FEM/977

L'ETAT BULGARE RECONNAIT QU'IL EXISTE UN FOSSE ENTRE LA SITUATION DE JURE DES FEMMES ET LEUR CONDITION DE FACTO

28 janvier 1998


Communiqué de Presse
FEM/977


L'ETAT BULGARE RECONNAIT QU'IL EXISTE UN FOSSE ENTRE LA SITUATION DE JURE DES FEMMES ET LEUR CONDITION DE FACTO

19980128 Les membres du Comité estiment que la création d'un mécanisme national de promotion de la femme est indispensable

Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes a entamé ce matin l'examen des deuxième et troisième rapports périodiques combinés de la Bulgarie. Présentant les rapports, Mme Antoinette Primatarova, Vice-Ministre des affaires étrangères de la Bulgarie a fait valoir les nombreux changements démocratiques et politiques survenus dans son pays depuis 1989, pour expliquer le manque de suivi des politiques générales, et notamment de celles en faveur de la promotion des femmes. La Vice-Ministre a expliqué que, dans la mesure où les droits de la femme sont considérés comme partie intégrale des droits de l'homme et où la Constitution consacre l'égalité et la non-discrimination entre les hommes et les femmes, aucune mesure temporaire positive en faveur des femmes n'a été prise. Elle a indiqué cependant qu'un certain nombre de mécanismes, telle la Commission intergouvernementale sur les femmes, ont été créés afin de mettre en oeuvre la Plate-forme d'action de Beijing. La représentante a reconnu qu'il existe un fossé entre le traitement des femmes de jure et leur condition de facto. Elle a ainsi indiqué que le secteur privé de l'emploi est le lieu de discriminations contre les femmes. Par ailleurs, le modèle de répartition traditionnelle des tâches au sein de la famille est toujours dominant, ce qui entraîne un double fardeau pour les femmes qui exercent une activité salariée.

Plusieurs expertes ont félicité l'Etat partie pour le retrait de ses réserves à la Convention et pour les mesures courageuses adoptées en faveur des femmes. La conviction selon laquelle la participation des femmes au processus de prise de décision est un préalable à l'instauration de la démocratie est louable, ont-elles estimé. Il est néanmoins indispensable que l'Etat partie mette en place un mécanisme national de promotion de la femme et qu'il élabore des instruments juridiques appropriés pour que les principes d'égalité consacrés par la Constitution bulgare et pour que la réelle volonté politique du Gouvernement soient traduits dans les faits. Un certains nombre d'expertes ont également constaté l'accent mis sur le respect des droits de l'homme en Bulgarie. Elles ont suggéré d'appliquer ces principes à l'égard des femmes.

Le Comité se réunira à nouveau cet après-midi pour poursuivre l'examen des rapports combinés de la Bulgarie. Le Comité entendra également une intervention de M. Abdelfattah Amor, Rapporteur spécial sur l'intolérance religieuse.

Deuxième et troisième rapports périodiques de la Bulgarie (CEDAW/C/BGR/2-3)

Les rapports portent sur la période 1985-1993 et ont fait l'objet de discussions à l'occasion d'une réunion des représentants des organismes compétents et des organisations non gouvernementales féminines. Les instruments internationaux fondamentaux relatifs aux droits de l'homme, y compris la Convention sur l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, ont été traduits en langue bulgare et publiés dans une série de livres grâce à l'appui financier du Service de l'information de l'Office des Nations Unies à Genève.

L'ensemble des indicateurs démographiques sont caractérisés par des tendances négatives avec pour conséquence une baisse importante de la population. Le taux de natalité est ainsi passé de 16,6 pour mille en 1976 à 10,5 en 1992. Il apparaît que les femmes deviennent mères de plus en plus jeunes, 23,6 ans en 1991 contre 25,3 en 1979. Parallèlement le nombre de femmes par rapport aux hommes augmentent dans l'ensemble de la population, même si cette tendance est plus forte dans les villes que dans les villages.

