LE CONSEIL DE SECURITE EXAMINE LES MOYENS DE REPONDRE AUX BESOINS URGENTS DE L'AFRIQUE
Communiqué de Presse
CS/919
LE CONSEIL DE SECURITE EXAMINE LES MOYENS DE REPONDRE AUX BESOINS URGENTS DE L'AFRIQUE
19980424 Il a entamé un débat sur la situation à la suite du rapport du Secrétaire général sur les causes des conflits en Afrique et leurs remèdesLe Conseil de sécurité a examiné ce matin la situation en Afrique à la suite du rapport du Secrétaire général intitulé "les causes des conflits et la promotion d'une paix et d'un développement durables en Afrique". Le Conseil, le 25 septembre 1997, lors d'un débat au niveau ministériel sur la situation en Afrique, avait prié le Secrétaire général de lui présenter des recommandations concrètes sur les moyens de prévenir les conflits en Afrique. C'est ce rapport que le Conseil a examiné ce matin, en portant particulièrement son attention aux sources des conflits, aux différents modes d'intervention dans les situations de conflits, aux impératifs d'une paix et d'une croissance économique durables. Le Conseil est également d'avis que le développement durable ne pourra se faire que dans un climat de paix et de stabilité.
Le Conseil a entendu les délégations qui dans leur ensemble se sont félicitées du rapport complet et bien documenté du Secrétaire général qui analyse de façon exhaustive les causes des conflits en Afrique. Ce rapport doit être considéré comme faisant partie d'un processus devant répondre aux besoins les plus pressants de l'Afrique. Aux yeux de nombreuses délégations, la réunion du Conseil de sécurité montre l'importance qu'attache la communauté internationale aux problèmes qui affectent le continent africain. Les délégations ont fait valoir que l'avenir de l'Afrique dépend des Africains eux-mêmes tout en soulignant que la communauté internationale doit maintenir et renforcer son engagement en faveur du continent africain. Certaines propositions du Secrétaire général contenues dans son rapport, notamment celles relatives au trafic d'armes, à la nécessité de mettre en place des sanctions mieux ciblées, à la séparation des réfugiés et des combattants, à l'allégement de la dette des pays africains font partie des mesures que le Conseil devra envisager pour faire face à la situation.
Les membres suivants du Conseil de sécurité : Gabon, Portugal, Fédération de Russie, Suède, France, Chine, Royaume-Uni, Gambie, Slovénie, Costa Rica, Brésil, Bahreïn, Kenya et Japon. Le représentant du Zimbabwe (au nom de l'Organisation de l'unité africaine (OUA), a pris la parole.
Le Conseil poursuivra son débat cet après-midi.
Déclarations
M. DENIS DANGUE REWAKA (Gabon) a rappelé que c'est grâce à l'heureuse initiative des Etats-Unis que le Conseil de sécurité est réuni aujourd'hui. Le rapport du Secrétaire général a le mérite de bien présenter la problématique des conflits en Afrique et les solutions qu'il propose méritent la plus grande attention. Nous partageons le diagnostique du Secrétaire général sur la cause des conflits en Afrique, a souligné le représentant. C'est à travers une juste appréhension de leurs causes que nous pourrons trouver des remèdes. Estimant qu'en général les conflits trouvent leurs racines dans la faiblesse des économies, le représentant a souligné l'importance des mesures prises par les institutions financières des Nations Unies. Libérés du poids de la dette ces pays auront plus de chance de réussir leur intégration économique d'autant qu'ils ont entrepris de courageuses réformes politiques. Les conflits armés autorisent que l'on apporte à leur prévention un caractère d'urgence. Citant le Secrétaire général, le représentant a précisé que prévenir les conflits c'est protéger l'humanité.
L'organe central du mécanisme de prévention des conflits en Afrique de l'Organisation de l'Unité africaine réalise déjà un travail remarquable. Le rôle joué par ce mécanisme à travers le système d'alerte précoce a néanmoins besoin d'être renforcé et mérite d'être doté de tous les moyens nécessaires. Les dirigeants et les Etats africains n'ont ménagé aucun effort pour résoudre les crises avant qu'elles ne dégénèrent en conflits armés et à cet égard il a rappelé le rôle de bons offices joué par le Président du Gabon. L'Afrique en raison de la diversité des causes de conflits, ne peut pas, à elle seule, trouver des solutions. La prévention des conflits et le maintien de la paix doivent être une prérogative du Conseil de sécurité qui doit travailler de concert avec les organisations régionales. Dans le cas contraire, on aurait l'impression d'un désengagement des Nations Unies en Afrique. Le représentant a appelé au renforcement du partenariat avec les organisations régionales. Il a souligné dans ce cadre le rôle de coordination du Conseil qui est le seul à pouvoir se situer au-dessus de la concurrence et des subjectivités.
M. ANTONIO MONTEIRO (Portugal) a fait sienne l'idée que les mécanismes d'alerte précoce exigent une action rapide pour garantir leur efficacité. Des mesures concrètes devraient être envisagées pour permettre aux Nations Unies, et au Conseil de sécurité en particulier, de répondre à temps aux crises émergentes. Le Secrétaire général souligne à juste titre que, lorsque la communauté internationale est engagé dans des efforts de maintien de la paix, il ne faudrait pas encourager la prolifération des efforts de médiation. Les Nations Unies ont un rôle crucial dans ce domaine. Les sanctions peuvent constituer un instrument efficace dans le règlement des différends et doivent être mieux ciblées afin que les responsables politiques soient directement visés et que la population civile soit épargnée. La prolifération des armes est un fléau considérable sur le continent africain. Il faudrait faire davantage pour mettre fin au trafic illicite des armes, en particulier les armes de petit calibre. A cet égard, M. Monteiro a souligné la nécessité d'empêcher que les armes ne soient rassemblées après la fin d'un conflit pour
servir dans une autre guerre sur le même continent. La délégation portugaise appuie l'appel du Secrétaire général adressé aux pays africains de réduire leurs dépenses militaires. Le Portugal est d'avis que l'ensemble de la question de la prolifération des armes soit examinée par le Conseil de sécurité.
