à des prêts, a-t-elle dit.

Mme NAWAL AMMAR a elle aussi souligné l'importance de disposer de données fiables. Répondant à une question sur le bénévolat, elle a estimé que les dons octroyés par des personnes comme Bill Gates visaient à améliorer une image publique et ne relevaient pas du bénévolat. Partant, elle s'est demandée comment créer un système qui permette d'éliminer ce genre de problème.

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M. SIDDIQUE RAHMAN OSMANI a expliqué qu'en imposant quelques frais aux utilisateurs, on peut fournir des services plus importants. Si cela implique d'exclure les pauvres, ce n'est évidemment pas recommandable. Toutefois, dans de nombreux cas, si l'on ne fait pas payer les utilisateurs, les services ne peuvent simplement pas être fournis, a-t-il déclaré. Les pays pauvres doivent rattraper les pays riches en matière d'éducation, a-t-il poursuivi. A la question de savoir si les gouvernements doivent subventionner l'enseignement supérieur, il a répondu qu'à son avis, ces subventions devraient pour le moins être diminuées. Il a expliqué que beaucoup d'universités privées avaient vu le jour au Bangladesh au cours des dernières années. De nombreuses familles riches envoient leurs enfants dans ces institutions et paient parfois jusqu'à 500 fois le prix des universités subventionnées. Pourquoi alors continuer à subventionner de manière universelle l'enseignement universitaire, s'est-il demandé.

Répondant à une deuxième série de questions, M. RAHMAN OSMANI a déclaré qu'il n'y aura jamais d'unanimité totale sur la définition de la notion de services sociaux. Ce qui est concevable en Europe, ne l'est pas forcément en Afrique. Nous sommes cependant d'accord que les gouvernements ont des responsabilités en matière sociale, et que les gouvernements doivent effectivement assumer le rôle qui leur est dévolu. Et s'ils ne peuvent pas le faire, alors il faut définir qu'elles sont les priorités les plus immédiates à satisfaire. Mais jusqu'où peut aller l'aide internationale et jusqu'où peut-on compter sur elle ? C'est à chaque gouvernement de déterminer au départ jusqu'où ses propres moyens lui permettent d'aller. Quand on parle de promotion des services sociaux, il faut tenir compte de la notion de croissance économique et de la part de croissance à consacrer au secteur social dans chaque pays. Plus il y a de ressources disponibles, davantage de services peuvent être fournis à la population; mais la croissance elle-même n'est pas synonyme de développement des services sociaux. Il faut pour cela une volonté politique délibérée et soutenue, car on a vu des pays qui avaient connu des taux de croissance élevés pendant certaines périodes, mais où les services mis à la disposition des populations n'avaient pas vraiment connu d'amélioration quantitative et qualitative. C'était une question de justice sociale et de répartition des fruits de la croissance non résolue. Parlant plus spécifiquement des problèmes de santé, il y a des maux difficiles à combattre comme le sida, mais il en est aussi qui pourraient être aisément prévenus comme le tabagisme, dont les conséquences coûtent un prix énorme aux pays en développement. Des pays comme la Thaïlande et l'Ouganda, ont pu mener des campagnes contre le sida ou le tabac qui ont été efficaces, tout en pesant sur des budgets qui auraient pu servir dans l'immédiat à des prestations sociales. Mais c'est un choix.

Mme SYLVIA SABORIO a fait ensuite remarquer que le financement des services sociaux peut venir de l'étranger, notamment dans les pays qui ne peuvent pas eux-mêmes générer les ressources nécessaires à ces investissements. Ces pays pourraient, soit obtenir des dons, soit faire

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des emprunts pour des investissements sociaux judicieux. La Banque interaméricaine de développement, par exemple, doit consacrer 50% de ses investissements et prêts au secteur social. Il faudrait sans doute généraliser ce système à toutes les institutions financières internationales ou régionales.

Répondant à une dernière série de questions des délégations, Mme FUNMI TOGONU-BICKERSTETH a estimé que les plans d'action de suivi du Sommet mondial pour le développement social devraient être mis en oeuvre conformément à la réalité de chaque pays. Elle a invité les délégations à s'interroger sur ce qui se passera si les Etats choisissaient d'ignorer les besoins de leurs populations. Outre les besoins prioritaires, il est important d'identifier les bénéficiaires des services et de les faire participer aux efforts déployés afin de fournir des services acceptables et viables à long terme qui répondent effectivement aux besoins.

Mme NAWAL AMMAR a estimé, pour sa part, que si les objectifs économiques et sociaux semblaient souvent s'opposer, cela était dû souvent au contexte politique. Il ne faut pas seulement penser aux besoins, mais aussi à l'information et à la création d'indicateurs sociaux, a-t-elle suggéré.

Concluant à son tour le débat, M. SIDDIQUE RAHMAN OSMANI a mis l'accent sur la nécessité de faire face au problème de la pauvreté dans son ensemble. On croit qu'il y a des millions de pauvres dans le monde pour qui les services sociaux sont inaccessibles. Pour peu que l'on réussisse à sortir les pauvres de la pauvreté, leur accès aux services sociaux sera facilité. Il y aura une demande. Cela ne veut pas dire que la question des services sociaux peut être incorporée totalement à la lutte contre la pauvreté. Mais, tant qu'il y aura de la pauvreté, on ne peut pas simplement attendre que les autres problèmes soient résolus. Tant que la pauvreté existe, les gouvernements ont des responsabilités en matière de fourniture de services sociaux, a-t-il dit.

Mme SYLVIA SABORIO a déclaré, de son côté, que les prestations sociales pour tous représentent avant tout une responsabilité nationale. Chaque pays doit accepter d'affecter une part de ses ressources à ce domaine. Il faut réaliser que la question concerne la société dans son ensemble, a-t-elle souligné.

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