LE CONSEIL EXHORTE LES PARTIES AFGHANES A CESSER LE COMBAT ET A RETOURNER SANS RETARD ET SANS CONDITION A LA TABLE DES NEGOCIATIONS
Communiqué de Presse
CS/950
LE CONSEIL EXHORTE LES PARTIES AFGHANES A CESSER LE COMBAT ET A RETOURNER SANS RETARD ET SANS CONDITION A LA TABLE DES NEGOCIATIONS
19980714 Il souscrit à la décision du Secrétaire général d'ouvrir une enquête sur les allégations de massacres de prisonniers de guerre et de civilsA l'issue de consultations sur la situation en Afghanistan, le Président du Conseil de sécurité, M. Sergey Lavrov (Fédération de Russie), a fait au nom des membres du Conseil la déclaration suivante :
"Le Conseil de sécurité a examiné le rapport du Secrétaire général sur la situation en Afghanistan, en date du 19 juin 1998 (A/52/957-S/1998/532).
Le Conseil réaffirme son vif attachement à la souveraineté, à l'indépendance, à l'intégrité territoriale et à l'unité nationale de l'Afghanistan, ainsi que le respect qu'il témoigne à son patrimoine culturel et historique. Il réitère l'inquiétude que lui inspirent le caractère ethnique de plus en plus prononcé du conflit ainsi que la menace que celui-ci continue de faire peser sur l'unité de l'État afghan.
Le Conseil se déclare gravement préoccupé par la poursuite du conflit afghan, qui fait peser une grave menace sur la sécurité régionale et internationale et cause de profondes souffrances aux populations et de nouveaux dégâts matériels, courants de réfugiés et autres importants déplacements forcés de populations.
Le Conseil déplore qu'un appui militaire toujours aussi important y compris des armes et autres matériels connexes continue d'être fourni depuis l'étranger aux factions belligérantes, malgré les appels réitérés que lui- même, l'Assemblée générale et le Secrétaire général ont lancés pour qu'il y soit mis fin. Il demande à nouveau à tous les États, et en particulier aux États de la région, de mettre immédiatement un terme à de telles ingérences.
Le Conseil juge nécessaire de déployer plus activement, sous les auspices de l'Organisation des Nations Unies et avec la participation des pays intéressés, des efforts en vue de parvenir à un règlement pacifique du conflit afghan, qui prenne en compte les intérêts de tous les groupes ethniques et religieux et de toutes les forces politiques qui y sont mêlés.
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Le Conseil déplore la rupture des pourparlers intra-afghans d'Islamabad et exhorte les parties à respecter le souhait de la grande majorité des Afghans, et donc à cesser le combat, à retourner sans retard et sans aucune condition préalable à la table des négociations, et à engager un dialogue politique en vue de parvenir à la réconciliation nationale, à un règlement politique durable du conflit, lequel ne peut connaître une solution militaire, et à la formation d'un gouvernement pleinement représentatif et reposant sur une large assise. Comme premier pas vers cet objectif, il demande à toutes les parties d'accepter immédiatement un cessez-le-feu, un échange de prisonniers, et la levée de toutes les restrictions qui entravent l'envoi de fournitures humanitaires dans tout le pays.
Le Conseil réaffirme que l'Organisation des Nations Unies, en tant qu'intermédiaire universellement reconnu, doit continuer à jouer un rôle central et impartial dans l'action menée par la communauté internationale en vue d'arriver à une solution pacifique du conflit afghan, et apporte son plein appui à la Mission spéciale des Nations Unies en Afghanistan et à l'Envoyé spécial du Secrétaire général pour l'Afghanistan.
Le Conseil prend acte du fait que le Secrétaire général estime que la méthode informelle, pratiquée de longue date en Afghanistan pour résoudre les différends et préconisée par certains dirigeants des factions afghanes non belligérantes, la Loya Jirgah (grande assemblée), continue de mériter de retenir l'attention, et encourage la Mission spéciale des Nations Unies en Afghanistan à entretenir les utiles contacts qu'elle a pris avec ces dirigeants.