Le Portugal appuie activement les efforts visant à renforcer la capacité de l'Afrique de faire face aux différends, y compris le maintien de la paix. A cet égard, le Ministre des affaires étrangères portugais avait souligné devant l'Assemblée générale en septembre dernier l'importance que le Portugal attache au rôle crucial que l'Organisation de l'unité africaine (OUA) peut jouer. Il avait également insisté sur le rôle des Nations Unies et du Conseil de sécurité en particulier en matière de maintien de la paix et de la sécurité internationales. Lorsque l'Afrique a besoin de l'assistance des Nations Unies, ces dernières ne devraient pas l'ignorer. Il ne s'agit pas seulement d'une responsabilité qui incombe à l'ONU en vertu de la Charte mais également une question de solidarité. Le Portugal continuera, de son mieux, à contribuer et à participer aux opérations de maintien de la paix des Nations Unies en Afrique, comme il l'a fait au Mozambique, en Angola, au Libéria et au Sahara occidental.
Concernant l'assistance humanitaire, M. Monteiro a appuyé les recommandations du Secrétaire général et a indiqué que son pays se dit prêt à contribuer à leur mise en oeuvre. Il a estimé que toutes les missions spéciales des droits de l'homme devraient être financées par des contributions volontaires et, à cet égard, appuie fermement la notion des enfants comme "zones de paix". Les recommandations concernant la sécurité des camps de réfugiés et la séparation des combattants et des réfugiés sont pertinentes. Le représentant s'est également félicité de la proposition visant à tenir financièrement responsables les combattants à l'égard de leurs victimes en vertu du droit international, lorsque les civils sont délibérément la cible d'une agression. Par ailleurs, le Portugal appuie l'approche de cadre stratégique en matière de restauration de la paix, qui fournirait une stratégie intégrée afin d'aider les pays en crise et à permettre une intervention coordonnée des Etats, des organisations internationales et des organisations non gouvernementales.
M. SERGEI LAVROV (Fédération de Russie) a estimé que le rapport du Secrétaire général sur la situation en Afrique fait une analyse approfondie des différents problèmes qui sapent les efforts de maintien de la paix et de sécurité sur le continent. Il a fait remarquer que le rôle fondamental du Conseil de sécurité en matière de maintien de la paix a été exercé à plusieurs occasions. Il faudrait toutefois renforcer ce rôle. Le représentant a souligné la nécessité d'examiner de manière approfondie les conséquences des sanctions imposées par le Conseil de sécurité. Il serait utile que le Conseil de sécurité et autres organes compétents prennent les mesures nécessaires en vue de la mise en oeuvre des recommandations formulées par le Secrétaire général.
M. HANS DAHLGREN (Suède) a rappelé qu'il incombe en premier lieu au peuple africain et à ses dirigeants d'assurer l'avenir de l'Afrique. Toutefois, la communauté internationale doit également maintenir et renforcer son engagement en faveur de l'Afrique. Comme le montre l'exemple du Rwanda, cet engagement n'a pas toujours été évident. Tout aspect de prévention, de maintien de la paix et de règlement des différends a été compris en théorie. Mais à moins de répondre de manière efficace à une crise, de faire preuve de volonté politique et de fournir les ressources financières nécessaires, la connaissance de ces aspects n'a aucun sens. La véritable sécurité commence au niveau de l'individu. C'est précisément l'approche adoptée par le Secrétaire général dans son rapport. Tout en reconnaissant la pleine portée des mesures nécessaires pour faire face aux causes sous-jacentes des conflits et non seulement leurs symptômes, le rapport n'a pas perdu de vue la référence à la sécurité humaine. La création de sociétés stables constitue certainement la tâche la plus complexe dans la prévention des conflits. La pauvreté, l'oppression, les politiques économiques peu adaptées et les violations des droits de l'homme doivent être combattues en priorité. Elles devraient être au centre d'une nouvelle politique de partenariat avec l'Afrique. La Suède augmente de manière considérable son budget de coopération pour le développement en faveur de l'Afrique en vue de l'assister à répondre aux causes inhérentes du conflit.
La délégation suédoise estime qu'il faudrait également mettre fin à la prolifération des armes pour contribuer à la prévention des conflits. A cet égard, la Suède se félicite des efforts visant à présenter un moratoire sur la production et le transfert des armes de petit calibre en Afrique de l'Ouest, comme l'a recommandé le Mali. La communauté internationale devrait appuyer pleinement les initiatives régionales. La capacité de constituer rapidement une présence internationale est cruciale en vue de prévenir et de contenir les conflits a jugé le représentant qui a ajouté qu'il faudrait explorer les moyens visant à renforcer les arrangements relatifs aux forces et moyens en attente afin de les déployer dans un bref délai. Le Conseil de sécurité et les Nations Unies, dans leur ensemble, disposent des moyens nécessaires pour répondre rapidement aux demandes de médiation, de bons offices, de missions d'observation et d'autres mesures de prévention, y compris les opérations de maintien de la paix.
M. ALAIN DEJAMMET (France) a estimé que le rapport du Secrétaire général est remarquable d'une part, par son contenu qui analyse avec précision et sans fard la réalité et d'autre part, par son opportunité, alors que l'Afrique se trouve dans une phase de transition à la recherche d'une paix et d'un développement durables. Il a reconnu que si beaucoup dépend des Africains eux-mêmes, les Nations Unies et les Etats extérieurs au continent ne sont pour autant pas dispensés de poursuivre et de renforcer leur action et leur engagement en faveur de l'Afrique. De l'avis de la France, le rôle croissant des organisations ou des initiatives régionales doit être épaulé par les Nations Unies, et le Conseil de sécurité, pour faire prévaloir les préoccupations et les intérêts équitables de l'ensemble de l'Organisation. En ce qui concerne les opérations de maintien de la paix, la contrainte
financière ne doit pas devenir le critère déterminant de décision, a mis en garde le représentant, pour qui l'essentiel réside en fait dans la capacité, la disponibilité et la volonté des Etats membres à répondre aux nécessités du moment. Il importe également de renforcer les capacités des Etats africains à prendre leur part au maintien de la paix dans le monde et notamment en Afrique. A cet égard, M. Dejammet a évoqué l'effort de la France au renforcement des capacités africaines de maintien de la paix (RECAMP) qui s'élève pour 1998 à environ 40 millions de dollars.
