En cours au Siège de l'ONU

NGO/310

LES NORMES EN MATIÈRE DE DROITS DE L'HOMME ONT UN CARACTÈRE ABSOLU MAIS LEUR APPLICATION SOUFFRE D'UNE CERTAINE SELECTIVITE

16 septembre 1998


Communiqué de Presse
NGO/310
PI/1083


LES NORMES EN MATIÈRE DE DROITS DE L'HOMME ONT UN CARACTÈRE ABSOLU MAIS LEUR APPLICATION SOUFFRE D'UNE CERTAINE SELECTIVITE

19980916 L'influence indéniable des médias ne doit pas faire oublier que c'est la volonté politique qui prime pour mettre un terme aux violations

La cinquante et unième Conférence annuelle des Organisations non gouvernementales et du Département de l'information a entamé ce matin sa troisième et dernière journée de travaux, placée sous le signe "des droits de l'homme et la paix". Dans ce cadre, les participants ont tenu deux tables rondes consacrées au rôle de la communauté internationale dans la prévention des conflits et des violations des droits de l'homme et au rôle de la communauté internationale dans la protection des droits de l'homme.

Au cours de la première table ronde, animée par M. Peter Weiss, Vice- Président du Centre des droits constitutionnels, les participants se sont accordés pour reconnaître que les normes en matière de droits de l'homme ont bien un caractère absolu, mais que leur application souffre d'une certaine relativité, voire sélectivité. Ainsi le Représentant spécial du Secrétaire général pour les enfants et les conflits armés, M. Olara Otunnu, a estimé que la disparité avec laquelle les ressources sont réparties entre les groupes sociaux, ethniques ou religieux est l'un des facteurs d'abus des droits de l'homme dans de trop nombreux pays. C'est pourquoi, il est indispensable de chercher à éliminer les facteurs qui peuvent générer les conflits. Pour ce faire, il faut garantir que l'on ne mène pas une politique de deux poids deux mesures. Abondant dans ce sens, le Représentant permanent de la Bosnie- Herzégovine auprès des Nations Unies, M. Muhamed Sacirbey, a estimé que plus que les lois elles-mêmes, c'est leur mise en oeuvre qui fait preuve de lacunes et il en a pris pour preuve le fonctionnement du Tribunal international pour l'ex-Yougoslavie, qui demeure obligé de faire des choix politiques pour effectuer ses mises en accusation, sous prétexte que certaines personnes ne peuvent y être traduites parce qu'elles sont utiles politiquement. Il s'est inquiété également que l'Organisation semble accepter trop facilement d'être bouc émissaire et qu'elle prête parfois le flanc aux critiques en divulguant de manière trop sélective les informations en sa possession. Poursuivant sur la question de l'information, Mme Joëlle Tanguy, Directrice exécutive de Médecins sans frontières, a précisé que le personnel humanitaire ne doit pas seulement offrir des soins médicaux mais également informer les médias des

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crises dont il est témoin. Elle a évoqué la question de la dépendance vis-à- vis des médias qui attirent ou non l'attention du public sur une crise humanitaire. Pour Mme Lucia Newman, Directrice du bureau de CNN à La Havane, c'est la volonté politique qui est vitale. Certes les médias ont une influence, mais elle n'est pas aussi décisive que l'on voudrait bien le faire croire. Il est clair en revanche que lorsque les médias se taisent quand des violations sont commises, ils contribuent à leur poursuite.

Pour ce qui est du rôle de la communauté internationale dans la protection des droits de l'homme, les participants ont rappelé que si la responsabilité première du respect des droits de l'homme relève des gouvernements et des populations, il n'en demeure pas moins nécessaire de renforcer la coopération internationale à tous les niveaux. A cet égard, M. Carlos Enrique Garcia Gonzalez, Représentant du El Salvador, a estimé que les Nations Unies ont une responsabilité particulière quant à la vérification des engagements pris lors de la résolution d'un conflit pour la garantie des droits de l'homme, facteur clef d'une réconciliation et d'une reconstruction durables. Le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires des Nations Unies, M. Sergio Vieira de Mello, a déclaré que la perspective humanitaire devrait être partie intégrante de l'approche des droits de l'homme, étant donné la distinction de plus en plus faible qui existe entre les deux domaines. La transition de la paix à la guerre est la période idéale pour faire prendre conscience de l'importance des droits de l'homme à tous les niveaux et les ONG ont un rôle essentiel à jouer à cette occasion.

