LE COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS POURSUIT L'EXAMEN DU RAPPORT DES PAYS-BAS
Communiqué de Presse
DH/G/862
LE COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS POURSUIT L'EXAMEN DU RAPPORT DES PAYS-BAS
19980506 Plusieurs experts soulèvent la question de la moralité de la politique libérale des Pays-Bas au regard de la protection de la familleGenève, 6 mai -- Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a poursuivi, ce matin, l'examen du rapport des Pays-Bas en discutant des questions liées à la politique de protection de la famille, au logement et à la santé. L'attention s'est portée en particulier sur les problèmes relatifs à la prostitution, au statut des couples homosexuels, aux expulsions forcées, à la situation des demandeurs d'asile et aux stupéfiants.
Abordant les questions relatives à la protection de la famille, de la mère et de l'enfant suivie par les Pays-Bas, un membre du Comité s'est demandé si la politique libérale suivie par les Pays-Bas dans de nombreux domaines avait des incidences sur la situation et l'évolution de la famille. Un autre expert a souligné que le Pacte énonce des obligations en ce qui concerne le respect de la moralité publique. Un expert a néanmoins estimé que le Comité n'avait pas à se prononcer sur les questions morales. La délégation a par ailleurs indiqué que l'exploitation de la prostitution d'autrui est illégale aux Pays-Bas, mais la législation néerlandaise établit une distinction entre prostitution forcée et prostitution volontaire.
En matière de droit au logement, la délégation a souligné que les autorités municipales ont l'obligation d'appliquer des mesures de relogement à l'intention des personnes expulsées. Le Gouvernement a par ailleurs l'obligation de fournir un logement aux demandeurs d'asile jusqu'à ce qu'une réponse ait été apportée à leur demande et, s'ils sont déboutés, jusqu'au moment où ils retourneront dans leur pays.
Le Comité achèvera cet après-midi, à partir de 15 heures, sa discussion sur le rapport des Pays-Bas. Il a par ailleurs décidé de reporter à sa prochaine session l'examen de la situation aux Îles Salomon afin de pouvoir d'ici là rassembler des informations fiables sur la situation dans ce pays qui n'a présenté aucun rapport au Comité à ce jour.
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Aperçu de la discussion sur le rapport des Pays-Bas
Plusieurs experts se sont inquiétés des conséquences néfastes des modifications apportées aux lois relatives à la sécurité sociale sur la situation de certains des secteurs les plus vulnérables et les plus défavorisés de la société néerlandaise.
La délégation néerlandaise a souligné que le système de sécurité sociale, fruit d'un travail de longue haleine, est très élaboré aux Pays-Bas. Elle a assuré que le pays a procédé à une refonte du système tout en tenant compte des obligations qui lui incombent en vertu du Pacte. En ce qui concerne les mesures de protection de la famille, de la mère et de l'enfant le Gouvernement néerlandais estime important de créer des conditions favorables permettant aux familles de jouer leur rôle traditionnel. Il n'existe pas d'institution spéciale qui, au sein du Gouvernement, soit spécifiquement chargée des questions liées à la violence familiale, a indiqué la délégation. Il existe toutefois des lignes téléphoniques directes pour aider les enfants victimes d'abus sexuel, a-t-elle précisé. En outre, un citoyen peut prévenir la police s'il existe une forte présomption d'abus sexuel perpétré contre des enfants. Conformément aux obligations qui incombent au pays en tant que membre de l'Union européenne, des mesures législatives doivent être prises pour protéger les jeunes de la pornographie. La délégation a souligné que la protection des jeunes, en l'occurrence, soulève également la question de la capacité de l'État d'intervenir dans la programmation des médias.
Un expert s'est demandé comment les Pays-Bas parvenaient à concilier la légalisation de la prostitution avec les obligations qui incombent au pays en matière de protection de la famille et des femmes. Un membre du Comité s'est demandé si la loi qui, depuis le 1er janvier 1998, donne aux partenaires d'un couple non marié les mêmes droits que ceux dont jouissent les couples mariés, leur impose également des obligations. Les Pays-Bas estiment-ils que la législation relative aux couples homosexuels est conforme à l'obligation de protection de la famille conformément aux dispositions du Pacte, a demandé un expert. Les homosexuels ont-ils droit d'adopter des enfants et, si tel est le cas, quelles mesures sont-elles prises pour protéger ces enfants contre les abus sexuels, a demandé un expert ?
Un membre du Comité a souligné que le Pacte énonce des obligations en ce qui concerne le respect de la moralité publique. Un autre a demandé à la délégation de lui indiquer si la politique libérale suivie par les Pays-Bas dans de nombreux domaines avait des incidences sur la situation et l'évolution de la famille. Un expert a néanmoins estimé que le Comité n'avait pas à se prononcer sur les questions morales.
La délégation s'est interrogée sur l'opportunité d'ouvrir devant le Comité un débat sur les questions de moralité, notamment en ce qui concerne la dignité des femmes prostituées. La délégation a par ailleurs souligné que les maisons de prostitution sont interdites et que l'exploitation de la
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prostitution d'autrui était illégale. La législation néerlandaise fait la différence entre la prostitution forcée et la prostitution volontaire. Il y a dans le pays entre 25 000 et 30 000 femmes prostituées. La délégation n'a pas nié l'existence d'un problème de trafic de femmes mais a souligné que ce problème est mondial. Aussi, le Gouvernement ne ménage-t-il aucun effort pour mettre un terme à ce trafic et coopère-t-il en ce sens au niveau international. D'autre part, il y a eu une émancipation considérable des homosexuels aux Pays-Bas et l'égalité des droits leur est reconnue. Les couples homosexuels, à l'heure actuelle, ne peuvent pas adopter d'enfants, même s'il est vrai que cette question est à l'étude, a affirmé la délégation.