En ce qui concerne les droits de l'homme, la France juge essentiel d'éviter que ne se crée l'impression que les Nations Unies pratiqueraient ou toléreraient une politique de "deux poids deux mesures" car leur crédibilité et leur autorité en pâtiraient durablement. La France estime avec le Secrétaire général que, dans bien des cas, la solution durable de l'instabilité et des conflits passe par l'établissement de bases saines à la gestion de l'Etat et au fonctionnement de l'économie. Le Secrétaire général a raison de souligner l'importance du développement social car il ne peut y avoir de développement et de paix durables sans une élévation substantielle des niveaux d'éducation et de formation, sans une amélioration des systèmes de santé, sans une répartition équitable des fruits de la croissance. La responsabilité qui incombe au premier chef aux Etats africains n'exonère pas les autres pays de leurs obligations, a poursuivi M. Dejammet. Le représentant a exprimé son inquiétude face à la réduction brutale de l'aide au développement ces dernières années. Pour sa part, la France entend maintenir son effort d'aide, soit 7,5 milliards de dollars dont la moitié est destinée à l'Afrique, et continuer de plaider, dans les instances internationales, en faveur d'une solidarité active avec l'Afrique. C'est pourquoi, la France estime que les Etats membres et les instances internationales concernées doivent examiner avec la plus grande attention les recommandations du Secrétaire général en matière de restructuration de l'aide internationale, d'allégement du fardeau de la dette, d'ouverture des marchés internationaux, ainsi que d'appui à la coopération à l'intégration régionales.
M. SHEN GUOFANG (Chine) a estimé que la réunion du Conseil doit servir à comprendre mieux les questions relatives à la situation en Afrique et qu'en conséquence, une attention particulière doit être accordée aux points de vue des pays et des organisations régionales de ce continent. Soulignant l'importance de l'Afrique sur la scène internationale, il a jugé essentiel que ce continent devienne un véritable partenaire du développement mondial. Partant, la communauté internationale ne peut échapper à sa responsabilité d'apporter un appui ferme aux efforts des pays africains pour maintenir la paix et assurer leur développement. S'agissant du maintien de la paix, le représentant a rendu hommage aux efforts des pays africains et des organisations régionales tout en appuyant un rôle accru du Conseil de sécurité dans le règlement des questions africaines qui implique le déploiement en temps voulu des opérations de maintien de la paix conformément à la Charte des Nations Unies et aux requêtes des pays africains concernés. Il est important, a précisé le représentant, de veiller dans ce cadre, à respecter les points de vue des pays africains, leur souveraineté et leur intégrité territoriale et de
suivre le principe de la non-ingérence dans les affaires intérieures des Etats.
Le développement et la paix sont indissociables, a poursuivi le représentant qui a souligné que les difficultés économiques sont parmi les causes originelles de l'instabilité sur le continent africain. Il est temps de réaliser que l'assistance à l'Afrique contribue au développement et à la prospérité du monde et est de l'intérêt commun de la communauté internationale dans son ensemble. Cette assistance, qui doit être inconditionnelle, doit également se fonder sur la situation réelle du continent et bénéficier véritablement au peuple africain tant il est vrai qu'imposer un modèle donné s'avèrerait contre-productif. La Chine se félicite de la tendance croissante vers l'unité, observée aujourd'hui en Afrique. L'OUA et les organisations sous-régionales jouent un rôle de plus en plus important tant dans les affaires régionales qu'internationales. La Chine appuie, en conséquence, le renforcement des relations entre l'ONU et l'OUA ainsi qu'avec les organisations sous-régionales.
La Chine appuie aussi la proposition du Secrétaire général visant à ce que le Conseil se réunisse tous les deux ans, au niveau ministériel, pour examiner la situation en Afrique comme elle appuiera, au moment opportun la tenue d'un sommet. La Chine espère que les autres propositions du Secrétaire général se verront traduites en actions concrètes sur la base de discussions substantielles avec les pays africains. Lors de sa dernière visite sur le continent en 1996, le Président Jiang Zemin a proposé des principes de développement et de relation de coopération à long terme, à savoir qui peuvent se résumer au développement d'une véritable amitié et d'une relation entre partenaires égaux, au respect des souverainetés respectives, à la recherche d'un développement commun sur la base d'avantages mutuels et au renforcement de la coopération dans les affaires internationales. L'année dernière, la Chine a signé des accords d'assistance avec 41 pays africains et décidé d'augmenter l'assistance gouvernementale en y impliquant des institutions et des sociétés financières. Elle a également fourni des prêts à des taux préférentiels et établi des partenariats ou des projets de coopératives avec les entreprises locales dans le cadre de l'exécution des projets d'assistance. Les programmes d'assistance de la Chine ne sont assortis d'aucune condition, a souligné le représentant.
SIR JOHN WESTON (Royaume-Uni) a indiqué que son pays accueille avec satisfaction le rapport complet et objectif du Secrétaire général. Il a fait sienne l'analyse selon laquelle il faut s'attaquer aux causes des conflits et non pas seulement aux symptômes. Il s'est rallié à l'analyse du Secrétaire général sur les réalités de l'action préventive, du maintien et de l'imposition de la paix en Afrique ainsi qu'à ses recommandations. Reconnaissant les réalisations et les échecs des Nations Unies dans ce domaine, il a estimé qu'il aurait fallu agir plus rapidement en Sierre Léone et qu'il faudrait faire davantage pour arrêter les combats au Congo- Brazzaville. L'expérience en Somalie a encore un goût amère mais il aurait été pire de ne pas intervenir. Les Nations Unies ne peuvent pas ignorer les
impératifs militaires des interventions humanitaires. L'intervention en Slavonie orientale montre qu'avec un mandat clairement défini une opération de maintien de la paix peut réellement faire une différence à condition qu'elle bénéficie de ressources suffisantes. Le représentant s'est associé au Secrétaire général pour dire que la priorité à l'avenir est de renforcer la capacité de maintien de la paix de l'Afrique. Il a annoncé que son pays est disposé à coopérer à d'autres initiatives africaines comme celle ayant associée le Royaume-Uni et le Zimbabwe. Les efforts multilatéraux lancés sous les auspices des Nations Unies en consultation étroite avec l'Organisation de l'unité africaine devraient apporter beaucoup au renforcement des capacités de maintien de la paix des pays africains.
