LE CONSEIL CONDAMNE LES ESSAIS NUCLEAIRES DE L'INDE ET DU PAKISTAN ET RAPPELLE QUE CONFORMEMENT AU TNP, CES DEUX PAYS NE PEUVENT AVOIR LE STATUT D'ETAT NUCLEAIRE
Communiqué de Presse
CS/935
LE CONSEIL CONDAMNE LES ESSAIS NUCLEAIRES DE L'INDE ET DU PAKISTAN ET RAPPELLE QUE CONFORMEMENT AU TNP, CES DEUX PAYS NE PEUVENT AVOIR LE STATUT D'ETAT NUCLEAIRE
19980606 Le Pakistan affirme avoir développé sa capacité nucléaire pour réagir au programme de l'Inde et estime que les cinq Etats nucléaires cherchent à consolider leur positionDans le cadre de sa responsabilité en ce qui concerne le maintien de la paix et de la sécurité internationales, le Conseil de sécurité a adopté cet après-midi à l'unanimité la résolution 1172 (1998) par laquelle il condamne les essais nucléaires auxquels ont procédé l'Inde les 11 et 14 mai et le Pakistan les 28 et 30 mai 1998.
Le Conseil exige que ces deux pays s'abstiennent de procéder à de nouveaux essais nucléaires et demande à tous les Etats d'en faire de même. Il demande à l'Inde et au Pakistan de mettre immédiatement fin à leurs programmes de mise au point d'armes nucléaires et à cet égard, encourage tous les Etats à empêcher l'exportation de matériel, de matière ou de technologie qui pourraient contribuer au programme d'armement nucléaire de ces deux pays.
Le Conseil demande, par ailleurs, à l'Inde et au Pakistan de reprendre leur dialogue sur toutes les questions en suspens relatives à la paix et à la sécurité et les prie instamment d'éviter les opérations militaires, les violations de frontières et autres provocations afin d'éviter que la situation ne s'aggrave. Il les exhorte à adhérer au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires et au Traité d'interdiction complète des essais. Il leur demande aussi de participer aux négociations menées au sein de la Conférence du désarmement sur un traité interdisant la production de matières fissiles aux fins d'armes nucléaires.
Le Conseil rappelle que, conformément au Traité sur la non prolifération de armes nucléaires (TNP), l'Inde et le Pakistan ne peuvent avoir le statut d'Etat doté de l'arme nucléaire.
Le représentant du Pakistan a affirmé que son pays a développé sa capacité nucléaire pour réagir au vaste programme d'armement nucléaire de l'Inde. Si le Conseil de sécurité ne prend ses responsabilités en matière de maintien de la paix et de la sécurité internationales, on ne peut demander
(à suivre - 1a)
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au Pakistan de renoncer à son droit de se défendre contre les menaces extérieures qu'elles émanent d'armes conventionnelles ou de destruction massive. Il a souligné que son pays a été victime d'une discrimination au niveau mondial par les cinq Etats dotés de l'arme nucléaire qui s'octroient le droit d'acquérir et de stocker des armes de destruction massive et de menacer ainsi le reste du monde.
Les membres suivants du Conseil de sécurité ont expliqué leur position : Japon, Suède, Fédération de Russie, Slovénie, Costa Rica, Kenya, Etats-Unis, Brésil, Gambie, France, Gabon, Bahreïn, Chine et Royaume-Uni, au nom de l'Union européenne. Le Secrétaire général a également fait une déclaration.
Outre le Pakistan, les pays suivants se sont exprimés : République islamique d'Iran, Australie, République de Corée, Canada, Emirats arabes unis, Nouvelle-Zélande, Mexique, Ukraine, Argentine, Kazakhstan et Norvège.
Texte du projet de résolution (S/1998/476)
Le Conseil de sécurité,
Réaffirmant les déclarations de son Président en date du 14 mai 1998 (S/PRST/1998/12) et du 29 mai 1998 (S/PRST/1998/17),
Réaffirmant également la déclaration de son Président en date du 31 janvier 1992 (S/23500) dans laquelle il était dit, notamment, que la prolifération des armes de destruction massive constitue une menace contre la paix et la sécurité internationales,
Constatant avec une vive préoccupation que les essais nucléaires auxquels ont procédé l'Inde puis le Pakistan remettent en question les efforts déployés à l'échelle mondiale en vue de renforcer le régime international de non-prolifération des armes nucléaires et gravement préoccupé par la menace posée contre la paix et la stabilité dans la région,
Profondément préoccupé par le risque d'une course aux armements nucléaires en Asie du Sud et résolu à prévenir celle-ci,
Réaffirmant l'importance cruciale que le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires et le Traité d'interdiction complète des essais revêtent pour les efforts déployés à l'échelle mondiale en vue d'assurer la non-prolifération des armes nucléaires et le désarmement nucléaire,
Rappelant les Principes et objectifs de la non-prolifération et du désarmement nucléaires adoptés par la Conférence de 1995 des Parties au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires chargée d'examiner le Traité et la question de sa prorogation, ainsi que le résultat positif de cette conférence,
Affirmant la nécessité de continuer à oeuvrer avec détermination à la mise en oeuvre intégrale et effective de toutes les dispositions du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, et se félicitant que les cinq Etats dotés d'armes nucléaires soient résolus à honorer les engagements qu'ils ont pris à l'article VI du Traité à l'égard du désarmement nucléaire,
Conscient que la Charte des Nations Unies lui confère la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationales,
1. Condamne les essais nucléaires auxquels ont procédé l'Inde les 11 et 14 mai 1998 et le Pakistan les 28 et 30 mai 1998;
2. Souscrit au communiqué commun publié le 4 juin 1998 à l'issue de leur réunion de Genève par les Ministres des affaires étrangères de la Chine, des Etats-Unis d'Amérique, de la Fédération de Russie, de la France et du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord (S/1998/473);
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3. Exige que l'Inde et le Pakistan s'abstiennent de procéder à de nouveaux essais nucléaires et, dans ce contexte, demande à tous les Etats de ne pas effectuer d'essais d'armes nucléaires ou autres explosions nucléaires, conformément aux dispositions du Traité d'interdiction complète des essais;