Le Conseil juge louables les travaux du Groupe "six plus deux" et demande à tous les pays qui en font partie de continuer à participer de bonne foi dans le but d'élaborer, sur la base des points qu'il a été convenus d'arrêter, une approche cohérente des efforts de paix en Afghanistan, et notamment d'arrêter, effectivement et de façon impartiale, les envois d'armements et de matériels connexes en Afghanistan. Il accueille avec satisfaction et encourage l'appui apporté par d'autres États Membres à ce processus.
Le Conseil prie instamment toutes les factions afghanes de coopérer pleinement avec la Mission spéciale des Nations Unies en Afghanistan et les organisations internationales humanitaires et les exhorte, en particulier les Taliban, à prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et la liberté de mouvement de leur personnel.
Le Conseil prend acte de la signature par l'Organisation des Nations Unies et les Taliban du Mémorandum d'accord sur les questions humanitaires et souligne qu'il importe que celui-ci soit pleinement appliqué, et notamment que les immunités du personnel des Nations Unies soient pleinement respectées et que les organismes des Nations Unies puissent apporter sans entrave leur aide en matière de santé et d'éducation. Notant
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que certains des obstacles qui empêchaient l'acheminement de l'aide jusqu'à la région d'Hazarajat ont été surmontés, il demeure néanmoins préoccupé par le fait que les Taliban continuent de se servir de l'aide humanitaire de l'Organisation des Nations Unies comme d'une arme contre les Hazara et exige qu'ils mettent immédiatement fin à cette pratique. Le Conseil demeure également préoccupé par l'impossibilité de faire venir des fournitures par le nord en raison de l'insécurité et des pillages. Il demande à toutes les factions afghanes de lever inconditionnellement tout blocus empêchant l'arrivée des secours humanitaires.
Le Conseil juge inquiétantes les récentes informations faisant état du harcèlement des organisations humanitaires ainsi que la décision, prise unilatéralement par les Taliban, de déménager les bureaux de ces organisations à Kaboul. Il demande à toutes les factions de faciliter, dans toute la mesure du possible, les travaux des organismes internationaux.
Le Conseil demeure profondément préoccupé par la discrimination à laquelle les filles et les femmes continuent d'être en butte, ainsi que par les autres violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire perpétrées en Afghanistan.
Le Conseil souscrit à la décision du Secrétaire général d'ouvrir une enquête sur les allégations de massacres de prisonniers de guerre et de civils qui auraient eu lieu en Afghanistan, enquête dont les résultats lui seront soumis, ainsi qu'à l'Assemblée générale, dès qu'ils seront connus.
Le Conseil réaffirme que la poursuite du conflit en Afghanistan est un terreau sur lequel prospèrent terrorisme et production illégale et trafic de stupéfiants, qui déstabilise toute la région, et même d'autres parties du monde, et il exhorte les dirigeants des parties afghanes à mettre un terme à ces activités.
Le Conseil demeurera saisi de la question et prie le Secrétaire général de le tenir régulièrement informé de la situation en Afghanistan."
Rapport du Secrétaire général sur la situation en Afghanistan et ses conséquences pour la paix et la sécurité internationales (S/1998/532)
Le rapport du Secrétaire général sur la situation en Afghanistan et ses conséquences pour la paix et la sécurité internationales porte sur l'évolution de la situation depuis l'établissement du rapport du Secrétaire général en date du 17 mars 1998. Le rapport fait état de l'évolution récente de la situation dans le pays où les incidents se sont progressivement multipliés le long de la ligne de front au nord de Kaboul et dans la région de Kunduz. Un moratoire militaire n'a pas empêché la reprise des combats après la suspension réunion d'Islamabad au mois de mai, les Taliban s'efforçant à nouveau de prendre des territoires dans la région de Kunduz tenus par le commandant
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Ahmad Shah Massoud. Le rapport évoque également des livraisons d'armes et de munitions pendant les trois derniers mois en direction des Taliban mais également du Front uni. Le personnel des Nations Unies a été informé, de source sûre, de la présence d'instructeurs militaires étrangers dans les camps des deux parties afghanes, et dans un cas a pu directement constater une telle présence.