En attendant de recevoir les dividendes d'une telle coopération, le représentant a estimé qu'à court terme, la communauté internationale doit faire la preuve de sa volonté politique à intervenir au sein des conflits en Afrique. Il ne peut pas être question du désengagement du Conseil de sécurité en Afrique. Sa responsabilité est claire dans le domaine du maintien de la paix et de la sécurité internationales et bien que les institutions régionales ont un rôle important à jouer elles ne peuvent en aucun cas s'y substituer. Nous avons besoin d'un partenariat actif avec l'Afrique et le Royaume-Uni s'efforce de jouer le rôle qui lui revient à la fois au sein et à l'extérieur du Conseil de sécurité. Mentionnant la coopération qui s'est instaurée en Sierra Léone, il a rappelé que son pays a offert deux millions de dollars au Fonds d'affectation spéciale créé à cet effet. Il a appelé la communauté internationale à en faire de même.
Au sein du système des Nations Unies, la coordination lors du passage d'une opération de maintien de la paix à une opération de consolidation de la paix après les conflits est d'une importance cruciale. Il a souhaité la mise en place de stratégies dans ce domaine impliquant les institutions financières de Breton Wons ainsi que les institutions du système des Nations Unies, les fonds et les programmes et le Bureau de la Haute Commissaire aux droits de l'homme. Il a estimé que dans le mesure du possible, des sanctions "intelligentes" et ciblées doivent être imposées.
Il a appuyé la recommandation du Secrétaire général visant à ce que les Etats adoptent des mesures législatives permettant de poursuivre devant les tribunaux nationaux les auteurs de violation des embargos sur les armes décrétés par le Conseil de sécurité. Il a soutenu l'appel lancé par le Secrétaire général pour que les pays africains contribuent au registre sur les armes. Il a estimé que la mise en place de registres d'armes supplémentaires seraient d'une grande utilité. Dans ce contexte il a rendu hommage au Mali pour son initiative visant à instaurer un moratoire sur l'importation, l'exportation et la fabrication des armes dans la région subsaharienne. Il indiqué que son gouvernement s'est engagé à verser 300 000 dollars pour soutenir cette initiative. ll a précisé que son pays tente d'obtenir un accord avec l'Union européenne sur les normes relatives à un code de conduite sur les exportations d'armes. ll a en outre appuyé la recommandation du Secrétaire général visant à créer des zones sûres pour les réfugiés.
Sur la nécessité de promouvoir le développement économique, le représentant a souhaité que l'Assemblée générale soit saisie de cette question. Dans ce contexte , il a souligné l'importance qu'il y a à garantir le respect des droits de l'homme, une bonne gouvernance et le respect de l'environnement qui sont des facteurs indispensables à un développement économique durable. Soulignant l'importance de l'élimination de la pauvreté, le représentant a appuyé l'objectif de réduire de moitié le nombre de personnes vivant au dessous du seuil de pauvreté d'ici l'an 2015, de fournir une éducation de base à tous les pays et de promouvoir l'égalité entre les sexes. Il a également souligné l'importance de réduire le poids de la dette africaine. Il a indiqué que le monde en développement en général, l'Afrique en particulier, fera partie des priorité, lors du sommet du G8 les 15 et 17 mai prochains.
M. ABDOULIE MOMODOU SALLAH (Gambie) a fait remarquer que, si la responsabilité de la situation présente du continent revenait aux Etats africains eux-mêmes, des facteurs extérieurs avaient toutefois fortement contribués à cette situation. La délégation de la Gambie est encouragée par l'actuelle diminution des conflits internes de grande échelle et par le fait que les Africains eux-mêmes prennent de plus en plus en main la question de la prévention, de la gestion et de la résolution des conflits. Il faut maintenant mettre l'accent sur les conflits civils et les déplacer du champ de bataille vers la table de négociation. Le représentant a observé cependant qu'en raison des coûts prohibitifs de la démobilisation et de la restructuration militaire, les dividendes de la paix sont longs à se faire sentir. La Gambie se félicite des efforts en cours pour créer une Equipe africaine spéciale pour les opérations d'urgence. La Gambie se félicite de la tendance actuelle à une meilleure compréhension des liens étroits et inévitables entre la libéralisation politique, la bonne gouvernance et l'existence d'un environnement stable pour la croissance économique. Les taux de croissance enregistrés, récemment, en Afrique sont porteurs d'espoir mais demeurent fragiles. A cet égard, le représentant a fait observer que la stagnation économique et le développement inéquitable ont fortement contribué à la plupart des conflits internes et à l'instabilité en Afrique.
Aujourd'hui le problème majeur du continent est le fardeau insoutenable de la dette, la marginalisation économique, des termes des échanges défavorables et l'imposition de conditions pénibles qui ne vont pas seulement à l'encontre du processus de paix, mais également du rétablissement des économies fragiles. Les conditions de participation à l'initiative de réduction de la dette des pays pauvres les plus endettés entreprenant d'importantes réformes économiques, lancée par la Banque Mondiale et le Fonds monétaire international, demeurent trop strictes. Pour qu'elle soit utile, cette initiative doit permettre aux Etats africains de satisfaire à ses exigences, moyennant des efforts raisonnables, a remarqué le délégué. De plus et dans la mesure où la communauté internationale a contribué à la création de cette situation indésirable, la Gambie espère que la proposition du Secrétaire général de convertir en subventions toutes les dettes bilatérales officielles en cours pour les pays africains les plus pauvres sera largement entendue.
