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CS/976

LA POURSUITE DE L'ACTION HUMANITAIRE PASSE PAR SON IMPARTIALITE ET LA RESPONSABILITE DEVANT LA JUSTICE DES AUTEURS DE VIOLATIONS DU DROIT HUMANITAIRE

29 septembre 1998


Communiqué de Presse
CS/976


LA POURSUITE DE L'ACTION HUMANITAIRE PASSE PAR SON IMPARTIALITE ET LA RESPONSABILITE DEVANT LA JUSTICE DES AUTEURS DE VIOLATIONS DU DROIT HUMANITAIRE

19980929 Le Conseil de sécurité a tenu ce matin et cet après-midi un débat relatif au rapport du Secrétaire général sur la protection des activités d'assistance humanitaire aux réfugiés et autres personnes touchées par un conflit, qui a été présenté par la Vice-Secrétaire générale des Nations Unies, Mme Louise Fréchette.

Les intervenants ont convenu que la nature des conflits a connu une évolution telle que les populations civiles sont devenues les principales cibles des belligérants, rendant ainsi plus difficile et plus dangereuse l'action humanitaire. Dans ce contexte, la protection et le respect des droits de la population civile et du personnel humanitaire ainsi que la lutte contre la culture de l'impunité des responsables de violations du droit international et du droit international humanitaire, en particulier, représentent les principaux défis. Il a donc été souligné que la responsabilité première de cette protection et du respect de ces droits incombe aux Etats qui doivent veiller à une mise en oeuvre efficace des instruments juridiques existants tels que les Conventions de Genève et leurs protocoles facultatifs. Le renforcement de la juridiction de la Cour pénale internationale, dont le Statut inclut les attaques contre le personnel humanitaire dans les crimes relevant de sa compétence, a été considéré comme important. Des appels ont également été lancés pour que les Etats adhèrent au plus vite à la Convention de 1994 sur la sécurité du personnel des Nations Unies et du personnel associé.

Dans un contexte où le personnel humanitaire fait l'objet d'attaques délibérées de la part des belligérants, l'établissement d'un nouveau concept de l'action humanitaire a également été jugé nécessaire. Tout en préconisant une distinction nette entre le mandat du Conseil de sécurité en matière de sécurité et de paix internationales et celui des organisations humanitaires, les intervenants ont appelé à une meilleure coordination entre action en faveur d'une paix durable et action humanitaire. Certains ont préconisé que les forces de maintien de la paix viennent en appui à l'action humanitaire.

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Toutefois, une mise en garde a été lancée contre la systématisation d'une telle approche, car l'action humanitaire est déjà vue de plus en plus comme l'instrument des politiques étrangères - moyen pratique de cacher le manque de volonté des gouvernements de régler les conflits. La présence d'éléments armés dans une opération humanitaire doit être fondée sur un mandat clair et précis, au risque d'accroître les suspicions dans une activité où la confiance des parties revêt une importance capitale. Force est donc de préserver le caractère apolitique et impartial de l'action humanitaire en recherchant le consentement indispensable des parties d'abord par le dialogue et les négociations.

Les représentants des pays membres suivants du Conseil de sécurité ont participé au débat : Etats-Unis, Chine, Fédération de Russie, Brésil, Portugal, Slovénie, Royaume-Uni, Kenya, Gambie, Costa Rica, Japon, France, Gabon, Bahreïn et Suède. La République de Corée, l'Autriche, l'Argentine, le Canada, le Pakistan, l'Indonésie et la Norvège ont également pris la parole ainsi que les représentants de l'Organisation des Nations Unies de l'éducation, la science et la culture (UNICEF), du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR).

Le Conseil de sécurité a tenu, pour la première fois, un débat sur la question de la protection des activités d'assistance humanitaire aux réfugiés et autres personnes touchées par un conflit, le 21 mai 1997. En effet, des crises humanitaires comme celle de la région des Grands Lacs - mouvements massifs de près de deux millions de réfugiés et présence d'éléments armés dans des camps situés en pleine zone de conflit - avaient montré l'urgence qu'il y avait à améliorer la réponse de la communauté internationale aux situations humanitaires. Au cours du débat, le représentant du Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés avait posé les conditions préalables à une action humanitaire efficace : la sécurité du personnel humanitaire, l'accès illimité aux populations dans le besoin, et le respect de l'intégrité et de l'impartialité de l'action humanitaire. Par une déclaration du 19 juin 1997, le Conseil de sécurité avait souligné la nécessité d'adopter une démarche coordonnée pour protéger l'assistance humanitaire, et encouragé le Secrétaire général à étudier plus avant les moyens de renforcer cette protection. En réponse à cette requête, le Secrétaire général soumet aujourd'hui son rapport dans lequel il estime qu'il est important de mettre fin à l'impunité qui entoure actuellement les violations des normes humanitaires. Il préconise, en conséquence, le renforcement de la juridiction de la Cour pénale internationale. Pratiquement, le Secrétaire général suggère que les réfugiés soient installés dans des camps de taille limitée, situés à une distance raisonnable des frontières internationales. Il annonce aussi la création d'un groupe de travail du Comité exécutif pour la paix et la sécurité et du Comité exécutif pour les affaires humanitaires, chargé de mieux définir les relations entre les représentants spéciaux et les coordonnateurs pour les affaires humanitaires.

Rapport du Secrétaire général sur la protection des activités d'assistance humanitaire aux réfugiés et autres personnes touchées par un conflit (S/1998/883)

Ce rapport, en date du 22 septembre 1998, a été établi pour donner suite à une déclaration du Conseil de sécurité du 19 juin 1997, dans laquelle le Conseil encourageait le Secrétaire général à étudier plus avant la question de la protection des activités d'assistance humanitaire.

Dans son rapport, le Secrétaire général estime qu'il est de la plus haute importance de veiller à ce qu'il existe sur le terrain des mécanismes efficaces de coordination entre, d'une part, les éléments politiques et militaires et, d'autre part, les éléments droits de l'homme et humanitaires d'une opération des Nations Unies. Les arrangements pratiques entre les forces de sécurité internationales et l'ONU ou d'autres organisations à vocation humanitaire devraient garantir la parfaite compréhension à caractère distinct de leurs tâches respectives et une bonne coordination des politiques et stratégies. Le Secrétaire général estime aussi qu'il est important de ne pas dissocier les activités d'ordre humanitaire du contexte général, social, politique et économique d'un conflit. Le Conseil de sécurité devrait être tenu au courant de l'évolution de la situation sur la plan humanitaire en cas de conflit potentiel ou effectif, de manière qu'il ait une image complète du problème. Lorsque le Conseil de sécurité décide de déployer des contingents de l'ONU ou d'autres forces de sécurité extérieures pour appuyer des opérations humanitaires, le Secrétaire général considère qu'il est de la plus haute importance de leur donner un mandat précis, clair et réaliste, de les déployer dans les délais voulus et de les doter de ressources et d'un appui suffisants.

En ce qui concerne le renforcement de l'application du droit international, le Secrétaire général note que si cette application a toujours posé des problèmes dans les situations de conflit, la situation s'est considérablement dégradée ces dernières années en raison de l'évolution de la nature des conflits. Dans les situations de conflit interne, la société entière est souvent mobilisée pour faire la guerre et il est difficile de distinguer entre combattants et non-combattants. Les populations civiles sont les cibles premières, et le déplacement forcé des populations civiles est maintenant bien souvent un objectif direct, plutôt qu'un effet secondaire, de la guerre. L'un des grands problèmes vient du fait que les Etats ne traduisent pas en justice ceux qui violent le droit, d'où l'instauration d'une culture d'impunité dans laquelle les violations flagrantes des droits de l'homme et du droit humanitaire ne sont jamais sanctionnées.

A propos de la garantie de l'accès de l'assistance humanitaire, le Secrétaire général rappelle qu'en vertu du droit international, les réfugiés, les personnes déplacées et autres victimes de conflits ont le droit de bénéficier de la protection et de l'assistance internationales lorsque les autorités nationales ne sont pas en mesure de la faire. C'est aux Etats qu'il incombe au premier chef de veiller à ce que ces personnes bénéficient de l'aide et de la protection nécessaires et que l'Organisation des Nations unies et les autres organismes à vocation humanitaire aient accès à ces groupes en

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toute sécurité et sans entrave. Mais ce sont les Etats eux-mêmes qui, bien souvent, refusent l'accès à ces organismes et défendent leur action en invoquant le principe de la souveraineté nationale. Ces dernières années, l'accès aux populations ayant besoin d'une aide humanitaire a été entravé par l'insécurité générale résultant des conflits. Le Secrétaire général rappelle que des "zones de sécurité" ont été établies par l'Organisation des Nations Unies dans le cadre d'un certain nombre d'opérations afin de protéger les populations civiles vulnérables touchées par un conflit et d'améliorer l'accès pour l'apport d'une aide humanitaire; les "couloirs de sécurité" servent à donner l'accès aux populations. Toutefois, les zones de sécurité ne peuvent remplir leur fonction que si le Conseil de sécurité fait montre de volonté politique et exerce des pressions suffisantes pour protéger la zone elle-même et les convois logistiques.