Par ailleurs, la situation politique interne entre les factions afghanes a rendu encore plus problématique la reprise des pourparlers de paix. Il a été fait état à plusieurs reprises de combats entre les factions du nord, et même au sein de ces factions. Les dissensions à l'intérieur du Front uni sont l'un des principaux obstacles ayant entravé les pourparlers de paix avec les Taliban. Il a aussi été fait état à plusieurs reprises de tensions au sein de la direction des Taliban et d'une certaine lassitude dans les rangs des combattants.
La situation politique en dehors de l'Afghanistan est légèrement plus prometteuse, les pays de la région ayant commencé à communiquer entre eux plus fréquemment. Il convient de relever en particulier les contacts accrus entre l'Arabie saoudite, le Pakistan et la République islamique d'Iran, qui pourraient contribuer à forger un cadre international solide pour résoudre le conflit afghan avec la participation des principaux protagonistes de la région. Il est également encourageant que le Secrétaire général de l'Organisation de la Conférence islamique (OCI), M. Azzedine Laraki, ait eu des contacts de haut niveau avec les gouvernements intéressés de la région.
Pendant la période à l'examen, la Mission spéciale s'est intéressée essentiellement au dialogue intra-afghan entre les factions belligérantes. Malheureusement, les espoirs fondés sur ce dialogue se sont évanouis avec la rupture des pourparlers directs entre les principales factions afghanes le 3 mai à Islamabad. En effet, la réunion du comité directeur pour préparer la commission d'oulémas, ou docteurs de la loi, afin de régler le conflit afghan sur la base de la charia, a été ajournée le 3 mai sans avoir achevé ses travaux. La question du blocus imposé par les Taliban à la région de Hazarajat s'est avérée être un point extrêmement litigieux. Les dirigeants des Taliban à Kandahar ont informé, le 17 mai, une équipe de la Mission spéciale qu'ils avaient abandonné l'idée de pourparlers intra-afghans par l'entremise d'une commission d'oulémas.
Une série d'entretiens a été engagée par la Mission spéciale avec les dirigeants des factions en vue d'explorer de nouvelles possibilités pour la reprise des pourparlers directs, ajoute le Secrétaire général. L'Organisation des Nations Unies soutient les appels lancés par ces Afghans indépendants pour qu'il soit mis fin aux hostilités et prend acte de l'idée d'organiser une véritable loya jirgah (grande assemblée) pour favoriser un règlement politique. Cette méthode informelle de règlement des différends, pratiquée de longue date en Afghanistan, continue de mériter de retenir l'attention. Le Secrétaire général détaille également les contacts que son Envoyé spécial,
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M. Brahimi, a eu en Afghanistan et dans certains des pays voisins entre le 20 mars et le 15 avril. Ces contacts avaient pour objectif d'encourager une plus grande coopération entre les voisins de l'Afghanistan en particulier le Pakistan et la République islamique d'Iran en vue d'arrêter les livraisons d'armes et de munitions aux factions afghanes.
Une réunion a par ailleurs été organisée par le Secrétaire général adjoint aux affaires politiques le 1er juin. Elle a réuni le Groupe des 21 États Membres ayant une influence en Afghanistan. Les délégations ont unanimement confirmé qu'elles appuyaient le travail entrepris par l'Organisation des Nations Unies et M. Brahimi en coopération avec l'OCI. En outre, M. Brahimi et le Secrétaire général adjoint ont assisté à cinq réunions du groupe Six plus deux depuis le mois d'octobre. Le groupe est parvenu à un accord sur une approche commune reflétée dans une série de questions à aborder dont le texte précise les principes de base pour un règlement du conflit afghan. Ces questions figurent en annexe à mon précédent rapport publié sous la cote A/52/826-S/1998/222. Le groupe a continué à rechercher des modalités pour imposer un embargo sur les armes de façon efficace et équitable.