M. DANILO TüRK (Slovénie) a déclaré que l'expérience de son pays montre que la performance économique accélérée exige une meilleure utilisation des ressources existantes. La mondialisation des marchés mondiaux et la création d'une culture d'épargne devraient figurer parmi les priorités d'une politique de développement efficace. De même, les investissements en ressources humaines, notamment par le biais de l'éducation, doivent être reconnus comme une force motrice pour la croissance économique. Tout en soulignant que la mobilisation des ressources existantes est cruciale, M. Türk a estimé que la communauté a un rôle indispensable à jouer dans la création et le maintien d'un climat propice aux investissements en Afrique. En dépit des progrès récents, la situation dans de nombreux pays africains demeure marquée par l'absence d'une infrastructure de base adéquate et des difficultés fiscales profondes. Cette situation fait obstacle aux investissements privés et aux efforts visant à libérer le commerce, à renforcer la transparence et la protection des droits fonciers. C'est pourquoi, l'assistance internationale est essentielle.
La Slovénie estime que pour garantir la crédibilité des Nations Unies, la communauté internationale doit être en mesure d'agir pour faire progresser les objectifs de paix et de sécurité en Afrique. Tout en considérant que les opérations de maintien de la paix ne constituent pas toujours le meilleur remède aux crises en Afrique, M. Türk a estimé que la capacité des Nations Unies en matière de maintien de la paix devrait être renforcée et devrait être fondée sur une capacité crédible, appuyée par la volonté politique de la communauté internationale et la coopération sur le terrain. Chaque situation doit être examinée sur la base de ses propres mérites par le Conseil de sécurité. En outre, la délégation slovène appuie la coopération entre les Nations Unies et l'Organisation de l'unité africaine (OUA). L'assistance humanitaire ne devrait pas être substituée à l'action politique, mais être complémentaire. En d'autres termes, l'assistance humanitaire ne devrait pas détourner des autres priorités l'attention des pays récipiendaires et de leurs populations. L'affectation rationnelle des ressources entre les secours humanitaires et l'assistance humanitaire est nécessaire.
M. FERNANDO BERROCAL-SOTO (Costa Rica) s'est félicité du rapport du Secrétaire général qu'il a jugé réaliste et transparent. Les recommandations formulées par le Secrétaire général pourraient servir de base à des discussions au sein du Conseil économique et social. Il appartient aux pays africains de garantir l'avenir de leur continent. La situation dans la région des Grands Lacs a créé de profondes divisions ethniques et une nouvelle configuration géographique artificielle. Le représentant a souligné la nécessité de renforcer la coopération entre la communauté internationale et les pays africains pour garantir la stabilité, ainsi qu'un développement économique et social durable en Afrique. Il a fait remarquer que sans ressources financières et sans investissements en ressources humaines, il ne sera possible de parvenir à un développement durable dans la région. Tous les pays en développement doivent oeuvrer en vue de garantir la primauté du droit et créer un climat propice à la libre concurrence et aux marchés. Le Costa Rica estime que le grand défi de cette fin de siècle est la volonté politique
des dirigeants africains de construire et de préserver la démocratie en Afrique. La démocratie en tant que cadre politique ne peut se concrétiser qu'avec l'élimination de l'analphabétisme et de la pauvreté. M. Berrocal-Soto a insisté sur l'appel lancé par le Secrétaire général aux pays africains et à la communauté internationale de renforcer leur coopération en vue de régler les problèmes économiques qui font obstacle aux efforts de paix et de développement.
M. CELSO AMORIM (Brésil) a déclaré qu'il est du devoir du Conseil de sécurité de se pencher au cours des semaines et des mois à venir sur les suggestions contenues dans le rapport du Secrétaire général, de manière à ce que des progrès tangibles soient faits pour répondre aux défis auxquels l'Afrique fait face. L'Afrique, cependant, ne doit pas simplement être appréhendée comme une terre de conflits; il existe en effet de nombreuses parties du continent où fleurissent la paix et la croissance économique. En ce qui concerne la résolution des conflits, nous devons observer que l'éruption de violences intercommunautaires et d'autres formes de violences que l'on a vues au Libéria, en Somalie ou dans les Grands Lacs ne constituent pas les seuls apanages de l'Afrique. Si le Secrétaire général déclare dans son rapport que l'Afrique doit veiller à résoudre ses problèmes par des moyens politiques plutôt que militaires, il faut reconnaître que ce postulat s'applique aussi au reste du monde. Si, en Afrique, le déploiemnt d'opérations de rétablissement et de maintien de la paix, ayant une capacité de dissuasion crédible peut être nécessaire dans les situations d'extême gravité, il faut cependant se garder de la tentation de préconiser des solutions militaires à des situations qui requièrent avant tout, le dialogue et la diplomatie.
Le Brésil partage les conclusions du Secrétaire général sur la prolifération des petites armes. Le Conseil de sécurité devrait examiner ce problème d'urgence, et pour que les recommandations faites en ce sens soient efficaces, un mécanisme approprié devrait être mis en place pour proposer et appliquer les voies et moyens de la lutte contre la prolifération illicite de ces armes. Les pays africains devraient, d'autre part, participer davantage au Registre d'armes conventionnelles de l'ONU, ce qui contribuerait à renforcer la confiance dans les zones instables. Le Brésil trouve un certain mérite dans la distinction qui est faite entre les causes internes et externes des conflits en Afrique. Mais il ne faut pas oublier que même des causes internes de conflit ont souvent des composantes externes, et il est impossible de dissocier la prolifération des dictatures en Afrique durant la période post-coloniale, des rivalités bipolaires de la guerre froide. Ce sont les arsenaux accumulés durant ces années par les régimes les plus répressifs, avec le soutien couvert ou déclaré des puissances étrangères, qui ont aujourd'hui des retombées délétères sur le continent.
