SG/SM/6653

LE SECRETAIRE GENERAL APPELLE A UNE INTENSIFICATION DE LA COOPERATION ENTRE L'ONU ET LES GROUPEMENTS REGIONAUX POUR FAVORISER LA PREVENTION DES CONFLITS

13 août 1998


Communiqué de Presse
SG/SM/6653


LE SECRETAIRE GENERAL APPELLE A UNE INTENSIFICATION DE LA COOPERATION ENTRE L'ONU ET LES GROUPEMENTS REGIONAUX POUR FAVORISER LA PREVENTION DES CONFLITS

19980813 On trouvera ci-après le texte de l'allocution que le Secrétaire général Kofi Annan à prononcé le 28 juillet à New York devant la troisième réunion entre l'Organisation des Nations Unies et les organisations régionales :

C'est avec un grand plaisir que je vous souhaite la bienvenue aujourd'hui au Siège de l'Organisation des Nations Unies. J'ai ainsi pour la première fois le privilège d'accueillir cette réunion. Pour avoir de longue date préconisé une coopération plus étroite entre l'Organisation des Nations Unies et les organisations régionales, j'espère que de vos délibérations naîtra un progrès réel de notre capacité à coordonner nos efforts et à en maximiser les effets. C'est le moins que nous puissions faire dans une réunion dont le thème est "Coopération pour la prévention des conflits".

Comme beaucoup d'entre vous le savent, les deux premières réunions entre l'Organisation des Nations Unies et les organisations régionales, qui se sont tenues en 1994 et 1996, ont été essentiellement consacrées à énoncer les principes qui sont appelés à guider notre coopération. Ces réunions ont aussi permis d'examiner des modalités pratiques et plus efficaces d'action collective dans le domaine de la paix et de la sécurité internationales.

Deux nouvelles organisations — l'Organisation de la francophonie et le Conseil de l'Europe — participent à notre réunion cette année. L'augmentation du nombre des organisations participantes témoigne de l'importance croissante du régionalisme en tant que force dans les affaires internationales. Au cours de l'année écoulée, j'ai eu le privilège de m'adresser à un certain nombre d'organisations parmi celles que vous représentez, notamment l'Organisation de l'unité africaine (OUA), l'Organisation des États américains (OEA) et l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN). À chacune de ces occasions, j'ai pu constater chez mes interlocuteurs un sens plus aigu de leur mission et une volonté plus résolue de la réaliser. Jamais le renforcement de la coopération entre l'Organisation des Nations Unies et les organisations régionales n'a été plus nécessaire. À une époque où la principale menace à la sécurité de l'humanité prend la forme de conflits de type nouveau, plus divers et plus mortels, l'Organisation des Nations Unies et les organisations régionales sont en mesure — voire sont tenues — d'approfondir leur coopération pour la prévention de ces conflits.

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Je dis "tenues" parce que les conflits modernes, par leur nature, ébranlent jusqu'aux fondements de la coexistence entre les hommes. Lorsque, des Balkans au Rwanda, il n'y a que génocides, viols à grande échelle et atrocités infligées à des enfants, on ne peut plus dire que la guerre n'est que la poursuite de la politique par d'autres moyens. Lorsque les victimes de la guerre sont essentiellement des civils, et non des militaires, la paix cesse d'être un choix pour devenir une nécessité.

En vérité, la difficile mission de la prévention des conflits touche au coeur même de la mission collective de l'Organisation des Nations Unies et des organisations régionales au cours du siècle qui s'annonce. Telle est la raison pour laquelle j'ai proposé la "prévention des conflits" comme thème général de la réunion de cette année, et je ne peux que me féliciter de l'accueil enthousiaste que les chefs des organisations régionales ont réservé à cette proposition.

À l'heure où l'Organisation des Nations Unies continue de renforcer ses capacités, il importe plus que jamais de forger des liens efficaces avec les organisations régionales. Nous devons faire davantage pour amener une répartition plus rationnelle et rentable des tâches qui favorise l'efficacité, améliore la coordination et accroisse notre aptitude à arrêter et prévenir effectivement les conflits, ce qui est en définitive le seul critère sur lequel notre action sera jugée.