En ce qui concerne l'économie, la Bulgarie est passée d'une économie planifiée à une économie de marché. Plusieurs obstacles sont apparus au cours du processus de réformes économiques (perte des anciens marchés, application de décisions prises au niveau international et fort endettement) et en conséquence, le niveau de vie de la population a beaucoup souffert. Ceci est particulièrement évident dans le cas des femmes dont la situation antérieure aux réformes était déjà plus fragile. Le nombre d'habitants qui vivent sous les normes sociales minimales ne fait qu'augmenter.

Une nouvelle Constitution a été adoptée le 12 juillet 1991, faisant du pays une république dotée d'un système parlementaire et marquée par la séparation des pouvoirs. Avant 1989 et le début de la période de transition politique et économique, l'égalité entre les hommes et les femmes avait été formellement proclamée par les Constitutions de 1947 et de 1971. Des mesures visant à aider les femmes à intégrer plus facilement leurs obligations professionnelles et leurs responsabilités familiales, et concernant notamment les soins des enfants, ont alors été prises. Par ailleurs, bien que des quotas aient été mis en place à cette époque pour faciliter la participation des femmes au processus décisionnel, leur présence à l'Assemblée et dans les organes locaux et au Gouvernement n'est demeurée que symbolique. Ces dispositions avaient en réalité pour but d'assurer le double, sinon le triple, rôle des femmes comme travailleuses, mères et citoyennes engagées sur le plan social. Elles étaient en effet définies sur le plan législatif formel comme "travailleuses et mères" alors que la définition correspondante pour les hommes "travailleurs et pères" n'existait pas. En outre, si le principe de l'égalité entre les sexes était valable en ce qui concerne l'emploi, au fil du temps il devint admis que des professions comme l'enseignement et la médecine étaient du ressort des femmes.

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La Constitution de juillet 1991 proclame que tous les individus sont égaux devant la loi et qu'il ne doit exister aucune restriction ou privilège en raison, notamment, du sexe. Tout instrument international ratifié est considéré comme partie intégrante de la législation interne du pays, supplante toute disposition législative contraire et s'applique directement et immédiatement. L'obligation de veiller au respect des droits relatifs aux femmes incombe à la fois aux organes judiciaires et aux autres institutions de l'Etat tant aux niveaux national que local. Aucune mesure temporaire n'a été prise pour accélérer l'instauration de l'égalité entre les hommes et les femmes. Cependant les mères font l'objet d'une protection sociale spéciale de la part de l'Etat qui leur garantit, entre autres, un congé néonatal et postnatal, ainsi que des soins obstétriques gratuits. Le Code de travail contient un chapitre sur la protection spéciale accordée aux femmes qui leur interdit l'exercice de certains travaux susceptibles de porter atteinte à leur santé et à leurs fonctions reproductives. Récemment la disposition du Code du travail interdisant le congédiement des employées ou des ouvrières de l'Etat qui étaient enceintes, avaient un enfant de moins de trois ans ou dont le mari effectuait son services militaire régulier, a été supprimé. L'objectif était de supprimer les privilèges accordés aux femmes en matière d'embauche et de congédiement afin que les employeurs ne soient plus tentés, dans la pratique, de remplir les postes par des hommes en raison des obligations susmentionnées. Toutefois les différentes modifications opérées peuvent elles aussi entraîner certaines discriminations à l'égard des femmes et il est envisagé de modifier le système de licenciement des femmes enceintes et des mères de petits enfants en congé maternité.

En ce qui concerne la prégnance des stéréotypes, les femmes accomplissent la plupart des tâches ménagères et ont ainsi une double charge (emploi et famille). La violence dans les familles constitue l'un des facteurs les plus difficiles à contrôler et qui n'entraîne que peu de condamnations du fait que l'on évite souvent d'en faire état. Les meurtres, les blessures corporelles et le viol sont passibles de peines de prison. De tous les crimes contre la personne, le viol est celui qui est le plus fréquemment détecté et le nouveau projet de Code pénal prévoit l'établissement d'une peine de prison de 20 ans pour viol. Des peines d'emprisonnement sont également prévues dans les cas de prostitution forcée. Le problème de l'exploitation de la prostitution et du trafic des femmes est devenu très sérieux depuis quelques années, aggravé par les difficultés économiques et le taux de chômage élevé. Ces activités font partie du crime organisé et selon la police nationale, on compte plus de 10 entreprises de réseaux de prostitution, ayant souvent des liens avec l'étranger. Les efforts de lutte contre ces filières n'ont pour l'instant pas donné de résultats tangibles.

