NGO/308

LA LOGIQUE ECONOMIQUE FONDEE SUR UNE CROISSANCE SANS LIMITES COMPENSEE PAR L'ETAT-PROVIDENCE NE FONCTIONNE PLUS

15 septembre 1998


Communiqué de Presse
NGO/308
PI/1081


LA LOGIQUE ECONOMIQUE FONDEE SUR UNE CROISSANCE SANS LIMITES COMPENSEE PAR L'ETAT-PROVIDENCE NE FONCTIONNE PLUS

19980915 Les participants à la Conférence s'inquiètent des pressions exercées sur les normes du travail dans le contexte de la mondialisation

Consacrant sa deuxième journée à l'impact de la mondialisation sur les droits de l'homme, la cinquante et unième Conférence annuelle du Département de l'information et des Organisations non gouvernementales a tenu, ce matin, deux tables rondes portant respectivement sur "le développement économique : qui est responsable ?" et sur les problèmes transfrontières.

Les débats qui se sont déroulés dans le cadre de la table ronde sur la responsabilité du développement économique ont fait ressortir que la logique économique, fondée sur une croissance sans limites dont les effets négatifs étaient compensés par l'intervention de l'Etat, ne fonctionne plus. Ainsi pour M. John Sewell, Président du Conseil pour le développement d'outre-mer, il est clair que les acteurs privés dominent désormais l'économie mondiale. Selon lui, pour que la mondialisation tienne ses promesses de progrès socioéconomique, il est indispensable qu'elle soit bien gérée, et que l'on redéfinisse, par exemple lors d'un sommet international sur la mondialisation, toute la coopération internationale en repensant le rôle de l'aide qui doit obéir aux objectifs du développement durable. Ces modifications posent le problème non encore résolu des responsabilités du développement. Il est essentiel de comprendre les liens intimes entre les choix que nous faisons et notre compréhension des droits de l'homme, a souligné M. Alfredo Sfeir-Younis, Représentant spécial de la Banque mondiale auprès des Nations Unies. Les individus et les sociétés doivent avoir le droit de choisir leur propre destin et avoir la capacité de le faire.

Animée par Mme Ingeborg Kaul du Bureau du développement et des études au Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), cette table ronde a également rassemblé M. Legwaila Joseph Legwaila, Représentant permanent du Bostwana auprès des Nations Unies; et Mme Victoria Tauli-Corpuz, Directrice exécutive de la Fondation Tebtebba.

(à suivre - 1a)

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Les participants à la table ronde sur les problèmes transfrontières ont identifié l'émergence d'un marché mondial du travail, qui s'accompagne d'une perte d'autonomie nationale, et la pression exercée sur les normes du travail, au détriment notamment des travailleurs migrants ou des enfants, comme les deux conséquences principales de la mondialisation sur les droits de l'homme. Mme Katie Quan, Spécialiste de l'inspection du travail, University of California at Berkeley, a suggéré de répondre à cette situation en rendant les normes internationales du travail contraignantes. Les producteurs doivent être tenus responsables des conditions de travail qu'ils imposent, a-t-elle affirmé, en soulignant dans le même temps la responsabilité qui incombe aux consommateurs dans le choix des produits. Mme Quan a également préconisé la création de syndicats internationaux qui seraient mieux à même de défendre les intérêts des travailleurs d'un secteur particulier au niveau mondial.

Ont également participé à cette seconde table ronde, animée par Edward Mortimer, Rédacteur en chef des discours du Secrétaire général des Nations Unies : M. Franklyn Lisk, Directeur du Bureau de liaison de l'Organisation internationale du Travail aux Nations Unies ; M. Richard Mollica, Directeur au Harvard Program on Refugee Trauma ; Hnin Hnin Pyne, Candidate au doctorat à l'Université John Hopkins, School of Public Health ; et Volodymyr Yelchenko, Représentant permanent de l'Ukraine auprès des Nations Unies.

Cet après-midi, à partir de 15 heures et toujours sur le thème de l'impact de la mondialisation sur les droits de l'homme, la Conférence tiendra deux tables rondes, la première sur "la santé et le développement durable" et la seconde sur "l'édification des institutions : renforcer la capacité de protection des droits de l'homme".

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L'IMPACT DE LA MONDIALISATION SUR LES DROITS DE L'HOMME

LE DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE : QUI EST RESPONSABLE ?