Nous ne devons pas craindre une définition claire et bien établie de nos avantages comparatifs dans les différents domaines ou régions où les difficultés ne manqueront pas demain — ici, l'OUA est peut-être mieux en mesure d'assumer un rôle de médiation; là, l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) est peut-être mieux en mesure d'assumer un rôle de surveillance des élections; ailleurs, l'OTAN est peut-être mieux en mesure d'assumer un rôle de maintien de la paix; ailleurs encore, c'est l'Organisation des Nations Unies qui est mieux en mesure de négocier le règlement d'un conflit et de dépêcher une mission de consolidation de la paix.

Vous n'êtes pas sans savoir que la réussite en matière de prévention des conflits passe impérativement par l'alerte rapide, qui permet de prendre rapidement les mesures qui s'imposent. Puisque nous sommes à la recherche des moyens grâce auxquels nous pourrons mieux identifier les "points chauds", proposer des solutions pour le règlement pacifique des différends et essayer de cristalliser la volonté politique nécessaire, il nous faut tous examiner de près un certain nombre de questions.

En premier lieu, comment allons-nous concentrer notre action sur la mise en place de mécanismes efficaces qui permettent de passer de la détection rapide des crises potentielles à une situation où des mesures de prévention efficaces peuvent être appliquées? En deuxième lieu, comment chaque organisation aborde-t-elle la prévention des conflits en général?

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En troisième lieu, quels sont les outils dont chaque organisation dispose pour la prévention des conflits? En quatrième lieu, comment pouvons-nous agir collectivement pour lever les doutes et les inquiétudes des États Membres?

Jusqu'ici, la forme la plus commune de coopération entre l'Organisation des Nations Unies et les organisations régionales dans le domaine de la prévention a essentiellement consisté à organiser des consultations et à fournir un appui diplomatique. C'est ce que nous avons fait ces dernières années avec l'OEA au Guatemala, au Nicaragua et en El Salvador.

C'est également ce que nous avons fait avec l'OSCE et le Conseil de l'Europe au Nagorno-Karabakh, en Bosnie et au Tadjikistan, avec l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est (ANASE) au Cambodge, et avec l'OUA, la Ligue arabe et l'Organisation de la Conférence islamique en Somalie.

Certes, on ne saurait par un seul modèle de coopération entre nos organisations couvrir toutes les situations, mais il y a un certain nombre de mesures qui pourraient améliorer immédiatement notre action. Je citera, entre autres, des consultations plus régulières; une meilleure circulation de l'information; des échanges d'attachés de liaison, des échanges de personnel opérationnel pour des durées relativement longues entre les sièges des organisations; et d'autres mesures du même ordre à définir au cas par cas.

Il a d'ores et déjà été décidé de nommer un attaché de liaison de l'Organisation des Nations Unies au siège de l'OUA, à Addis-Abeba. Cette fonction, qui devrait faciliter l'échange d'informations et améliorer la coordination de nos activités, pourrait servir de modèle sur lequel les autres organisations régionales pourraient prendre exemple.

Mais, au bout du compte, ce sont nos États Membres qui doivent réaliser la promesse de la prévention multilatérale des conflits. Nous devons donc les assurer que, loin d'empiéter sur leur souveraineté, des activités telles que l'alerte rapide, l'action préventive et la consolidation de la paix visent à rétablir l'autorité et la légitimité des États dont la sécurité et la stabilité sont menacées.

Mon voeu le plus sincère est que la présente réunion, partant des principes généraux sur lesquels nous nous sommes déjà accordés, fasse progresser les choses et examine les aspects concrets et pratiques de la coopération dans le domaine de la prévention des conflits. Il nous incombe par-dessus tout de mobiliser auprès des États Membres une volonté politique effective en faveur de la prévention.

Si nous n'y parvenons pas, aucune action de sensibilisation, aussi vaste soit-elle, et aucune mise en garde, aussi insistante soit-elle, n'apportera le progrès à ceux qui en ont le plus besoin — à ceux qui sont menacés et vulnérables, aux peuples du monde à l'intention desquels l'Organisation des Nations Unies a été créée.

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