Etant donné que l'ensemble de la législation est fondée sur le principe de l'égalité entre les sexes, il n'est pas possible de citer de dispositions administratives ou législatives spécifiques portant sur l'égalité entre les hommes et les femmes en politique et dans la vie publique. Les femmes représentent actuellement 12,91% du nombre total des députés. En revanche, le

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Gouvernement actuel ne compte aucun ministre femme. Les femmes occupent 30% des postes de direction aux niveaux inférieurs de l'Administration et des entreprises d'Etat, 13% des postes de hauts fonctionnaires et 9,5% du personnel diplomatique. Elles sont bien représentées au sein de la magistrature.

L'enseignement est gratuit à tous les niveaux, pourvu que les étudiants aient réussi les examens d'entrée. Les filles constituent 50% des élèves du niveau secondaire, 74,1% du nombre total des étudiants des établissements d'enseignement supérieur et 54,3% des étudiants des universités, académies et établissements d'enseignement qui accordent des diplômes universitaires. En 1990, 80% des enseignants et professeurs étaient des femmes, contre 77% en 1992.

Les dispositions constitutionnelles en matière d'emploi ne prévoient aucune distinction entre les hommes et les femmes. Toutefois le Code du travail contient une section intitulée "protection spéciale des femmes". Les employées ont droit à un congé payé en cas de grossesse allant jusqu'à 180 jours ainsi qu'à un congé payé pour élever leurs trois premiers enfants jusqu'à ce qu'ils atteignent l'âge de deux ans. Dans le cas des mères célibataires, le droit à l'indemnité n'est pas soumis à l'existence d'une assurance sociale. Le pourcentage des femmes dans le secteur étatique était d'environ 48,5% en 1993 et dans le secteur privé, il s'élevait à 41 %. Fondés aux aussi sur le principe de l'égalité, les documents normatifs concernant le chômage n'accordent aucun privilège particulier aux femmes. Il apparaît que les femmes sont très légèrement plus touchées par le chômage que les hommes. Seule différence véritable, les femmes ont en principe droit à une pension de retraite à l'âge de 55 ans et les hommes à l'âge de 60 ans.

Les soins de santé sont gratuits même si un projet de loi a été soumis à l'Assemblée concernant une réforme d'ensemble des services de santé publics pour les rendre plus conformes à une économie de marché. La législation actuelle contient des dispositions spéciales qui visent à préserver la santé des femmes enceintes, des mères et des enfants. La quasi-totalité des accouchements s'effectuent en milieu hospitalier. Au début des années 80, une tendance est apparue vers un accroissement du taux des naissance prématurées qui contribuent de façon importante à la mortalité infantile. Ce phénomène s'explique avant tout par les mariages précoces, la fécondité précoce, le taux élevé des avortements et le manque de connaissances en matière de contraception. Au cours des dernières années, le nombre des avortements (dont la majorité sont volontaires) a de beaucoup dépassé celui des naissances. En 1991, on comptait 44,6 naissances et 64,9 avortements pour 1000 femmes en âge de procréer. La tendance à une augmentation des avortements chez les jeunes filles de moins de 20 ans est préoccupante. Le taux de mortalité maternelle de 14,1 pour 1000 en 1993, bien qu'en baisse, demeure élevé par rapport aux pays de l'Europe occidentale. Jusqu'à maintenant, l'éducation sanitaire s'est révélée insuffisante qu'il s'agisse de la planification de la famille ou des

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soins à apporter aux enfants. Au cours de la période 1985-1993, on a observé une tendance à la baisse des maladies vénériennes. En 1993, il y avait 24 cas de sida (dont 8 femmes) pour 100 000 habitants.

Les femmes ont le même droit que les hommes de bénéficier de crédits bancaires accordés par l'Etat et les mères célibataires ont droit à un crédit préférentiel. Les personnes, femmes ou hommes, dont les activités relèvent de l'économie rurale ont droit à des prêts à des taux préférentiels. L'emploi dans le secteur rural a considérablement diminué à la suite des réformes agraires et les femmes ont été particulièrement touchées.