Cette deuxième table ronde a également rassemblé sous la direction de M. Gerhard Mueller, Professeur, School of Criminal Justice, Rutgers University : M. Robert Schwartz, Administrateur des économistes unis pour la réduction des armes et Mme Ilene Cohn du Human Rights Programme de Harvard Law School.

Cet après-midi, à partir de 15 heures, la Conférence tiendra une table ronde sur l'enseignement des droits de l'homme, puis elle procédera à sa séance de clôture, à laquelle devraient participer notamment Mmes Graça Machel et Danielle Mitterrand.

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LES DROITS DE L'HOMME ET LA PAIX

ROLE DE LA COMMUNAUTE INTERNATIONALE DANS LA PREVENTION DES CONFLITS ET DES VIOLATIONS DES DROITS DE L'HOMME

Présentations

Mme LUCIA NEWMAN, Chef du bureau de CNN à la Havane, s'est particulièrement penchée sur le rôle joué ou potentiel des médias dans la prévention des conflits ou des violations des droits de l'homme. Evoquant l'assassinat, à la fin des années 70, du correspondant de la chaîne télévisée ABC, Bill Stuart, par un garde du Président Somoza au Nicaragua, dont les images ont fait le tour de la planète, elle a fait observer que cet événement a joué un rôle capital dans le changement de la politique des Etats-Unis envers ce pays. Si le rôle des médias dans ce cas précis a été déterminant, elle a estimé qu'en fin de compte c'est la volonté politique qui a prévalu, les médias n'ayant en l'occurrence qu'accéléré le processus. C'est la volonté politique qui est vitale, a-t-elle insisté.

Dans le cas du conflit du Chiapas au Mexique en revanche, la présence sur place de nombreux journalistes dès le début des affrontements a contribué à empêcher un écrasement total de la rébellion par les militaires, ainsi que l'ont reconnu ensuite plusieurs hauts responsables du gouvernement mexicain. Toutefois là aussi, la couverture des médias est allée de pair avec la volonté politique, puisqu'ensuite des négociations, qui n'ont toujours pas abouti, ont été entamées. Certes les médias ont une influence, mais elle n'est pas aussi décisive que l'on voudrait bien le croire, a estimé Mme Newman. En général, les journalistes transmettent leurs informations de manière responsable qui peut parfois les placer dans une situation difficile, comme c'est le cas de la couverture de presse de l'Intifada ou du conflit en Bosnie. En fait, ce que peuvent faire les médias, c'est montrer ce qu'ils voient et dire ce qu'ils savent. Avec le Rwanda, on a vu qu'ils peuvent générer et propager un sentiment de honte dans le monde entier. Il est clair en revanche que lorsque les médias se taisent quand des violations sont commises, ils contribuent à leur poursuite et Mme Newman en a pris pour preuve le conflit dans le Timor oriental dont la presse ne parle que rarement. Il n'en demeure pas moins que les journalistes doivent rester tout à fait impartiaux et s'en tenir aux faits, montrant les deux parties des faits, ce qui est le seul moyen de les relater. Nous ne pouvons que nous féliciter si leur couverture contribue à la résolution des conflits et à un plus grand respect des droits de l'homme, a conclu Mme Newman.

