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SG/SM/6602

LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL EXPRIME L'ESPOIR QUE L'EXCISION "NE SERA PLUS QU'UN SOUVENIR" ET QUE LA QUESTION RESTERA À L'ORDRE DU JOUR DE LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE

19 juin 1998


Communiqué de Presse
SG/SM/6602
WOM/1052


LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL EXPRIME L'ESPOIR QUE L'EXCISION "NE SERA PLUS QU'UN SOUVENIR" ET QUE LA QUESTION RESTERA À L'ORDRE DU JOUR DE LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE

19980619 Le texte ci-après reproduit la déclaration du Secrétaire général, M. Kofi Annan, à l'ouverture de la réunion sur "la culture, l'éducation et l'excision", prononcée en son nom par sa Conseillère spéciale pour la parité entre les sexes et la promotion de la femme, Mme Angela King, le lundi 15 juin :

Je suis heureux de saluer tous les participants à cette réunion sur "la culture, l'éducation et l'excision. Je tiens à remercier le Gouvernement et la Mission permanente de l'Ouganda, la Fédération des femmes pour la paix mondiale, la Fédération des familles pour la paix mondiale, Unification International et les autres promoteurs qui ont permis la tenue de cette réunion, spécialement parce qu'elle attire l'attention sur un sujet d'une importance capitale.

Durant la présente décennie, l'excision a été reconnue par la communauté internationale comme une profonde violation des droits des femmes.

La Déclaration de 1993 sur la violence contre les femmes a inclus l'excision et les autres pratiques traditionnelles qui maltraitent les femmes dans la définition de la violence contre les femmes. Le programme d'action adopté à la Conférence internationale sur la population et le développement, en 1994, a invité les gouvernements à interdire l'excision partout où elle se pratique et à soutenir l'action menée par les organisations non gouvernementales et communautaires et par les institutions religieuses pour l'éliminer.

Dans le Programme d'action de Beijing de 1995, la communauté internationale a réaffirmé sa détermination d'éliminer cette pratique, recommandant que les gouvernements adoptent et appliquent des mesures législatives à cette fin.

En 1997, l'Organisation mondiale de la santé (OMS), le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) et le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) ont publié une déclaration commune qui fait date, décrivant la pratique et les motifs de son application, détaillant les ravages qu'elle

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cause et exposant des stratégies pour en venir à bout. La même année, le FNUAP a nommé une ambassadrice spéciale, Waris Dirie, jeune femme courageuse, elle-même victime de cette pratique, pour protester contre la mutilation génitale des femmes.

L'attitude de la communauté internationale à ce sujet n'a cependant pas toujours été aussi vigoureuse. Bien que la question ait été soulevée par la Commission des droits de l'homme dès 1952 et qu'elle ait fait l'objet d'études et de réunions de travail tenues sous les auspices de l'Organisation des Nations Unies et de ses institutions spécialisées, elle est restée largement taboue, cachée derrière l'euphémisme des "pratiques traditionnelles qui nuisent à la santé des femmes et des filles".

L'excision est particulièrement répandue en Afrique, où une forme ou une autre de mutilation génitale des femmes se pratique dans au moins 28 pays, le nombre des victimes s'élevant à 114 millions. À un séminaire pionnier, tenu à Dakar en 1984, les participants venus de 20 pays d'Afrique et les représentants des organisations internationales ont demandé instamment que cette pratique soit abolie et ont réclamé des programmes d'éducation pour modifier les attitudes et les pratiques.

Le message lancé par ce séminaire s'est répandu dans tout le mouvement des femmes en Afrique, diffusé par des femmes comme Mme Jane Frances Kuka, qui nous racontera ce soir son histoire extraordinaire. De fait, c'est largement grâce à des campagnes parties de la base, tout comme la sienne, que ce qui était autrefois tabou sera discuté cette année par les gouvernements à l'Assemblée générale. Voici un progrès remarquable.

De même que Mme Kuka, les femmes africaines ont compris que la pratique était profondément ancrée dans la culture et la tradition et qu'elle était pour beaucoup une question de fierté et de spiritualité. Elles ont compris qu'il ne suffirait pas de dénoncer simplement la mutilation génitale des femmes et de condamner ceux qui la pratiquent, pour provoquer un changement. Elles ont compris que l'excision ne disparaîtrait que si les populations, et notamment les femmes, étaient convaincues qu'elles pouvaient renoncer à une telle pratique sans renoncer aux aspects profonds de leur culture. Elles ont compris que l'excision ne pourrait être éliminée que par des stratégies multidimensionnelles, englobant une action d'éducation et la reconnaissance de l'importance des rites de passage.

Leurs efforts, leur courage et leur détermination ont mis la question de l'excision au premier plan de l'actualité politique.

Je suis certain que vous avez tous connaissance de la décision rendue en décembre par la juridiction administrative égyptienne suprême qui a confirmé la validité d'une décision ministérielle interdisant l'excision. Vous savez aussi, j'en suis sûr, que plusieurs pays, dont les États-Unis, reconnaissent

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la qualité de réfugié aux femmes qui fuient leur pays à cause de craintes bien fondées de mutilation génitale. Vous n'ignorez pas que, bien que le problème reste aigu, les parents choisissent de plus en plus souvent de renoncer à la pratique de l'excision sur leurs filles.

J'ai le sincère espoir que nous approchons le jour où une pratique qui a nui à la santé et à l'épanouissement de tant de filles et de femmes au long des siècles ne sera plus qu'un souvenir. En tant qu'Africain et en ma qualité de Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies, je ferai tout mon possible pour veiller à ce que cette question conserve la place qui lui revient dans l'ordre du jour de la communauté internationale et reçoive, de la part du système des Nations Unies, l'attention sérieuse qu'elle mérite.

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