L'égalité des femmes dans les rapports familiaux est l'un des principes fondamentaux du Code de la famille. L'âge minimum pour contracter mariage est de 18 ans pour les deux sexes et les empêchements de mariage sont les mêmes pour les deux sexes.

Il est rappelé que le rapport initial de la Bulgarie (CEDAW/C/5/Add.15) avait été présenté devant le Comité en 1985.

Présentation du rapport par l'Etat partie

Mme ANTOINETTE PRIMATAROVA, Vice-Ministre des affaires étrangères de la Bulgarie, a rappelé que depuis que la Bulgarie a ratifié la Convention pour l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes en 1981, et a présenté son rapport initial en 1985, des changements démocratiques radicaux ont eu lieu. Ces modifications ont entraîné un changement général de la société, où auparavant les femmes étaient les égales des hommes de jure mais pas de facto. De 1989 à 1997, les politiques engagées n'ont pas pu être suivies avec une réelle continuité. Depuis son entrée en fonctions, le nouveau Gouvernement constitué à la suite des élections d'avril 1997, s'est engagé dans un processus de réforme général, tant dans le secteur de l'économie, de la protection sociale, de l'éducation, de la santé que de l'administration. Il s'efforce également d'accélérer le processus de privatisation. Pour l'heure, le taux d'inflation a baissé de manière radicale et les prix sont stabilisés, aussi l'économie semble-t-elle reprendre. Le pays est également en train de mener des négociations directes pour devenir membre de l'Union européenne.

La Vice-Ministre a indiqué que la tendance à la diminution du nombre des mariages et à l'augmentation des naissances hors mariage s'explique par la démocratisation de la société et n'est pas considérée comme un phénomène préoccupant. Les autorités bulgares l'envisagent au contraire comme la preuve que les femmes sont désormais plus maîtresses de leur destinée et que la discrimination à leur égard recule. L'Institut pour la démographie travaille en ce moment à l'élaboration d'une stratégie nationale pour la population, conformément aux recommandations de la Conférence du Caire sur la population et le développement. Le taux de mortalité infantile assez élevé s'explique

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par les mariages précoces, les avortements assez nombreux et un manque de connaissance des méthodes contraceptives.

En tant qu'Etat partie à de nombreux instruments internationaux pour les droits de l'homme, le Gouvernement bulgare considère la mise en oeuvre de ces différents textes comme fondamentale. Pour ce qui est des articles 1 à 3 de la Convention, les droits des femmes font partie intégrante des droits de la personne. La Constitution bulgare est fondée sur les principes de l'égalité et de la non-discrimination et la législation nationale s'attache à les faire respecter. Les femmes n'ont pas besoin de l'approbation de leur mari ou parent pour ester en justice, sauf lorsque des biens communs sont en jeu. Le 16 décembre 1997, l'Assemblée Nationale a adopté une loi pour la protection de l'emploi qui consacre l'égalité entre les sexes dans le secteur du travail. Par ailleurs, les citoyens sont protégés de tout dommage physique ou moral occasionné par des fonctionnaires de l'Etat. Le 5 mai 1992, la Bulgarie a retiré sa réserve sur l'article 29 de la Convention, relatif à l'arbitrage de la Cour internationale de Justice en cas de différend entre les Etats concernant l'interprétation de la Convention.

L'article 5 de la Constitution prévoit que les instruments internationaux ratifiés par le pays sont parties de la législation spéciale. Les dispositions constitutionnelles en matière de droits de l'homme s'appliquent donc directement, sans qu'il y ait besoin d'une législation nationale. Tous ces instruments internationaux ont été traduits, publiés et largement diffusés dans le pays. Il n'existe pas de cas où la Cour Constitutionnelle a mentionné la Convention pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes.

Abordant l'article 4 sur les mesures temporaires positives, la représentante a rappelé qu'aucune mesure de ce type n'a été prise étant donné que la Constitution pose l'égalité entre les hommes et les femmes. Le Gouvernement a toutefois conscience que la situation de facto peut parfois être différente de la situation de jure, notamment dans le secteur privé.

Des programmes spéciaux visant à améliorer l'accès à l'éducation de tous les enfants, notamment ceux de la communauté rom, ont été mis en place, en coopération avec l'UNICEF et l'UNESCO.