Présentations

M. LEGWAILA JOSEPH LEGWAILA, Représentant permanent du Botswana auprès de l'ONU, a rappelé que son pays est la plus vieille démocratie d'Afrique et était en 1966, année à laquelle il a accédé à l'indépendance, un pays très pauvre. En choisissant la démocratie, le Gouvernement qui a été mis en place après l'indépendance, a permis le développement économique du pays. La découverte de gisements de diamants et leur exploitation ont permis le décollage économique du pays. Bien que le Botswana ne peut être considéré comme un "tigre" au même titre que certains pays asiatiques, on peut parler de miracle économique. Pour qu'il y ait développement économique, il faut qu'il y ait la démocratie, la paix et la stabilité, a souligné le Représentant. Il est possible à la fois de développer un pays et d'y promouvoir les droits de l'homme.

M. JOHN SEWELL, Président du Conseil du développement d'outre-mer, a indiqué que la logique économique qui a prévalu depuis 1945 et basée sur la prospérité sans limites, ne fonctionne plus aujourd'hui. Autrefois, les bouleversements entraînés par l'élargissement de l'économie devaient être compensés par le rôle protecteur de l'Etat, ce qui aujourd'hui n'est plus vérifié. L'économie est dominée maintenant par les acteurs privés. La mondialisation offre des possibilités de progrès socio-économiques sans précédent, à condition qu'elle soit bien gérée, sinon il y aura de nombreux dommages, y compris pour les pays développés, a-t-il mis en garde. La communauté internationale doit donc relever quatre défis, à savoir faire en sorte que tous les pays en profitent ; faire taire la crainte de la déstabilisation, amplifiée par la récente crise financière en Asie ; calmer les préoccupations du monde industriel face à la concurrence des pays en développement pour les amener à mieux coopérer ; et gérer de manière durable les ressources naturelles et l'environnement en général. C'est en fait toute la coopération internationale qu'il faut redéfinir, en repensant parallèlement le rôle de l'aide. Le problème est que s'il y a un accord général sur les démarches à adopter pour encourager le développement, on note une montée du scepticisme sur l'efficacité et l'utilisation de l'assistance. De plus en plus, on estime que l'aide n'a pas d'effet systématique sur les politiques et les environnements, parce qu'elle est insuffisante et parce qu'elle n'obéit pas à des objectifs de développement durable. Il faut donc désormais définir comment changer cette aide et la compléter par des politiques d'investissement, ce qui implique des responsabilités différentes et rend l'ensemble encore plus complexe. M. Sewell a plaidé en faveur de la tenue d'un sommet international de la mondialisation.

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M. ALFREDO SFEIR-YOUNIS, Représentant spécial de la Banque mondiale auprès de l'ONU, a souligné le fait que chacun est responsable du développement économique. Rappelant l'influence des idéologies économiques dans le débat social, politique et économique sur le développement, il a estimé qu'une grande part de la responsabilité était du côté des producteurs, des gouvernements et des marchés, la plupart des sociétés étant restées passives, même dans le passé récent, en ce qui concerne ce qui est produit et comment. Les processus de production sont détachés des consommateurs et du citoyen ordinaire, et laissés aux choix des producteurs. Ce n'est que récemment que les consommateurs ont quelque influence sur la manière dont le progrès technologique est orienté. Il a souligné les responsabilités croissantes du secteur privé et le débat non résolu sur le rôle des gouvernements, leurs fonctions et leurs responsabilités dans ce domaine. Les responsabilités pour le développement changent. Parmi les éléments qui poussent à ce changement, il a mentionné en premier lieu la nécessité d'éradiquer la pauvreté dont les niveaux sont inacceptables; le nouveau rôle de la société civile; le lien entre la responsabilité individuelle et collective; le nouveau rôle des consommateurs; le progrès technologique et ses incidences; la reconnaissance de notre haut degré d'interdépendance; et le changement des valeurs.

Pour le représentant de la Banque mondiale, il est essentiel de comprendre les liens intimes entre les choix que nous faisons et notre compréhension des droits de l'homme. Les individus et les sociétés doivent avoir le droit de choisir leur propre destin et avoir la capacité de le faire. C'est pourquoi, il est essentiel de renforcer cette capacité. Le processus de développement économique prendra une nouvelle dimension lorsque la pauvreté aura été éliminée. La capacité est renforcée par la participation à tous les niveaux de prise de décision. On ne peut pas esquiver cette responsabilité. Ce n'est qu'en changeant le système de valeurs, que l'on pourra assurer le droit au développement de chacun. La Banque mondiale s'efforce, pour sa part, de changer sa culture pour relever ce défi.