M. JASSIM MOHAMMED BUALLAY (Bahreïn) a estimé que cette réunion reflète l'intérêt que porte le Conseil à l'avenir du continent africain. Sans aucun doute le lourd héritage du colonialisme et l'instabilité du pouvoir politique constituent les raisons principales des nombreux foyers de discorde. Les
problèmes économiques et sociaux complètent le cycle de l'instabilité. La nature multiethnique des Etats d'Afrique, le traitement préférentiel que certains Etats accordent à certaines ethnies et l'accaparement des richesses font également partie des causes d'affrontement. Le représentant a appelé la communauté internationale à trouver des mesures d'urgence pour pallier à l'effondrement des économies et du tissu social. Il a estimé que tout déploiement d'une opération de maintien de la paix des Nations Unies doit reposer sur la volonté politique des pays en conflit à trouver une solution. Dans ce cadre, il a appelé au renforcement de la coopération avec les organisations régionales. La consolidation de la paix doit passer par une coopération renforcée entre l'ONU et l'OUA, par la nécessité de prendre des mesures contre le transfert illégal d'armes, la nécessité d'une coordination des activités du Conseil de sécurité et les activités de développement des Nations Unies.
M. NJUGUNA M. MAHUGU (Kenya) a déclaré que le rapport présenté par le Secrétaire général doit être considéré comme faisant partie d'un processus devant répondre aux besoins les plus pressants de l'Afrique. La première responsabilité du maintien de la paix au niveau international revient à- l'Organisation des Nations Unies, et notamment au Conseil de sécurité. Mais on a malheureusement constaté des tentatives répétées en vue de saper le rôle de l'Organisation dans ce domaine, et de mettre beaucoup plus l'accent sur la régionalisation des activités de rétablissement et de maintien de la paix. Le Kenya pense que les organisations régionales et sous-régionales ne peuvent jouer qu'un rôle complémentaire dans ce domaine. Il estime que le renforcement des capacités institutionnelles et opérationnelles de l'Organisation de l'unité africaine (OUA), qui collabore déjà avec l'ONU, à travers la mise sur pied d'un système d'alerte rapide, un transfert de technologie, une assistance dans la formation des personnels, l'échange et la coordination des informations, un soutien logistique et une assistance financière, est un impératif urgent.
Sur le plan économique, l'Afrique reste marginalisée dans les courants d'échanges actuels. Le Kenya partage les vues du Secrétaire général sur l'urgence de redéfinir les relations du continent avec les principaux acteurs économiques de la scène mondiale, y compris les institutions de Bretton Woods. Il soutient les recommandations selon lesquelles davantage de pays devraient bénéficier de l'Initiative en faveur des pays pauvres lourdement endettés. De même, le Kenya soutient pleinement l'appel du Secrétaire général aux pays donateurs pour qu'ils transforment en dons toutes les dettes bilatérales des pays africains les plus pauvres.
M. HISASHI OWADA (Japon) s'est déclaré convaincu de la nécessité d'adopter une approche holistique lorsqu'il s'agit des problèmes de l'Afrique, en englobant les facteurs politique, économique, social et même culturel. Il ne fait aucun doute que l'une des tâches les plus urgentes de la communauté internationale, à l'orée du 21ème siècle, est de déterminer comment répondre au mieux à la situation en Afrique, a suggéré M. Owada. Il est de la responsabilité de la communauté internationale de promouvoir la coopération en
faveur d'une nouvelle stratégie intégrée. En premier lieu et pour répondre à la situation africaine de manière efficace, les activités des organes des Nations Unies, ainsi que de l'OUA, de l'ECOMOG, entre autres, de la Banque Mondiale, du Fonds monétaire international et de la communauté internationale dans son ensemble devraient être intégralement coordonnées et envisagées de manière complémentaire sur la base d'une stratégie globale unique. Cette stratégie devrait être fondée sur le principe de la responsabilité partagée de l'ensemble des pays, dans laquelle les Nations Unies joueraient un rôle fondamental. Lors de la mise en oeuvre de cette stratégie, il sera nécessaire d'adopter une attitude pragmatique en fonction des circonstances et des besoins spécifiques de chaque pays. C'est de cette manière que le Japon aborde déjà la question de la prévention et du règlement des conflits en Afrique, a précisé M. Owada, ajoutant que la question est désormais de transformer l'intérêt actuel porté à l'Afrique en actions concrètes, en appliquant notamment les sages recommandations du Secrétaire général.
Le représentant a déclaré que la communauté internationale doit s'attaquer méthodiquement au problème du trafic des armes. A cet égard, les pays qui exportent des armes vers l'Afrique doivent se sentir particulièrement responsables de la situation présente, a fait remarquer M. Owada. De l'avis du Japon, le Conseil de sécurité devrait accorder à cette question tout le sérieux qu'elle mérite et rechercher les moyens efficaces de contrôler le commerce et l'exportation d'armes de petit calibre. Parallèlement, le Registre des Nations Unies sur la Convention sur les armes pourrait être utilisé pour contenir les conflits actuels et potentiels. L'amélioration de la transparence dans le domaine des capacités de défense nationale est un important facteur d'établissement de la confiance entre pays voisins. C'est pourquoi le représentant a demandé que le Registre soit pleinement mis en place de part le monde et tout particulièrement pour l'Afrique. Le Japon estime également que le Conseil de sécurité devrait se pencher de manière urgente sur la question des missions humanitaires et notamment leurs aspects sécuritaires. M. Owada a proposé, vu la richesse du rapport du Secrétaire général, que le Conseil de sécurité crée un Groupe de travail pour étudier en détail les recommandations qui y sont contenues et établir un plan d'action concret. Le résultat de cette réflexion pourrait être soumis au Conseil lors d'une réunion au niveau ministériel, en septembre prochain, a suggéré le représentant.
