FEM/1032

LE GOUVERNEMENT ALGERIEN PRESENTE SON RAPPORT INITIAL DEVANT LE COMITE POUR L'ELIMINATION DE LA DISCRIMINATION A L'EGARD DES FEMMES

21 janvier 1999


Communiqué de Presse
FEM/1032


LE GOUVERNEMENT ALGERIEN PRESENTE SON RAPPORT INITIAL DEVANT LE COMITE POUR L'ELIMINATION DE LA DISCRIMINATION A L'EGARD DES FEMMES

19990121 Il s'engage à mener jusqu'au bout le processus d'émancipation de la femme algérienne retardé notamment par l'intégrisme et le terrorisme

Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes s'est réuni, ce matin, et a entamé l'examen du rapport initial de l'Algérie, présenté par le Représentant permanent auprès des Nations Unies, M. Abdallah Baali. Celui-ci a souligné que le fait que l'Algérie présente son premier rapport deux ans à peine après son adhésion à la Convention constitue un signal clair à l'adresse des femmes que le pays, malgré des circonstances difficiles, est résolu à s'ancrer dans la modernité.

M. Baali a reconnu que, malgré une évolution rapide, l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes a été ralentie par un certain nombre d'obstacles, parmi lesquels l'apparition de l'intégrisme et de la violence terroriste qui l'accompagne. Pour répondre tout particulièrement aux besoins des femmes et des enfants victimes de la violence terroriste qui s'est traduite notamment par de nombreux cas de viols et d'enlèvements, le Gouvernement algérien a mis en place des centres d'aide et a pris, en 1998, des dispositions rendant possible l'avortement en cas de grossesse résultant d'un viol. Le représentant a affirmé toutefois que ce phénomène était aujourd'hui en régression et circonscrit à certains îlots.

Le représentant a tracé une distinction d'une part entre la situation des femmes dans la vie publique, et leur statut personnel d'autre part régi par le Code de la Famille. Au plan public rien dans la législation algérienne ne porte atteinte à sa dignité ni ne réduit ses droits vis-avis des hommes, a- t-il expliqué. Sur le plan familial et conjugal en revanche, la condition de la femme n'est pas idéale. Cette situation a mené à l'adoption du projet de loi en mai 1998 portant sur la révision d'un certain nombre de dispositions du Code de la Famille. La question de cette révision n'est plus tabou et atteste de l'évolution sociale et normative de la société algérienne. Ceci devrait pouvoir mener également à la levée de la plupart des réserves que l'Algérie a posées à différents articles de la Convention.

(à suivre - 1a)

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Formulant des remarques générales, les expertes ont estimé que la présentation et les explications franches données par la délégation de l'Algérie témoignaient d'une volonté politique réelle du pays de faire progresser la situation des femmes, même en ces circonstances difficiles. Elles ont tout particulièrement salué le courage et l'engagement héroïque dont les femmes algériennes font preuve. Pour plusieurs expertes, les femmes algériennes se révèlent l'allié le plus solide du Gouvernement dans son combat pour la démocratie et c'est pourquoi la question de leur pleine émancipation, passant notamment par une réforme en profondeur du Code de la famille, doit se voir accorder la priorité.

Lors de la prochaine réunion du Comité, cet après-midi à partir de 15 heures, les expertes auront la possibilité de poser des questions article par article à la délégation algérienne.

( suivre)

RAPPORT INITIAL DE L'ALGÉRIE (CEDAW/C/DZA/1 et Add.1)

En Algérie, la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes a été ratifiée le 22 janvier 1996 et est entrée en vigueur dans le pays le 19 juin 1996. Depuis cette date, les dispositions de cet instrument font partie de la législation nationale.

Le rapport retrace les différentes actions entreprises par les pouvoirs publics pour la consolidation des droits de la femme en Algérie et vise à donner un aperçu des mesures pratiques mises en oeuvre depuis l'entrée en vigueur de la Convention. Le rapport souligne qu'à ce jour l'essentiel des dispositifs d'alerte et de surveillance en matière des droits de l'homme a été mis en place. Outre les mécanismes politiques, judiciaires, associatifs et syndicaux, un Observatoire national des droits de l'homme et un Médiateur de la République ont mis en place.