4. Prie instamment l'Inde et le Pakistan de faire preuve de la plus grande retenue et d'éviter les opérations militaires à caractère menaçant, les violations de frontières et d'autres provocations afin d'empêcher que la situation ne s'aggrave;
5. Demande instamment à l'Inde et au Pakistan de reprendre leur dialogue sur toutes les questions en suspens, en particulier toutes les questions relatives à la paix et à la sécurité, afin de dissiper les tensions existant entre eux, et les encourage à trouver des solutions mutuellement acceptables qui tiennent compte des causes fondamentales de ces tensions, y compris la question du Cachemire;
6. Accueille avec satisfaction les efforts que le Secrétaire général déploie pour encourager l'Inde et le Pakistan à dialoguer;
7. Demande à l'Inde et au Pakistan de mettre immédiatement fin à leurs programmes de mise au point d'armes nucléaires, de s'abstenir d'utiliser le nucléaire à des fins d'armement ou de déployer des armes nucléaires, de cesser de mettre au point des missiles balistiques capables de transporter des armes nucléaires et de produire des matières fissiles à des fins d'armement nucléaire, de confirmer qu'ils ont pour politique de ne pas exporter de matériel, de matières ou de technologies qui pourraient servir à la fabrication d'armes de destruction massives ou de missiles capables de transporter celles-ci, et de prendre à cet égard les engagements voulus;
8. Encourage tous les Etats à empêcher l'exportation de matériel, de matières ou de technologies qui pourraient d'une façon ou d'une autre contribuer au programme d'armement nucléaire en Inde ou au Pakistan ou à la production de missiles balistiques capables de transporter des armes nucléaires, et se félicite des politiques nationales adoptées et déclarées à cette fin;
9. Se déclare gravement préoccupé par les effets préjudiciables sur la paix et la stabilité en Asie du Sud et au-delà des essais nucléaires effectués par l'Inde et le Pakistan;
10. Réaffirme son adhésion pleine et entière au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires et au Traité d'interdiction complète des essais, ainsi que l'importance cruciale de ces instruments, qui constituent la pierre angulaire du régime international de non-prolifération des armes nucléaires et sur lesquels repose la poursuite du désarmement nucléaire;
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11. Se déclare fermement convaincu que le régime international de non-prolifération des armes nucléaires doit être maintenu et consolidé et rappelle que, conformément au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, l'Inde et le Pakistan ne peuvent avoir le statut d'Etat doté de l'arme nucléaire;
12. Constate que les essais auxquels ont procédé l'Inde et le Pakistan font peser une lourde menace sur l'action menée à l'échelon international en vue d'assurer la non-prolifération des armes nucléaires et le désarmement nucléaire;
13. Exhorte l'Inde et le Pakistan, ainsi que tous les autres Etats qui ne l'ont pas encore fait, à adhérer sans retard et sans conditions au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires et au Traité d'interdiction complète des essais;
14. Demande instamment à l'Inde et au Pakistan de participer, dans un esprit positif et sur la base du mandat convenu, aux négociations menées au sein de la Conférence du désarmement à Genève sur un traité interdisant la production de matières fissiles destinées à la fabrication d'armes et autres engins nucléaires, afin qu'un accord puisse être conclu rapidement;
15. Prie le Secrétaire général de lui rendre compte d'urgence des mesures prises par l'Inde et par le Pakistan en vue d'appliquer la présente résolution;
16. Se déclare prêt à étudier les meilleurs moyens d'assurer l'application de la présente résolution;
17. Décide de demeurer activement saisi de la question.
Débat
M. HISASHI OWADA (Japon) a exprimé la grave préoccupation de son pays quant aux conséquences négatives des essais nucléaires effectués par l'Inde et le Pakistan sur la paix et la stabilité dans l'Asie du Sud. La détérioration des relations et le risque de confrontation nucléaire entre les deux grands pays du sous-continent ne peuvent qu'entraîner des incidences graves pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales au-delà de la région, a-t-il fait remarquer. Pour éviter ces conséquences graves, le Conseil de sécurité doit faire face à la situation avec une ferme détermination, de manière urgente et en prenant conscience de sa lourde responsabilité. C'est dans le contexte de la présente résolution que le Conseil de sécurité prie instamment l'Inde et le Pakistan de faire preuve de la plus grande retenue et de reprendre le dialogue sur toutes les questions importantes en vue d'apaiser les tensions qui existent entre eux et de trouver des solutions mutuellement
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acceptables pour répondre aux causes mêmes de ces tensions, en particulier sur le Cachemire. En tant que pays asiatique, le Japon espère fermement que l'Inde et le Pakistan progresseront dans la voie d'une réconciliation historique par le biais d'efforts inlassables visant à créer une confiance mutuelle plutôt qu'une confrontation et une course aux armements.
L'Inde et le Pakistan compromettent gravement le régime international de non-prolifération qui constitue la pierre angulaire indispensable pour donner des garanties à la communauté internationale contre les horreurs d'un holocauste nucléaire. Le Japon est particulièrement préoccupé par les récents essais nucléaires de l'Inde et du Pakistan, dans la mesure où le peuple japonais a été le premier à subir les affres causées par les armes nucléaires et est déterminé à ne pas permettre que cette tragédie nucléaire comme celles d'Hiroshima et de Nagasaki se reproduisent sur notre planète, a souligné M. Owada. Le Japon est convaincu que par le biais de la présente résolution, le Conseil de sécurité devrait exprimer en termes non ambigus sa grave préoccupation à l'égard du défi que les essais nucléaires effectués par l'Inde et le Pakistan constituent face aux efforts internationaux visant à renforcer le régime mondial de non-prolifération des armes nucléaires et leur demande de devenir Parties au Traité de non-prolifération des armes nucléaires et au Traité d'interdiction complète des essais nucléaires.