Mme VICTORIA TAULI-CORPUZ, Directrice exécutive de la Fondation Tebtebba, a estimé que les ONG peuvent influencer les décisions des gouvernements ou des institutions internationales, telles le Fonds monétaire international notamment, à partir du moment où elles demeurent unies. Il est manifeste qu'à moins que les objectifs du développement durable définis dans l'Agenda 21 ne soient pris au sérieux, la croissance et le bien-être économique promis par la mondialisation n'interviendront pas. Il est regrettable que peu de cas soit fait des violations des droits de l'homme qui résultent du processus actuel de mondialisation, a-t-elle ajouté. Il est aujourd'hui ironique de constater que les violations des droits de l'homme s'aggravent et que le fossé entre pays riches et pays pauvres s'accroît. L'objectif pour les ONG est que les besoins des populations soient prioritaires sur les impératifs des marchés.

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Les Nations Unies pourraient étudier sérieusement l'efficacité de la Déclaration universelle des droits de l'homme et des instruments qui en découlent, en centrant l'attention sur les relations entre les droits de l'homme, l'environnement, le développement et le commerce, a proposé Mme Victoria Tauli-Corpuz. La situation actuelle démontre également l'importance de trouver les moyens de réglementer les activités des corporations d'entreprises et la spéculation financière. Là encore, les Nations Unies pourraient jouer un rôle important dans les discussions sur la manière de rendre le secteur privé plus responsable. Pour leur part, les ONG doivent être encore plus vigilantes et actives mais elles doivent aussi proposer des alternatives plus viables. A cet égard, Mme Tauli-Corpuz a estimé que le projet de déclaration sur les droits des populations autochtones constitue une proposition concrète et elle a souhaité que la Décennie internationale des populations autochtones ne s'achève pas, en 2004, sans l'adoption d'une déclaration universelle idoine.

Echange de vues

Répondant à une question d'une ONG sur la démocratie dans son pays, M. LEGWAILA JOSEPH LEGWAILA, a précisé que les élections au Botswana étaient libres et équitables selon les normes internationales et que le pays connaît une qualité de la démocratie comparable aux autres démocraties dans le monde.

Répondant aux préoccupations des ONG concernant les responsabilités des sociétés internationales dans les pays en développement, Mme VICTORIA TAULI- CORPUZ a souligné le pouvoir de ces sociétés qui dirigent le monde d'aujourd'hui. Pour les ONG, le défi le plus important est de voir comment faire assumer leurs responsabilités à ces entreprises et aussi de ne pas accepter des accords comme l'Accord multilatéral sur les investissements. A cet égard, les Nations Unies ont un rôle important à jouer, a-t-elle souligné.

M. JOHN SEWELL a précisé, pour sa part, qu'il y a une grande différence entre les activités des sociétés qui sont installées dans un pays depuis longtemps et les activités de courtiers en devises qui spéculent sur les marchés mondiaux de devises. Un certain nombre d'acteurs autonomes, tirant parti des nouvelles technologies, ont une grande influence sur les marchés de devises dans le monde. Il a estimé que ce type d'activités devaient être réglementées. Chaque gouvernement dans le monde cherche à promouvoir les investissements de ses entreprises. Ceux qui violent le plus les lois du travail sont, à l'exception de quelques entreprises occidentales, les multinationales du tiers monde, a-t-il déclaré. Certaines mesures peuvent être prises en Occident, notamment en matière d'environnement.

S'agissant de l'allègement de la dette du tiers monde, M. ALFREDO SFEIR- YOUNIS a souligné le fait que cette question préoccupe fortement la Banque mondiale. La part de la dette auprès de la Banque mondiale ne représente toutefois que 4 à 5 % de la dette mondiale. L'allègement de ces créances ne

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serait donc pas suffisant pour faire démarrer l'économie des pays ou les mettre à un niveau acceptable, mais doit être assorti de politiques sociales et économiques spécifiques. Répondant ensuite à la question d'une ONG sur la nécessité d'un changement de valeurs, M. Sfeir-Younis a rappelé qu'à la base des choix, il y a les valeurs. Il faut qu'il y ait un espace mondial dans lequel toutes les valeurs puissent exister, a-t-il souligné, en mettant l'accent sur l'importance de la participation des ONG et de la société civile dans ce processus et de l'interaction entre l'aspect économique et la spiritualité. La Banque mondiale est préoccupée par la pauvreté en Amérique centrale, mais certains modes de développement créent la pauvreté, a-t-il déclaré par ailleurs, en invitant à réfléchir à cette question.

