En cours au Siège de l'ONU

SG/SM/6739

LA COURSE AUX ARMEMENTS EST UN DETOURNEMENT DE RESSOURCES ET DE COMPETENCES AU DETRIMENT DU DEVELOPPEMENT DECLARE LE SECRETAIRE GENERAL

12 octobre 1998


Communiqué de Presse
SG/SM/6739
GA/DIS/31


LA COURSE AUX ARMEMENTS EST UN DETOURNEMENT DE RESSOURCES ET DE COMPETENCES AU DETRIMENT DU DEVELOPPEMENT DECLARE LE SECRETAIRE GENERAL

19981012 Le texte suivant est la déclaration liminaire faite ce matin devant la Première Commission de l'Assemblée générale :

Permettez-moi de commencer par vous féliciter de votre élection à la présidence de cette importante Commission. Le fait que ce soit la Première Commission de l'Assemblée générale témoigne de la priorité que les Nations Unies ont voulu donner dès le début au désarmement. Il me semble qu'elles ont eu raison.

Comme vous le savez, j'ai décidé l'année dernière de rétablir le Département pour les affaires de désarmement et de mettre à sa tête un Secrétaire général adjoint. J'ai été très heureux que l'Assemblée générale appuie cette décision. J'ai été très heureux aussi qu'elle ait décidé de faire le point des travaux de la Commission du désarmement et de la Première Commission, comme je l'avais recommandé. Je sais que vous avez l'intention d'actualiser vos travaux, de les rationaliser et de leur donner un nouvel élan, et j'ai hâte de voir les résultats.

Je suis enchanté aussi d'avoir M. Jayantha Dhanapala pour Secrétaire général adjoint. Il est parfaitement qualifié pour le poste et a pris un excellent départ.

Peut-être vous demandez-vous pourquoi il n'est pas ici aujourd'hui. Dans un sens, Monsieur le Président, je le représente pendant qu'il me représente.

En effet, il s'est rendu, à ma demande, dans la capitale de votre pays pour assister à une conférence importante sur "un désarmement durable pour un développement durable". C'est une bonne chose que le lien entre ces deux thèmes essentiels qui figurent à l'ordre du jour de l'Assemblée générale — le désarmement et le développement — soit de plus en plus compris et reconnu.

Le désarmement, Monsieur le Président, est au coeur des efforts que déploie l'Organisation pour maintenir et renforcer la paix et la sécurité internationales.

- 2 - SG/SM/6739 GA/DIS/3108 12 octobre 1998

On dit parfois que ce ne sont pas les armes qui tuent, mais que ce sont les gens. Il est vrai que, ces dernières années, des actes de violence abominables ont été commis sans que soient utilisées d'armes perfectionnées.

Le génocide rwandais est l'exemple qui nous hante tous. Mais je pourrais en citer beaucoup d'autres. Ceux qui nous viennent immédiatement à l'esprit, à cause des images atroces que nous avons vues, sont les massacres qui ont récemment eu lieu au Kosovo.

Des armes légères sont utilisées pour tuer ou blesser des milliers et des milliers de civils chaque année. Et ce qui est encore plus choquant, c'est que l'écrasante majorité d'entre eux sont des femmes et des enfants.

Le désarmement doit donc porter aussi bien sur les armes légères que sur les armes lourdes. Je suis heureux de voir que la communauté internationale commence à s'en rendre compte.

Je salue en particulier à ce propos le moratoire que la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest a décidé d'imposer au commerce et à la fabrication des armes légères et l'entrée en vigueur récente de la Convention interaméricaine contre la fabrication et le trafic illicites des armes à feu, munitions, explosifs et autres matériels connexes. (Peut-être nous faudrait-il maintenant une convention limitant la longueur des titres des accords internationaux!)

Je tiens aussi à remercier Michael Douglas — un redoutable utilisateur d'armes légères à l'écran — de tout ce qu'il fait, en tant que messager de la paix, pour avertir l'opinion publique des dommages terribles que ces armes causent dans la réalité. Je suis convaincu qu'il est possible de mobiliser la société civile dans son ensemble sur cette question, comme on l'a déjà fait avec succès sur la question des mines antipersonnel.

Il y a lieu de se féliciter de ce qu'un aussi grand nombre d'États Membres aient signé et ratifié la Convention d'Ottawa — une interdiction globale des mines antipersonnel — qui entrera en vigueur au mois de mars prochain; et nous devons maintenant tout faire pour que cette interdiction devienne universelle.

