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GA/SM/61

LE PRÉSIDENT DE L'ASSEMBLÉE GÉNÉRALE SOULIGNE L'OPPORTUNITÉ D'UN DIALOGUE DE HAUT NIVEAU SUR LES EFFETS ÉCONOMIQUES ET SOCIAUX DE LA MONDIALISATION

23 septembre 1998


Communiqué de Presse
GA/SM/61


LE PRÉSIDENT DE L'ASSEMBLÉE GÉNÉRALE SOULIGNE L'OPPORTUNITÉ D'UN DIALOGUE DE HAUT NIVEAU SUR LES EFFETS ÉCONOMIQUES ET SOCIAUX DE LA MONDIALISATION

19980923 On trouvera ci-après le texte, établi à partir de l'espagnol, de l'intervention prononcée le 17 septembre par le Président de l'Assemblée générale, Didier Opertti (Uruguay), à l'occasion du dialogue de haut niveau consacré aux effets sociaux et économiques de la mondialisation et de l'interdépendance ainsi qu'à leurs incidences sur le plan des politiques :

L'Assemblée générale va examiner aujourd'hui une question qui préoccupe les dirigeants et les responsables de l'élaboration des politiques du monde entier. Les faits récents ont montré que la mondialisation et ses conséquences touchent tous les pays. Les forces de l'intégration mondiale et notre action, ou notre inaction, face à elles, influenceront le monde du XXIe siècle. Notre Assemblée, qui est en quelque sorte un parlement mondial, se doit tout particulièrement de tenir compte de tous et de veiller à ce que le dialogue international sur cette question critique soit réellement universel.

Chaque jour, nous entendons des rapports inquiétants sur la situation des différents marchés financiers.

L'instabilité des marchés boursiers reflète, dans les différents pays, les effets particuliers et dramatiquement tangibles d'une crise qui résulte de la combinaison de nombreux facteurs — certains internes, propres à tel ou tel État, d'autres externes.

Certains de ces facteurs sont le résultat de décisions prises par les autorités compétentes, d'autres de mesures prises par des acteurs du marché qui, dans la plupart des cas, ne sont pas tenus à certaines règles de prudence uniformément applicables.

La mondialisation du marché, dont on estime généralement qu'elle a rendu possible une amélioration de l'économie mondiale, fait apparaître néanmoins des effets négatifs, dont certains demeurent localisés, mais dont presque tous ont eu des répercussions d'importance variable — mais toujours sensible — qui dépassent largement les frontières des États.

- 2 - GA/SM/61 23 septembre 1998

Qu'il nous suffise ici de rappeler "l'effet tequila" ou la crise en Asie du Sud-Est.

Le premier — rappelons-le brièvement — a entraîné l'intervention directe d'institutions financières internationales telles que le Fonds monétaire international, la Banque mondiale et la Banque interaméricaine de développement, qui toutes ont apporté une assistance en sus de celle de pays compatissants.

Quant à la crise d'Asie du Sud-Est, qui avait été considérée initialement comme un phénomène de courte durée, elle n'est pas encore surmontée; ce qui a débuté comme un problème national est devenu un problème régional, puis a pris des dimensions internationales dont les effets, et même l'issue, demeurent difficiles à prévoir.

La crise ne se limite naturellement pas aux marchés financiers, mais atteint l'ensemble de l'économie : elle a des effets négatifs sur l'investissement, impose des pressions aux réserves des banques centrales, engendre une contraction des échanges, crée du chômage, exacerbe les problèmes sociaux qui en résultent et influence à des degrés divers la pensée politique dans les États affectés.

L'économie des grands États elle-même n'échappe pas à cette onde de choc ou à ce qu'on appelle souvent un phénomène de contagion.

Ceci est dans une certaine mesure logique et n'a rien de surprenant dans un monde où le marché a subi une véritable transformation et ne connaît plus désormais que les limites de la libre concurrence, et où le mouvement sans restriction des actifs et des valeurs est devenu la règle.

Si l'on ajoute à cela que, dans bien des cas, les pays concernés ont poursuivi à grand peine des politiques anti-inflationnistes d'ajustement, il devient clair que la solution de ce problème financier et économique n'est pas à la portée d'économies agissant isolément.