Bien qu'il ne soit que consultatif, le mandat de l'Observatoire est très large puisqu'il lui échoit notamment d'établir un bilan annuel sur l'état des droits de l'homme et de le présenter au Président de la République. Dans la pratique, l'Observatoire exerce de plus en plus des activités de médiateur entre les pouvoirs publics et les particuliers pour éviter que tout conflit ne se transforme systématiquement en action judiciaire. Instance de recours créé en 1996, le Médiateur de la République peut être saisi par "toute personne physique qui, ayant épuisé tous les recours, s'estime lésée par un dysfonctionnement d'un service public". Lorsqu'il n'obtient pas satisfaction, le Médiateur peut saisir le Président de la République.

En ce qui concerne plus particulièrement la condition de la femme, le rapport souligne que comme dans toutes les sociétés appartenant à la sphère arabo-musulmane, la condition juridique de la femme se présente de manière dichotomique. Le principe constitutionnel de l'égalité des sexes est scrupuleusement respecté en matière de droits civils et politiques. Il confère à la femme un statut de citoyenne à part entière. En droit civil comme en droit pénal, la femme a une capacité juridique entière. En matière de statut personnel, en revanche, le Code de la famille - en partie inspiré de la Charia - comporte toujours des dispositions contestées par les mouvements associatifs comme celle qui reconnaît la polygamie ou celle qui institue l'autorité du tuteur matrimonial dans le consentement du mariage.

Pour les pouvoirs publics, le dépassement des pratiques patriarcales est un objectif réel mais qui demande prudence et persévérance. La ratification de la Convention entre d'ailleurs dans le contexte de cette volonté d'assurer une émancipation graduelle. La position du gouvernement a été d'adhérer à la Convention avec quelques réserves, cette adhésion ayant conduit le Gouvernement à envisager d'apporter des amendements au Code de la famille.

( suivre)

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La deuxième partie du rapport étant consacré aux éléments sur les dispositions de fond, elle donne le détail des mesures prises depuis l'entrée en vigueur de la Convention. Ainsi, il a été procédé à la mise en place d'un Conseil national de la femme - organe consultatif placé auprès du chef du Gouvernement - composé de représentants de l'ensemble des départements ministériels, de cinq représentants des institutions et organes consultatifs de l'Etat, de cinq représentants du mouvement syndical et patronal, de 20 représentants du mouvement associatif et de quatre personnalités choisies intuitu personae. Il a également été procédé à la mise en place du Conseil de la préservation et de la promotion de la famille qui est, lui, composé de représentants d'une douzaine de départements ministériels et de représentants des associations nationales à caractère social. Le Conseil est chargé d'élaborer et de transmettre un rapport annuel d'activités au Ministère de la solidarité et de la famille.

Pour ce qui est des mesures de lutte contre la discrimination, le rapport indique que la législation algérienne contient des dispositions spécifiques favorables à la femme en matière de travail qui peuvent être assimilés à une forme de discrimination positive. Les chiffres de la participation à la vie politique et publique montrent notamment depuis 1982, douze femmes ont occupé des postes gouvernementaux en qualité de ministre, vice-ministre ou secrétaire d'Etat. Ils montrent aussi que 46,59% des femmes ont participé aux dernières élections législatives de juin et octobre 1997. Onze femmes siègent au Parlement soit 3,2% des députés élus. Les raisons de cette tendance de plus en plus favorable à une plus grande participation de la femme à la vie politique résident notamment dans le fait que la nouvelle loi portant régime électoral limite le vote par procuration à des situations exceptionnelles. Il s'agit aussi de la volonté et du courage de la femme algérienne qui, malgré la menace terroriste, a décidé de s'engager dans le combat politique.