Le Gouvernement bulgare considère l'égalité entre les sexes comme essentielle à la démocratie et c'est pourquoi les dispositions de la Plate- forme de Beijing ont été mises en oeuvre, principalement en ce qui concerne la participation des femmes au processus de décision. A cet égard, Mme Primatarova a rappelé que jusqu'en 1989 la société bulgare ne connaissait pas le principe de prise de décision tel qu'on l'entend dans les pays à longue tradition démocratique. Pour appliquer la Plate-forme d'action de Beijing, une Commission intergouvernementale sur les femmes a été créée et un Plan d'application national a été élaboré. En 1996, le Gouvernement a établi un Conseil intergouvernemental pour l'application et le suivi de ce Plan. Ce

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Conseil n'a pas encore de Président et pour l'heure, c'est le Ministère des affaires étrangères qui se charge de la coordination des politiques entre tous les ministères. Il est envisagé de créer un poste de médiateur pour les droits de l'homme, qui serait également chargé des questions de parité entre les sexes. La meilleure façon de mettre en oeuvre la Plate-forme est d'y faire participer les femmes qui doivent avoir accès à la prise de décision et à sa mise en oeuvre, a déclaré la Vice-Ministre. Le Gouvernement souhaite aussi y associer les hommes.

Sur un total de 17 ministres, trois sont des femmes, de même que 18% des vices-ministres. Dans l'administration publique, les femmes représentent 61% des fonctionnaires et 75% des chefs de département au Conseil des ministres. Elles ont fait d'énormes progrès dans les affaires étrangères où pour la première fois, une femme dirige la diplomatie bulgare. Les femmes sont également bien représentées dans le système judiciaire puisqu'elles représentent 60% des personnes employées dans les tribunaux régionaux et locaux. 11% des membres du Parlement sont des femmes, qui occupent en outre des postes importants (Chef du groupe parlementaire majoritaire, Chef du parti agraire, Vice-Président).

En revanche, la traditionnelle division des activités au sein de la famille n'est toujours pas satisfaisante et les femmes qui travaillent ont un double fardeau. Pour surmonter les clichés, les femmes ont un rôle fondamental a jouer, a déclaré Mme Primatarova.

La protection de la maternité est garantie par la Constitution et le Code du travail bulgare contient une section spéciale sur les femmes. Toutefois il existe des cas de discrimination dans le secteur privé de l'économie. Les employeurs préfèrent recruter des hommes ou de très jeunes femmes qui n'ont pas encore d'enfant. Les emplois à très fortes qualifications sont peu ouverts aux femmes, notamment celles d'un certain âge. C'est pourquoi des cours de formation continue sont offerts aux personnes au chômage.

Les autorités ont pris des mesures fermes contre le crime organisé, y compris le trafic des femmes et l'exploitation de la prostitution. En juillet 1997, le Code pénal a été amendé pour pénaliser de manière plus stricte le trafic de personnes et la prostitution imposée. Les formes les plus courantes de violence à l'égard des femmes sont des crimes de droit commun, tels les meurtres ou tentatives de meurtre, les viols et les vols. Les femmes victimes de harcèlement sexuel peuvent entamer des procédures pénales ou civiles. La violence au foyer est un problème qui préoccupe beaucoup les autorités bulgares. Des blessures sérieuses ou même légères sont considérées comme un délit qui peut être poursuivi devant un tribunal, à la condition toutefois que la victime porte plainte. Compte tenu de l'histoire du pays, la violence domestique n'est pas encore considérée par la population comme une grave violation des droits de l'homme et des campagnes d'information sur ce sujet ont été mises en place, en collaboration avec les ONG et les médias. Le

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Parlement débat en ce moment d'une loi pour les droits de l'enfant, qui envisage notamment de criminaliser la violence domestique.

L'accès gratuit à l'éducation est égal pour tous les sexes et toutes les ethnies, c'est pourquoi aucune donnée ventilée par appartenance ethnique n'est disponible. Les femmes représentent 60% des étudiants de l'université, un peu moins de 50% des enseignants et plus de 50% des directeurs et cadres d'établissements.