M. HANS DAHLGREN (Suède) a, une nouvelle fois, condamner les essais nucléaires effectués par l'Inde et le Pakistan. Ces essais, a-t-il estimé, constituent un recul et va au-delà de la volonté de la communauté internationale d'interdire les essais nucléaires. Ils font également courir des risques graves à la sécurité régionale. Si les cinq puissances nucléaires ont une responsabilité particulière dans l'élimination des armes de destruction massive, cette responsabilité ne saurait en aucun cas annihiler l'obligation des autres Etats de contribuer au désarmement et de prévenir la prolifération des armes nucléaires. La Suède rejette sans équivoques la notion selon laquelle l'armement nucléaire accroît la sécurité et renforce la place d'un pays sur l'échiquier mondial. La résolution d'aujourd'hui envoie un message clair : les essais nucléaires ne procurent pas plus de sécurité comme ils ne renforcent pas non plus le statut des pays. Bien au contraire, l'Inde et le Pakistan, par leurs actes récents, ont tourné le dos à la communauté internationale et ne peuvent y revenir qu'à une condition, à savoir, renoncer, à l'instar de l'Afrique du Sud, à l'option nucléaire et adhérer aux régimes des traités pertinents. La Suède reconnaît la complexité du contexte politique et historique en Asie du Sud. Elle encourage l'Inde et le Pakistan à reprendre et à renforcer le dialogue politique sur toutes les questions importantes, y compris la question du Cachemire. La communauté internationale doit se déclarer disposée à faciliter un tel dialogue afin de réduire la tension et établir des relations de confiance et de sécurité entre ces deux pays.
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M. SERGEY V. LAVROV (Fédération de Russie) a souligné que l'affrontement entre l'Inde et le Pakistan ont pris aujourd'hui une dimension nucléaire très dangereuse pour l'ensemble de la région. Les dispositions du projet de résolution d'aujourd'hui doivent donc constituer une réponse unanime face à ce défi, conformément à sa responsabilité en matière de paix et de sécurité internationales. A cet égard, il faut attirer l'attention sur les conclusions de la réunion des cinq ministres des affaires étrangères des membres permanents du Conseil de sécurité. Un appel a d'ailleurs été lancé aux deux pays pour qu'ils adhèrent aux traités pertinents. La Fédération de Russie souligne sa volonté d'aider les parties à rechercher une solution à leurs différends. La Fédération de Russie estime qu'il est inacceptable du point du droit international d'adopter des sanctions économiques contre ces deux Etats et se félicite que de telles dispositions ne figurent pas dans la résolution présentée aujourd'hui. Ces dernières années, des progrès réels ont été effectués dans le domaine nucléaire. La Fédération de Russie et les Etats-Unis espèrent que leurs négociations aboutiront à d'autres progrès. Il faut aussi espérer que d'autres pays se joindront à de tels efforts. Le régime international de non-prolifération doit être renforcé par de nouvelles mesures concrètes. La Fédération de Russie n'épargnera aucun effort pour protéger les accords existants.
M. DANILO TURK (Slovénie) a déclaré que les essais nucléaires effectués par l'Inde et le Pakistan constituent un recul aux efforts internationaux visant à renforcer le régime de non-prolifération des armes nucléaires. Tandis qu'aucun de ces deux pays n'a adhéré au Traité de non-prolifération sur les armes nucléaires ni au Traité d'interdiction complète des essais nucléaires, la délégation slovène estime que les récents essais qu'ils ont effectués ont des conséquences négatives sur les aspirations universelles visant à libérer le monde d'armes de destruction massive. Les principes de non-prolifération nucléaire et d'interdiction des essais nucléaires ont été acceptés par une écrasante majorité. En outre, les essais nucléaires effectués par l'Inde et le Pakistan peuvent avoir des conséquences graves pour la stabilité de leur région et même au-delà. La Slovénie estime que l'acquisition d'armes nucléaires ne peut régler des problèmes politiques importants. M. Türk a souligné qu'il est nécessaire pour le Conseil de sécurité d'agir avec détermination pour empêcher d'annuler les progrès réalisés dans le domaine de la non-prolifération des armes nucléaires.
M. BERND NIEHAUS (Costa Rica) a rappelé que pour son pays, le désarmement va au-delà de la simple politique extérieure. Le Costa Rica a toujours manifesté son rejet de l'armement nucléaire. La course à l'armement nucléaire est, selon lui, contraire aux objectifs de la paix et du développement du monde moderne. Le Costa Rica estime que l'armement nucléaire est irrationnel. Deux pays du monde en développement, ayant des besoins économiques et sociaux urgents, préfèrent utiliser leurs ressources limitées pour des objectifs insensés. En invoquant fallacieusement des impératifs de sécurité, les deux pays menacent, aujourd'hui, la paix et la sécurité internationales.
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Le Costa Rica appelle les deux pays à cesser le processus d'armement nucléaire et à adhérer aux traités pertinents. Ils doivent résoudre leur différend par la voie du dialogue. S'il est vrai que pour des raisons d'équilibre mondial, le Conseil, à ses débuts, n'a pas condamné la prolifération d'armes nucléaires, il faut dire que les temps ont changé et qu'il faut condamner la course aux armements nucléaires. Le Conseil a aujourd'hui une politique de fond qui consiste à condamner tout débordement nucléaire.
M. NJUGUNA MAHUGU (Kenya) a encouragé l'Inde et le Pakistan à faire preuve de modération et à s'abstenir d'effectuer de nouveaux essais nucléaires. Ma délégation demande à ces deux pays de rester engagés en faveur des objectifs du Mouvement des non-alignés de désarmement nucléaire et de participer avec les autres aux négociations pour l'élaboration d'un traité sur la réduction de matériel fissile à la Conférence sur le désarmement à Genève. Il est regrettable que l'insécurité créée par l'absence d'un engagement sérieux de la part des Etats dotés de l'arme nucléaire en faveur du désarmement a fourni à d'autres l'excuse d'assurer leur propre sécurité. A cette fin, on ne peut que souligner la nécessité d'assurances pour la sécurité en faveur des pays non-nucléaires et la nécessité urgente de libérer le monde d'armes nucléaires. Le Kenya votera en faveur de la présente résolution.
M. BILL RICHARDSON (Etats-Unis) a déclaré que les tests nucléaires auxquels ont procédé l'Inde et le Pakistan sont un coup porté au régime international de non-prolifération et à la sécurité dans la région. Aujourd'hui le Conseil de sécurité est sur le point d'adopter une résolution condamnant ses essais. Le texte fait plus que condamner, il indique la voie sur laquelle l'Inde et le Pakistan doivent s'engager pour reprendre leur statut devant les autres nations. A l'issue de la réunion de Genève, la Secrétaire d'Etat aux affaires étrangères des Etats-Unis a fait part de sa volonté de faire appel à d'autres participants pour apporter la paix dans la région. La réunion de Genève fait partie d'un processus continu qui jouira de la participation de nombreuses entités sur les questions nucléaires. Le but de ces réunions n'est pas de faire de l'Inde et du Pakistan des parias, a souligné le représentant en lançant un appel aux deux pays pour qu'ils prennent des mesures visant à réduire les tensions, à ratifier les traités pertinents ou encore à engager des négociations sur le traité d'interdiction de la production des matières fissiles. Les deux pays doivent cesser les essais nucléaires qui ne sont que des actes de provocation. Ils doivent prendre toutes ces mesures parce que c'est dans leur meilleur intérêt.
