LE PRESIDENT DE L'ASSEMBLEE GENERALE NOUVELLEMENT ELU EVOQUE LES NOUVEAUX PROBLEMES AUXQUELS L'ONU DOIT FAIRE FACE
Communiqué de Presse
GA/SM/58
LE PRESIDENT DE L'ASSEMBLEE GENERALE NOUVELLEMENT ELU EVOQUE LES NOUVEAUX PROBLEMES AUXQUELS L'ONU DOIT FAIRE FACE
19980914 On trouvera ci-après le texte de l'allocution prononcée par le Président de l'Assemblée générale, Didier Opertti (Uruguay), à l'ouverture de la cinquante-troisième session :Je souhaite tout d'abord dire que je suis sincèrement ému à la pensée de l'honneur insigne que représente pour mon pays, l'Uruguay, le fait que ma candidature à la présidence de la cinquante-troisième session de l'Assemblée générale des Nations Unies a été proposée par consensus j'insiste bien, par consensus par le groupe des pays d'Amérique latine et des Caraïbes et a été approuvée par l'Assemblée générale.
Je souhaite exprimer à tous, de la part de mon pays, une profonde reconnaissance et je m'engage personnellement à travailler avec les 185 délégations qui constituent l'Assemblée, en ayant à coeur de m'acquitter des tâches que la Charte et le Règlement intérieur de l'Assemblée assignent au Président.
Je dois souligner ici que l'honneur et la responsabilité de présider l'Assemblée générale des Nations Unies ont été conférés à mon pays, l'Uruguay pays aux frontières ouvertes, membre à part entière du Marché commun du Sud, qui a acquis son indépendance politique durant le premier quart du XIXe siècle et qui, depuis lors, a pris sa place parmi les nations sans ambition déplacée ni parti pris politique et avec une vocation internationaliste inébranlable fondée sur les principes de la paix, de la tolérance, du respect mutuel et de la protection qu'assure l'ordre juridique. L'Uruguay a voté en faveur de la création de ce produit unique du XXe siècle que représente l'Organisation des Nations Unies et apporte aujourd'hui sa contribution avec un sens élevé de ses responsabilités. Des Uruguayens sont allés jusqu'à sacrifier leur vie en s'acquittant de leur mission dans le cadre d'opérations de maintien de la paix menées dans plusieurs régions du monde.
Je m'engage, devant vous tous, à conduire les travaux de l'Assemblée générale en étant fidèle aux valeurs de l'Uruguay, notamment l'humanisme, l'esprit de conciliation et l'impartialité.
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En outre, c'est en invoquant ces valeurs que j'invite respectueusement tous les États représentés ici à oeuvrer pour parvenir à un consensus qui nous permettra de définir des intérêts communs, universels, qui feront de l'Organisation des Nations Unies un cadre unique dans lequel, pour citer le grand juriste Irureta Goyena, nous pourrons "concilier la transparence des principes et l'opacité de la réalité".
Je souhaite remercier en particulier le Président de la cinquante- deuxième session, mon éminent collègue l'Ambassadeur Hennadiy Udovenko, d'Ukraine, qui n'a pas ménagé ses efforts et m'a généreusement fait part de l'expérience qu'il avait acquise durant l'année où il a présidé l'Assemblée. Il m'a fait connaître ses satisfactions et ses préoccupations et, surtout, sa confiance inébranlable dans l'avenir de l'Organisation et dans son renforcement, autrement dit dans la paix, le développement, la sécurité et, en somme, le progrès des nations qui constituent l'ONU.
Les orientations fournies par M. Udovenko et par le groupe de travail chargé d'examiner la composition et les modalités de prise de décisions du Conseil de sécurité constituent des renseignements très précieux et complètent les efforts considérables accomplis à cet égard par les prédécesseurs de M. Udovenko. Le discours que ce dernier a prononcé à la clôture de la cinquante-deuxième session de l'Assemblée générale est un document de fond qu'il convient d'examiner dans tous ses aspects.