Durant la période 1990 à 1995, les femmes représentaient environ 47% de la population active. Elles étaient employées surtout dans l'industrie, le commerce, l'éducation et le secteur de la santé. Le chômage est un problème général qui touche cependant plus fortement les femmes. Celles-ci représentent 53,5% des demandeurs d'emploi. Les autorités espèrent que le processus de privatisation va, à moyen et à long termes, entraîner de nombreuses créations de postes. Pour ce qui est des congés de maternité, ils sont considérés comme temps de travail et viennent s'ajouter à l'ancienneté des femmes salariées.

En ce qui concerne la mise en oeuvre de l'article 12 de la Convention, la représentante a indiqué que la vaste réforme entamée vise à améliorer la qualité des soins de santé et à garantir le bon fonctionnement des services de soins gratuits.

La réforme agraire prévoyant la restitution des terres n'est pas encore achevée. Les terres qui ont été redistribuées ont été données aux anciens propriétaires. Il n'est pas prévu de crédits spéciaux pour les nouveaux propriétaires. Cependant tout propriétaire terrien peut demander des crédits pour améliorer son équipement, améliorer la qualité des sols et acheter des graines. La préférence pour accorder des crédits est donnée aux personnes qui cultivent des produits définis comme prioritaires par le Gouvernement.

Mme Primatarova a également indiqué qu'il n'existe toujours pas de loi régissant les droits et les devoirs des personnes vivant maritalement. Elle a rappelé que le document HRI/CORE/1/Add.1 contient de nombreuses informations complémentaires.

Questions et commentaires des expertes

Une experte a constaté les changements survenus en Bulgarie dans le cadre de la démocratisation du pays. Elle s'est félicitée de ce que la délégation bulgare a posé la participation des femmes au processus de prise de décision du pays comme un élément clé de l'instauration de la démocratie. Ces convictions admirables doivent néanmoins être traduites dans les faits à travers la mise en place de lois spécifiques et la volonté des autorités de les appliquer rapidement. L'experte a également placé au rang des priorités l'élaboration des instruments juridiques nécessaires, la mise en place des institutions d'Etats responsables de leur mise en oeuvre et la création d'un

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mécanisme national. Elle a estimé que les rapports de l'Etat partie reflètent la nécessité pour le Gouvernement bulgare d'adopter des mesures spécifiques répondant à des besoins particuliers d'une société en transition. Si l'experte a reconnu les mesures courageuses adoptées en Bulgarie pour protéger les droits de l'homme, elle a souligné la nécessité d'appliquer ces principes à l'égard des femmes.

Une autres experte s'est dite frappée par la démarche adoptée par la délégation Bulgare dans sa présentation des rapports. L'importance accordée aux droits de l'homme de façon générale permet d'espérer que le dialogue entre l'Etat partie et le Comité mènera à l'adoption de nouvelles mesures en faveur de la femme bulgare. Pour ce qui est des changements structurels que connaît la pays, l'experte a relevé les progrès importants réalisés dans le domaine de l'emploi et de l'activité économique. Elle a par ailleurs félicité l'Etat partie d'avoir retiré ses réserves à la Convention. Elle a également dit son appréciation quant aux efforts manifestés par le Gouvernement bulgare en vue de mettre en oeuvre la Convention au niveau national et de l'intégrer à la législation du pays. Elle a cependant demandé plus d'informations sur les stratégies en faveur de la femme appliquées par le Gouvernement. Elle a demandé si la ratification de la Convention a fait l'objet d'une publication au Journal officiel. La Convention est-elle un instrument juridique contraignant? Quelle mesure avez-vous prises pour combattre le phénomène de la pauvreté chez les femmes? Comment abordez-vous la question de la participation de la femme à des postes de direction? Pour ce qui est de la violence à l'égard des femmes, elle a demandé comment le Gouvernement bulgare répond à ce problème. S'agissant de la traite des femmes, elle a fait part de sa profonde préoccupation quant à ce phénomène et a suggéré l'établissement d'une coopération internationale dans ce domaine. Pourquoi les femmes ont-elles encore recours à l'avortement comme moyen de contraception? Qu'en est-il des moyens de contraception et de la planification familiale? Quelle est votre politique en matière de santé et ne pensez-vous pas que les femmes devraient prendre plus part à la prise de décision du pays pour les questions de santé publique. La démocratie réelle ne peut pas être établie sans la participation des femmes à la société, a-t-elle souligné.