M. JOHN SEWELL a ensuite souligné l'importance de la responsabilité des organisations internationales. Toutefois, lorsqu'une institution n'est pas mise en place démocratiquement, on peut douter de sa représentativité.

Mme VICTORIA TAULI-CORPUZ a indiqué, pour sa part, que lors d'un débat la semaine dernière sur la responsabilité sociale des sociétés, les ONG avaient appelé à la promotion de nouvelles valeurs dans le monde des affaires pour que les droits de l'homme y jouissent également d'un haut degré de protection.

LES PROBLEMES TRANSFRONTIERES

Présentations

M. FRANKLYN LISK, Directeur du Bureau de liaison de l'Organisation internationale du Travail (OIT) aux Nations Unies, a fait observer que cette année marque également le cinquantième anniversaire de la Convention sur les droits des travailleurs de s'associer et de s'organiser. Deux facteurs importants issus de la mondialisation peuvent être reliés à la question des problèmes transfrontières : l'émergence d'un marché mondial du travail, qui s'accompagne d'une perte d'autonomie nationale ; et l'impact de la mondialisation sur les normes du travail, notamment pour les travailleurs migrants ou les enfants.

L'OIT attache une importance première à la question du travail des enfants et à sa suppression. Les normes actuelles ne répondent pas aux problèmes qu'ont certains pays en développement en matière d'abolition du travail des enfants, a reconnu M. Lisk, ajoutant que l'OIT peut aider techniquement ses membres à prendre des mesures immédiates pour éliminer les formes les plus graves du travail des enfants. De plus en plus, la mondialisation nous conduit à accroître l'attention que nous portons à la situation des travailleurs migrants et notamment leurs conditions d'emploi et le travail forcé. La position de l'OIT en ce qui concerne la mondialisation est de reconnaître les phénomènes nouveaux qui affectent les principes de l'Organisation et de mettre à jour ses instruments de régulation, en tenant compte des spécificités des situations et des Etats.

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M. RICHARD MOLLICA, Directeur du "Harvard Program on refugee trauma", a expliqué que les personnes traumatisées participaient aujourd'hui davantage à leur processus de réadaptation. Il a rappelé que les violations des droits de l'homme se produisent durant toutes les phases de l'expérience d'un réfugié. On constate un taux de 70 % de traumatismes et de dépressions parmi les réfugiés et les personnes déplacées, tandis que le taux de handicaps physiques est en hausse de 30 % parmi ces populations, en particulier chez les femmes et les enfants, ce qui a des conséquences à long terme sur la reconstruction des pays. M. Mollica a mis l'accent sur les nombreux facteurs de risques liés à la détention, le confinement, l'absence de travail productif, l'absence de formation professionnelle, l'oisiveté et le manque d'accès à la religion dans les camps de réfugiés. Il a indiqué ne pas avoir de réponse à la question de savoir comment les médecins peuvent contribuer à la prévention des violations des droits de l'homme. Les personnes traumatisées ont soif de justice et le fait de traduire en justice les responsables de violations des droits de l'homme pourrait avoir des conséquences bénéfiques considérables pour les victimes de traumatismes, a-t-il affirmé.

Mme HNIN HNIN PYNE, Candidate au doctorat de l'Université John Hopkins, School of Public Health, a exposé le problèmes des citoyens birmans (Myanmar) quittant le pays pour chercher refuge et travail dans des pays étrangers, principalement en Thaïlande. Il s'agit d'un groupe de personnes très divers qui rassemble des réfugiés et des travailleurs migrants, même s'il semble que la distinction ne soit plus très nette puisque les conditions économiques qui poussent ces personnes à partir ne peuvent être séparées de la situation politique du pays, et notamment de la nécessité de fuir l'oppression militaire. Ces mouvements migratoires ont entraîné un véritable trafic de personnes, qui s'accompagne de violences sexuelles ou de travail forcé. On s'aperçoit que le trafic et l'immigration illégale sont désormais des problèmes liés auxquels viennent s'ajouter des problèmes de santé, en raison du sentiment d'insécurité constant. Récemment la crise financière en Asie a conduit à des déplacements et également des expulsions massives de travailleurs migrants. Or, pour l'heure, on ne sait toujours pas contrôler et faire respecter les droits de l'homme de ces travailleurs migrants, a fait remarquer Mme Pyne. Un autre effet de la mondialisation est que les réseaux de migration s'étendent dans le monde entier et ne sont plus seulement limités à deux pays. L'exemple de la Birmanie démontre que le coût des violations des droits de l'homme s'étend non seulement aux pays voisins de l'Etat où elles se produisent mais aussi à l'ensemble de la communauté internationale.