Pour ce qui est de l'égalité aux services de santé et plus particulièrement de l'accès à la planification familiale, le rapport indique que des progrès tangibles ont été enregistrés depuis l'introduction de cette activité dans les soins de santé de base, à la fin des années 60. En mars 1997, le programme adopté au Conseil du gouvernement fixe notamment comme objectif, d'ici à la fin de la décennie, un taux de pratique de la contraception moderne à 60%. Pour faciliter l'accès la planification familiale, la gratuité des actes et produits contraceptifs est assurée dans les structures publiques de santé et quand ils sont dispensés dans le secteur privé, il sont remboursés à 100% par la sécurité sociale.

Le système de sécurité sociale accorde à la femme, outre l'assurance maladie et la protection contre les accidents du travail, des mesures spécifiques en matière de maternité et retraite. La femme travailleuse bénéficie d'un congé de maternité de 14 semaines, payé à 100% du salaire de poste, au titre des prestations en espèces. Elle bénéficie également des prestations en nature qui consistent en un paiement intégral des frais

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médicaux et pharmaceutiques et en frais d'hospitalisation liés à l'accouchement. Les femmes non travailleuses, épouses d'assurés sociaux, bénéficient également des prestations en nature au titre de l'assurance maternité. Par ailleurs, le départ volontaire à la retraite est autorisé à partir de 55 ans avec possibilité de réduction d'un an par enfant; la limite étant fixé à trois enfants.

L'additif du rapport est consacré à l'évaluation de la mise en oeuvre de la Plate-forme d'action de Beijing. Il note que si le bilan peut être considéré comme positif, en raison de l'avancée de la femme dans divers domaines, la consolidation des acquis dépend néanmoins de futures améliorations notamment en ce qui concerne la situation des mères célibataires, la violence domestique, les abandons d'ascendants ou descendants ou encore les mauvais traitements infligés aux enfants.

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Présentation de l'Etat partie

M. ABDALLAH BAALI, Représentant permanent de l'Algérie auprès des Nations Unies, a déclaré que le fait que l'Algérie présente son premier rapport au Comité deux ans à peine après son adhésion est un témoignage fort de son engagement sincère en faveur des droits de l'homme en général et un signal clair à l'adresse des femmes que malgré les circonstances difficiles qu'il traverse, le pays est résolu à s'ancrer dans la modernité et le progrès et à réhabiliter la femme algérienne dans la plénitude de ses droits. Grâce à un effort d'éducation qui a permis, après l'indépendance à des millions d'Algériens d'accéder aux bancs de l'école et de l'université, la femme a pu s'associer dans le combat qui a permis au pays de basculer en 1989 dans la démocratie pluraliste et dans la modernité. Cette année-là, l'Algérie se dotait en effet d'une Constitution consacrant notamment la liberté et la pluralité des opinions, le multipartisme politique et le respect des droits et libertés du citoyen.

Avec l'apparition du phénomène intégriste et son recours à la violence terroriste, la femme algérienne a vite réalisé que c'était elle qui avait le plus à perdre et s'est engagée dans un nouveau combat pour la prévalence des valeurs démocratiques, le retour de la paix et de la stabilité et la poursuite du processus de démocratisation et de mise en place d'institutions pluralistes élues, a expliqué M. Baali, ajoutant qu'aujourd'hui grâce à la mobilisation de millions d'Algériens, le terrorisme ne constitue plus une menace et se voit peu à peu circonscrit à de rares îlots.