M. OLARA OTUNNU, Représentant spécial du Secrétaire général pour les enfants et les conflits armés, a souligné le rôle de la communauté internationale pour prévenir les conflits armés et défendre les droits de l'homme. Un des facteurs d'abus des droits de l'homme est certainement que, dans de trop nombreux pays, les ressources sont réparties de façon inéquitable entre les différentes couches sociales et entre les différents groupes sociaux

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et religieux. Il faudrait qu'il y ait une cohérence au niveau national qui reconnaisse la diversité de sa population. M. Otunnu a regretté que, dans certaines situations, le gouvernement devienne l'oppresseur de sa propre population ainsi que l'absence ou la faiblesse des institutions et des processus qui peuvent prévenir les abus des droits de l'homme.

Non seulement il est capital de chercher à prévenir les conflits avant qu'ils n'éclatent mais il est également essentiel de prévenir la reprise de ces conflits en éliminant les facteurs qui peuvent les générer. Il faut faciliter la réconciliation nationale dans les pays émergeant de conflits.

M. Otunnu a estimé que la communauté internationale devait agir plus sérieusement pour ce qui est de la prévention. Il faut éviter l'absence de cohérence et garantir que l'on ne mène pas une politique de deux poids, deux mesures. M. Otunnu a également estimé qu'il ne faut pas favoriser les groupes qui le sont déjà. La solidarité internationale doit servir à renforcer la solidarité nationale.

Le grand défi, en matière de droits de l'homme, n'est pas d'établir de nouvelles normes mais d'assurer la mise en oeuvre et le renforcement des normes existantes aux niveaux national et local. M. Otunnu a déclaré que la communauté internationale disposait de moyens de pression du fait que, dans un monde de plus en plus interdépendant, il est impossible aux pays en conflit de faire abstraction de son opinion. Il s'agit donc bien d'un projet de nature politique. Il a également évoqué la nécessité d'assurer un accès des organismes humanitaires aux populations victimes d'abus de droits de l'homme. Ces organismes apportent l'aide, mais peuvent également jouer un rôle dissuasif important. De même, la presse est un outil qui doit être utilisé.

M. MUHAMED SACIRBEY, Représentant permanent de la Bosnie-Herzégovine auprès des Nations Unies, a fait remarquer qu'il y a deux courants de pensée en ce qui concerne les droits de l'homme, ceux qui d'un côté estiment qu'il s'agit de droits conquis par et pour quelques privilégiés et de l'autre ceux qui pensent, à l'image de Thomas Jefferson, que tous les êtres humains ont des droits inaliénables. Ce ne sont pas tant les lois qui ont des lacunes, mais plutôt la mise en oeuvre de ces lois, a estimé M. Sacirbey. En réalité, il existe une hiérarchie dans le respect des droits de l'homme, visible ou non, qui place certaines personnes à un niveau supérieur à d'autres. Selon cette hiérarchie, si l'on est blanc et si l'on vit en Europe, on a "plus" le droit à ces droits inaliénables. D'un autre côté, plus on est sombre et plus on vit loin de l'Europe, plus il faut se battre pour la reconnaissance de ces droits. Le contre-exemple du Koweït, parfois avancé par certains, n'est pas valide, puisque l'on sait très bien que, si les puissances occidentales sont intervenues, c'est pour des raisons économiques, a-t-il fait observer. Le conflit en Bosnie vérifie également cette règle, et certains diplomates sont même allés jusqu'à reconnaître que s'il s'était agi de chrétiens tués par des musulmans, la réaction des pays européens et occidentaux eut été tout autre.

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Il est regrettable que l'on fasse trop souvent abstraction des travaux de la Cour internationale de justice, a poursuivi M. Sacirbey. Il a expliqué ensuite que le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie a vu le jour grâce aux efforts de diplomates et de militants pour les droits de l'homme, mais même aujourd'hui il demeure obligé de faire des choix politiques pour effectuer ses mises en accusation. On prétend ainsi que certaines personnes ne peuvent y être traduites parce qu'elles sont utiles politiquement. En agissant ainsi, on fait abstraction de la question de la responsabilité institutionnelle, a dénoncé M. Sacirbey avant de rejeter la notion de responsabilité collective car un Serbe n'est pas forcément coupable parce qu'il est serbe. Selon lui, il existe avant tout une responsabilité individuelle et institutionnelle, même si cette dernière ne prend que rarement forme pour être traduite devant les tribunaux. Toujours en ce qui concerne le Tribunal pour l'ex-Yougoslavie, il a déploré que le pouvoir d'obtenir des preuves et de procéder à des arrestations soit limité à quelques personnes.