Passant en revue les mesures prises par les Pays-Bas pour donner effet aux dispositions du Pacte concernant le droit au logement, un membre du Comité a fait état d'informations émanant de la section néerlandaise de la Commission internationale de juristes selon lesquelles 6 000 ménages auraient été expulsés de leur logement en 1995. Selon ces informations, les personnes concernées n'ont pas toujours été relogées, a souligné l'expert. Il a également mentionné les informations fournies par la Fédération des associations nationales de logement des Pays-Bas selon lesquelles de logements abandonnés par leurs propriétaires restent vacants.
La délégation a affirmé qu'il n'est pas aisé d'obtenir des données sur le phénomène des expulsions forcées mais a assuré que le nombre d'expulsions forcées est faible. En outre, les autorités municipales ont l'obligation d'appliquer des mesures de relogement à l'intention des personnes expulsées. La cause principale des expulsions forcées réside dans le non-paiement d'arriérés de loyers. La délégation a reconnu l'obligation sociale des autorités de loger les personnes à faible revenu et a souligné que les subventions d'aide au logement ont considérablement augmenté ces trois dernières années. Aux Pays-Bas, la demande de logements bon marché a énormément diminuée. La demande actuelle dans le secteur immobilier concerne essentiellement des logements de qualité moyenne ou élevée, a-t-elle poursuivi. Ainsi, plus de 70% des nouvelles mises en chantier concernent des logements à prix moyen ou élevé.
En réponse à un expert qui attirait l'attention sur des informations faisant état d'une discrimination dans le secteur du logement contre certaines personnes en raison de leur orientation sexuelle, la délégation a souligné qu'un changement a été apporté au code civil néerlandais aux termes duquel, après la disparition d'un des partenaires vivant dans un logement donné, le survivant continue de bénéficier du même logement et du même loyer. Cette disposition s'applique également aux partenaires homosexuels qui partagent un même appartement, a précisé la délégation.
Un membre du Comité a également attiré l'attention sur la situation des demandeurs d'asile qui attendent, pendant parfois sept mois, le résultat de leur demande de permis de séjour permanent. Selon la section néerlandaise de la Commission internationale de juristes, il semble qu'il y ait un problème en
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ce qui concerne les conditions de vie dans les centres d'accueil des demandeurs d'asile, a affirmé cet expert. La délégation a affirmé que le Gouvernement néerlandais a l'obligation de fournir un logement aux demandeurs d'asile jusqu'à ce qu'une réponse ait été apportée à leur demande et, s'ils sont déboutés, jusqu'au moment où ils retourneront dans leur pays. La délégation a déclaré, à cet égard, qu'elle devra s'adresser à son Gouvernement pour recueillir l'avis des responsables concernés en ce qui concerne les conditions de vie dans les centres d'accueil des demandeurs d'asile.
Interrogée sur la politique de santé, la délégation des Pays-Bas a indiqué que la politique menée en la matière par l'actuel Gouvernement vise trois objectifs essentiels, à savoir augmenter l'espérance de vie, prévenir les décès qui peuvent être évités et accroître la qualité de vie des personnes souffrant de maladies chroniques ou de handicaps. L'idée de limiter les dépenses de santé de l'État est désormais généralement admise aux Pays-Bas, a souligné la délégation. Elle a par ailleurs indiqué que la politique du Gouvernement en ce qui concerne les stupéfiants a pour but de protéger la santé de la population en restreignant à la fois la demande et l'offre de drogues. La loi sur l'opium établit une distinction entre drogues douces (cannabis) et drogues dures, parmi lesquelles figurent l'ecstasy, la cocaïne, l'héroïne. En ce qui concerne les locaux connus sous le nom de coffee shops, des poursuites judiciaires ne sont engagées que si les gérants ne respectent pas les règles en vigueur régissant ces locaux. Ainsi, il ne doit pas être vendu plus de cinq grammes de drogues douces par personne au cours d'une même transaction, aucune publicité ne peut être faite en faveur des stupéfiants, aucune drogue dure ne peut être vendue et les locaux ne peuvent être fréquentés par des mineurs de 18 ans. Les autorités municipales peuvent fermer ces locaux, a précisé la délégation. L'État dépense plus de trente millions de florins pour aider les toxicomanes, a-t-elle ajouté. Certains experts ont souhaité savoir dans quelle mesure les immigrants illégaux ont accès aux services de santé, ainsi que les mesures prises par le Gouvernement dans le domaine de la prévention des maladies.
S'agissant de la situation à Aruba, un membre du Comité s'est enquis du nombre de lois discriminatoires, fondées sur une distinction entre les sexes ou entre enfants légitimes et non légitimes, qui sont encore en vigueur à Aruba. Un autre expert s'est demandé si la loi sur les stupéfiants est appliquée à Aruba de la même manière qu'elle l'est dans la partie européenne des Pays-Bas. Un membre du Comité a souhaité connaître la durée de la semaine légale de travail à Aruba. La délégation devrait répondre cet après-midi aux questions concernant la situation sur l'île d'Aruba. Cet après-midi, le Comité abordera également l'examen de la situation dans les Antilles néerlandaises.
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