A propos de la sécurité des opérations et du personnel humanitaires, le Secrétaire général remarque que l'insécurité à laquelle le personnel humanitaire est en butte résulte principalement de trois facteurs: le désir des protagonistes dans les situations de conflit d'entraver les opérations humanitaires qu'ils considèrent comme allant à l'encontre de leurs propres objectifs; le désir d'éviter que les violations des droits de l'homme et autres violations du droit international n'aient des témoins; la méfiance et la suspicion à l'égard des motifs et des intentions des organisations humanitaires.

Abordant le rôle du Conseil de sécurité dans les opérations humanitaires, le Secrétaire général rappelle que c'est à l'Assemblée générale qu'il incombe en premier chef de fournir des orientations pour les opérations humanitaires de l'ONU. Toutefois, ces dernières années, il est apparu que les crises humanitaires, en particulier les afflux massifs de réfugiés, sont souvent des signes avant-coureurs et menacent la paix et la sécurité internationales. Le Secrétaire général remarque que les circonstances dans lesquelles des opérations humanitaires ont été menées peuvent être classées en quelques grandes catégories. L'accès aux populations ayant besoin d'aide humanitaire peut être, par exemple, obtenue par voie de négociation sans que le Conseil de sécurité ait à intervenir. Les mesures prises par le Conseil de sécurité pour protéger l'aide humanitaire peuvent prendre différentes formes et faire intervenir à la fois des composantes militaires et civiles, comme la police internationale, les gardes des Nations Unies ou des observateurs des droits de l'homme. Le Secrétaire général considère qu'une approche intégrée est particulièrement importante sur le terrain, où le manque de cohésion ou les dissensions entre les entités des Nations Unies peuvent être exploitées par les parties. L'appui apporté par le Conseil de sécurité aux opérations humanitaires doit aller de pair avec une action politique visant à résoudre le conflit, faute de quoi l'efficacité de l'action humanitaire risque de se trouver compromise.

En conclusion, le Secrétaire général considère qu'en principe, les Etats devraient réaffirmer, renforcer et appliquer les normes, principes et dispositions du droit international, notamment du droit humanitaire, des droits de l'homme et du droit des réfugiés. Le Conseil de sécurité devrait appuyer les actions visant à assurer le respect du droit international.

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Le Secrétaire général estime en outre qu'il faut mettre fin à l'impunité généralisée qui entoure actuellement les violations des normes humanitaires. Tous ceux qui se rendent coupables de violations du droit international doivent être traduits en justice, qu'il s'agisse ou non d'Etats. Il faudra continuer à prendre des mesures pour élargir et renforcer la juridiction de la Cour pénale internationale. Le Conseil de sécurité pourrait aussi envisager sérieusement de mettre au point une série d'options pour ce qui est du maintien de l'ordre et afin de créer un environnement sûr pour la population civile exposée au conflit et la fourniture d'aide humanitaire dans des situations conflictuelles. Les réfugiés devraient dans la mesure du possible être installés dans des camps de taille limitée, situés à une distance raisonnable des frontières internationales, afin de réduire les risques pour leur sécurité et celle du personnel humanitaire. Il faudrait mener une action plus résolue afin de contrôler et réglementer les ventes d'armes à destination de zones de conflit effectif ou potentiel. Le personnel des Nations unies et autre personnel humanitaire devraient être suffisamment formés aux procédures de sécurité avant d'être envoyés sur le terrain.

Le Secrétaire général annonce enfin la création d'un groupe de travail du Comité exécutif pour la paix et la sécurité et du Comité exécutif pour les affaires humanitaires, qui a été chargé de mieux définir les relations entre les représentants spéciaux du Secrétaire général et les coordonnateurs pour les affaires humanitaires, ainsi qu'entre les droits de l'homme et les autres éléments des missions de l'ONU (Programme alimentaire mondial). Le Secrétaire général estime qu'il ne faudrait ménager aucun effort pour appuyer l'action que mène le Coordonnateur des secours d'urgence et les organismes membres du Comité permanent interorganisations afin d'assurer la coordination des opérations humanitaires.

Déclaration de la Vice-Secrétaire générale des Nations Unies

Mme LOUISE FRECHETTE, Vice-Secrétaire générale des Nations Unies, présentant le rapport du Secrétaire général sur la protection des activités d'assistance humanitaire aux réfugiés et autres personnes touchées par un conflit, a souligné avant tout que la capacité des institutions humanitaires à effectuer leur travail ne peut qu'être limitée lorsque des civils sans défense deviennent les cibles des belligérants. Jamais auparavant le monde n'a vu des attaques aussi délibérées contre des civils. Terrorisées et traumatisées, des millions de personnes sont obligées de fuir alors que d'autres se retrouvent bloquées dans les zones de guerre. En dépit des progrès effectués dans le domaine des mines terrestres, ces armes continuent d'être utilisées contre des civils et de gêner l'assistance humanitaire. Ce phénomène n'est pas nouveau, mais son ampleur a atteint des niveaux sans précédents comme le montre la situation en Afghanistan, au Kosovo ou dans la République démocratique du Congo. L'assassinat de civils représente aujourd'hui l'objectif principal des conflits et dans ce contexte, les limites de l'action humanitaire deviennent évidentes. L'action humanitaire ne vise pas à mettre fin aux massacres ni aux déplacements des populations. Elle ne peut rien contre cela.

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Il est donc essentiel de revoir le concept de l'action humanitaire et les besoins des populations civiles. Le Conseil doit prendre les mesures appropriées pour apporter une réponse à ces crises. Le mandat du Conseil étant la paix et la sécurité internationales, il doit faciliter aussi le déroulement de l'action humanitaire et veiller à l'établissement d'un environnement favorable à une paix et à un développement durables. Le rapport du Secrétaire général a été établi avec la collaboration du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés et d'autres organismes et départements des Nations Unies concernés. Il tient compte des expériences des institutions humanitaires qui savent mieux que d'autres que le principal défi de l'action humanitaire est de fonctionner dans des environnements hostiles. La guerre a changé de nature et le personnel humanitaire doit aujourd'hui faire face aux violations massives des droits de l'homme lorsque les groupes armés évitent les affrontements directs en s'attaquant aux civils non armés. Le rejet des normes internationales à l'égard du personnel humanitaire réduit aussi sa capacité d'agir et représente un danger croissant pour les femmes et les enfants. Le rapport du Secrétaire général explique pourquoi la nature de la guerre est tellement préoccupante. Il propose des mesures dont la nécessité pour les auteurs des crimes d'être tenus responsables de leurs actes. La création de la Cour pénale internationale doit pouvoir sonner le glas de l'impunité.

Déclarations

M. PETER BURLEIGH (Etats-Unis) a déclaré qu'il est impératif de mettre un terme à la culture d'impunité qui a permis les attaques contre des réfugiés sans défense et contre le personnel humanitaire qui s'efforce de leur fournir une aide. La délégation américaine estime que le Conseil de sécurité gagnerait en efficacité s'il examinait la question de la protection des réfugiés et de la sécurité du personnel humanitaire de manière séparée. Le représentant a rappelé que les Etats-Unis participent en ce moment, avec d'autres membres du Conseil, au groupe de travail sur les moyens d'assurer la sécurité et la neutralité dans les camps de réfugiés. Bien que ce travail soit essentiellement centré sur les camps de réfugiés en Afrique, nul doute que les recommandations qui en résulteront pourront être appliquées partout ailleurs, a-t-il ajouté.

La nature des menaces qui pèsent sur le personnel humanitaire a changé. Il n'est plus seulement directement victime des combats, mais de plus en plus souvent pris pour cible à des fins politiques et économiques. La nature des conflits a également changé, souvent internes et chaotiques, ils interviennent dans des pays où les gouvernements ne sont plus capables de garantir la sécurité des travailleurs humanitaires. C'est pourquoi le Conseil devrait d'urgence s'attacher à élaborer une stratégie globale visant à améliorer la sécurité et la protection du personnel humanitaire. A cet effet, il conviendrait d'examiner notamment la possibilité pour le Secrétaire général de nommer une personnalité de haut niveau chargée d'enquêter sur les cas de violences contre les travailleurs humanitaires afin d'en identifier les responsables.

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Parallèlement, il faudrait encourager le renforcement des lois interdisant de telles attaques et élaborer des mesures concrètes encourageant aussi bien les Etats que les acteurs non gouvernementaux à ne pas commettre ou tolérer de telles attaques. M. Burleigh a suggéré en outre d'examiner la valeur et la faisabilité de la rédaction d'un éventuel protocole à la Convention sur la sécurité et la protection du personnel des Nations Unies et du personnel associé, qui améliorerait la protection des travailleurs humanitaires. Il serait bon enfin de se pencher sur les moyens d'assurer au personnel humanitaire une formation appropriée dans le domaine de la sécurité.

M. SHEN GUOFANG (Chine) a déclaré que les civils, surtout les femmes et les enfants, sont particulièrement touchés par les conflits, qui engendrent également de nombreux réfugiés. La communauté internationale a la responsabilité de veiller à leur sécurité.