Pour ce qui est des Nations Unies, M. Sacirbey a affirmé que les Nations Unies n'ont pas subi d'échec en Bosnie, et que l'Organisation a simplement été un bouc émissaire. Ainsi en ce moment, l'ONU n'est pas présente au Kosovo et on constate que les mêmes événements se reproduisent, a-t-il fait remarquer. Il s'est inquiété en revanche, que l'Organisation semble accepter trop facilement d'être un bouc émissaire et qu'elle prête parfois le flanc aux critiques. Ainsi les informations dont l'Organisation est parfois en possession sont dans certains cas et malheureusement divulguées de manière trop sélective. L'ONU devrait aussi rendre des comptes dans le domaine des droits de l'homme, ainsi pour ce qui s'est passé à Srebrenica, a conclu M. Sacirbey.

Mme JOELLE TANGUY, Directrice exécutive de Médecins sans frontières, a précisé que le défi qui se pose au personnel humanitaire n'est pas seulement d'offrir des soins médicaux mais également de négocier l'accès des populations aux secours humanitaires, d'informer les médias des crises dont ils sont témoins et de défendre le droit humanitaire et les droits de l'homme de la population civile. L'action humanitaire nécessite que soient prises en compte les questions politiques, militaires, légales et économiques. L'expérience a prouvé qu'il est nécessaire que la communauté internationale examine trois domaines clés. Il est important de s'interroger sur le manque d'un cadre conceptuel efficace, sur la relativité du droit humanitaire et sur la dynamique ambiguë de ceux qui sont chargés de régler les conflits.

Trois concepts de la paix sont apparus à différents moments au cours des trois derniers siècles : "la paix par le commerce", où les intérêts commerciaux arbitrent les conflits, "la paix par la raison" et la "paix par la loi". Ces trois concepts ont une influence sur le processus de règlement des crises humanitaires. Mme Tanguy a souligné la nécessité d'avoir un cadre conceptuel qui permettrait aux différentes agences et organisations jouant un rôle important dans le domaine de l'aide humanitaire de coordonner leurs

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actions. Il est regrettable que les nobles déclarations d'intention qui figurent dans les textes humanitaires n'arrivent pas à transformer la pratique et la logique des Etats Membres. Les institutions établies par la Charte des Nations Unies et les différentes agences ne doivent pas capituler devant les pressions opérées par les pays donateurs mais doivent au contraire continuer à se battre pour défendre leurs idées afin de pouvoir pleinement remplir leurs mandats respectifs. Médecins sans frontières est une Organisation non gouvernementale qui essaie de travailler de façon indépendante et de ne pas modifier ses activités en fonction de l'opinion publique. Pourtant, l'on ne peut s'empêcher de se demander si, malgré tout, l'on ne perd pas ce que l'on gagne en indépendance politique par une dépendance totale vis-à-vis des médias qui attirent ou non l'attention du public sur une crise humanitaire. Malgré les différentes pressions qui existent, il est essentiel de continuer à rester fidèle aux valeurs que l'on défend et qu'illustre le courage des hommes et des femmes qui continuent à prendre des risques importants pour défendre les droits de l'homme et le droit humanitaire.

Echange de vues

A la représentante d'une ONG qui s'interrogeait sur la manière dont Tito a pu maintenir la cohabitation de tous les groupes ethniques en ex-Yougoslavie, M. SACIRBEY a expliqué que le pays avait, bien avant Tito, une tradition pluraliste très ancienne. La Bosnie avait ainsi accueilli de nombreux Juifs après qu'ils aient été chassés de l'Espagne. Tito a réussi à maintenir la Yougoslavie unie en niant les différences de religion ou d'identité culturelle. En revanche, après la chute du Mur de Berlin, certains dirigeants ont compris qu'il serait utile pour eux d'utiliser le nationalisme afin d'empêcher l'installation de la démocratie et ses exigences.