Mme KATIE QUAN, Spécialiste de l'inspection du travail, Center for labor research and education/IIR, University of California at Berkeley, évoquant sa propre expérience d'ouvrière textile et de syndicaliste dans ce secteur, a expliqué que les salaires dans ce secteur aux Etats-Unis avaient diminué de moitié au cours des 20 dernières années et que la production s'était déplacée d'abord vers les Caraïbes et l'Amérique latine, ensuite vers l'Asie. Où est la justice pour les ouvrières lorsqu'elles craignent constamment la fermeture des usines parce que les coûts sont moins élevés ailleurs, a-t-elle demandé.

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Pour Mme Quan, la réponse serait de s'organiser en syndicats, non plus locaux, mais internationaux, en fédérations de syndicats. La plupart des fabricants sont guidés par le profit plutôt que par les droits de l'homme. C'est pourquoi, les normes de travail internationales doivent être contraignantes. Les fabricants doivent être tenus responsables juridiquement des conditions de travail qu'ils imposent dans la fabrication. Les consommateurs doivent eux aussi engager leur responsabilité dans ce processus pour défendre le droit du travail. L'effort vaut la peine d'être tenté pour porter un coup aux ateliers de misère et faire un pas en avant vers la réalisation de la vision de la Déclaration universelle des droits de l'homme, a-t-elle conclu.

M. VOLODYMYR YELCHENKO, Représentant permanent de l'Ukraine auprès des Nations Unies, a estimé que la mise en place d'un système de normes internationales est l'une des grandes avancées des Nations Unies dans le domaine des droits de l'homme. La fin du monde bipolaire a offert de nouvelles possibilités pour la protection des droits de l'homme et la mondialisation a ouvert les frontières à de nouvelles idées et à de nouveaux moyens de communication, fournissant ainsi l'occasion de construire une culture universelle des droits de l'homme. M. Yelchenko a ensuite évoqué la Conférence sur les droits de l'homme, tenue en septembre dernier à Yalta, qui a adopté un Plan d'action en faveur de l'établissement, sous les auspices du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), d'un réseau de collecte d'informations sur les meilleures pratiques en matière de promotion des droits de l'homme. Le représentant de l'Ukraine a indiqué que la Conférence a également permis de fixer des priorités pour les politiques nationales en matière de droits de l'homme. Il faut, pour léguer un héritage positif aux générations futures, harmoniser les actes aux normes établies par la Déclaration universelle et les autres instruments qui en découlent, a-t-il insisté en conclusion.

Echange de vues

Répondant à la question d'une ONG, Mme KATIE QUAN a précisé que, dans le secteur textile, tous les coûts du travail font partie des coûts de production, ceux-ci ne représentant toutefois qu'une petite partie du budget qui comprend également la publicité et les frais généraux. S'agissant de la responsabilité des Etats, elle a déclaré que bien qu'il existe des lois en matière de travail aux Etats-Unis, celles-ci ne sont pas toujours appliquées.

M. FRANKLYN LISK a précisé que les Etats-Unis ont ratifié uniquement la Convention sur le travail forcé, ce qui ne veut pas dire qu'ils ne souscrivent pas à l'esprit et à la lettre des six autres conventions en matière de droit du travail, a-t-il souligné. L'OIT fait un lien entre la justice sociale et la protection du droit du travail. Dans la recherche de la justice sociale, il faut en effet respecter les normes internationales du travail. Celles-ci

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sont partie intégrante des droits universels de la personne. Répondant à une question sur les migrations illégales, il a rappelé que l'OIT disposait de deux instruments qui protègent les travailleurs migrants. Lors d'une réunion récente, la situation des travailleurs migrants dans les pays d'accueil a été examinée. L'aspect social de la question devrait être examiné lors d'une prochaine réunion, a-t-il précisé.

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