La question de la sécurité et de la protection du personnel humanitaire préoccupe également la Chine qui estime que le Conseil de sécurité devrait examiner de plus près cette question. Cependant la Chine accueille avec satisfaction le rapport du Secrétaire général sur la protection des activités d'assistance humanitaire.

Le respect par tous du droit international, en particulier par les parties en conflit, est essentiel. De leur côté, les opérations de secours doivent respecter les principes de neutralité et d'impartialité. Elles doivent respecter les pratiques locales, les pratiques religieuses, les traditions.

La Chine souhaite une meilleure communication entre le Conseil de sécurité et d'autres organismes tels que le Haut commissariat pour les réfugiés. Elle est d'avis que le Conseil de sécurité devrait étudier plus avant les propositions faites par le Secrétaire général dans son rapport.

M. SERGEY LAVROV (Fédération de Russie) a estimé que sans une assistance humanitaire efficace, il est difficile d'envisager le succès des missions de maintien de la paix. C'est pourquoi aujourd'hui les opérations humanitaires deviennent un élément clé des opérations de maintien de la paix. Il faut toutefois souligner la différence des mandats du Conseil et des institutions humanitaires et respecter cette différence. Dans ce contexte, il convient simplement d'appeler à une meilleure coordination entre le maintien de la paix et l'action humanitaire. Pour assurer la protection du personnel humanitaire, on peut songer à une intervention des contingents militaires des opérations de maintien de la paix mais aussi à l'importance qu'il y à respecter l'impartialité de l'action humanitaire. Cette dernière ne peut servir d'instrument de pression politique. Il convient donc d'établir clairement et de manière réaliste les tâches humanitaires. L'utilisation de la force doit, dans ce contexte, intervenir en dernier ressort. Aujourd'hui, le concept d'ingérence humanitaire pose de nombreuses questions. Il faut éviter que la population civile ne se retrouve otage d'une action humanitaire cachant en fait une action politique. De l'avis de la Fédération de Russie, la lutte contre la circulation des armes dans les zones de conflit représente le facteur le plus important de stabilisation.

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M. CELSO L. N. AMORIM (Brésil) a déclaré que son pays convenait de l'importance de promouvoir le respect du droit humanitaire international en améliorant l'assistance aux réfugiés dans les situations de conflit. Il est clairement apparu qu'il était indispensable d'assurer une plus grande diffusion des principes et règles humanitaires, en dépit du travail remarquable mené par un certain nombre d'Etats et d'institutions tel que le Comité international de la Croix Rouge. Un principe fondamental du droit humanitaire est que l'aide doit être fournie de manière impartiale et neutre. Les succès extraordinaires remportés par la Croix Rouge proviennent du respect strict de cette philosophie. Nous devons garder à l'esprit que le recours au Chapitre VII de la Charte des Nations Unies peut avoir des conséquences négatives sur la fourniture de l'aide humanitaire, ce qu'a souligné à juste titre le Secrétaire général dans son rapport. Il est nécessaire aujourd'hui de réévaluer la situation et de reconnaître avec plus de précaution et plus de sagesse que le recours à la force dans les opérations humanitaires entraîne de nombreux risques et ne devrait être envisagé uniquement quand il pourrait contribuer à une paix durable.

La communauté internationale ne doit pas se dérober à sa responsabilité collective mais les leçons des années cinquante mettent en garde contre l'établissement d'une co-relation automatique entre la responsabilité collective et la sécurité collective dans les opérations humanitaires. Il est clair que l'accès des secours humanitaires peut être garanti de manière satisfaisante grâce aux négociations, sans pour autant nécessiter l'intervention du Conseil de sécurité même s'il existe de sérieux problèmes de sécurité. Dans des cas extrêmes, où l'une des deux parties au conflit ne consent pas à la présence de forces de sécurité extérieures, des options coercitives peuvent être envisagées. Les objectifs humanitaires ne pourront pas être atteints à moins de les combiner à une stratégie politique efficace visant à la stabilité, à la cessation des hostilités et à la stabilisation. Nous devrions éviter de placer le Conseil de sécurité dans une situation où il doit déployer des efforts humanitaires désespérés afin de gérer les conséquences alors qu'il aurait dû traiter des causes des conflits.

Le problème spécifique de la présence des combattants armés dans les camps de réfugiés et la nécessité d'endiguer le commerce des armes dans les zones de conflits méritent une attention particulière. Par ailleurs, de nombreux pays en développement accusent, avec leurs maigres ressources, le coût social, économique et politique des crises humanitaires régionales. Il est nécessaire de corriger la perception selon laquelle les pays en développement bénéficient de l'aide humanitaire alors que souvent, ils donnent le peu qu'ils possèdent. Le travail remarquable des institutions humanitaires des Nations Unies et des différentes agences méritent un plus grand soutien politique et matériel.

M. ANTONIO MONTEIRO (Portugal) a déclaré qu'il considère le rapport du Secrétaire général comme stimulant la réflexion et constituant une bonne base pour une action future. La légitimité et le rôle crucial que le Conseil de sécurité est susceptible de jouer en matière d'assistance humanitaire à l'égard des populations civiles ne font aucun doute.

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Notre approche et notre action doivent consister en un effort collectif qui engage l'ensemble du système des Nations Unies, les autres organisations régionales et internationales et les organisations humanitaires. Les mandats du Conseil de sécurité en matière de maintien de la paix devraient prendre en considération, dès le début, la sécurité des réfugiés, des personnes déplacées au sein du pays et du personnel humanitaire.

La protection de l'assistance humanitaire passe également par le respect du droit international. La communauté internationale, les Nations Unies et en particulier le Conseil de sécurité, doivent s'opposer fermement à la violation du droit à l'assistance et imposer des sanctions aux coupables. C'est d'abord aux Etats concernés, qui sont responsables de la sécurité des réfugiés et des civils en général, que revient la tâche de faire comparaître les coupables. La communauté internationale, quant à elle, doit lever la voix contre la culture de l'impunité et soutenir les efforts produits pour que les coupables soient jugés, aux niveaux national et international. Pour cette raison, le Portugal salue l'adoption du statut de la Cour pénale internationale.

En matière de protection du personnel des Nations Unies, le Portugal réitère son souhait que soit ratifiée la Convention sur la sécurité du personnel des Nations unies et du personnel associé. Afin de faciliter et de protéger l'aide et l'assistance humanitaire, le Conseil de sécurité devrait considérer la possibilité de déployer sur le terrain des unités militaires.

M. DANILO TÜRK (Slovénie) a déclaré que la nature des conflits armés avait changé depuis un certain temps déjà. Le Conseil de sécurité traite de plus en plus, mais pas exclusivement, de conflits internes et de leurs tragiques conséquences humanitaires. Nous ne pouvons plus parler de séparation claire entre combattants et civils.

Les combats entre différentes factions - dont les objectifs politiques et militaires ne sont pas toujours clairs - produisent des situations très complexes. Le déplacement forcé de civils innocents est souvent le principal objectif des combats. La souffrance des enfants lors de ces conflits est terrible. Le personnel humanitaire est souvent directement pris pour cible. Ces attaques servent les intérêts des parties en conflits. Nous nous trouvons, comme jamais auparavant, face à de violations des droits de l'homme et des lois sur l'assistance humanitaire internationale.

Les situations d'urgence humanitaire doivent être traitées de façon prioritaire. Cependant, l'action humanitaire ne doit pas être utilisée comme un substitut à une action politique ou - quand elle est nécessaire - à une intervention militaire. L'action humanitaire ne doit pas faire oublier les responsabilités du Conseil de sécurité pour ce qui est des aspects politique et sécuritaire. Il doit répondre de façon claire, adéquate et unifiée, utilisant tous instruments en sa possession pour répondre de façon efficace à une situation d'urgence humanitaire.

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L'un des aspects les plus inquiétants de la nouvelle mécanique de guerre et des conflits non internationaux est l'érosion du respect des normes et des lois internationales. Nous devons redoubler d'efforts pour les faire appliquer, en particulier en ce qui concerne le droit humanitaire, les droits de l'homme et le droit des réfugiés. Les violations des lois internationales sur l'assistance humanitaire ne peuvent rester impunies. La prévention de l'impunité incombe d'abord aux Etats et à leur système de justice pénale. Néanmoins, la communauté internationale a également des responsabilités dans cette question.

Au regard des récents conflits aux conséquences humanitaires dramatiques, comme en Sierra Leone, en République démocratique du Congo, en Afghanistan ou au Kosovo, pour n'en citer que quelques-uns, nous voudrions insister sur l'importance d'assurer l'accès des organisations humanitaires aux réfugiés et aux personnes touchées par un conflit. Souvent, la clé de la solution se trouve dans la nécessité de faire respecter un cessez-le-feu et d'engager un dialogue politique et des négociations. D'un autre côté, quand les parties en conflit empêchent délibérément l'assistance humanitaire d'accéder aux civils, une action militaire semble être la seule réponse efficace aux graves problèmes posés par une situation d'urgence souvent complexes.