Déclarant que la guerre est le pire des crimes contre l'humanité et évoquant l'opinion exprimée par M. Federico Mayor, Directeur de l'UNESCO, d'inscrire le droit à la paix dans la Déclaration universelle des droits de l'homme, M. PETER WEISS, Vice-Président du Centre des droits constitutionnels et animateur de la table ronde, a précisé que ce droit à la paix est inscrit déjà dans un autre document adopté unanimement par la communauté internationale il y a 50 ans et que la Déclaration universelle ne peut pas être amendée. M. Sacirbey a indiqué que s'il vrai que la guerre est la pire des injustices, il n'y a toutefois pas de choix absolu. Ce faisant, il a expliqué que la paix n'avait pas pu être signée plus tôt dans son pays car les conséquences auraient été encore plus lourdes et désastreuses que le conflit. En revanche, lorsqu'il y a des chances de signer une paix juste, il faut les saisir.

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A une représentante d'ONG qui déplorait l'absence de couverture médiatique des enfants d'Afrique, et notamment ceux victimes du conflit en Sierra Leone, Mme NEWMAN a répondu que CNN s'efforce de couvrir de la manière la plus complète la situation sur le continent. Malheureusement le continent est victime de nombreuses tensions et il est difficile d'être exhaustif, a-t- elle précisé.

Répondant à une question sur l'objectivité des médias, lorsque seule une des parties concernées est en mesure de fournir des informations, Mme Newman a expliqué que c'est une situation difficile et que l'impartialité demande des efforts constants. Il est vrai que les gouvernements ou les partis installés ont davantage de moyens pour faire entendre leur voix et dans ce cas, il faut accorder un plus grand bénéfice du doute aux autres. Elle a expliqué également que les médias doivent avoir la force d'aller à l'encontre des désirs du public. Sur ce point, M. Sacirbey a estimé que parfois les médias peuvent créer une situation un peu douteuse et il faut se souvenir que les faits ne sont pas toujours aussi manichéens qu'il ne semble ou comme certains les présentent.

ROLE DE LA COMMUNAUTE INTERNATIONALE DANS LA PROTECTION DES DROITS DE L'HOMME

Présentations

M. CARLOS ENRIQUE GARCIA GONZALEZ, Conseiller à la Mission permanente du El Salvador auprès des Nations Unies, a estimé qu'il est nécessaire de renforcer la coopération internationale à tous les niveaux dans le domaine de la protection des droits de l'homme. L'appui et la solidarité internationale en matière de promotion des droits de l'homme restent essentiels. M. García González a rappelé que le conflit salvadorien a pris racine dans les profondes inégalités sociales et économiques du pays. Durant plus de soixante ans, les possibilités de participation démocratique de la société civile ont été inexistantes et les droits civils et politiques ont été violés. La crise au El Salvador a connu son paroxysme entre 1979 et 1992, période au cours de laquelle il y a eu une importante intervention étrangère. Pendant la lutte armée, 75 000 personnes ont perdu la vie et plus d'un million de personnes sont devenues réfugiées ou se sont déplacées à l'intérieur du pays. La violence générée par le conflit armé a constitué le facteur principal de la violation des droits humains de la société salvadorienne. La communauté internationale a joué un rôle de premier ordre dans la défense des droits de l'homme de la population salvadorienne, notamment en promouvant des initiatives bilatérales, régionales et multilatérales. Les organisations non gouvernementales ont également manifesté leur appui et leur solidarité.