Le représentant a qualifié l'accès des femmes à l'éducation de facteur le plus décisif dans le processus d'émancipation des femmes. L'adoption d'une nouvelle Constitution en 1989, révisée en novembre 1996, a marqué une étape importante en faveur des femmes. Elle dispose notamment que toute Convention ratifiée et publiée acquiert une autorité supérieure à celle de la loi, disposition confirmée par le Conseil Constitutionnel. Le principe de l'égalité entre les sexes est donc garanti par la Constitution et l'ensemble des codes en matière civile, pénale, administrative ou commerciale ont été mis en conformité avec la loi fondamentale. Toute nouvelle loi qui n'interdirait pas toute discrimination à l'égard des femmes peut être annulée par le Conseil Constitutionnel, a précisé M. Baali, avant de reconnaître que certaines pesanteurs sociales subsistent qui ne favorisent pas toujours l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes. C'est pourquoi des mesures particulières ont été prises pour renforcer les mécanismes nationaux, avec notamment la création en juin 1996 d'un Comité permanent placé sous l'égide du Ministère de la Solidarité nationale et de la Famille et d'un Conseil National de la Préservation et de la Promotion de la Famille ainsi que d'un Conseil national de la Femme, dont les principales missions sont de veiller à la mise en oeuvre d'une politique cohérente des activités en faveur de la femme et de participer à la définition d'une stratégie globale et cohérente.

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Des mesures temporaires spéciales pour lutter contre la discrimination ont également été prises, a poursuivi le représentant. Ainsi la législation algérienne contient des dispositions spécifiques favorables à la femme en matière de travail pour la préserver de dangers et de nuisance liés à certaines activités. Elle contient aussi des mesures de protection en liaison notamment avec la maternité et le rôle de la femme au sein de la cellule familiale, en interdisant par exemple le travail de nuit, le licenciement en période pré ou post-natale et en accordant le bénéfice de l'intégralité du salaire pendant le congé de maternité. Parallèlement à ces mesures positives, l'accès à l'éducation a entraîné un net recul des préjugés et des mentalités rétrogrades, même si dans les campagnes, l'autorité parentale sur la fille demeure encore pesante. En matière d'éducation, la rentrée scolaire 1997/1998 a vu un afflux de 7,5 millions d'élèves dont 50% étaient des jeunes filles. La quasi totalité des établissements est mixte, l'enseignement gratuit, l'accès à toutes les filières libre et la pratique de l'éducation sportive obligatoire.

Malgré ces efforts, la femme continue à subir la violence domestique, même si elle est en diminution constante. La Constitution et le Code pénal se montrent d'une grande sévérité à l'égard des auteurs de brutalités, qui encourent la réclusion à perpétuité si les violences ont entraîné la mort non intentionnelle, a souligné M. Baali. Le problème est que la justice ne peut connaître que les cas de violence dont elle est saisie et qu'un grand nombre de femmes acceptent en silence leur sort et les mauvais traitements. De nombreuses associations de femmes battues ont été créées partout dans le pays depuis 1989.

Par ailleurs, certains des amendements apportés au Code de la famille, soumis à la législature pour adoption, ont des répercussions directes sur l'atténuation d'une certaine forme de violence morale grâce aux restrictions apportées à la pratique de la polygamie, qui requiert désormais l'autorisation du juge et l'accord préalable des deux épouses, et à l'annulation du divorce abusif par la seule volonté de l'époux. Malheureusement de nombreux cas de viols et d'enlèvements de femmes ont été enregistrés ces dernières années et face à la terreur islamiste, l'Etat est déterminé à poursuivre la lutte contre le terrorisme jusqu'à son éradication totale, a affirmé M. Baali. Pour répondre à cette situation, et aux sévices subis par les femmes et les enfants, des centres d'aide aux victimes du terrorisme ont été mis en place et en 1998, les pouvoirs publics ont pris des dispositions tendant à atténuer la souffrance physique et morale des victimes en rendant possible l'avortement au même titre que celui pratiqué pour des raisons thérapeutiques. Enfin, depuis septembre 1998, de nouveaux programmes consacrés à la culture de la paix, au rejet de la violence et à la tolérance ont été introduits dans les écoles dès la première année de primaire.

Evoquant l'article 9 de la Convention, M. Baali a affirmé que le Code de la nationalité n'opère aucune distinction entre l'homme et la femme en ce qui concerne les conditions générales d'acquisition et de perte de la nationalité.

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S'agissant de la femme, ni le mariage avec un étranger, ni le changement de nationalité du mari ne change la nationalité, ne la rend apatride ou ne l'oblige à prendre la nationalité de son mari.