Une experte a relevé le nombre croissant de naissances hors mariage qui selon elle serait dû à la modernisation de la société. Est-ce que de façon délibérée ou pas le Gouvernement n'encourage-t-il pas une société de promiscuité? Est-ce là une façon d'éliminer la discrimination à l'égard des femmes? Ce style de vie contribue-t-il à l'amélioration de la condition de la femme? Il faut nous efforcer d'élever le niveau moral des sociétés, a-t-elle estimé.

Une experte a également félicité le Gouvernement pour le retrait des réserves à la Convention. Elle a également dit son appréciation pour le taux élevé de femmes au niveau universitaire supérieur. Elle a cependant fait part de sa préoccupation quant à la persistance des stéréotypes en Bulgarie alors que le niveau d'éducation est élevé. Elle a recommandé par ailleurs

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l'intensification des campagnes de sensibilisation à la violence domestique. Pour ce qui est du taux élevé des naissances hors mariage, elle a suggéré d'engager un débat national à ce sujet car rien ne peut remplacer la cellule familiale. Le renforcement de cette structure pourrait faire l'objet de mesures temporaires. Au sujet des femmes rurales, elle a également suggéré qu'on leur facilite de nouveaux débouchés par le biais de cours de formation.

Une experte a manifesté son inquiétude quant au fait que le Gouvernement bulgare est resté tributaire de l'égalité de jure héritée du régime communiste sans se préoccuper de l'application dans les faits des principes d'égalité. Les faits traduisent en effet une discrimination structurelle. Les questions de sexospécificité doivent être au rang des priorités nationales. Vous avez la volonté politique, a-t-elle estimé. Il s'agit maintenant de la traduire dans les faits. Elle a demandé par ailleurs plus d'informations sur le Comité interministériel et le Plan d'action national pour la mise en oeuvre de la Plate-forme de Beijing. Combien de personnes sont-elles impliquées au niveau des ministères pour l'application de ce plan national? Une formation est-elle prévue pour ce personnel? Si l'experte a relevé le taux d'instruction élevé des femmes, elle a constaté une certaine dichotomie dans le système éducatif bulgare se traduisant par la présence de femmes très éduquées et de femmes ne possédant même pas un niveau élémentaire d'instruction.

Une experte, abordant la situation de la population gitane, a constaté que la majorité des enfants gitans ne fréquentent pas l'école. Ceci contribue à la fragilisation d'une population déjà vulnérable. Est-ce que le Gouvernement a l'intention de mener à bien un programme concret et intensif pour encourager les enfants gitans à aller et à rester à l'école? Est-ce que le Gouvernement à l'intention d'intensifier ses efforts en faveur de cette population? S'agissant de la violence au foyer, elle a constaté l'absence de réaction concrète face à l'importance de ce phénomène qui a pourtant des conséquences sociales. Elle a évoqué par ailleurs le phénomène de la pédophilie très répandu en Europe. Est-ce que la Bulgarie est touchée par ce fléau? Abordant la question de la toxicomanie, elle a souhaité connaître son incidence sur les jeunes filles et les femmes. Au sujet des femmes rurales, elle a demandé si celles-ci avaient pu devenir propriétaires des terres.

Une experte a fait remarquer que le rapport ne correspond pas dans sa rédaction aux directives définies par les Nations Unies en matière de présentation des questions de parité entre les sexes. Ceci est d'autant plus inquiétant qu'il semble révéler une attitude générale de refus de considérer de manière spécifique les questions de la promotion de la femme. Un autre membre du Comité a regretté le manque d'informations relatives aux stratégies adoptées par le Gouvernement vis-à-vis des différentes questions qui intéressent les femmes. Pour ce qui est du mécanisme national, il a été demandé s'il est envisagé d'en laisser la direction au Ministère des affaires étrangères. Une experte a estimé que le fait que ce soit le Ministère des affaires étrangères qui supervise la politique nationale en faveur des femmes