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La crise du El Salvador a montré que la violation des droits de l'homme est une source de conflit qui a des répercussions régionales et internationales. Le lien entre la paix, la démocratie et le développement est clair. Les accords de Esquipulas II, signés au Guatemala en 1987, ont permis de faciliter la participation des Nations Unies afin de résoudre le conflit salvadorien. Les Nations Unies ont joué un rôle important et ont accompli un mandat novateur et pluridisciplinaire en participant notamment à la vérification des engagements pris et des accords de paix.

La Mission de vérification des Nations Unies a permis de promouvoir les droits de l'homme des citoyens salvadoriens. Une campagne sur les droits de l'homme et les libertés fondamentales a pu être organisée. La création de la Commission pour la défense des droits de l'homme a été capitale dans la promotion des droits de l'homme. Les progrès réalisés en la matière ont contribué à favoriser la réconciliation et la réunification de la société salvadorienne. La création d'une police nationale civile a également été un facteur important. Les institutions mises en place doivent permettre de protéger les droits des Salvadoriens, et plus particulièrement ceux des plus pauvres. M. García González a estimé qu'il reste encore beaucoup à faire pour éliminer les causes structurelles de conflit. Il est nécessaire d'éliminer la pauvreté et de résoudre les problèmes liés au développement durable. Il faut également renforcer la conscience collective des Salvadoriens et leur permettre de mieux connaître leurs droits. Le rôle de la communauté internationale est capital. Les crises peuvent être surmontées s'il y a un engagement politique suffisant. M. García González a estimé que, s'il est clair que la responsabilité première en matière de respect des droits de l'homme incombe au Gouvernement et à la population salvadorienne, le rôle de la communauté internationale et de l'ONU reste capital.

M. ROBERT SCHWARTZ, Administrateur des économistes unis pour la réduction des armes, portant son attention sur le commerce des armes, a indiqué que les médias accordent une grande attention aux armes de destruction massive alors qu'en fait ce sont les armes classiques qui font le plus grand nombre de victimes de par le monde. L'ensemble des dépenses militaires a représenté en 1997 près de 800 milliards de dollars. Les Nations Unies sont l'instance la plus appropriée pour garantir le désarmement. Lorsqu'un conflit est achevé, il faut se demander si le conflit est effectivement résolu. L'action pour résoudre, si l'on peut, des causes sous-jacentes de conflits, doit parallèlement, être accompagnée d'efforts pour amener une réduction des flux d'armes. L'on peut tenter d'imaginer ce que serait le monde si toutes les ressources qui ont été employées à des fins militaires avaient été autrement utilisées, et notamment au développement, a déclaré M. Schwartz.

La véritable question qui se pose aujourd'hui est celle de la sécurité, non plus seulement militaire, mais également économique. Le budget militaire des Etats-Unis est huit fois plus élevé que le budget militaire consolidé des 8 pays considérés comme les plus menaçants. Les Etats-unis pourraient être victimes d'un trop lourd budget militaire, ainsi que l'Union soviétique en a

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été victime. Un autre problème est que si les pays développés semblent globalement réduire leurs dépenses militaires, ces dépenses augmentent dans les pays en développement, alors que la majorité des personnes qui y vivent n'ont pas de quoi satisfaire leurs besoins vitaux.

Un problème économique très sérieux dans le monde est l'écart croissant entre les riches et les pauvres et l'esprit qui a guidé le Plan Marshall après la Seconde Guerre mondiale a disparu. A cet égard, M. Schwartz a rappelé qu'il avait proposé un nouveau plan sur le modèle du Plan Marshall, dont le financier ne serait plus seulement les Etats-Unis mais qui rassemblerait tous les pays du G7. Il pourrait être mis fin à la crise économique actuelle en déplaçant les fonds alloués aux dépenses militaires vers les domaines les plus importants pour la personne humaine et ses droits. Il faudrait apprendre à résoudre les conflits sans avoir recours à la force. La pauvreté n'est pas inévitable, a affirmé M. Schwartz. Les gouvernements doivent respecter les droits des peuples et les droits des individus et les peuples ont le droit de remplacer les gouvernements fautifs, a-t-il également déclaré, citant Thomas Jefferson.