Le rapport dresse également le bilan de la situation humanitaire qui a continué à se détériorer dans certaines parties du pays. L'insécurité empêche toujours les organismes des Nations Unies de retourner à Mazar-i-Sharif. Par ailleurs, un séisme encore plus fort, d'une magnitude de 6.9 à 6.1 sur l'échelle de Richter, a de nouveau frappé la même région le 30 mai, tuant 4 000 personnes et blessant ou privant d'abris au moins 50 000 autres. Dans la zone montagneuse de Hazarajat, au centre du pays, la vie de dizaines de milliers de civils est en danger en raison de graves pénuries alimentaires causées en partie par la poursuite du blocus imposé à la région par les forces des Taliban au sud et par l'impossibilité de faire venir des vivres des provinces septentrionales à cause de l'insécurité et des pillages. Le PAM a estimé que 167 000 personnes dans la région manquaient cruellement de vivres. Il est encore impératif de faire parvenir 7 500 tonnes supplémentaires dans la région pour les trois prochains mois. Le Secrétaire général demande à toutes les factions afghanes de lever inconditionnellement tout blocus qui pourrait empêcher le passage des secours humanitaires, en particulier ceux destinés aux populations vulnérables. Néanmoins, un mémorandum d'accord en 23 points a été signé; c'est la première fois qu'un document de cette nature est signé par l'ONU et les Taliban. L'accord définit un code de conduite pour l'ONU et pour les autorités locales, met en place un mécanisme de collaboration et de recherche conjointe d'une solution aux problèmes qui se posent et traite de manière préliminaire des questions de parité entre les sexes. Comme suite à cet accord, l'ONU a décidé, le 28 mai 1998, de débloquer son programme dans les régions sud et sud-ouest de l'Afghanistan.
En ce qui concerne le rapatriement des réfugiés, neuf groupes de réfugiés afghans, représentant un total de 6 526 personnes, ont quitté le Pakistan et sont retournés dans la région est de l'Afghanistan au titre du nouveau programme de rapatriement de groupes du Haut Commissaire des
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Nations Unies pour les réfugiés. S'agissant de l'Appel global de 1998 en faveur de l'Afghanistan, 13 % seulement du montant fixé avaient à la mi-mai été couverts par des annonces de contributions et des contributions. Une augmentation des versements de la part des donateurs s'impose de toute urgence.
Le Secrétaire général évoque les graves violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire et estime qu'il est urgent que l'Organisation des Nations Unies prenne des mesure. La mission menée en mai par le Haut Commissariat aux droits de l'homme présentera bientôt ses recommandations au Haut Commissaire. Les résultats préliminaires montrent qu'il existe suffisamment de faits permettant de recommander qu'une enquête soit ouverte sur les allégations relatives à ces violations et qu'elle soit effectuée en bonne et due forme et le plus rapidement possible.
Au titre des recommandations et des conclusions, le Secrétaire général estime qu'il ne pourra être mis fin à la tragédie afghane qu'à condition que la communauté internationale soit décidée à s'attaquer à ses aspects externes, à savoir une ingérence étrangère constante se traduisant par des livraisons d'armes et d'autres fournitures aux factions en guerre. Pour cela, il faut que les puissances régionales engagent le dialogue et renforcent la confiance mutuelle entre elles. Il faut que la communauté internationale adopte une stratégie cohérente où les objectifs politiques et les objectifs en matière d'assistance se renforcent mutuellement et qui lui permette de parler d'une même voix sur les questions de principe et les questions de politique générale. Les progrès qui ont été réalisés, au titre du cadre stratégique global, vers la mise en place d'un dispositif commun de programmation est encourageant.
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