Les organisations humanitaires travaillent sur la base d'un concept de neutralité, d'impartialité et d'indépendance. Il est donc inacceptable que, dans leurs efforts pour venir en aide aux populations qui en ont besoin, ces organisations deviennent les cibles des parties en conflits.

Nous condamnons fermement les actes de violence contre les travailleurs humanitaires. Nous nous félicitons du fait que ces actes sont désormais considérés comme des crimes de guerre et relèvent de la juridiction de la Cour pénale internationale.

M. JEREMY GREENSTOCK (Royaume-Uni) a constaté que la culture de l'impunité prévaut toujours lorsqu'il s'agit des attaques perpétrées contre le personnel humanitaire. Aujourd'hui, il faut établir un calendrier précis pour traiter de la question. La communauté internationale doit assumer ses responsabilités vis-à-vis du droit international. Dans ce contexte, le Royaume-Uni accueille avec satisfaction l'adoption du statut de la cour pénale internationale et formule l'espoir qu'il mettra fin à cette culture d'impunité. Le Royaume-Uni se félicite particulièrement de la référence faite au personnel humanitaire dans la liste des crimes entrant dans la compétence de la cour. Il lance un appel urgent aux Etats pour qu'ils ratifient la Convention de 1994 sur la sécurité du personnel des Nations Unies et du personnel associé.

De l'avis du Royaume-Uni, les pays hôtes doivent remplir leurs obligations à l'égard du personnel humanitaire. Ils doivent mettre tout en oeuvre pour traduire en justice les responsables d'actes perpétrés contre lui.

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Il faut également que le Conseil de sécurité mette tout en oeuvre pour assurer la protection du personnel humanitaire et comprendre l'importance qu'il y a à donner aux troupes des Nations Unies en appui aux opérations humanitaires, un mandat clair, réaliste et approprié. Les forces doivent être équipées pour pouvoir répondre aux menaces. Trop souvent, l'on a demandé aux militaires de faire l'impossible tout en ne leur donnant pas les moyens nécessaires.

M. NJUGUNA M. MAHUGU (Kenya) a estimé qu'au moment où la fourniture de l'aide humanitaire intervient dans des conditions de plus en plus précaires partout dans le monde, la communauté internationale a la responsabilité collective de garantir la sécurité et la protection du personnel des Nations Unies, des organisations non gouvernementales et des autres organisations humanitaires. Faisant observer que le continent africain détient le record, peu enviable, du plus grand nombre de réfugiés et de personnes déplacées, M. Mahugu a constaté que cette situation est aggravée par les changements intervenus dans la nature des conflits. Tous les tabous en matière de conflit sont tombés et aujourd'hui ce sont des sociétés entières qui sont mobilisées à des fins de guerre. Des enfants de 9 ans sont spécialement recrutés et entraînés au combat, et des civils, y compris les femmes et les enfants, sont tout particulièrement pris pour cible.

Récemment le caractère civil des camps de réfugiés a également changé. Ils abritent désormais des éléments armés, des milices ou des enfants soldats. De surcroît, une culture d'impunité s'est développée permettant à certaines personnes de continuer à violer les droits de l'homme et le droit humanitaire en restant impunies. A cet égard, le Kenya se félicite tout particulièrement de l'adoption récente du statut portant création de la Cour pénale internationale et se tient prêt à relever le défi visant à ce que tant les acteurs gouvernementaux que non gouvernementaux satisfassent aux exigences des instruments juridiques internationaux de protection et d'assistance aux populations civiles et aux réfugiés, ou personnes déplacées. Le représentant s'est également réjoui de l'adoption par le Conseil économique et social, lors de sa récente session de fond, d'une série de principes directeurs sur la protection des personnes déplacées au sein d'un pays. Terre d'accueil, le Kenya s'est toujours efforcé de faire en sorte que l'accès à l'aide humanitaire soit un droit pour les réfugiés, les personnes déplacées et autres civils. Ayant ainsi fait l'expérience des conséquences sociales et des effets destructeurs sur l'environnement qu'entraîne une forte concentration de réfugiés dans une aire donnée, le Kenya demande instamment à la communauté internationale de participer à l'amélioration des capacités locales en matière de fourniture d'aide humanitaire, dont le plus grand défi est aujourd'hui de demeurer neutre et impartiale.

M. BABOUCARR-BLAISE ISMAILA JAGNE (Gambie) a déclaré qu'il existe des mécanismes juridiques élaborés par la communauté internationale pour protéger les réfugiés et autres personnes touchées par un conflit ainsi que le personnel humanitaire qui lui vient en aide. Malgré ce cadre juridique, nous sommes surchargés par les problèmes d'accès aux personnes dans le besoin et de sécurité du personnel humanitaire.

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Entre le 1er janvier 1992 et le 31 août 1998, 153 membres du personnel des Nations Unies ont perdu la vie et 43 prises d'otages de membres de ce personnel ont été enregistrées.

Les Nations Unies devraient faire tous les efforts nécessaires pour faire cesser cette situation. Il faut en particulier faire respecter le droit international. Nous sommes d'accord avec le Secrétaire général quand il suggère de demander aux Etats membres de réaffirmer leur engagement aux droits internationaux sur cette question. Les Etats qui n'ont pas encore souscrit à ces droits devraient le faire. Nous constatons également que, dans certains cas, les violations des droits sont dus à des facteurs autres que leur méconnaissance. La Gambie souhaite que le respect des normes internationale soit considéré comme une question prioritaire. L'impunité doit cesser. La Gambie se félicite de la réponse aux violations des droits de l'homme et des lois humanitaires prévues par la Cour pénale internationale. Aucun dirigeant, aucune junte où que ce soit, ne peut rester impuni s'il ne respecte pas les droits de l'homme.

Le représentant a souligné que le fardeau de l'accueil des réfugiés est très lourd à porter pour les pays en développement. La solidarité et le partage du fardeau sont importants pour encourager les Etats à respecter les principes de l'aide humanitaire. La communauté internationale devrait néanmoins être prête à aider ces Etats. L'assistance ne doit pas se faire au détriment de l'aide au développement. De nombreux Etats, notamment en Afrique, souffrent de ce problème. La création d'un mécanisme international pour aider les Etats à recevoir les réfugiés serait pertinente.

Par ailleurs la Gambie considère que la question de la sécurité du personnel humanitaire est aussi importante que celle des réfugiés. Elle insiste également sur la question de la formation du personnel qui doit être obligatoire. Elle espère que les organisations recevront les fonds nécessaires pour assurer cette formation et encourage les Etats à apporter leur contribution.

Sur tous ces problèmes, le Conseil de sécurité a un rôle à jouer, bien qu'il n'ait pas, pour l'instant, bien défini sa position en la matière. Le moment est venu pour lui d'agir de manière plus pragmatique. La Gambie souhaite l'élaboration de directives très claires afin de répondre de façon concrète aux problèmes soulevés par le rapport du Secrétaire général.

M. BERND NIEHAUS (Costa Rica) a réitéré la proposition de son pays de promouvoir une nouvelle conception de règlement des conflits fondée sur la sécurité de l'être humain. Dans ce contexte, l'action de maintien de la paix doit d'abord viser à promouvoir le respect des droits de l'homme et octroyer de meilleures conditions de vie aux victimes des conflits armés. Le respect du droit international humanitaire et la protection du personnel humanitaire deviennent primordiaux. Le Costa Rica est pleinement conscient du poids économique, social et politique des réfugiés. Il encourage donc l'adoption de mesures visant à garantir l'acheminement de l'assistance humanitaire et la protection de ceux qui la fournissent. S'il reconnaît le droit à la légitime défense du personnel humanitaire, le Costa Rica estime qu'il faut éviter de

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recourir à la force afin de ne pas porter préjudice au caractère impartial de toute action humanitaire. Il est tout aussi important pour les belligérants de respecter la neutralité des camps de réfugiés et des personnes déplacées et d'accorder l'accès à l'assistance humanitaire. Aujourd'hui, la question prioritaire serait de mettre fin à la culture de l'impunité et il faut souligner, dans ce contexte, le bien-fondé du statut, de la Cour pénale internationale. Le Costa Rica regrette tout simplement que, dans la déclaration qu'il doit adopter à la fin du débat, le Conseil n'ait pu être en mesure de faire une référence à ce statut à cause de la réticence de certains de ses membres.

M. HISASHI OWADA (Japon) a souligné que le problème de la protection des activités d'aide humanitaire peut être envisagé sous trois angles. Tout d'abord, il s'agit de diffuser la prise de conscience de ce problème. Le non- respect des droits de l'homme et du droit humanitaire international par les personnes dans les régions en conflit engendre un mépris de la part des factions en guerre à l'égard des principes de base sur lesquels se basent les opérations humanitaires. La communauté internationale, par le biais d'organisations des Nations Unies comme le Bureau de la coordination des affaires humanitaires, le Haut Commissariat pour les réfugiés, le Haut Commissariat pour les droits de l'homme, et l'UNICEF ainsi que par le biais des organisations humanitaires comme le Comité international de la Croix- Rouge, doit intensifier son plaidoyer en faveur de la protection des activités d'aide humanitaire, notamment dans les régions à risques.