Mais en même temps, nous ne pouvons nous permettre de relâcher nos efforts en vue de freiner la prolifération des armes lourdes, et en particulier des armes de destruction massive. Ce serait le comble de la folie de tenir pour acquis que ces armes sont trop terribles pour être jamais utilisées et que les États ne les conserveront que comme moyen de dissuasion.

Nous savons que des armes nucléaires ont été utilisées en 1945, et que les villes d'Hiroshima et de Nagasaki souffrent encore aujourd'hui, plus d'un demi-siècle plus tard, de leurs effets dévastateurs.

- 3 - SG/SM/6739 GA/DIS/3108 12 octobre 1998

Nous savons aussi que des armes chimiques ont été abondamment utilisées, notamment contre l'Iran et contre des civils dans le nord de l'Iraq en 1988. La population d'Halabja, en Iraq, souffre encore elle aussi, 10 ans plus tard, de leurs effets, qui se manifestent sous forme de maladies débilitantes, de malformations congénitales et de fausse-couches.

Quant à la menace des armes biologiques, elle est presque trop horrible pour qu'on se la représente. Pourtant, nous savons que des États ont mis au point de telles armes et qu'ils les gardent dans leurs arsenaux.

Tant que des États auront de telles armes à leur disposition, il subsistera toujours le risque que, tôt ou tard, ils décident de les utiliser. Et il existe un risque permanent qu'elles échappent au contrôle des États et tombent entre les mains de terroristes.

C'est pourquoi nous devons intensifier nos efforts pour qu'un plus grand nombre d'États deviennent parties aux Conventions sur les armes chimiques et biologiques, et pour que le respect de ces conventions soit mieux vérifié.

C'est pourquoi les essais nucléaires effectués cette année par l'Inde et le Pakistan ne doivent pas nous laisser indifférents.

Il va sans dire que j'accueille avec la plus grande satisfaction les déclarations des Premiers Ministres de ces deux pays, qui ont fait connaître à l'Assemblée générale leur intention d'adhérer au Traité d'interdiction complète des essais nucléaires.

Nous devons tous oeuvrer pour que ce traité entre en vigueur le plus tôt possible. Mais nous devons oeuvrer aussi pour qu'aboutissent les efforts déployés pour obtenir l'adhésion universelle à tous les traités fondamentaux relatifs aux armes de destruction massive, notamment le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires. Et nous devons nous rappeler que la durabilité de ce traité dépend du sérieux avec lequel toutes les parties en appliqueront les dispositions.

Cela fait plus d'un demi-siècle que les Nations Unies s'emploient à éliminer les armes nucléaires partout dans le monde et en condamnent l'acquisition où que ce soit. Considérant le potentiel de dévastation d'une seule arme nucléaire, je suis convaincu que le désarmement nucléaire global doit rester en tête de notre ordre du jour. Je compte sur la Première Commission pour prendre la direction des tâches à entreprendre afin de délivrer le monde de cette menace, ainsi que de la menace des armes chimiques et biologiques.

J'ai dit tout à l'heure que le désarmement et le développement étaient intimement liés. Je crois qu'ils le sont de deux manières.

- 4 - SG/SM/6739 GA/DIS/3108 12 octobre 1998

Premièrement, le désarmement est indispensable pour prévenir effectivement les conflits et pour consolider la paix après les conflits dans de nombreuses parties du monde en développement, et les conflits sont les pires ennemis du développement où qu'ils se produisent.

Deuxièmement, même lorsqu'une course aux armements ne mène pas directement à un conflit, elle n'en constitue pas moins un détournement de ressources et de compétences, qui sont enlevées au développement.

Alors que tant de besoins humains restent insatisfaits, des millions de personnes sur la planète dépendent pour leur subsistance de la production, ou de la diffusion, ou de l'entretien d'engins conçus uniquement pour détruire — des engins dont le mieux qu'on puisse espérer est qu'ils ne seront pas utilisés.

C'est un gaspillage terrible, Monsieur le Président. Et plus encore, c'est un motif de honte profonde. Tant que cela continuera, aucun de nous ne pourra être fier de l'humanité. Le monde compte sur les Nations Unies, et les Nations Unies comptent sur la Première Commission pour qu'elle les engage sur une voie différente et plus prometteuse.

Je souhaite que vos travaux soient couronnés de succès. Soyez assurés que vous aurez tout l'appui que nous, le Secrétariat, pouvons vous apporter.

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