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témoigne du refus des autorités d'adopter une approche réellement orientée vers les questions de parité. Envisage-t-on de maintenir le caractère intergouvernemental de la Commission ou de lui accorder indépendance et autonomie? Une experte a déploré que le Plan national d'application de la Plate-forme de Beijing ne soit pas présenté de manière détaillée dans les rapports. Se félicitant de la création future d'un poste de médiateur, une experte a insisté sur la nécessité de lui attribuer un mandat clair et des ressources suffisantes. L'absence de loi sur l'égalité entre les sexes a été regrettée par plusieurs membres du Comité. Le contenu de la Constitution ne suffit pas pour améliorer la situation des femmes dans les faits et des mesures temporaires spéciales en leur faveur doivent être adoptées. Si le Gouvernement rédige un projet de loi sur le droit des enfants, ne peut-il pas développer un projet semblable sur le droit des femmes? De manière générale, les expertes ont estimé que le régime législatif pris en faveur des droits de l'homme et des femmes constitue un premier pas, qui demande cependant à être complété par des mesures précises et concrètes. Elles ont ajouté que cette situation est particulièrement vraie pour les pays en transition économique.

Rappelant que 80% des Bulgares vivent en deçà du seuil de pauvreté, dont une majorité de femmes, on a demandé si des plans de lutte contre la pauvreté s'inscrivant dans le cadre des recommandations de Beijing ont été mis en place. Une experte a demandé si le Gouvernement s'est penché sur les raisons de la faible participation des femmes aux cours de formation gratuite offerts aux demandeurs d'emploi. Quels sont concrètement les efforts développés pour réduire les obstacles économiques et culturels auxquels les femmes rurales sont confrontées?

Abordant la question de la violence au foyer, un membre du Comité a estimé que la législation existante et notamment le Code pénal n'est pas suffisamment efficace pour lutter contre ce phénomène, du fait notamment que la procédure judiciaire ne prévoit pas la présence d'un procureur auprès des plaignantes et n'offre aucune aide judiciaire gratuite. En fait, il apparaît que les femmes craignent des représailles. Des statistiques existent-elles sur le nombre des hommes qui avaient été condamnés pour violence domestique? Dans de tels cas, quelle a été la nature des peines infligées? Les expertes ont estimé que la violence domestique n'est plus un problème du domaine privé et qu'il est du devoir des pouvoirs publics de lutter contre ce phénomène. A cet égard, elles ont demandé au Gouvernement bulgare de prendre des mesures législatives qui dans un premier temps sont les seules qui ont un effet dissuasif. Les chiffres relatifs aux avortements provoqués ont été qualifiés d'anormalement élevés et on s'est demandé s'il y avait là un lien avec le phénomène de la violence domestique. Les expertes ont estimé qu'il est inacceptable pour une société de tolérer la violence à l'égard des femmes. L'absence de toute mention des services spécifiques accordés aux femmes victimes de violence signifie-t-elle qu'il n'existe aucune aide de cette nature? Un membre du Comité a particulièrement mis l'accent sur la nécessité d'éduquer la population sur cette question.

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Une autre experte s'est particulièrement inquiétée de l'importance du trafic des femmes et de l'exploitation de la prostitution. Elle a mis en garde contre les risques sanitaires qui en découlent et a engagé le Gouvernement bulgare à développer plus avant sa collaboration avec d'autres pays pour lutter contre cette forme de crime organisé. Un autre membre du Comité a ajouté que les mesures punitives, qui sont certes essentielles, doivent également s'accompagner parallèlement de mesures préventives. Il faut notamment informer les prostituées et toutes les jeunes filles de la nature des réseaux de trafic des femmes et de leurs méthodes d'approche. Les chiffres fournis par le Gouvernement sur la prostitution sont choquants tant ils sont élevés, a déclaré une experte. Il a également été rappelé que bien souvent c'est une situation économique très difficile qui pousse les femmes à la prostitution.

Le Comité s'est déclaré inquiet du niveau élevé du chômage des femmes. Rappelant que le processus de transition économique offre une opportunité particulière aux femmes de créer leur entreprise, les membres du Comité ont souhaité connaître les mesures spécifiques prises pour l'accès des femmes au crédit et pour encourager la création d'entreprise par des femmes.

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