D'autre part, il s'agit de mettre en place un cadre juridique, qui permette de poursuivre en justice ceux qui ont violé les règles de droit. Je voudrais proposer au Conseil de sécurité qu'il demande au Secrétaire général de mener une étude minutieuse sur ce problème, incluant la possibilité d'une convention globale couvrant tous les aspects de l'assistance humanitaire dans le contexte du changement des conflits actuels. Il s'agit , en outre, d'appliquer de manière effective le droit humanitaire international. Dans cette optique, grâce à l'établissement de la Cour pénale internationale, les attaques perpétrées contre le personnel humanitaire pourraient constituer des crimes de guerre. Toutefois, nous ne devons pas perdre de vue que c'est d'abord aux Etats que revient la responsabilité de poursuivre les coupables.

Le troisième aspect concerne les mesures concrètes de protection. Nous devons, tout d'abord, faire en sorte de minimiser les risques pris par le personnel sur le terrain. La neutralité et la sécurité des camps de réfugiés peuvent être assurées en séparant les combattants des civils. Endiguer le trafic d'armes illicite entrant et sortant d'Afrique permettrait également d'améliorer la sécurité du personnel. Il faut également que le personnel humanitaire reçoive un entraînement approprié et que les organisations humanitaires respectent le principe de stricte impartialité. Le Japon réitère son engagement financier à hauteur d'un million de dollar pour soutenir les mesures de sécurité prises en faveur du personnel des Nations unies.

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Pour faire face aux menaces de nature militaire, une protection armée par des organisations militaires pourrait être une option, bien que l'engagement de telles forces armées puisse être contre-productif. C'est pourquoi l'utilisation de forces armées devrait remplir plusieurs conditions et devrait être suivi de près par le Conseil de sécurité.

M. ALAIN DEJAMMET (France) a souligné que le Conseil de sécurité doit, dans l'exercice de son mandat, davantage prendre en compte les dimensions humanitaires des crises. Il dispose de moyens, d'instruments de nature à contribuer à la protection de l'aide humanitaire. Aujourd'hui, il lui appartient d'avoir la volonté de les mettre en oeuvre. Les échecs de ces dernières années ne doivent pas nous conduire à nous désengager et à renoncer à faire face à nos responsabilités, mais plutôt à entreprendre une réflexion sur la base des leçons tirées de notre expérience, pour définir des stratégies efficaces pour l'avenir, a-t-il suggéré. Depuis l'opération humanitaire en Somalie, la communauté internationale a pris conscience de l'importance de ne pas dissocier les activités d'ordre humanitaire du contexte général, social, politique et économique d'un conflit. L'expérience de la FORPRONU a enseigné que lorsque le Conseil de sécurité décide de déployer des contingents de l'ONU ou d'autres forces de sécurité pour appuyer des opérations humanitaires, un mandat précis, clair et réaliste doit permettre de définir les responsabilités respectives des éléments militaires et humanitaires. Sur le terrain, cela doit se traduire par une coordination étroite entre éléments politiques et militaires d'une part et humanitaires d'autre part, tout en gardant bien à l'esprit le caractère distinct de leurs tâches respectives.

Les échecs ont souvent conduit à une prudence excessive, souvent perçue comme une paralysie du Conseil et une incapacité à faire face à ses responsabilités. C'est pourquoi, en Afrique centrale, en novembre 1996, la décision du Conseil de sécurité de créer une force multinationale pour assurer la sécurité de millions de femmes et d'hommes dans une situation d'extrême détresse, n'a jamais vu le jour. Tout en recommandant d'agir avec prudence au Kosovo, la France souhaite que le Conseil assume ses responsabilités pour éviter une nouvelle catastrophe humanitaire. Soulignant que le contrôle du respect des normes et principes du droit international est un élément crucial, M. Dejammet estime que la création d'une Cour pénale internationale constitue un progrès majeur dans la lutte contre l'impunité des plus grands criminels de guerre. A cet égard, il a rappelé que la France a été un des premiers pays à avoir signé le traité, à Rome. Invitant les pays réticents à la rejoindre, la France se déclare désireuse d'apporter sa contribution pour faire de la Cour pénale internationale un instrument crédible et efficace au service des droits de l'homme et de l'humanité. Par ailleurs, la délégation française, très préoccupée par la détérioration des conditions dans lesquelles le personnel humanitaire travaille, rappelle avec tristesse et préoccupation que depuis janvier 1998 le Français Vincent Cochetel, qui travaillait pour le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés en Ossétie du Nord est maintenu en détention par ses ravisseurs. Enfin, M. Dejammet s'est déclaré convaincu que l'on ne pourra obtenir de résultats concrets sur le terrain sans coordination étroite et confiance entre tous les acteurs, Etats, Organisation des Nations Unies et organisations non gouvernementales.

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M. DENIS DANGUE REWAKA (Gabon) a fait remarquer qu'aussi abondante qu'est la législation dans le domaine des droits de l'homme et dans celui du droit international humanitaire, force est de constater qu'elle n'est pas appliquée de manière rigoureuse aussi bien par les Etats que par les différents groupes en conflit. Sa délégation déplore vivement cette situation dont les conséquences sont amplement soulignées dans le rapport du Secrétaire général. La communauté internationale ne peut plus tolérer que des femmes, des enfants, des vieillards, des réfugiés, le personnel des organisations humanitaires - en un mot la population civile - soient constamment les cibles des groupes armés. Il est vital de mettre fin à ces exactions répétées. Tout en rendant hommage aux nombreuses victimes qui ont péri pour leur engagement en faveur de la paix, M. Dangue Rewaka a exprimé sa gratitude aux efforts déployés par le Comité internationale de la Croix-Rouge, le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés et toutes les organisations gouvernementales et non gouvernementales engagées dans l'assistance et les secours humanitaires.

Dans ce contexte, la délégation gabonaise appuie fermement les recommandations du Secrétaire général relatives à la protection à la fois des réfugiés, des personnes déplacées et du personnel des Nations Unies et des organisations humanitaires. Toutefois, a souligné M. Dangue Rewaka, les efforts de la communauté internationale seraient vains si aucune action concrète n'est faite en faveur du renforcement de la confiance entre les organisations humanitaires et les parties en conflit qui parfois accusent ces organisations de soutenir un groupe au détriment d'un autre.

M. RACHID AL-DOSARI (Bahreïn) a souligné que la communauté internationale s'est depuis longtemps rendue compte de la nécessité d'assurer la protection des réfugiés, des personnes déplacées et de toutes autres personnes touchées par les conflits. C'est la raison pour laquelle des textes comme les Conventions de Genève ont été adoptés. D'autre part, il est clair que l'aide humanitaire ne parvient pas toujours à ses destinataires et que le personnel humanitaire est de plus en plus victime d'attentats. Le Bahreïn condamne ces actes comme violations du droit international. Il souligne la responsabilité des Etats d'assurer la sécurité du personnel des Nations Unies et des autres personnels associés. De l'avis du Bahreïn, le Conseil de sécurité doit toujours être tenu au courant de la situation humanitaire des conflits afin qu'il puisse adopter des mesures appropriées. Le Bahreïn souscrit aux recommandations du Secrétaire général parmi lesquelles figure l'amélioration de la sûreté et de l'intégrité du secours d'urgence. Il convient de déployer tous les efforts pour apporter une solution à ce problème.

M. HANS DAHLGREN (Suède), rappelant que les flux de réfugiés et les déplacements de populations sont tout autant des conséquences que des facteurs d'instabilité, a condamné les attaques contre des civils innocents ainsi que contre les personnels des Nations Unies et des organisations humanitaires. A cet égard, il s'est félicité des dispositions du statut de la Cour pénale internationale visant à considérer ces attaques comme crimes de guerre, ce qui constitue un pas décisif à l'encontre de la culture d'impunité qui prévaut trop souvent.

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La responsabilité du Conseil de sécurité, comme du système des Nations Unies en général, est de prévenir les crises humanitaires en apportant des solutions rapides et viables à leurs causes profondes. A cet effet, des réunions d'informations régulières de la part des principaux acteurs humanitaires permettraient d'avoir une approche globale de situations d'urgence souvent complexes.

La Suède se félicite en outre des efforts du Secrétaire général visant à renforcer la coordination entre les diverses composantes des Nations Unies. De même, il serait souhaitable que la collaboration entre les Représentants spéciaux du Secrétaire général et les Coordonnateurs humanitaires soit plus étroite. Nous devons continuer à développer des mécanismes pour garantir la sécurité humanitaire sans pour autant forcément avoir recours au déploiement de troupes. La communauté humanitaire elle-même est en train de se pencher sur le problème. Soulignant les liens étroits entre les recommandations du Secrétaire général dans ce rapport et celui sur la situation en Afrique, notamment concernant la mise en place de mécanismes efficaces pour assurer la sécurité dans les camps de réfugiés, M. Dahlgren a insisté sur la nécessité de traduire ces conclusions en actions et sur l'importance de définir les responsabilités du Conseil de sécurité en la matière.