La voie qu'ils ont empruntée n'ajoute pas à leur sécurité, au contraire elle la diminue. L'Inde et le Pakistan doivent comprendre que leurs essais ne font pas d'eux des Etats nucléaires. Les Etats-Unis ne défendront aucun amendement au TNP pour les hausser au statut d'Etats nucléaires car cela compromettrait l'objectif du Traité et le régime de non-prolifération. Les Etats-Unis veulent oeuvrer pour réduire la tension entre les deux pays.
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Ils ont tendu la main aux parties pour les aider à améliorer la confiance. Aujourd'hui, a souligné M. Richardson, je réitère cette offre au nom de mon Gouvernement. Il a également souligné que la situation du Cachemire est telle qu'elle peut dégénérer en un conflit que personne ne pourra arrêter. Les Etats-Unis exhortent l'Inde et le Pakistan à éviter tout mouvement menaçant. Ils demandent aux deux pays de tenir compte du communiqué de Genève et de la résolution du Conseil de sécurité. Ces textes ne constituent pas une punition ou un châtiment mais représentent l'appel de la communauté internationale en faveur de la retenue, de la prudence et du bon sens.
M. CELSO AMORIM (Brésil) a appelé l'Inde et le Pakistan à faire preuve de retenue, à apaiser les tensions, à promouvoir le dialogue pour un règlement pacifique de toutes les questions bilatérales et à entamer un processus de coopération. Ces mesures ne pourraient que contribuer de manière positive au bien-être de leurs peuples, et renforcer leur statut et leur prestige sur la scène internationale. La délégation brésilienne se déclare profondément préoccupée par la série des événements qui ont poussé l'Asie du Sud à s'engager dans la course aux armements nucléaires, compromettant ainsi le régime international de non-prolifération nucléaire et les efforts internationaux de désarmement nucléaire. Ces événements regrettables renforcent l'urgence de l'adoption par les puissances nucléaires de mesures concrètes pour l'élimination complète des armes nucléaires. Le Brésil s'associe aux déclarations du Mécanisme permanent pour la consultation et la coordination (Groupe de Rio), faites à Panama City, et à la résolution du Conseil de l'Organisation pour l'interdiction de la prolifération des armes nucléaires en Amérique latine et aux Caraïbes (OPANAL). Le Groupe de Rio déplore les essais nucléaires et appelle la communauté internationale à entamer les négociations sur l'élimination des armes nucléaires, ce qui renforcerait ainsi le régime de non-prolifération nucléaire. Le Brésil votera en faveur de la présente résolution.
M. BABOUCARR-BLAISE JAGNE (Gambie) a souligné que l'adhésion aux traités pertinents dépend d'un traitement égal de tous les Etats. Le monde aurait été un endroit plus sûr si tous avaient joué le jeu. Les relations entre la Gambie, l'Inde et le Pakistan permettent d'être confiants et de savoir que le bon sens finira par l'emporter. En votant en faveur de la résolution, la Gambie souligne que le désarmement est une obligation pour toutes les nations.
M. ALAIN DEJAMMET (France) a rappelé que son pays a déploré et condamné les essais nucléaires réalisés par l'Inde et le Pakistan qui vont à l'encontre des efforts mondiaux déployés en vue de la non-prolifération des armes nucléaires et de la très large adhésion internationale au Traité d'interdiction complète des essais nucléaires. Dans un communiqué conjoint, publié le 4 juin dernier, les Ministres des affaires étrangères de la Chine, de la France, de la Fédération de Russie, du Royaume-Uni et des Etats-Unis ont présenté des propositions concrètes et tracé des perspectives que le Conseil de sécurité va entériner en adoptant le projet de résolution.
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Face à la situation en Asie du Sud, la France estime qu'il est prioritaire de maintenir et de renforcer le régime de non-prolifération tel qu'il a été instauré par le Traité de non-prolifération des armes nucléaires. La France réaffirme son attachement à la mise en oeuvre des décisions et de la résolution adoptées par la Conférence d'examen et de prorogation du TNP de 1995. Elle appelle l'Inde et le Pakistan, ainsi que les autres Etats qui ne l'ont pas encore fait, à adhérer au Traité d'interdiction complète des essais nucléaires, sans délai et sans conditions. La France appelle l'Inde et le Pakistan à participer à la négociation d'un traité d'interdiction de la production de matières fissiles à des fins d'armes nucléaires, à la Conférence du désarmement, sur la base du mandat agréé. En outre, les différends entre les deux pays, notamment le Cachemire, sont à la source des problèmes d'aujourd'hui. C'est pourquoi, il est fondamental de rechercher activement une solution à ces problèmes par un dialogue direct, ainsi que par la création de mesures de confiance.
M. DANGUE REWAKA (Gabon) a argué qu'en pareilles circonstances, il faut s'assurer que le Conseil adopte une attitude constante. Force est de constater que dans certains cas, les interventions ont fait montre d'une certaine subjectivité. Il aurait été préférable que la résolution contienne les mêmes termes que les déclarations adoptées par le Conseil dans des circonstances analogues. Dans un souci d'unité et dans un esprit constructif, le Gabon s'associera au consensus.
M. JASSIM MOHAMMED BUALLAY (Bahreïn) s'est félicité des efforts du Japon, de la Suède, du Costa Rica et de la Slovénie pour aboutir à un consensus sur le projet de résolution. Sa délégation appelle l'Inde et le Pakistan à faire preuve de la plus grande retenue et à s'abstenir d'effectuer de nouveaux essais nucléaires. Evoquer la paix et la sécurité en Asie du Sud permet d'évoquer la paix et la sécurité au Moyen-Orient. Il est essentiel de prendre toutes les mesures nécessaires pour libérer le monde d'armes nucléaires et garantir la paix et la sécurité internationales.