Dans le domaine des services de santé, la Charte de la santé adoptée en mai 1998 a inscrit parmi les priorités retenues à l'horizon 2005, la santé de la mère et de l'enfant et le développement des services de santé de base. Le recours à la planification familiale a été renforcé notamment dans les années 1990. Le taux de fécondité chez les moins de 20 ans est passé de 69 à 26 pour mille entre 1980 et 1992 et de 288 à 151 pour mille au cours de la même période chez les 20-24 ans. Pour ce qui est de l'avortement, M. Baali a mentionné la décision prise en avril 1998 par les autorités algériennes d'offrir la possibilité aux femmes victimes de sévices sexuels du fait des actes terroristes d'avorter alors que seul l'avortement thérapeutique était jusque là reconnu et autorisé. La fin de la décennie 90 doit constituer une période charnière pour la réalisation de l'objectif escompté de généralisation d'ici 2015 de l'accès à la contraception moderne et aux soins de santé reproductifs tels qu'adoptés dans les Programmes d'action du Caire et de Beijing.

Pour ce qui est de l'égalité de droits dans la famille, M. Baali a expliqué que le Code de la famille permet à la femme, après le décès de son mari, d'exercer la tutelle sur ses enfants, ce qui constitue un acquis important au regard des pesanteurs sociales et d'un certain conservatisme imposé par la tradition qui veut que la tutelle soit la prérogative de la lignée masculine. Le processus de révision du Code de la Famille est aujourd'hui engagé et cette révision n'est plus considérée comme un tabou.

Abordant la question des réserves à la Convention, le représentant a expliqué que celles-ci ne portent pas sur l'essence même de la Convention. Il a ajouté que la position du gouvernement a été d'adhérer à cet instrument avec quelques réserves, avec le sous-entendu qu'il faudrait utiliser cette adhésion comme argument en faveur d'une évolution sociale et normative, la maturation de cette évolution devant elle-même entraîner à terme, la levée desdites réserves. L'Algérie applique dans sa quasi-totalité l'article 2 de la Convention et n'a de difficulté qu'avec l'alinéa f. La réserve au paragraphe 2 de l'article 9 s'explique par le fait que le Code algérien de la nationalité ne permet à l'enfant d'avoir la nationalité de la mère que dans certaines conditions. En ce qui concerne le paragraphe 4 de l'article 15 relatif au droit de la femme de choisir sa résidence et son domicile, M. Baali a souligné que l'article 44 de la Constitution dispose que tout citoyen jouissant de ses droits civils et politiques a le droit de choisir librement le lieu de sa résidence et de circuler sur le territoire national et qu'il était donc en parfaite harmonie avec l'article 15 paragraphe 4. L'article 37 du Code algérien de la Famille n'énonce ni clairement ni expressément une limitation du droit de la femme de choisir sa résidence et son domicile. Une réflexion sur cette réserve a donc, à l'évidence besoin d'être engagée pour clarifier davantage la position de l'Algérie sur ce paragraphe. Certaines

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disposition de l'article 16 ne sont pas conformes aux dispositions pertinentes du Code algérien de la famille et nous ne pouvons pas pour le moment envisager d'évolution radicale, a dit le représentant.

La violence terroriste a longtemps constitué un vrai problème pour la société algérienne dans son ensemble et pour la femme en particulier, a poursuivi le représentant. Avec l'éradication de ce phénomène circonscrit à certaines poches et la prise en charge effective des victimes de terrorisme, notamment les femmes, par les services de l'Etat, disparaît progressivement un problème dont la femme algérienne a cruellement souffert.