M. MACHIVENYIKA T. MAPURANGA (Zimbabwe), au nom du Président de l'Organisation de l'Unité africaine (OUA), a observé que le rapport du Secrétaire général sur l'Afrique s'inscrit dans le cadre du partenariat lancé lors de la session ministérielle du Conseil de sécurité du 25 septembre 1997 entre l'OUA et les Nations Unies en particulier, et entre l'Afrique et la communauté internationale en général. M. Mapuranga a noté que, malgré la détermination de l'Afrique d'assumer davantage de responsabilités dans la résolution des conflits africains, la question de la paix en Afrique ne sera jamais une question exclusivement africaine: il s'agira toujours aussi d'une tâche qui relève des Nations Unies et à laquelle la communauté internationale devra apporter son soutien. Dans ce contexte, il a appelé la communauté
internationale a non seulement soutenir les initiatives de paix en Afrique, mais à évaluer également le rôle que peut jouer l'OUA en matière de prévention, de gestion et de résolution des conflits en Afrique. A cet effet, l'OUA souhaiterait que le Secrétaire général lui détache une équipe afin de l'assister à prendre les mesures nécessaires pour la mise en place d'un système d'alerte rapide, de fournir une assistance technique et de formation au personnel, d'institutionnaliser les échanges d'informations entre les systèmes d'alerte rapide de l'ONU et de l'OUA, de fournir un soutien logistique et de mobiliser des ressources financières pour le Fonds de paix de l'OUA. Au-delà du fait de se doter d'un système d'alerte rapide, l'Afrique doit améliorer ses capacités de réponse rapide aux conflits, à la fois sur les plans politique et diplomatique, et sur le plan militaire il est important de renforcer ses capacités de déploiement rapide de missions de maintien de la paix. Dans ce contexte, l'OUA et ses organismes sous-régionaux permettraient d'assurer la coordination de ces effort, et partant, de contribuer aux efforts de paix et de stabilité à l'échelle du continent.
M. Mapuranga a souligné que, malgré le fait que les statistiques africaines semblent indiquer parfois que de réels progrès économiques sont en cours, suite aux programmes d'ajustement structurels imposés par les institutions de Bretton Woods, cela ne se traduit pas toujours de la même manière au niveau micro-économique. Les conditions de vie des sociétés africaines se détériorent à cause de la réduction des dépenses publiques en matière de santé et d'éducation et d'un accroissement du chômage. Beaucoup de pays africaines dépensent plus pour le service de leur dette que pour l'éducation et la santé, or il ne peut y avoir de développement économique sans éradication de la pauvreté. M. Mapuranga a souligné que la paix et la stabilité dépendent largement du développement économique et social ainsi que de l'élimination de la pauvreté absolue, mais aussi de la bonne gouvernance des pays, notamment grâce à une démocratisation réelle et davantage de respect des droits de l'homme. Les dirigeants africains s'y attachent de manière collective à travers l'OUA qui a supervisé plus de quarante élections multipartites et référendum au cours de la dernière décennie seule. L'Afrique s'est engagée dans la construction d'institutions réellement démocratiques et d'une culture démocratique là où il y avait auparavant l'autocratie et les régimes militaires. Mais il est aussi vrai qu'il ne peut y avoir de démocratie dans un contexte de pauvreté, d'analphabétisme, de faim et de maladie. C'est pourquoi le Zimbabwe lance un appel à la communauté internationale pour qu'elle vienne à l'aide du continent africain en soutenant ses efforts qui dépendent notamment de l'éducation des populations africaines, du transfert de technologies, de l'annulation de la dette, de flux de capitaux et de l'accès aux marchés internationaux.
RAPPORT DU SECRETAIRE GENERAL
Les causes des conflits et la promotion d'une paix et d'un développement durables en Afrique
Le rapport du Secrétaire général observe que les conflits en Afrique compromettent les efforts de l'ONU pour instaurer la paix, la prospérité et le respect des droits de l'homme pour tous. Depuis 1970, il y a eu en Afrique plus de 30 guerres qui, dans leur vaste majorité, ont eu pour origine des conflits internes aux Etats. En 1996, seulement 14 des 53 pays d'Afrique ont connu des conflits armés qui ont été responsables de plus de la moitié de tous les décès causés par des conflits au niveau de la planète entière, provoquant plus de 8 millions de réfugiés et de personnes déplacées. Le rapport mentionne que les sources de conflits en Afrique sont autant d'ordre interne qu'externe. Il cite, entre autres, la nature du pouvoir politique, de même que ses conséquences, réelles ou perçues comme telles, ainsi que la prise du pouvoir et du maintien de celui-ci. Lorsque les dirigeants ne sont pas tenus de rendre des comptes, que les régimes ne sont pas transparents, qu'il n'existe pas de système adéquat de contrôle du pouvoir, que la légalité n'est pas respectée, qu'il n'y a pas de moyens et de mécanismes pacifiques de remplacement et d'alternance, et que les droits de l'homme ne sont pas respectés, le contrôle politique prend une importance excessive et les enjeux deviennent dangereusement élevés, est-il souligné dans le rapport. Dans des situations extrêmes, des collectivités rivales, du fait de la politisation souvent violente de l'ethnicité, peuvent avoir le sentiment que leur sécurité, voire leur survie, ne peut être assurée que si elles contrôlent le pouvoir national. Le conflit devient alors inévitable.
Au plan externe, le rapport, outre les déséquilibres sociaux et économiques résultant de la colonisation, mentionne que les rivalités d'intérêts extérieurs portant sur le pétrole et d'autres ressources précieuses de l'Afrique continuent de jouer un rôle important dans les conflits qui se déroulent sur le continent. En Afrique même, des pays frontaliers, inévitablement touchés par les conflits qui éclatent à leurs portes soutiennent ou attisent des luttes et des guerres chez leurs voisins. Des motivations économiques jouent aussi un rôle important, souligne le rapport, car malgré la dévastation que provoquent les conflits armés, nombreux sont les groupes ou les individus qui profitent de l'anarchie et de l'impunité que provoque cet état de choses. Il s'agit, en premier lieu, des marchands d'armes internationaux et de certains protagonistes. Au Libéria par exemple, le contrôle et l'exploitation des diamants, des bois précieux et d'autres matières premières était l'un des objectifs majeurs des factions en présence, ce qui leur donnait les moyens de financer leur action et de poursuivre la guerre. Il en va de même en Angola, où les difficultés auxquelles ne cesse de se heurter le processus de paix sont dues pour beaucoup à l'importance que revêt le contrôle de l'exploitation des gîtes diamantifères lucratifs du pays. En Sierra Leone, le désir de piller les ressources naturelles du pays et les réserves de la Banque centrale était l'une des motivations majeures de ceux qui ont renversé le gouvernement élu en mai 1997. Toutefois, il existe des cas
particuliers où les causes de conflits proviennent de facteurs économiques internes liés, dans la plupart des cas, à des problèmes fonciers. Tel est, par exemple, le cas du Rwanda où plusieurs familles déplacées revendiquent le même lopin de terre.