M. LEE SEE-YOUNG (République de Corée) a déclaré que dans les conflits de l'ère post-guerre froide, le calvaire de dizaines de millions de civils continue. Nous avons constaté en outre ces derniers mois qu'un nombre croissant de volontaires venus porter secours à des personnes innocentes ont vu leur vie sacrifiée ou mise en danger. La République de Corée estime que le temps est venu pour la communauté internationale de prendre sérieusement en main ces problèmes.

Le premier point concerne le besoin urgent pour la communauté internationale de mettre concrètement en action les recommandations faites dans le rapport du Secrétaire général. En raison de la complexité de la question, la communauté internationale devrait l'aborder de façon coordonnée et globale. Ce qui conduit à aborder la question du rôle du Conseil de sécurité. Un certain nombres de points soulevés dans le rapport concernent le Conseil et sa mission de maintien de la paix et de la sécurité internationales. La participation du Conseil de sécurité est indispensable.

Nous ne devons pas oublier que la responsabilité première du Conseil est d'encourager le règlement politique des situations de conflit. L'assistance humanitaire ne doit pas se substituer à l'action politique. Les activités humanitaires doivent être soutenues par les initiatives politiques du Conseil aussi bien que par sa volonté de prendre les mesures de sécurité adéquates, y compris le déploiement de forces de maintien de la paix. Quand des opérations de maintien de la paix sont déployées par le Conseil, ce dernier devrait essayer d'être à la hauteur de la situation. Nous espérons que le Conseil retiendra la leçon des expériences passées malheureuses en Somalie, ex- Yougoslavie, Rwanda et dans l'ex-Zaïre.

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Nous voudrions attirer l'attention du Conseil de sécurité sur l'importance de séparer les combattants armés des réfugiés de plein droit et des populations déplacées. Les pays d'accueil des réfugiés sont souvent incapables ou ne souhaitent pas maintenir l'ordre dans les camps de réfugiés. Dans ce cas, le Conseil de sécurité devrait prendre rapidement les mesures adéquates pour éviter que les camps de réfugiés ne se transforment en bases militaires. Les milices doivent également cesser d'utiliser les réfugiés comme boucliers humains.

Le Conseil de sécurité a des outils utiles, tels que l'embargo sur les armes. Il devrait envisager de mettre en place des embargos ciblés sur certaines régions, là où les mouvements armés transfrontaliers sont fréquents. Une fois imposés, ces embargos doivent être respectés grâce à un mécanisme de suivi efficace mis en place par le Conseil.

Abordant le cadre juridique, le représentant a indiqué que la culture de l'impunité doit cesser. Le respect du droit international est indispensable; la création de Tribunaux internationaux pour le Rwanda et l'ex-Yougoslavie ont constitué des pas importants, tout comme l'adoption des statuts de la Cour pénale internationale. Des mesures spécifiques doivent être prises contre ceux qui violent les droits humanitaires internationaux aux niveaux national et international. Les parties et les dirigeants fautifs doivent être considérés comme physiquement et financièrement responsables envers leurs victimes, en vertu des lois internationales.

M. Lee-Young a suggéré enfin que le Conseil approfondisse son dialogue avec d'autres institutions et organisations, en particulier l'Assemblée général sur cette question. La communauté internationale doit relever le défi d'assurer la sécurité du personnel des Nations Unies et du personnel humanitaire. Le temps est venu d'agir. Le Gouvernement coréen est prêt à contribuer aux efforts déployés en ce sens.

M. ERNST SUCHARIPA (Autriche), s'exprimant également au nom de l'Union européenne, a insisté sur le fait que l'action humanitaire devait constituer une dimension à part entière des activités de maintien de la paix et de développement des Nations Unies. Mais, pour protéger les opérations d'assistance humanitaire, il est indispensable que les parties aux conflits, qu'elles soient des Etats ou non, se conforment aux dispositions du droit international. De nos jours, où les acteurs non gouvernementaux ont un rôle de plus en plus important, il est plus que jamais nécessaire que les individus autant que les Etats soient rendus responsables au regard du droit international et, à cet égard, l'adoption du Statut de la Cour pénale internationale constitue une avancée majeure. De même, le Statut, en prévoyant que les attaques contre des personnels humanitaires constituent des crimes de guerre, permet de les poursuivre et, par là même, contribue à assurer les besoins de sécurité de ces personnels. En conséquence, pour l'Union européenne, il est de la plus haute importance que le Statut entre rapidement en vigueur et elle appelle tous les Etats à le ratifier dans les plus brefs délais.

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En outre, l'Union européenne, notant que les victimes civiles dans les conflits armés sont avant tout des femmes et des enfants, insiste sur la nécessité de prendre davantage en compte ces dimensions. Considérant de plus que l'accès sûr et sans entraves des organisations humanitaires internationales aux réfugiés, aux personnes déplacées et aux populations vulnérables est un principe fondamental, elle condamne fermement toutes les entraves à ce droit et estime que la souveraineté des Etats ne peut en aucun cas justifier de telles pratiques. A cet égard, l'Union européenne accueillerait favorablement la mise en place d'un mécanisme international destiné à aider les pays hôtes qui le souhaitent à assurer la sécurité et la neutralité des camps de réfugiés.

L'Union européenne, déplorant les attaques dont sont victimes les personnels humanitaires dans le contexte d'une stratégie militaire de plus en plus délibérée des parties aux conflits, a également appelé à la mise en oeuvre de la résolution 52/167 relative à la sécurité des personnels humanitaires et à la ratification rapide de la Convention sur la sécurité des personnels des Nations Unies et associés. Une coopération plus étroite sur le terrain entre les Etats et avec les diverses organisations internationales et une meilleure circulation de l'information pourraient contribuer à prévenir ce genre d'attaques. De même, il serait souhaitable de donner une meilleure formation aux personnels humanitaires et de renforcer les procédures de sécurité des organisations humanitaires. Enfin, les Etats sur le territoire desquels de telles attaques se sont produites, doivent enquêter et lancer sans délais des poursuites contre les responsables de tels actes. L'Union européenne insiste enfin sur la nécessité de donner aux opérations humanitaires des mandats clairs et réalistes et de leur allouer les ressources adéquates afin d'assurer la sécurité, tant des populations civiles que des personnels humanitaires.

( suivre)

- 18 - CS/976 29 septembre 1998

M. FERNANDO ENRIQUE PETRELLA (Argentine) a estimé que l'importance de la question de la protection de l'assistance humanitaire ne fait aucun doute, plus de 30 civils ayant perdu la vie au cours de ces dix derniers mois. La provocation de crises humanitaires est devenue aujourd'hui une arme utilisée fréquemment par les parties au conflit. C'est là le facteur dont il faut tenir compte dans le diagnostic des causes des crises. Les mesures à adopter par la communauté internationale devront donc viser à accroître le coût politique et militaire que les parties auront à payer en cas de violation des droits de l'homme et des droits des réfugiés. Prendre pour cible la population civile n'est qu'un des fléaux dont la dimension a augmenté depuis le début du siècle. Il faut donc d'abord garantir le respect des instruments juridiques existants. La Cour pénale internationale représente, en ce sens, un progrès remarquable vers la protection de l'assistance humanitaire puisqu'elle est compétente pour connaître des crimes contre le personnel humanitaire. Dans la mesure où elle repose sur la responsabilité individuelle, la Cour est l'instance indiquée pour mettre fin à l'impunité. Il est indispensable de juger et de condamner les responsables, et espérer, dans ce contexte, que les instruments de la Cour pourront entrer en vigueur le plus rapidement possible. Le rapport du Secrétaire général contient des recommandations auxquelles l'Argentine souscrit. Nonobstant la compétence du Conseil, la totalité des membres des Nations Unies doivent être tenus informés de la situation humanitaires des zones de conflit.

M. ROBERT R. FOWLER (Canada) a déclaré que quatre ans après le génocide du Rwanda, le principal enseignement tiré de la réponse de la communauté internationale à cette crise est toujours valable: l'action humanitaire ne peut se substituer à l'action politique. L'un des défis les plus difficiles à relever est d'accorder une protection élémentaire aux plus vulnérables. Cet impératif de protection fait que le personnel militaire est de plus en plus appelé à intervenir dans le cadre de crises à caractère humanitaire. Le Canada a tiré les enseignements suivants : une connaissance approfondie des capacités et des rôles des partenaires politiques et militaires ainsi que des organisations d'aide humanitaire et de défense des droits de l'homme est essentielle; toute confusion des rôles politiques, militaires et humanitaires ne fait que porter atteinte à l'impartialité des organisations humanitaires. Une force d'intervention doit avoir des objectifs militaires précis et réalistes; les efforts visant à désarmer les parties belligérantes et à séparer les réfugiés des combattants sont dangereux et voués à l'échec lorsqu'une force d'intervention n'est pas structurée ou équipée pour ce genre de mission.