M. HUASEN QUIN (Chine) a déclaré que pour arrêter l'escalade de la tension dans la région et préserver le régime de non prolifération, les Ministres des affaires étrangères des cinq pays membres permanents du Conseil de sécurité se sont réunis et ont manifesté leur préoccupation. Ils se sont engagés à collaborer afin de prévenir une course aux armements en Asie du Sud. Les Ministres des affaires étrangères ont demandé aux parties d'éviter des mouvements militaires ou d'autres actes de provocation. La résolution adoptée aujourd'hui, a poursuivi le représentant, reconnaît les résultats positifs de la réunion de Genève. Il faut espérer à ce stade que les efforts du Conseil empêcheront une course aux armements en Asie du Sud. Les essais nucléaires effectués récemment ont porté un coup aux efforts de non prolifération. Il faut donc prendre des mesures pour aider l'Inde et le Pakistan à adhérer aux traités pertinents.
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Le Secrétaire général, M. KOFI ANNAN, a déclaré que les essais nucléaires effectués par l'Inde et le Pakistan mettent en jeu la stabilité d'une région qui est le berceau d'anciennes civilisations et compromettent gravement le régime international de non-prolifération des armes nucléaires. Il a ajouté qu'il poursuivra ses efforts en vue d'encourager les pays concernés à emprunter la voie du dialogue et de la négociation.
M. JOHN WESTON (Royaume-Uni), au nom de l'Union européenne, s'est félicité de l'adoption de la présente résolution qui reflète le rejet par la communauté internationale tout entière des récents essais nucléaires effectués par l'Inde et ensuite le Pakistan, et sa profonde inquiétude quant à la menace à la paix et à la stabilité de la région de l'Asie du Sud par la prolifération des armes nucléaires et de missiles. Comme l'Union européenne l'a déjà indiqué clairement, nous condamnons ces actions qui vont à l'encontre de la volonté exprimée par 149 signataires du Traité d'interdiction complète des essais nucléaires pour mettre fin à ces essais, et aux efforts visant à renforcer le régime international de non-prolifération.
L'Union européenne demeure pleinement engagée au Traité sur la non- prolifération des armes nucléaires comme la pierre angulaire du régime international de non-prolifération et le pivot de la poursuite du désarmement nucléaire, et appelle tous les Etats, qui ne l'ont pas encore fait, de devenir parties à ce Traité. L'Union européenne demeure également pleinement engagée à une entrée en vigueur rapide du Traité d'interdiction complète des essais nucléaires. Elle prie instamment l'Inde et le Pakistan de prendre les mesures nécessaires pour faire preuve de leur engagement en faveur des efforts internationaux sur la non-prolifération et le désarmement nucléaire en signant le Traité d'interdiction complète des essais nucléaires et en procédant à sa ratification; en contribuant activement et sans conditions à l'ouverture de négociations à la Conférence sur le désarmement à Genève pour l'élaboration d'un traité interdisant la production de matériel fissile pour les armes nucléaires ou autres dérivés explosifs nucléaires; en exerçant des contrôles sévères sur l'exportation de matériel, équipement et technologie conformément aux régimes existants; et en cessant le développement et le déploiement des missiles balistiques capables de lancer des têtes de missiles nucléaires. M. Weston a fait observer que l'Union européenne suivra de près l'évolution de la situation et prendra les mesures nécessaires si l'Inde et le Pakistan ne signent, ni ne ratifient les instruments pertinents de non-prolifération des armes nucléaires.
M. KAMAL KHARRAZI (République islamique d'Iran) a déclaré que les récents développements en Asie du Sud sont le résultat de nombreux facteurs historiques et juridiques importants, notamment la perception des pays concernés de l'absence de volonté politique de la part des puissances nucléaires d'entendre l'appel de la communauté internationale en faveur d'un désarmement nucléaire mondial. En particulier, le refus de permettre à
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la Conférence sur le désarmement d'entamer des négociations sur le désarmement nucléaire et de tenir compte des préoccupations des pays non nucléaires au cours des délibérations sur le Traité d'interdiction complète des essais nucléaires ont constitué des facteurs essentiels. Les récents essais nucléaires ont provoqué de graves inquiétudes dans la communauté internationale tout entière, en particulier les pays de la région. La délégation iranienne estime que la présente résolution aurait été plus efficace et plus représentative des vues exprimées par la communauté internationale si elle avait mieux reflété les graves préoccupations des pays non nucléaires. Le représentant a estimé que l'Inde et le Pakistan devraient renouveler leur engagement pour reprendre et poursuivre un dialogue global sur toutes les questions en suspens de façon durable et dans le but d'établir des relations amicales et harmonieuses et de garantir la stabilité dans la région. Le dialogue devrait inclure, entre autres, les questions importantes de la paix et de la sécurité, le Jammu et le Cachemire, les questions nucléaires, notamment la signature et la ratification du Traité de non-prolifération des armes nucléaires et du Traité d'interdiction complète des essais nucléaires. L'Inde et le Pakistan devraient faire preuve de la plus grande retenue et s'abstenir de nouveaux essais nucléaires en vue de garantir le succès du dialogue.
Mme PENELOPE ANNE WENSLEY (Australie) s'est déclarée préoccupée par les essais auxquels ont procédé l'Inde et le Pakistan en qualifiant ces actes de "défi" à l'égard du régime établi par les traités pertinents et de menace au processus de désarmement nucléaire. Ces actes ne sauraient être compatibles avec les déclarations de ces pays selon lesquels ils oeuvrent au désarmement nucléaire. Les essais auxquels il a été procédé menacent la paix et aggravent les perspectives d'une course aux armements dans la région. L'Australie a répondu fermement à ces essais notamment en suspendant l'aide non humanitaire et les visites bilatérales de haut niveau. Elle demande aux deux pays d'annoncer l'arrêt de tous les essais et de ratifier sans conditions le TNP. Elle les engagent également à se joindre aux négociations sur un traité interdisant la production de matières fissiles. Les deux pays doivent prendre des mesures pour reprendre le dialogue. L'après guerre froide a vu des progrès importants dans le processus de désarmement nucléaire par le biais notamment du processus START. Au-delà de ce processus, la communauté internationale considérera un processus multilatéral de désarmement nucléaire. Il va à l'encontre de toute logique de prétendre que l'apparition nucléaire dans deux Etats aidera la tâche du désarmement. La communauté internationale doit agir en refusant la mise au point ou l'acquisition de l'arme nucléaire par de nouveaux Etats. L'Australie appuie la résolution du Conseil qui vient d'être adoptée.