Pour agir face à ces situations de conflits, les démarches diplomatiques, les missions de maintien de la paix ou les opérations humanitaires sont des initiatives dont les chances de réussite et d'efficacité seront multipliées si elles se font sans attendre. Le Secrétaire général encourage les gouvernements confrontés à un conflit larvé ou ouvert, à envisager la nomination d'un médiateur ou d'une commission spéciale chargés d'examiner et de déterminer l'origine de ce conflit, d'instaurer la confiance entre les parties en présence et de recommander des solutions concrètes. Si le conflit s'aggrave au point de nécessiter une action plus large, souligne le Secrétaire général, l'intervention de la communauté internationale, par exemple sous forme de sanctions, ne sera efficace que si elle bénéficie du soutien et de la coopération de la sous-région concernée par le conflit. L'Organisation de l'unité africaine (OUA) a un rôle à jouer dans la mobilisation de cette coopération et de ce soutien, en concertation avec les organisations sous-régionales concernées.
Sanctions, arrêt de la prolifération des armes et maintien de la paix
Les sanctions économiques appliquées aux zones en conflit peuvent être, entre autres, au nombre des actions à prendre à condition que de telles sanctions soient bien ciblées. Pour lutter contre le trafic et la prolifération des armements en Afrique, le Secrétaire général appelle le Conseil de sécurité à s'intéresser de plus près aux marchands d'armes dont la divulgation des noms permettrait de mieux combattre les trafics de matériels militaires. L'ONU peut jouer un rôle dans la compilation, la recherche et la publication de ces informations.
En ce qui concerne le maintien de la paix, il importe tout autant d'essayer de prévenir les conflits que d'y porter remède. En établissant une présence rassurante et un minimum de transparence, un déploiement de forces préventif permet d'éviter les erreurs d'appréciation susceptibles de déboucher sur un conflit, donne le temps nécessaire au règlement des différends par des moyens politiques et permet le développement d'institutions pour la consolidation de la paix, tout en constituant une mesure de confiance capitale pour l'instauration de celle-ci.
L'Afrique est, de toutes les régions du monde, celle où l'ONU a déployé le plus grand nombre d'opérations de maintien de la paix. Les opérations qu'elle a lancées en Angola et en Namibie en 1989, dans le climat de détente internationale qui a suivi la fin de la guerre froide, ont marqué l'entrée dans une nouvelle ère de maintien de la paix caractérisée par une plus grande complexité. Sur les 32 opérations engagées par l'ONU depuis 9 ans, 13 ont été déployées en Afrique. Mais depuis les sérieux revers subis en Somalie (et l'expérience amère vécue dans l'ex-Yougoslavie), la communauté internationale
s'est montrée très réticente ces dernières années à prendre les risques politiques et financiers associés au déploiement de telles opérations. Les leçons de l'opération en Somalie ne semblent cependant pas devoir expliquer à elles seules ces hésitations, dont l'Afrique a été la première à pâtir.
L'occasion de ce genre d'opération s'offre actuellement à la communauté internationale en République centrafricaine, où une situation explosive a pu être maîtrisée jusqu'à présent grâce à la Mission interafricaine des Accords de Bangui (MISAB), dont le mandat tire à sa fin.
Financement du redressement, paix durable et croissance économique
La consolidation de la paix doit comporter la création et le renforcement d'institutions nationales, la surveillance d'élections, une action de défense des droits de l'homme, l'organisation de programmes de réinsertion et la recherche des conditions de la reprise du développement. Le Secrétaire général exhorte le Conseil de sécurité à envisager favorablement la création de structures de soutien de la consolidation de la paix semblables à celles mises en place au Libéria. Quand un pays n'est plus en mesure d'élaborer lui-même et d'appliquer une politique économique complète, en raison même du conflit dont il a été affecté, il faut envisager de rendre moins rigoureuses les conditions financières normalement strictes imposées par les institutions financières internationales. Il faut éviter les situations où seraient imposées des conditions financières contraires au processus de paix, et où les institutions internationales et la communauté des donateurs seraient amenées à couper les fonds à un gouvernement fragile qui, soutenu par la population, fait pourtant des efforts de bonne foi pour assurer la réconciliation nationale et l'application d'accords de paix. Au nombre des mesures de redressement et de développement économiques, le rapport mentionne la lutte contre la corruption, qui est un phénomène mondial grave qui a sévèrement entravé le développement de l'Afrique. Le Secrétaire général salue l'initiative récemment prise par l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), en vue de réduire les possibilités de corruption qui existent dans la passation des marchés publics financés au moyen de fonds d'aide. Il salue la signature de la Convention sur la lutte contre la corruption d'agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales, aux termes de laquelle les signataires s'engagent à adopter une législation définissant la corruption et introduisant les moyens de la réprimer.
Pour assurer les conditions d'un développement durable, les pays africains doivent créer un environnement propice aux investissements, source d'une croissance soutenue. Si l'on veut que l'Afrique participe pleinement à l'économie mondiale, il importe d'entreprendre des réformes économiques et politiques qui mettront en place des stratégies stables, qui déréglementeront l'activité économique, favoriseront les échanges, rationnaliseront les structures fiscales, mettront en place des infrastructures de base, garantiront la transparence et assureront la protection de la propriété. Entre autres mesures de redressement et de développement économiques, le
Secrétaire général mentionne l'allégement ou la suppression de la dette qui constitue un fardeau et une menace à la stabilité des pays du continent. La communauté internationale devrait réduire, à un niveau qui n'entraverait plus leur croissance économique et leur développement, la charge de la dette des pays pauvres après que ceux-ci aient appliqué des programmes de réformes internationalement acceptés. Le Secrétaire général demande instamment que l'appel lancé par l'Organisation de l'unité africaine en faveur de l'effacement de la dette des pays les plus pauvres dans un délai raisonnablement court soit entendu.
Le Secrétaire général demande à la communauté internationale de trouver davantage de nouvelles ressources de financements en faveur du développement et d'appliquer des mesures qui permettront à l'Afrique de générer les capitaux dont elle a besoin, et de mieux les réinvestir.
* *** *