Le Canada continue de soutenir les activités que mènent les Nations Unies pour accroître sa capacité à réagir rapidement aux situations d'urgence complexes. A cet effet, nous demandons instamment que des mesures soient prises le plus tôt possible. Il serait également utile et prudent de réexaminer comment les divers organes onusiens associés à des missions de soutien de la paix planifient et conduisent ces activités.

( suivre)

- 19 - CS/976 29 septembre 1998

Il faut absolument renforcer les relations de travail entre les Départements des affaires politiques et des opérations de maintien de la paix et les organisations humanitaires. Nous devons aussi élargir et intégrer le rôle joué par le Haut Commissaire aux droits de l'homme et par d'autres agences des Nations Unies chargées de la protection des droits de l'homme.

Il ne faut pas avoir une conception étroite du soutien que les organisations politiques peuvent apporter aux organisations humanitaires. Le Conseil de sécurité devrait examiner la possibilité d'élaborer un éventail de formules afin de maintenir l'ordre public et de créer un environnement sûr pour les populations civiles menacées par un conflit et pour l'acheminement de l'aide humanitaire dans le cadre de conflits. Par ailleurs, tous les Etats sont tenus de respecter les principes humanitaires fondamentaux et de s'acquitter de leurs obligations légales et internationales. Il est essentiel de faire connaître les principes et dispositions en vigueur et d'en contrôler le respect pour contribuer à leur efficacité. Pour ce qui est par exemple du Traité d'interdiction des mines terrestres, nous devrions en contrôler l'application et faire connaître au plus grand nombre le principe qui le sous- tend. Par ailleurs, la création de la Cour pénale internationale aidera à prévenir certaines violations du droit humanitaire les plus graves.

Pour ce qui est de la sécurité du personnel humanitaire, le représentant a plaidé en faveur de l'amélioration de toute urgence des mesures de sécurité destinées à sa protection. Il ne faut pas, manquer d'imputer la responsabilité de la sûreté des travailleurs humanitaires aux parties au conflit. Nous ne pouvons pas non plus rester immobiles devant la menace que constitue les armes de petit calibre. Le Canada a cet égard, a adopté une approche en trois volets axée sur le commerce licite et illicite de ces armes et sur les problèmes que présente leur prolifération dans le contexte de la consolidation de la paix.

M. AHMAD KAMAL (Pakistan) a rappelé que les réfugiés, les personnes déplacées, les autres victimes des conflits ainsi que le personnel humanitaire subissent des traitements cruels tant dans les zones de conflit que dans les situations de reconstruction, une fois ceux-ci résolus. Ils doivent faire face à l'adversité, en dépit des organes et des principes de droit international établis pour les protéger. Nous avons la responsabilité collective de garantir le respect effectif de ces normes juridiques par les Membres des Nations Unies, a affirmé M. Kamal. Or, comme l'a reconnu le Secrétaire général ce point constitue un problème récurrent. Les normes sont violées tout particulièrement dans les zones de conflit interne où des sociétés entières sont mobilisées à des fins de guerre, y compris des groupes armés, des milices, des mercenaires venant de l'étranger, des enfants soldats, des criminels ou d'autres groupes désespérés. Le Pakistan estime que des efforts concertés devraient être déployés pour faire prendre conscience de la responsabilité des autorités gouvernementales en cas de violations des normes du droit humanitaire. C'est pourquoi, il se réjouit de l'établissement d'une Cour pénale internationale ayant compétence en matière de génocides, de crimes contre l'humanité, de crimes de guerre et d'agressions criminelles.

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Le Pakistan est convaincu que les réfugiés, les personnes déplacées et autres victimes doivent se voir accorder aide et protection. C'est pourquoi, il fournit un abri aux quelques 1,5 million de réfugiés afghans qui se trouvent sur son territoire. Malheureusement l'aide de la communauté internationale en leur faveur ne cesse de diminuer, à tel point qu'ils semblent avoir été totalement abandonnés de tous, a fait remarquer le représentant. Il faut également d'entreprendre une analyse détaillée des raisons expliquant la résistance croissante opposée par certaines sociétés à l'accès des organisations humanitaires aux zones en conflit. La question de l'application d'une politique de deux poids, deux mesures visant à faciliter l'accès de l'aide humanitaire s'est également fait jour et la délégation du Pakistan estime qu'il devrait y avoir un traitement uniforme de l'aide, ignorant toute caste, couleur de peau ou religion.

De janvier 1992 à août 1998, 153 fonctionnaires des Nations Unies ont trouvé la mort dans l'exercice de leurs fonctions et il convient d'examiner cette question de manière prioritaire, a poursuivi M. Kamal, ajoutant qu'il faudrait avant tout se pencher sur les raisons de l'atmosphère ambiante de défiance envers le personnel de l'ONU. Le Conseil de sécurité doit continuer de jouer son rôle dans la dynamique complexe des conflits qui émaillent la planète, mais il doit prendre garde à ne pas adopter une attitude discriminatoire ou sélective.

M. HAZAIRIN POHAN (Indonésie) a souligné l'importance pour la communauté internationale de s'intéresser à la question de la protection de l'assistance humanitaire, en particulier à une époque où les réfugiés et le personnel humanitaire risquent de plus en plus leur vie en situation de conflits. L'Indonésie se félicite du rapport du Secrétaire général qui, à son avis, explore de manière satisfaisante tous les aspects de la question. Pour l'Indonésie, l'ONU doit jouer un rôle plus important dans la coordination de l'assistance humanitaire qui doit être fondée sur les résolutions pertinentes de l'Assemblée générale. Les réfugiés et les personnes déplacés ainsi que les autres civils ont un droit inaliénable à l'assistance humanitaire. Il s'agit d'une tâche difficile mais sacrée. L'acheminement de l'assistance humanitaire doit se faire conformément aux principes d'humanité, de neutralité et d'impartialité. La neutralité doit signifier le refus de prendre part aux conflits et l'impartialité, la fourniture d'une assistance aux particuliers quelle que soit l'affiliation politique des personnes. L'action humanitaire doit rester distincte des actions politiques et militaires. Les relations entre le maintien de la paix et l'action humanitaire sont complémentaires mais complexes. Il faut maintenir cette distinction comme l'ont souligné le Mouvement des non alignés et les organisations humanitaires elles-mêmes. Le Conseil doit adopter des mesures pour protéger l'assistance humanitaire mais aussi des dispositions pour préserver son impartialité. L'action humanitaire doit se faire dans le respect des lois nationales des pays et il est essentiel de respecter les principes de l'indépendance et de l'intégrité territoriale des pays.

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M. OLE PETER KOLBY (Norvège) s'est associé pleinement à la déclaration de l'Union européenne. Il a mis l'accent sur la nécessité de garantir une certaine cohérence et coordination entre l'action humanitaire et les activités de paix et de développement des Nations Unies. Fournir aide et protection aux réfugiés et aux personnes déplacées suppose souvent de travailler dans les zones de conflit, a fait remarquer le représentant. C'est pourquoi l'aide humanitaire devrait toujours être un élément d'un effort international plus large visant à rechercher des solutions politiques et pacifiques au conflit. Si l'on veut améliorer la situation actuelle, il est important que les personnes responsables de violations du droit international, y compris le droit humanitaire international, soient traduites en justice. A cet égard, la Cour pénale internationale devrait être en mesure de garantir la responsabilité à la fois des Etats, des acteurs non gouvernementaux et des individus. M. Kolby a encouragé tous les Etats à signer et à ratifier le Statut portant création de la Cour ainsi que les autres instruments internationaux pertinents.

Le représentant a ensuite estimé que les problèmes qui ont un effet négatif sur la sécurité des travailleurs humanitaires pourraient être abordés dans le contexte d'une stratégie humanitaire globale qui inclurait des mesures de prévention, fondées sur le droit humanitaire international, en offrant notamment une formation à la démocratie et aux droits de l'homme. Parallèlement des sanctions sévères doivent être prises contre les parties qui attaquent de manière délibérée les civils membres du personnel des Nations Unies ou des organisations humanitaires. Pour sa part, la Norvège a déjà versé 100 000 dollars au Fonds d'affectation spéciale pour la sécurité du personnel des Nations Unies créé récemment, afin de soutenir la formation du personnel et l'amélioration des politiques de sécurité. Elle encourage d'autres Etats Membres à financer ce fonds.

M. STEPHEN LEWIS, Directeur général adjoint de l'UNICEF, a réitéré l'importance qu'il y a à faire des enfants une question distincte et prioritaire dans les activités de promotion de la paix, de mise en oeuvre des accords de paix et de règlement des conflits. Il faut faire en sorte que tout accord de paix comprenne une référence spécifique à la démobilisation et à la réinsertion des enfants soldats dans la société et que les besoins et les droits des enfants soient systématiquement inclus dans les mandats liés à de telles actions. Il faut également réduire la circulation des armes de petit calibre et des armes légères qui transforment les enfants en miniatures de militaires. Il faut aussi former le personnel civil, militaire et de maintien de la paix, à ses responsabilités juridiques vis-à-vis des enfants et lancer un défi à l'obscénité de l'impunité par la saisine de la Cour pénale internationale. En ce qui concerne la question des enfants soldats, il faut souligner sans équivoques que tant que l'âge de 18 ans ne sera pas reconnu universellement comme l'âge minimum de recrutement, soit par l'adoption d'un protocole additionnel ou d'un amendement à la Convention sur les droits de l'enfant, il y aura, dans tous les conflits sordides, cette violation du droit qui consiste à enrôler les enfants. Lorsque la communauté internationale tergiverse sur l'âge minimum d'enrôlement, elle envoie un message ambigu aux prédateurs militaires qui hantent les zones de conflits à la recherche d'enfants à abuser, à séduire ou à enrôler.