Cela ressort à l'évidence des mesures adoptées récemment par le Groupe des Sept ainsi que des dispositions prises par le Gouvernement des États-Unis pour apporter son aide financière.

Conformément à la décision des ministres des finances de la région qui se sont réunis à Washington il y a deux semaines, le Groupe de Rio, à son sommet le plus récent, tenu à Panama, a appelé l'attention sur cette question et invité les organismes compétents à y apporter une réponse appropriée.

Nous avons jusqu'ici été témoins de réactions spontanées ou institutionnelles émanant de groupes particuliers de pays ou d'organismes agissant dans le cadre de leur mandat.

- 3 - GA/SM/61 23 septembre 1998

Il est, en tout état de cause, devenu évident que le système financier international n'a pas été en mesure d'éviter la crise actuelle, que l'Organisation des Nations Unies et les autres mécanismes internationaux de coopération n'ont pas pu agir sur les causes du problème avec l'efficacité voulue et, en fin de compte, que le dispositif institutionnel de Bretton Woods n'a pas été à même de contrer ces effets négatifs, qui, à l'échelon international, ne sont pas le résultat de la mondialisation mais y sont étroitement associés.

Ce n'est donc pas le moment de se répandre en lamentations, ou, pire encore, de compter que chacun fera de son côté le nécessaire.

À notre avis, il ne s'agit pas de débattre de la mondialisation d'un point de vue théorique ou doctrinaire.

La question pourrait faire le thème d'un débat académique, un tel débat étant toujours le bienvenu.

Cependant, il est évident que cela ne nous aiderait pas réellement dans la situation actuelle, où il nous faut, en collaboration, concevoir et adopter des mesures systématiques concertées, qui sont plus que jamais nécessaires.

Le présent dialogue est donc tout à fait opportun.

Peut-être fera-t-il germer des idées nouvelles quant au rôle des programmes des Nations Unies — Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et autres institutions telles que le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), le Fonds international de développement agricole (FIDA) et d'autres encore — et quant à la nécessité d'accorder à ces organismes l'attention et les ressources voulues pour leur permettre de contribuer efficacement à la mise en place et au développement d'un "milieu international favorisant l'auto-assistance", domaine auquel l'ONU a assigné une importance particulière et qui offre aujourd'hui des perspectives plus vastes dans le cadre du principe d'universalité.

Le présent dialogue peut également aboutir à des suggestions et à des recommandations sur l'orientation des activités futures de l'Organisation dans ce domaine.

Plus importante encore est toutefois la nécessité de mettre en place de nouveaux mécanismes institutionnels capables de prévision et, le cas échéant, de prévention, grâce à des instruments efficaces de suivi et d'évaluation des transactions internationales : gagnant en importance et en complexité, ces dernières requièrent, comme la circulation urbaine de nouveaux systèmes de signalisation, y compris des feux et signaux d'avertissement, et, dans certains cas extrêmes, des feux rouges, comme l'a fort bien souligné un analyste international distingué.

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Pour éviter des situations telles que celles dont souffre actuellement l'économie internationale, il ne suffira pas que les pays fassent preuve de discipline financière et monétaire.

Il nous faudra envisager les ajustements à apporter aux mécanismes institutionnels de l'après-guerre, entreprise qui ne peut être menée à bien sans l'Organisation des Nations Unies et sans la participation active de tous ses États Membres. De par son accessibilité et son universalité et du fait des responsabilités qui lui incombent pour assurer le bon ordre des relations politiques, économiques et sociales internationales, l'ONU est éminemment qualifiée pour une telle tâche.

De toute évidence, la nécessité d'élaborer de nouvelles procédures et de concevoir de meilleurs instruments pour promouvoir le fonctionnement du système financier international ne diffère pas fondamentalement de l'esprit de réforme et de modernisation qui guide les travaux entrepris actuellement pour réorganiser le Conseil de sécurité de l'ONU.

J'espère sincèrement qu'à l'issue de la présente réunion, chacun des participants aura le sentiment que nous sommes capables, à nous tous, d'apporter des solutions cohérentes aux problèmes liés à la dynamique que nous imposent les événements, sans pour autant sacrifier les valeurs et les principes fondamentaux de notre Organisation.

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