Mme ILENE COHN, Programme des droits de l'homme à l'Ecole de droit de Harvard, a insisté sur la nécessité de protéger les enfants durant les conflits armés et dans les périodes de reconstruction. Il est essentiel d'établir des normes à ce sujet. Il faut assurer un suivi psychologique des enfants victimes des conflits armés. Mme Cole a évoqué la question de l'exploitation des petites filles par les forces des opérations de maintien de la paix. La nomination de M. Olara Otunnu est importante. Il est nécessaire de s'interroger sur les effets des programmes qui ont été mis en oeuvre pour protéger les enfants et assurer leur redressement physique et psychologique. Il faut également examiner ce qui a été fait pour que les enfants soldats et les enfants victimes des mines antipersonnel et de la violence sexuelle puissent être réintégrés dans la société. Les enfants doivent être au centre de la reconstruction des pays victimes de conflits armés. Il est important qu'il y ait une coordination des efforts faits par les différents organismes internationaux pour protéger les enfants et améliorer leurs conditions de vie.

M. SERGIO VIEIRA DE MELLO, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires des Nations Unies, a estimé qu'il est difficile de faire la distinction entre la perspective humanitaire et l'approche fondée sur les droits de l'homme. C'est pourquoi la perspective humanitaire devrait être une partie prenante des droits de l'homme. Les violations d'aujourd'hui sont les conflits de demain, et cela nous oblige à réfléchir aux causes fondamentales de ces désordres et à la réticence de la communauté internationale à accepter la réalité, a-t-il ajouté. L'un des thèmes de l'Assemblée du millénaire devrait être la réaffirmation du droit humanitaire et des droits des réfugiés, autant de droits qui ont été floués ces dernières années de manière inacceptable. Depuis la fin de la guerre froide, il est de plus en plus courant d'avoir des conflits armés qui cherchent délibérément à faire le plus grand nombre possible de victimes parmi les civils.

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Les racines des conflits se situent dans les situations économiques et politiques des sociétés, a déclaré le Secrétaire général adjoint, précisant que les inégalités systématiques à l'intérieur et entre les Etats sont une recette assurée pour la multiplication des conflits. Trop souvent, on laisse les crises évoluer en des conflits armés où seules les organisations humanitaires sont présentes sur le terrain. Fournir une aide humanitaire sans répondre aux besoins en sécurité des populations en danger n'est pas suffisant, a-t-il mis en garde. Au cours des dernières années, des règles de base d'intervention humanitaire ont été établies, afin que tous les acteurs et partenaires humanitaires fonctionnent de manière complémentaire. L'importance de la reconstruction de la paix après le cessez-le-feu ne doit pas être omise. La transition de la guerre à la paix est le moment idéal pour faire prendre conscience des droits de l'homme à tous les niveaux. Il faut à cet égard construire et renforcer les capacités nationales afin de créer une culture des droits de l'homme dans les situations post-conflit et de mettre fin à l'impunité. Les acteurs non gouvernementaux ont une importance essentielle dans cette perspective, a conclu M. de Mello.

Echange de vues

Répondant à une question d'une représentante d'une Organisation non gouvernementale (ONG) sur l'arrêt de l'aide humanitaire en Bosnie, M. Sergio Vieira de Mello a précisé que la politique qui a été menée en Bosnie visait à passer au plus vite de l'aide humanitaire aux activités de reconstruction et de réhabilitation. Au sujet du Kosovo évoqué par la représentante d'une autre ONG, M. Vieira de Mello a déclaré qu'un arrêt des violences est nécessaire. Seul un environnement stable peut permettre à l'ensemble de la population de bénéficier de l'aide humanitaire. A propos des violations des droits de l'homme au El Salvador, M. García Gonzalez a précisé qu'il a été mis fin à l'impunité de ceux qui ont commis ces violations. Le système judiciaire doit châtier ceux qui commettent des crimes. C'est pour cette raison que certaines réformes du système judiciaire salvadorien ont été entreprises.

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