En cours au Siège de l'ONU

SG/SM/6716

RAPPORT DU SECRETAIRE GENERAL A LA DEUXIEME REUNION MINISTERIELLE DU CONSEIL DE SECURITE SUR LA SITUATION EN AFRIQUE

25 septembre 1998


Communiqué de Presse
SG/SM/6716
SC/6579


RAPPORT DU SECRETAIRE GENERAL A LA DEUXIEME REUNION MINISTERIELLE DU CONSEIL DE SECURITE SUR LA SITUATION EN AFRIQUE

19980925 À l'occasion de la deuxième Réunion ministérielle du Conseil de sécurité sur la situation en Afrique, le 24 septembre, le Secrétaire général a prononcé l'allocution suivante :

Je suis très heureux d'être des vôtres à l'occasion de la deuxième Réunion ministérielle du Conseil de sécurité sur la situation en Afrique. Si cette réunion a lieu, c'est parce que nous sommes déterminés à contribuer à la paix et à la prospérité en Afrique. Je vois là une manifestation concrète de la volonté politique que j'ai appelée de mes voeux dans mon rapport d'avril dernier — volonté politique sans laquelle nos efforts ne sauraient aboutir, ni en Afrique ni ailleurs.

Tout au long des six derniers mois, et tout récemment au Sommet du Mouvement des pays non alignés, certains dirigeants africains ont pris l'engagement d'aider à mettre en oeuvre les recommandations contenues dans ce rapport. Fait plus important encore, des hommes et des femmes ordinaires de tous les coins de l'Afrique ont entendu dans la voix de leurs Nations Unies l'écho des réalités qu'ils vivent au jour le jour. N'oublions jamais que c'est pour eux — les peuples africains — que nous devons avoir des idées percutantes qui influent sur le cours des choses.

Dans mon rapport, j'ai cherché à contribuer au progrès de l'Afrique de deux façons différentes mais connexes : premièrement, en offrant aux peuples d'Afrique l'hommage de la vérité — c'est-à-dire en décrivant honnêtement et franchement au reste du monde leurs problèmes et leurs aspirations; deuxièmement, en proposant à ces problèmes des solutions réalistes sous forme de recommandations.

Je me félicite donc du sérieux et de l'esprit constructif dont le Conseil a fait preuve, par l'intermédiaire de son groupe de travail ad hoc, lorsqu'il a entrepris de donner suite aux recommandations contenues dans le rapport. Voilà un bon début.

- 2 - SG/SM/6716 AFR/100 SC/6579 25 septembre 1008

Après la parution du rapport en avril, vous avez demandé au Secrétariat de réfléchir aux mesures concrètes qu'il pourrait prendre, ainsi que certains organismes des Nations Unies.

Je peux vous dire aujourd'hui que le Secrétariat de l'ONU s'emploie énergiquement à donner au rapport une expression concrète et que j'ai prié la Vice-Secrétaire générale de suivre l'application des recommandations qu'il contient. Mais nous nous sommes attelés à la tâche avant même d'avoir mis la dernière main à notre plan.

En juillet, nous avons organisé deux conférences internationales, l'une sur la Guinée, l'autre sur la Sierra Leone, afin de mettre les pleins feux sur les efforts que déploient ces deux pays en vue de rétablir ou de renforcer la paix et la stabilité, et de les aider dans cette tâche. Nous avons également présenté au Conseil des propositions spécifiques concernant la création d'un dispositif international qui permettrait d'aider les pays d'asile à maintenir la sécurité et la neutralité dans les camps de réfugiés. Et nous avons commencé à débattre de la nécessité de mettre fin aux transferts illicites d'armes à destination ou en provenance de l'Afrique.

Pour sa part, le Conseil s'est montré fermement attaché aux objectifs du rapport — et au principe d'une paix durable en Afrique. Premièrement, en créant des groupes de travail actifs et en adoptant des résolutions très importantes sur la base des recommandations figurant dans le rapport. Deuxièmement, en autorisant deux nouvelles opérations de paix, l'une en République centrafricaine, l'autre en Sierra Leone.

J'ai également le plaisir de vous annoncer que l'Assemblée générale examinera mon rapport en octobre, et j'attends avec impatience les conclusions de la session d'automne du CAC, laquelle portera essentiellement sur les aspects interorganisations de ce document.

Dans mon rapport, j'ai insisté sur le fait que tout effort visant à rétablir la paix devait être assorti de mesures de lutte contre la pauvreté en Afrique. Plus précisément, j'ai recommandé que l'on stimule l'investissement et la croissance économique, que l'on garantisse un niveau d'aide internationale suffisant, que l'on réduise le fardeau de la dette et que l'on ouvre les marchés internationaux aux pays africains. Voilà des objectifs sur lesquels nous pouvons tous nous mettre d'accord. Nous pouvons également tous nous mettre d'accord sur le fait qu'ils sont loin d'être atteints.