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M. SEE YOUNG LEE (République de Corée) s'est déclaré profondément préoccupé par la grave menace au régime mondial de non-prolifération des armes nucléaires et à la stabilité de l'Asie du Sud, causée par les essais nucléaires effectués par l'Inde et le Pakistan. Son gouvernement a suivi très attentivement et avec une grande inquiétude l'évolution de la situation en tant que signataire du Traité de non-prolifération des armes nucléaires et du Traité d'interdiction complète des essais nucléaires, et en tant que pays renonçant volontairement et sans équivoque à sa capacité nucléaire. M. Lee s'est déclaré fermement convaincu que la communauté internationale devrait réagir de manière résolue aux défis posés par les essais nucléaires. En l'absence de mesures concrètes, on affaiblirait l'efficacité du régime de non- prolifération nucléaire et accélèrerait la course aux armes nucléaires dans la région et même au-delà. La République de Corée se félicite de la série d'initiatives prises par le Conseil de sécurité, en tant qu'organe chargé du maintien de la paix et de la sécurité internationales, et appuie fermement la présente résolution.
M. ROBERT FOWLER (Canada) a estimé que les essais nucléaires de l'Inde et du Pakistan constituent une menace claire à la sécurité internationales. Trente ans de succès en matière de désarmement nucléaire sont aujourd'hui compromis. L'Inde et le Pakistan ont ramené le monde aux années sombres de la terreur nucléaire. Le principe de la "real politique" voudrait que l'on accepte ces deux pays comme Etats nucléaires, ce qui serait alors un recul dans le processus de désarmement. Il faut éviter toute mesure qui autoriserait ces pays à acquérir l'arme nucléaire. Cinq pays sont reconnus comme Etats nucléaires et si ce nombre était porté à sept, d'autres pays réclameraient aussi ce statut. Le monde ne peut se permettre une telle situation. Par leurs actes, l'Inde et le Pakistan ont rendu caduque leur prétention de siéger au Conseil de sécurité et encore d'acquérir un siège permanent, et ce en vertu des dispositions existantes. Les peuples de l'Inde et du Pakistan et leurs voisins n'ont jamais connu de plus grands dangers. Des pressions doivent être exercées pour convaincre les deux pays de renoncer à leur politique nucléaire. Le Canada a pris des mesures comme la suspension des contacts de haut niveau ou de l'aide bilatérale autre qu'humanitaire. Les essais nucléaires de l'Inde et du Pakistan montrent que l'heure est venue d'assurer la transparence dans le processus de désarmement. Il est temps que les organes pertinents aillent au-delà de leurs débats stériles. La communauté internationale n'a pas les moyens de succomber à un fatalisme nucléaire. Il faut donc aller au delà du message lancé à l'Inde et le Pakistan, et adresser aussi un autre message aux puissances nucléaires pour qu'elles remplissent leurs engagements de réduire les stocks d'armes nucléaires. Le Conseil de sécurité doit assumer sa responsabilité de mettre en oeuvre la résolution adoptée aujourd'hui.
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M. NABIL EL ARABY (Egypte) a déclaré que les essais nucléaires effectués par l'Inde et le Pakistan, qui ont gravement préoccupé la communauté internationale, ne devraient pas être examinés isolément du régime de non- prolifération nucléaire. Sa délégation souligne que l'examen du processus du TNP montre bien que les Etats non parties au Traité ont exigé dès le début des garanties contre toute menace du recours à l'arme nucléaire. Il est essentiel que le Conseil de sécurité réexamine le dossier du TNP et prenne les mesures nécessaires pour donner ces garanties aux pays non nucléaires. Il est plus urgent aujourd'hui que jamais de renforcer le régime de non-prolifération. Les essais nucléaires constituent une menace grave à la paix et la sécurité internationales, au titre du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies. La conclusion d'un accord interdisant le recours à l'arme nucléaire constituerait un engagement fondamental. Le représentant a fait remarquer que les risques nucléaires imposent de nouvelles responsabilités en faveur des pays non nucléaires. L'Egypte regrette que certains Etats ne se soient pas engagés pour une prorogation indéfinie du TNP. Faisant remarquer que certains pays tentent de fuir leurs responsabilités, M. El Araby a souligné les conséquences graves qu'une telle attitude peut causer pour la paix et la sécurité tant régionales qu'internationales. A cet égard, il a insisté sur le refus par Israël de signer le TNP. Rappelant que la Conférence de Madrid a examiné la question de la sécurité au Moyen-Orient, il a déploré qu'Israël n'ait toujours pas commencé des négociations en la matière. La délégation égyptienne insiste pour que le Conseil de sécurité fasse respecter par Israël le Traité de non- prolifération des armes nucléaires.
M. AL-HOSANI YACUB YOUSIF (Emirats arabes unis) a estimé que l'Inde et le Pakistan viennent de prouver la complexité du désarmement nucléaire. La concurrence prévaut toujours dans le domaine de l'armement nucléaire surtout pour les Etats qui connaissent des tensions ou qui, au mépris des dispositions du droit international, donne libre cours à leurs velléités d'hégémonie. En dépit des attentes nées de l'après-guerre froide, certains pays continuent de procéder à des essais nucléaires. Les Emirats arabes unis, qui ont signé les deux traités pertinents, estiment que ces instruments constituent la pierre angulaire de la sécurité mondiale. Une telle menace dans une région proche fait craindre l'éminence d'un drame pour l'humanité et pour tous les peuples. Le représentant a appelé au règlement pacifique des différends entre l'Inde et le Pakistan et souligné que les essais nucléaires ne sauraient qu'intensifier la tension dans la région. Il a lancé un autre appel pour que l'Inde et le Pakistan, pays amis des Emirats arabes unis, fassent preuve de retenue et reprennent le dialogue. Il a également lancé un appel au Conseil de sécurité pour qu'il use de ses bons offices afin de prévenir toute escalade de la tension entre ces deux pays. A cet égard, a-t-il ajouté, la politique de deux poids deux mesures du Conseil de sécurité, qui accepte qu'Israël soit un Etat nucléaire, ne peut qu'encourager la course aux armements. Il faut donc demander au Conseil de sécurité d'imprimer un caractère obligatoire aux traités sans exception et de faire de la région du Moyen-Orient et
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des autres régions des zones exemptes d'armes de destruction massive y compris les armes nucléaires. Toute paix juste et durable doit s'appuyer sur la volonté politique des Etats de renforcer le dialogue, la coopération et la confiance et ce, en mettant fin à la course aux armements sous toutes ses formes.