Je souhaite à présent m'adresser au Secrétaire général, M. Kofi Annan, et l'assurer de nouveau que nous coordonnerons nos travaux avec lui et avec toute son équipe afin d'associer efficacement les efforts et les compétences de chaque organe. Nous avons été vivement impressionnés par le fait que le Secrétaire général s'est efforcé de définir la portée de ses responsabilités et de ses objectifs et de discerner quel devait être l'avenir de l'Organisation. Ses séjours dans notre région et les contacts qu'il a établis sur place avec des chefs d'État nous ont permis de mieux apprécier son rôle en tant qu'interlocuteur direct des gouvernements.
Dans le contexte international actuel, pour conduire les travaux de l'Assemblée générale, nous devons pouvoir compter sur le dévouement et la bonne volonté de chacun et garder constamment à l'esprit le fait que les gouvernements et les peuples des États Membres attendent beaucoup de l'Organisation et que nous devons répondre à cette attente avec détermination et dans un esprit de tolérance en nous efforçant sans cesse de parvenir aux accords nécessaires pour résoudre les multiples problèmes urgents qui se présenteront à nous.
L'ONU se trouve face à des problèmes spécifiques et, dans la plupart des cas, elle s'est déjà mise à l'oeuvre. Citons en particulier les graves perturbations qui secouent les marchés financiers et leur impact négatif sur les économies nationales, y compris, du fait de la mondialisation, celles de
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pays qui ne sont nullement à l'origine de la crise; la recrudescence marquée des actes de terrorisme et la dialectique de la force que ceux-ci représentent; l'influence pernicieuse des drogues sur ceux qui les consomment et un circuit d'offre élaboré dans lequel sont représentés tous les stades d'organisation criminelle impliqués dans le trafic des drogues; l'aggravation de la criminalité internationale et de l'insécurité des citoyens; la protection dont ont besoin les personnes et les peuples défavorisés; la protection de la nature et de l'environnement, qui sont gravement menacés; les droits de l'homme dans leur plus authentique expression; et, enfin, l'instauration de la paix sociale. L'ONU est également présente sur plusieurs autres fronts : aide au développement, coopération dans les domaines de l'éducation, de la science et des techniques, combat contre les maladies, sans oublier des entreprises telles que la codification et le développement progressif du droit international, tâche dont elle s'acquitte discrètement, minutieusement et avec efficacité.
Il ne s'agit là que de quelques-unes des questions qui, étant donné le caractère foncièrement multilatéral de l'ONU, doivent impérativement figurer à son ordre du jour international pour les années à venir.
En 1945, la Charte de San Francisco visait résolument à éviter la guerre, et la structure de l'Organisation ainsi que la composition et la compétence de ses organes ont été conçues en fonction de cet objectif. Mais, aujourd'hui, il faut examiner plus avant la question du réaménagement de l'Organisation des Nations Unies et concevoir ensemble une organisation nouvelle, et il faut que les 185 États Membres qui la composent actuellement concluent les accords essentiels qui, se fondant sur le respect de la justice et du droit international, imposeront à chaque État la responsabilité de préserver ces valeurs, faute de quoi ni l'Organisation des Nations Unies ni aucune autre organisation internationale n'aura d'importance ou de représentativité véritable.
Sans doute serait-il réducteur et inexact d'affirmer que l'Organisation des Nations Unies est un composé du monde. Pourtant, il serait extrêmement difficile d'imaginer un monde sans l'Organisation des Nations Unies ou sans une organisation accomplissant des tâches analogues.
C'est dans cette optique que doit être perçue l'opération consistant à réformer la Charte, qu'un groupe de travail à composition non limitée a été chargé de mener à bien en vertu d'une résolution adoptée par l'Assemblée générale en 1995.