Hier, j'ai convoqué une réunion officieuse des Ministres des affaires étrangères des pays du Comité d'aide au développement afin de dégager cinq domaines prioritaires sur lesquels cibler les efforts visant à résoudre les problèmes économiques de l'Afrique. Il s'agit, premièrement, d'augmenter le

- 3 - SG/SM/6716 AFR/100 SC/6579 25 septembre 1998

volume de l'aide publique au développement et d'en améliorer la qualité; deuxièmement, d'envisager de convertir en dons tout le reliquat de la dette officielle bilatérale des pays d'Afrique les plus pauvres; troisièmement, d'élargir l'accès à l'initiative relative aux pays pauvres très endettés; quatrièmement, de faciliter les conditions d'accès pour les exportations africaines; et, cinquièmement, d'encourager les investissements en Afrique, ce continent s'étant dans une large mesure retrouvé en marge du processus de mondialisation.

Je suis heureux de pouvoir dire que tous les gouvernements représentés ont réaffirmé leur appui aux recommandations figurant dans le rapport et, en particulier, aux cinq domaines prioritaires que je viens d'indiquer.

Parallèlement, ils ont insisté sur la nécessité, pour les pays d'Afrique, de créer un environnement propice à l'investissement et à la croissance économique. La réciprocité est de rigueur. En effet, on ne peut demander à personne d'investir dans des zones instables ou peu sûres.

Si nous reconnaissons aujourd'hui que paix et prospérité sont à rechercher simultanément, avec la même urgence et la même ténacité, force nous est de reconnaître aussi que la notion de sécurité doit s'entendre au sens large. C'est pourquoi, de plus en plus, l'ONU conçoit toutes les activités de consolidation de la paix de façon globale et intégrée. Nous avons appris que l'assistance électorale devait faire partie du processus de démocratisation; que garantir les droits de l'homme revenait à garantir une véritable liberté politique; et que le développement politique allait de pair avec le développement économique. Aujourd'hui, nous tirons les leçons pratiques de ces enseignements.

Récemment, la situation a évolué de façon encourageante dans un certain nombre de pays d'Afrique qui tentent d'échapper à un conflit ou de passer d'un régime dictatorial à un régime démocratique. À ce propos, je forme le voeu que les dirigeants nigérians continuent sur la voie de la bonne gouvernance et de l'État de droit — en renforçant les institutions démocratiques et en organisant des élections libres et régulières en février, de façon que l'autorité civile soit rétablie dès la fin de mai 1999.

Malheureusement, au cours des derniers mois, le recours aux armes semble avoir été davantage la règle que l'exception. En fait, au cours des six mois qui se sont écoulés depuis la parution de mon rapport, nous avons enregistré des hostilités entre l'Éthiopie et l'Érythrée, en République démocratique du Congo et en Guinée-Bissau, en Angola et en Sierra Leone, alors que la crise humanitaire semble s'aggraver de jour en jour en Somalie et au Soudan.

- 4 - SG/SM/6716 AFR/100 SC/6579 25 septembre 1998

En partenariat avec l'OUA, l'ONU contribue activement à chercher à dénouer chacune de ces crises et à atténuer la souffrance de populations civiles innocentes. Mais, de manière plus générale, nous ne pouvons rien faire d'autre que d'en appeler à la sagesse des dirigeants, lesquels ont le devoir de faire passer l'intérêt de leur peuple avant le leur propre.

Si les parties elles-mêmes ne sont pas résolues à trouver une solution politique, il y a bien peu que nous puissions faire, si ce n'est offrir une aide humanitaire, souvent au prix des plus grandes difficultés et en courant les plus grands risques. Nous n'avons pas les moyens d'imposer la paix que les populations appellent de tous leurs voeux et qu'elles méritent tant.

Que faudra-t-il donc pour que les dirigeants africains renoncent enfin à chercher une solution militaire à leurs problèmes politiques? Quand comprendront-ils que pas un conflit ne prendra fin — pas un seul — en l'absence de compromis, de tolérance et de règlement pacifique? Quand viendra le temps où nous pourrons tous dire que nous avons fait de notre mieux pour l'Afrique — que ses dirigeants se sont réunis pour résoudre pacifiquement leurs différends et que nous, les membres de la communauté internationale, nous avons fait ce que nous pouvions pour aider à garantir une paix et un développement durables?

Permettez-moi de suggérer à ces dirigeants — et à nous tous — de regarder Nelson Mandela; d'écouter les derniers mots de l'ultime discours qu'il a prononcé à la tribune des Nations Unies en sa qualité de Président de l'Afrique du Sud; et d'essayer d'être à la hauteur du grand espoir qu'il forme pour le continent africain :

"L'espoir que surgira un groupe de dirigeants qui ne permettra pas que quiconque soit privé de sa liberté — comme nous l'avons été; que quiconque soit réduit au statut de réfugié — comme nous l'avons été; que quiconque soit condamné à connaître la faim — comme nous l'avons été; que quiconque soit privé de sa dignité d'homme — comme nous l'avons été."

Contre vents et marées, le Président Mandela a atteint le but qu'il s'était fixé pour son pays et pour son peuple. Que son succès soit une source d'inspiration pour nous tous.

Je vous remercie.

* *** *

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.