M. MICHAEL POWLES (Nouvelle-Zélande), rappelant que son gouvernement a condamné les essais nucléaires effectués par l'Inde et le Pakistan, a estimé que les essais nucléaires ne peuvent jamais être justifiés. De même, la Nouvelle-Zélande estime que les armes nucléaires n'ont aucune place légitime dans notre monde. La Cour internationale de justice a réaffirmé, à l'unanimité, les obligations de poursuivre de bonne foi et de conclure les négociations sur le désarmement nucléaire sous tous ses aspects et qui sera placé sous le contrôle d'un régime international efficace et strict. Cette obligation s'applique aussi bien à l'Inde et au Pakistan qu'à d'autres Etats. Les essais nucléaires lancés par l'Inde et le Pakistan sont incompatibles avec cette obligation. Au moment où certains pays comme la Nouvelle-Zélande souhaitent accélérer le processus de désarmement nucléaire, l'Inde et le Pakistan retournent à l'ère de la course à l'armement nucléaire et de la confrontation. La délégation de la Nouvelle-Zélande déplore que ces deux pays agissent en violation des normes internationales. Si l'Inde et le Pakistan veulent réparer le préjudice causé, ils doivent renoncer à leurs programmes d'armement nucléaire et adhérer sans conditions au Traité d'interdiction complète des essais nucléaires et au Traité de non-prolifération des armes nucléaires.
M. MANUEL TELLO (Mexique) a souligné que la situation dans le sud de l'Asie ne peut qu'inquiéter la communauté internationale. Il devient donc urgent que l'Inde et le Pakistan trouvent des solutions à leurs divergences historiques afin d'établir la stabilité entre eux et par conséquent dans la région. L'horreur des 50 ans d'essais nucléaires vient à peine de prendre fin et dans ce contexte, permettre, à la veille du XXIème siècle, que commence une nouvelle course nucléaire porterait atteinte à tous les traités établissant les zones exemptes d'armes nucléaires comme au TNP. Il ne faut pas oublier que le monde a été il y a longtemps une zone totalement exempte d'armes nucléaires. Il faut donc rétablir cette situation. On ne peut justifier l'acquisition d'armes nucléaires et l'ère nucléaire doit être vue comme un kyste cancéreux qu'il faut extirper. La réalité nucléaire compromet le renforcement du régime de non-prolifération et les dispositions du CTBT. Le Mexique lance un appel à tous les pays pour qu'ils adhèrent aux traités pertinents et ajoute, par ailleurs, que les arsenaux existants ne renforcent pas la sécurité mais l'affaiblissent au contraire. Tous les Etats doivent conclure des négociations sur le désarmement nucléaire. Le communiqué conjoint de Genève, publié à l'issue de la réunion des Ministres des affaires étrangères des cinq puissances nucléaires signalent leur volonté de s'acquitter des engagements pris en vertu du TNP. Il faut s'en féliciter
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et rappeler que l'avis de la Cour internationale de Justice établit l'obligation d'entreprendre de bonne foi des négociations visant le désarmement nucléaire sous tous ses aspects. Le Mexique est convaincu que le régime de non-prolifération doit être préservé et sa crédibilité rétablie. Le désarmement n'incombe pas seulement aux Etats nucléaires et la création d'un comité sur le désarmement nucléaire dans la cadre de la Conférence sur le désarmement devient donc urgent et nécessaire.
M. VOLODYMYR YEL'CHENKO (Ukraine) a rappelé que son pays a renoncé volontairement au troisième arsenal nucléaire le plus important du monde et assume son statut d'Etat non nucléaire. L'Ukraine continue de se conformer à ses engagements et à promouvoir de manière énergique le désarmement nucléaire universel. En conséquence, l'Ukraine, comme tout autre Etat, est en droit de condamner les actions qui menacent le régime de non-prolifération. L'Ukraine a adhéré en 1994 au Traité de non-prolifération des armes nucléaires et a signé en 1997 le Traité d'interdiction complète des essais nucléaires en tant qu'Etat dont la participation au Traité est essentielle à son entrée en vigueur. Le représentant a souligné qu'il est très important que la communauté internationale fasse preuve de fermeté, de cohésion et de détermination pour assurer le respect des principes et des objectifs de non- prolifération, empêcher l'escalade de la course aux armes nucléaires en Asie du Sud et assurer la paix et la stabilité tant dans la région que dans le monde. Sa délégation se déclare fermement convaincue que la seule de façon de procéder pour l'Inde et le Pakistan est de signer et ratifier les instruments pertinents. L'Ukraine se dit prête à appuyer le processus de négociations sur les questions qui opposent l'Inde au Pakistan. A cet égard, M. Yel'chenko a émis l'espoir que le Secrétaire général encouragera l'Inde et le Pakistan à entamer un dialogue immédiat et constructif.
M. FERNANDO ENRIQUE PETRELLA (Argentine) a indiqué qu'en 1995, son pays a participé activement à la conférence sur la prorogation du TNP pour s'ajouter ensuite aux pays qui ont signé le Traité sur l'interdiction complète des essais nucléaires. Il faut constater aujourd'hui que le régime de non prolifération est menacé. Il est donc nécessaire que les tous pays adhèrent pleinement à ces instruments. L'Argentine est préoccupée par les actes de l'Inde et du Pakistan. Elle a depuis longtemps compris les dangers de la technologie nucléaire. Faisant l'historique de son pays en la matière qui a conduit à une politique nucléaire commune entre son pays et le Brésil, le représentant a déclaré que c'est cette coopération qui a conduit les deux pays à ratifier le Traité de Tlatelolco. Les ressources ainsi économisées ont permis des investissements importants dans l'industrie de l'énergie. La coopération internationale a permis, pour sa part, l'affectation des ressources vers les priorités réelles du domaine social. C'est la raison pour laquelle l'Argentine appuie la résolution adoptée. Le message de l'Argentine est simple : elle plaide en faveur d'un dialogue franc et constructif pour le règlement pacifique des différends.