Et c'est également dans ce cadre que s'inscrivent les aspirations et les appels à une plus large participation des pays et surtout des peuples qui ont mis dans l'Organisation des Nations Unies l'essentiel de leurs espoirs de voir davantage de démocratie. Un monde meilleur, plus équilibré, plus sûr et plus
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équitable, qui tout en tenant compte des différences historiques, religieuses, culturelles, économiques, scientifiques et techniques puisse s'accorder sur l'essentiel et faire des hommes et des femmes organisés en société l'épicentre et l'inspiration de ses programmes et de son action.
Ce même dernier facteur, qui pourrait être perçu comme quelque chose d'abstrait, voire d'irréel ou de non pragmatique, doit, à notre sens, servir de boussole à une communauté internationale qui fait preuve quotidiennement d'une modernité quasi magique mais qui, en revanche, s'agissant des principes fondamentaux, montre des signes alarmants de régression, de sorte que la situation internationale atteint des niveaux de contradiction qui nous obligent à faire appel à des valeurs éthiques et à des positions communes.
En vertu de la Charte, le Conseil de sécurité a la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationales et agit au nom des États Membres en s'acquittant des devoirs que lui impose cette responsabilité. Il faut par conséquent assurer la coordination voulue entre l'Assemblée générale et le Conseil de sécurité, principe essentiel de la relation unissant les deux organes, pour que les activités qu'ils mènent dans le cadre de leurs diverses compétences puissent être considérées comme l'instrument commun de l'Organisation compte tenu de son mode actuel de prise de décisions. Cela n'implique pas en soi une évaluation positive ou critique de l'actuelle structure institutionnelle de l'Organisation des Nations Unies, qui date d'un demi-siècle, ni ne constitue un obstacle au réexamen auquel on procède actuellement.
Un demi-siècle, faut-il ajouter, qui a vu les avancées scientifiques et techniques les plus spectaculaires et au cours duquel l'ampleur et la dynamique des transformations politiques intervenues aux échelons tant national qu'international ont été telles, en particulier durant ces 10 dernières années, que ces transformations n'ont pu s'accompagner d'une évolution institutionnelle aussi rapide.
On peut dire sans exagérer que le XXIe siècle est désormais à nos portes. Toutefois, la rapidité des transformations auxquelles nous assistons et les certitudes énoncées dans la Charte ne sauraient être considérées comme des éléments inconciliables, mais devraient au contraire nous inciter à poursuivre sans hâte, mais de manière soutenue, la modernisation et le réglage minutieux de l'Organisation. Il ne doit pas s'agir simplement d'une opération diplomatique ou juridique; il doit s'agir d'une attitude politique naturelle de la part des États et par conséquent d'une opération qui ne saurait être remise à plus tard, qui consiste à continuer d'apporter des améliorations au seul instrument universel dont dispose la communauté internationale pour conclure ses accords et régler ses désaccords conformément au droit et aux principes de justice.
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Peut-être serait-il bon de rappeler ici que les problèmes auxquels l'Organisation doit faire face aujourd'hui ne sont pas les mêmes que ceux dont elle a eu à traiter précédemment. Au cours de ces 10 dernières années, seule une demi-douzaine sur les plus de 100 conflits qui ont porté atteinte à la paix et à la sécurité internationales étaient des conflits territoriaux. Mais ces conflits ont parfois porté atteinte à la sécurité des personnes et à la stabilité des institutions, voire même, dans certains cas, compromis la paix dans des régions entières.
Instaurer progressivement un climat propice à l'examen de ces questions, dans un esprit de coopération entre tous les États Membres, est peut-être notre principal objectif. Sous notre présidence, nous nous attacherons à poursuivre cet objectif en veillant à n'exclure aucun État, dans le respect de la Charte et du règlement intérieur, avec l'appui et l'aide du Secrétariat, au sein des divers organes subsidiaires groupes de travail et commissions de l'Assemblée générale. En d'autres termes, nous devrons compter sur l'appui et l'aide de tous ceux qui participent à cette session annuelle qui, bien que programmée à l'avance et s'inscrivant dans la routine, n'en est pas moins importante.