( suivre)

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S'agissant de la protection du personnel humanitaire, au cours des quatre dernières années, l'UNICEF a perdu 14 personnes et au cours des deux dernières années seulement, 25 autres ont été blessés principalement par des coups de feu. L'UNICEF a également du faire face à des cas de viols comme ce fut le cas à Goma, le 12 mai 1997. L'appel lancé par le Secrétaire général pour augmenter les ressources destinées à la protection de l'assistance humanitaire n'est donc pas superflu il touche au coeur même du problème. Concernant le respect du droit international humanitaire et des droits de l'homme, l'UNICEF rappelle l'unanimité qui a prévalu lors de l'adoption de la Convention sur les droits de l'enfant. En la ratifiant, les 191 Etats ont admis le caractère contraignant des dispositions de droit international contenues dans la Convention. Cette Convention est le seul instrument des droits de l'homme qui incorpore explicitement le droit humanitaire international. Les deux types de droits sont en effet réunis dans les articles de la Convention. Si cette fusion des droits de l'homme et du droit humanitaire international était reconnue et utilisée en faveur des enfants dans les situations de conflits, nous aurions une expression concrète des causes que le Conseil de sécurité a épousé, a conclu le représentant de l'UNICEF.

Mme SYLVIE JUNOD, Comité international de la Croix-Rouge, a estimé que les environnements violents et volatiles dans lesquels les réfugiés, les personnes déplacées et les autres victimes des conflits se retrouvent et dans lesquels les organisations humanitaires sont censées travailler constituent la part particulièrement préoccupante des tragédies des dernières années. C'est en effet dans ces environnements nouveaux que le personnel humanitaire se voit délibérément pris comme cible. Les intérêts économiques ainsi que les éléments criminels impliqués dans le trafic des drogues et celui des armes entrent souvent en jeu dans les conflits actuels. Ces bandits et ces groupes armés savent à juste titre que le matériel des organisations humanitaires n'est pas protégé et qu'aucune action ne suivra leur vol. Les organisations humanitaires deviennent donc, dans ce contexte, des cibles faciles.

Par ailleurs, l'action humanitaire se voit de plus en plus politisée. L'action humanitaire cache en quelque sorte le manque de volonté des gouvernements de prendre les risques liés au règlement des causes originelles des conflits. Toutefois, l'action humanitaire ne peut aucun cas se substituer au règlement politique. D'autre part, les civils continuent de constituer la principale cible des conflits armées. Partant, la protection et le respect des droits de la population civile ainsi que la promotion de la culture de la responsabilité par opposition à la culture de l'impunité représentent aujourd'hui les principaux défis. Lorsque le but des belligérants est d'annihiler un groupe ethnique ou de le retirer, de manière permanente, d'un territoire donné, le personnel humanitaire devient un témoin embarrassant et l'action humanitaire peut ainsi être perçue comme allant à l'encontre des objectifs des parties. De même, dans certaines parties du monde, l'action humanitaire est associée à l'"ouest" et considérée comme le véhicule des prétendues valeurs occidentales.

( suivre)

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Face à ces problèmes, le CICR s'est fermement engagé à travailler par le biais de réseaux et de contacts locaux et à renforcer sa capacité à comprendre les conflits actuels en analysant leurs aspects politiques, sociaux et économiques, de façon, à adapter ses opérations. Le CICR entend également promouvoir, parmi les organisations humanitaires, une approche commune et estime qu'il convient particulièrement de poursuivre la promotion du Code de conduite pour le Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant- Rouge et pour les organisations non gouvernementales lors des opérations de secours en cas de catastrophes. Le CICR juge également utile d'instaurer une relation équilibrée entre les organisations humanitaires et les médias.

Il faut souligner que la condition préalable à toute opération humanitaire impliquant une assistance ou une protection humanitaire est le consentement des parties au conflit. L'action humanitaire ne doit jamais être imposée par la force. La persuasion et la discussion pour négocier l'accès de l'action humanitaire conformément aux principes fondamentaux de neutralité et d'impartialité doivent prévaloir. Les organisations humanitaires doivent préserver leur caractère strictement apolitique et impartial, caractère qui peut être compromis par la présence d'escortes armées. Il faut faire en sorte que l'action humanitaire ne devienne pas l'instrument principal des politiques étrangères. Toute présence militaire doit être doté d'un mandat précis et ne pas devenir un simple pourvoyeur de l'assistance humanitaire. La responsabilité première de la mise en oeuvre des normes internationales incombe aux Etats et il faut, une nouvelle fois, souligner que la lutte contre la culture de l'impunité représente un facteur clé de la prévention de futures violations.

M. KOFI ASOMANI, Directeur du bureau de liaison du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés au siège des Nations Unies, a déclaré qu'il souhaitait revenir sur certaines questions soulevées par le rapport du Secrétaire général. Tout d'abord, le besoin de renforcer le respect par les protagonistes - qu'ils s'agisse ou non d'Etats - du droit international. Ce problème s'est fait ressentir plus fortement ces dernières années en raison du changement de la nature des conflits. Le déplacement forcé de civils est maintenant un objectif direct, plutôt qu'un produit secondaire de la guerre. De nombreux conflits sont devenus particulièrement complexes et violents en raison de l'implication de milices, criminels et autres groupes qui n'ont qu'une connaissance et un respect très limité du droit international. Un autre problème résulte de l'absence de justice envers ceux qui violent la loi; c'est ce que l'on appelle maintenant les cultures de l'impunité. Cela a été particulièrement évident dans la région des Grands lacs en Afrique, et plus récemment au Kosovo. Par conséquent, le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) soutient les recommandations du Secrétaire général concernant la promotion des instruments du droit international et la propagation des mécanismes visant à respecter le droit international. Cette question sera au centre des débats de la réunion du Comité exécutif du HCR, cette année, qui commence lundi prochain.

( suivre)

- 24 - CS/976 29 septembre 1998

Autre problème : celui de l'accès humanitaire qui a été empêché ces dernières années à cause de l'insécurité générale résultant des conflits ou bien en raison de l'impossibilité ou du refus des parties d'autoriser cet accès, souvent à travers des attaques armées.

Le rapport rappelle que c'est aux Etats d'apporter assistance et protection aux réfugiés, aux personnes déplacées à l'intérieur des pays et autres civils victimes d'un conflit, et de laisser aux personnels des Nations Unies et des autres organisations humanitaires libre accès à ces personnes. Des mécanismes prévisibles devraient être mis en place pour assurer la sécurité et l'accès aux opérations humanitaires. Il faudrait en particulier s'assurer que les camps de réfugiés se situent à une distance raisonnable des frontières internationales, que les combattants armés soient séparés des réfugiés et autres civils et que l'on surveille et réglemente le commerce d'armes dans les zones de conflit.

Troisièmement, nous souhaitons aborder la question de la sécurité du personnel des Nations Unies et des autres organisations humanitaires. Les protagonistes des conflits empêchent les activités humanitaires, considérant qu'elles contrarient leurs objectifs stratégiques. Ils souhaitent enlever les témoins éventuels de leurs abus. Le HCR se félicite de l'amélioration des instruments offerts actuellement par le droit international sur cette question. Le HCR salue les propositions du Secrétaire général concernant les mesures visant à renforcer la sécurité du personnel humanitaire et se félicite de l'adoption des statuts de la Cour pénale internationale. M. Asomani rappelle au Conseil le cas de son collègue français, M. Vincent Cochetel, qui a été enlevé en Ossétie Septentrionale il y a 243 jours. Nous espérons qu'il sera bientôt libéré.

Le HCR souhaite aussi revenir sur le rôle du Conseil de sécurité dans les opérations humanitaires. Il est essentiel que le Conseil soit tenu régulièrement informé de la situation humanitaire en cas de conflit potentiel ou déclaré, et de s'assurer que des activités humanitaires ne sont pas séparées du contexte social, politique et économique, et qu'une action rapide et adéquate est déclenchée. Le HCR insiste enfin sur la question des moyens fournis pour mettre en oeuvre ces mesures de protection. En Guinée par exemple, il faut établir les camps de réfugiés sierra léonais à une distance raisonnable de la frontière afin de prévenir le danger d'infiltration d'éléments armés indésirables dans ces camps. Or, nous nous demandons si cela ne va pas coûter trop cher et, en attendant, les conditions de sécurité se détériorent gravement.

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