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M. SVEIN AASS (Norvège) a estimé que la décision de l'Inde et du Pakistan de procéder à des essais nucléaires sous-terrains constituent un véritable défi à la communauté internationale et une menace pour le régime de non- prolifération ainsi que pour la paix et la stabilité dans l'ensemble de la région. Ces tests attestent de l'importance cruciale des Traités sur la non- prolifération des armes nucléaires (TNP) et d'interdiction complète des essais nucléaires (CTBT). Il est urgent d'établir un dialogue constructif entre la communauté internationale, New Delhi et Islamabad et de convaincre ces deux derniers de renoncer aux programmes d'armements nucléaires. Il est de même essentiel de s'assurer que la situation en Asie du Sud ne se détériore au point de provoquer une instabilité grave ou la guerre. La Norvège lance un appel au Pakistan et à l'Inde pour qu'ils annoncent immédiatement l'arrêt des essais et la renonciation à leur programmes nucléaires. La Norvège appelle les deux pays à devenir parties au TNP et au CTBT. Elle lance aussi un appel urgent aux deux pays pour qu'ils participent aux négociations, dans le cadre de la Conférence du désarmement, sur un traité interdisant la production de matières fissiles aux fins d'armes nucléaires.
M. SERGEY AGEYEV (Kazakhstan) a constaté avec regret que l'Inde et le Pakistan, ayant renoncé à contenir leurs ambitions nucléaires, compromettent aujourd'hui la paix et la sécurité internationales. Le Kazakhstan, qui s'est toujours prononcé contre la course à l'armement nucléaire, estime que l'Inde et le Pakistan doivent adhérer aux traités pertinents.
M. AHMAD KAMAL (Pakistan) a rappelé que pendant près de 50 ans, son pays n'avait cessé d'attiré l'attention des Nations Unies sur l'occupation illégale par l'Inde du Jammu-Cachemire. Le Pakistan a cherché à plusieurs reprises d'attirer l'attention de la communauté internationale sur la campagne brutale lancée par l'Inde pour empêcher le peuple du Cachemire d'exercer son droit inaliénable à l'autodétermination, comme le prévoient les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité. Le gouvernement pakistanais a prié instamment le Secrétaire général et le Conseil de sécurité de prendre connaissance de cette situation et a même proposé le renforcement du Groupe d'observateurs militaires des Nations Unies en Inde et au Pakistan. M. Kamal a souligné que la non-prolifération ne peut pas être réalisée par la création ou l'approbation d'une situation vide de sécurité. Cela continue d'être soutenu par tous ceux qui ont cherché à promouvoir l'objectif de non- prolifération. Le Conseil de sécurité s'est contenté de traiter des aspects de non-prolifération. La non-prolifération ne constitue plus une question en Asie du Sud. L'Asie du Sud est aujourd'hui une zone nucléaire grâce aux encouragements et à l'approbation tacite des puissances nucléaires. Si le Conseil de sécurité souhaite jouer un rôle pour contenir cette crise et empêcher qu'elle ne s'aggrave, il devrait adopter une approche pragmatique et réaliste.
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M. Kamal a fait remarquer que la résolution que le Conseil de sécurité vient d'adopter est dénuée de réalisme. Le Conseil semble attiser la flamme. Sa délégation estime que la résolution est un exercice transparent des cinq Etats nucléaires qui cherchent à consolider leur position. Le Pakistan est contraint à revoir sa position. C'est la première fois que le Conseil de sécurité examine une question relevant de la non-prolifération nucléaire, ce qui est contraire à la lettre et à l'esprit de la Charte des Nations Unies. Comment le Conseil de sécurité pourrait-il faire face à la non-prolifération ou à la question du lien entre le désarmement nucléaire et la non- prolifération nucléaire ? Le Mouvement des pays non alignés s'est exprimé clairement sur la question de la sécurité internationale fondée sur la politique de l'élimination des armes nucléaires. Si le Conseil est vraiment préoccupé par la non-prolifération, la présente résolution accorde peu de justice aux vues exprimées par la majorité du Mouvement des pays non-alignés, y compris ceux qui sont parties au TNP.
Le Pakistan n'a fait que montrer sa capacité nucléaire. Il l'a fait pour exercer sa légitime défense et pour restaurer l'équilibre stratégique en Asie du Sud. C'est l'Inde qui s'est proclamée sixième puissance nucléaire. Est-ce que le Conseil souhaite que le Pakistan en fasse de même ? En outre, la résolution ne tient pas compte du fait qu'outre l'Inde et le Pakistan, il existe d'autres Etats, non parties au TNP, qui possèdent l'arme nucléaire et l'ont reconnu. L'avenir de la non-prolifération ne peut être assuré en laissant de côté sa base juridique et morale. C'est exactement ce que vient de faire le Conseil de sécurité. Le Conseil est sur le point de s'engager dans une course totalement irréaliste et vouée à l'échec en ce qui concerne l'avenir de la non-prolifération et le désarmement nucléaire. Le Pakistan a été victime d'une double discrimination. Au niveau régional, par ce que le Conseil de sécurité n'a pas pu distinguer entre l'action et la réaction, entre une provocation et une réponse, entre une cause et un effet. Le Pakistan n'a développé sa capacité nucléaire que pour réagir au vaste programme d'armement nucléaire de l'Inde. On ne peut demander au Pakistan de renoncer à son droit de se défendre contre les menaces extérieures qu'elles émanent d'armes conventionnelles ou de destruction massive. Au niveau mondial, le Pakistan a été victime d'une discrimination par les cinq Etats nucléaires qui s'octroient le droit d'acquérir et de stocker des armes de destruction massive et de menacer ainsi le reste du monde.
Le Conseil de sécurité devrait s'attacher à réduire le risque d'un conflit nucléaire, promouvoir la retenue nucléaire et les mesures de stabilisation entre l'Inde et le Pakistan, et aider à dissiper la tension au Jammu- Cachemire, en particulier le long de la ligne de contrôle.
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