Il va sans dire que les problèmes et les questions dont doit s'occuper l'Organisation ne se limitent pas à l'ordre du jour, catalogue systématique et cohérent certainement indispensable pour pouvoir prendre une décision sur chaque question, et dont l'examen est la principale responsabilité de l'Assemblée. L'actualité internationale fait de l'Organisation des Nations Unies à la fois une caisse de résonance et le point de mire des peuples et des gouvernements, des organisations non gouvernementales et du secteur privé, des analystes et des observateurs, des communicateurs et des journalistes et, surtout, de tous ceux qui, pleins d'espoir, oeuvrent à une cause commune en oubliant leurs préoccupations personnelles.
L'Organisation ne peut, et ne pourra jamais, résoudre tous les problèmes et régler tous les conflits que fait naître la coexistence des pays. Le Secrétaire général n'épargne aucun effort pour réduire les dépenses de l'Organisation, mais il ne pourra aller au-delà d'un certain seuil sans risquer de déclencher une crise dans l'ensemble du système. C'est pourquoi, les critiques et récriminations, plus ou moins sévères selon leur source, seront toujours fort nombreuses.
Pourtant, rien n'est sans doute plus dangereux que d'oublier, sous l'influence des critiques, tout ce qui a été accompli par l'Organisation dans de multiples domaines, et constitue de grandes avancées pour l'humanité tout entière. Le nombre croissant d'États Membres de l'Organisation témoigne de l'importance de son action. Prenons tous soin de cette institution et, tout en reconnaissant et en montrant du doigt ses lacunes, ne cédons pas au scepticisme et au découragement. Réaffirmons notre attachement aux valeurs
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essentielles que sont la paix et le progrès, sans faire d'exception, sans sectarisme et en évitant le gel des relations internationales. Attaquons-nous avec la plus grande lucidité et le plus grand réalisme possibles aux problèmes qui mettent en danger l'Organisation, mais ne confondons pas la forme et le fond, l'essentiel et le secondaire.
Cela étant, il faut reconnaître que la marge de manoeuvre de l'Organisation sera limitée, voire nulle, si les États ne s'acquittent pas de leurs engagements. Nous soutenons l'action menée avec diligence par le Secrétaire général dans ce domaine.
La réforme de l'Organisation doit se faire tant sur le plan quantitatif que sur le plan qualitatif et doit concerner non seulement l'ensemble des organismes et des organes du système, mais aussi les États eux-mêmes, leurs relations, les relations régionales et les liens entre les organes de l'Organisation.
En d'autres termes, des questions comme la lutte contre le terrorisme, le désarmement nucléaire (domaine dans lequel s'illustre l'Amérique latine), les droits de l'homme, la protection des femmes et des enfants, la protection des minorités et des personnes déplacées, la poursuite devant une cour compétente des auteurs de crimes contre l'humanité et la lutte contre la maladie, la marginalité et l'extrême pauvreté, ne peuvent être réglées que si l'Organisation améliore sa capacité d'action, tant au niveau politique qu'au niveau du Secrétariat.
Dans ce contexte, nous devons évaluer avec objectivité ce que l'Organisation des Nations Unies a accompli jusqu'à présent. Le cinquantième anniversaire de la proclamation de la Déclaration universelle des droits de l'homme et le cinquantième anniversaire du lancement de la première opération de maintien de la paix illustrent à merveille la capacité d'action de l'Organisation.
Il importe également de veiller à coordonner l'action de l'Organisation des Nations Unies et des autres organisations internationales, à promouvoir les mécanismes d'intégration économique, qui sont l'un des moyens les plus efficaces d'oeuvrer en faveur de la paix et de rendre les frontières plus sûres grâce au commerce et à la coopération, et à encourager la diplomatie préventive sous toutes ses formes.
En conclusion, mes chers amis, je vous invite à vous engager résolument sur un chemin qui sera sans doute semé d'embûches mais qui est aussi porteur d'espoir. Ensemble, mettons en pratique notre volonté de servir une juste cause.
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