Questions des expertes

Mme EMNA AOUIJ, experte de la Tunisie, a indiqué que le rapport tient compte dans la pratique et le fond des directives du Comité. Elle a remercié le représentant des explications franches et concrètes qu'il a données au sujet des réserves à la Convention que le pays a émis et a salué le courage des femmes algériennes. Malheureusement, les textes de loi ne reflètent nullement la situation réelle de la femme. Ils sont en retard et continuent de la considérer comme mineure. Il faut une profonde réforme du Code de la famille. Les amendements présentés à l'Assemblée doivent être considérés comme une priorité nationale et ils ne doivent plus être différés, a-t-elle insisté, arguant qu'il appartient au pouvoir de donner l'impulsion nécessaire pour modifier le statut de la femme, qui est la seule vraie force alliée au projet démocratique du Gouvernement. Le Gouvernement ne doit pas répéter les mêmes erreurs historiques de 1984, lors de la promulgation du Code de la famille. La communauté internationale attend de l'Algérie les changements nécessaires qui accorderont à la femme algérienne ses droits élémentaires nécessaires. Les expertes du Comité sont solidaires du combat mené par la femme algérienne. L'experte a ensuite demandé des précisions sur la publication de la Convention au Journal officiel. La Convention est-elle opposable aux tiers? Est-elle supérieure à la loi nationale? Cette dernière a-t-elle déjà été invoquée par des femmes devant la justice du pays?

L'experte de l'Italie, Mme IVANKA CORTI, a estimé que le rapport et la présentation de ce matin expliquaient bien les causes des retards dans l'émancipation de la femme algérienne. Par l'institution de divers mécanismes nationaux, le Gouvernement a déjà fait d'importants progrès en faveur des femmes. Il est particulièrement satisfaisant de constater que les conventions internationales ont la primauté sur la loi nationale. Or si ces textes ont effectivement la primauté, il est encore plus difficile de comprendre pourquoi le pays a émis des réserves à la Convention. Notant que le Code de la famille semblait en contradiction avec la Constitution nationale, elle a demandé quel rôle jouait le Conseil Constitutionnel à cet égard. Le problème de l'émancipation de la femme est en réalité en premier lieu un problème de démocratie auquel les pouvoirs publics doivent accorder la priorité si l'on veut que la stabilité et la démocratie triomphent.

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Prenant ensuite la parole, Mme CHARLOTTE ABAKA du Ghana, a déclaré que la présentation du rapport par le Gouvernement algérien en cette période difficile témoigne de sa volonté politique. Elle a noté que les réserves émises à la Convention sont en contradiction avec la Constitution même du pays et qu'elles devaient par conséquent être levées. Il semble un peu contradictoire également d'affirmer que la législation ne contient aucune discrimination dans la mesure où la polygamie est admise légalement. En outre, le fait que les femmes doivent demander la permission à leur tuteur pour se marier est aussi contraire à la lettre et l'esprit de la Convention. L'experte a souligné en conclusion le rôle héroïque des femmes algériennes.

Mme SCHOPP SHILLING, experte de l'Allemagne, a rendu hommage aux efforts réels du Gouvernement algérien pour promoivoir l'égalité entre les sexes dans le contexte difficile que connaît le pays. Elle a souhaité obtenir des données chiffrées plus précises et a demandé si les informations fournies s'appliquent également aux femmes non arabes d'origine berbère. Avez-vous l'intention d'organiser des cours sur la Convention pour les juristes? Elle a encouragé l'Algérie à revoir ses réserves notamment celles sur l'article 16. L'experte a demandé pour quelles raisons certains des amendements proposés par des organisations de femmes au Code de la Famille n'avaient pas été acceptés par le Gouvernement algérien.

Mme FERIDE ACAR, experte de la Turquie, a souligné que la reconnaissance des droits humains des femmes dans la situation difficile que connaît l'Algérie traduit l'identité politique d'un Etat qui se veut démocratique. L'engagement de l'Algérie en faveur de la démocratie se mesurera à l'aune de son engagement en faveur des droits humains des femmes. L'Algérie se trouve dans une situation sans égale pour manifester sa position. Il ne s'agit pas seulement de garantir les droits humains des femmes mais de franchir un pas dans le sens de la libération de la religion musulmane qui sans cela resterait l'otage de groupes déviationnistes

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