FEM/969

LE RAPPORT INITIAL DU ZIMBABWE REVELE QUE LA PROMOTION DE L'EGALITE ENTRE LES SEXES EST FREINEE PAR LA PREVALENCE DU DROIT COUTUMIER

22 janvier 1998


Communiqué de Presse
FEM/969


LE RAPPORT INITIAL DU ZIMBABWE REVELE QUE LA PROMOTION DE L'EGALITE ENTRE LES SEXES EST FREINEE PAR LA PREVALENCE DU DROIT COUTUMIER

19980122 Le Comité félicite le Zimbabwe pour sa réelle volonté politique en faveur de la parité entre les sexes

Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes a entamé, ce matin, l'examen du rapport initial du Zimbabwe. Dans ses remarques introductives, le Ministre des affaires nationales, de la création d'emplois et des coopératives, Mme T.V. Lesabe, a affirmé que le Zimbabwe est probablement l'Etat du continent africain le plus avancé en ce qui concerne les questions liées aux spécificités de chaque sexe. Elle a cité en exemple la création d'un mécanisme national pour la promotion des femmes, la nomination au sein de chaque ministère d'une personne spécialement chargée des questions de parité, l'établissement d'un comité interministériel sur les droits de l'homme ainsi que l'élaboration d'une stratégie nationale dénommée "Vision 2020". Elle a cependant reconnu que la prégnance de certains stéréotypes défavorables aux femmes et des pratiques coutumières constitue un obstacle vers la marche vers l'égalité entre les sexes.

Le Secrétaire permanent du Ministère des affaires nationales, de la création d'emplois et des coopératives, M. J.M. Zamchiya, a ensuite présenté en détails les récentes mesures prises par le Gouvernement en faveur des femmes. Il a ainsi indiqué que, depuis 1997, la Constitution pose clairement l'interdiction de toute discrimination fondée sur le sexe. Par ailleurs, les pouvoirs du médiateur national ont été élargis aux questions de violations des droits de l'homme, ce qui permet désormais aux femmes victimes de discrimination de se tourner vers lui.

Les membres du Comité se sont accordés pour reconnaître la volonté politique réelle en faveur des femmes dont le Gouvernement du Zimbabwe fait preuve et qui s'est concrétisée par l'adoption de nombreuses mesures législatives et par l'amendement de la Constitution du pays posant comme hors- la-loi la discrimination fondée sur le sexe. Rappelant que la Convention a été ratifié il y a onze ans sans réserves, elles ont loué le gouvernement pour la clarté et la franchise du rapport qui a le mérite de ne pas passer sous silence les obstacles à la mise en oeuvre de la Convention.

Le Comité poursuivra son examen du rapport initial du Zimbabwe, cet après-midi, à 15 heures.

Rapport initial du Zimbabwe (CEDAW/C/ZWE/1)

Le rapport qui a été établi à partir de publications et de rapports des ministères et des organisations non gouvernementales qui s'occupent des questions féminines indique que le Zimbabwe est devenu Etat partie à la Convention pour l'élimination de toutes les formes de discrimination des femmes en 1991. La Convention n'a pas été traduite dans les langues locales et très peu de gens savent que le Zimbabwe l'a ratifiée.

Le Gouvernement du Zimbabwe a établi, au sein du Ministère des affaires nationales, de la création d'emplois et des coopératives, un mécanisme national, le Département des affaires féminines, qui a pour mandat d'encourager les activités visant à donner aux femmes la possibilité de participer à la vie politique à tous les niveaux, de garantir aux femmes, sur un pied d'égalité avec les homme, l'accès aux emplois du secteur structuré et de faire éliminer toutes les lois discriminatoires à l'encontre des femmes. Ce département travaille en liaison avec les ministères et les départements s'occupant également de la promotion des femmes et de la défense de leurs droits. Depuis 1994, dans les autres ministères, un fonctionnaire est spécialement chargé de veiller à ce que les politiques suivies soient soucieuses d'équité entre les sexes. Mais les procédures à appliquer à cet égard n'ont pas encore été clairement définies.

Il existe également un Bureau du médiateur, qui examine les plaintes de la population en général, et notamment celles des femmes. Le Médiateur actuel est une femme. Les cas les plus fréquents de plaintes déposées par des femmes auprès d'elle concernent les retards dans le versement des pensions alimentaires et dans le versement des parts de succession, le harcèlement sexuel et la division des biens après divorce.

Longtemps le Zimbabwe n'a attaché que peu de valeur à l'activité des femmes hors du foyer. Cette situation a été exacerbée par des politiques sociales et économiques colonialistes favorables aux hommes. Les femmes étaient considérées comme inférieures dans la quasi-totalité des domaines. Au plan juridique, les femmes étaient des mineures perpétuelles, sans personnalité juridique et ne pouvant ni passer contrat sans leur tuteur, ni acquérir des biens en leur nom propre, ni engager des poursuites en justice. Depuis l'indépendance, la cause des femmes a progressé grâce à des réformes du droit. La loi sur l'âge légal de la majorité, promulguée en 1982, a ainsi conféré aux femmes la majorité civile et en 1985, la loi sur les questions matrimoniales a introduit des motifs juridiques relativement simples de divorce. Cette dernière ne s'applique toutefois pas aux mariages de droit coutumier, or 80% des femmes au moins contractent des mariages de droit coutumier. Les dispositions de la Convention doivent être incorporées dans la législation nationale pour avoir force de loi.

La Constitution du Zimbabwe n'interdit pas la discrimination fondée sur le sexe, en tant que telle. Dans la pratique, cette omission a servi à

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promouvoir la cause des femmes. Dans le domaine de l'éducation, des mesures positives ont été adoptées pour encourager l'inscription d'étudiantes dans les écoles secondaires et les institutions techniques. En outre, la loi sur les relations professionnelles de 1985 prévoit l'adoption de mesures d'intégration active dans le domaine de l'emploi. Cette loi interdit aux employeurs de pratiquer une discrimination quelconque fondée sur le sexe, notamment en matière de fixation des salaires, de formation et de promotion. Son non respect constitue un délit punissable par la loi. Le Président a également été en mesure d'invoquer cette notion pour nommer des femmes ambassadeurs et hauts fonctionnaires. En revanche, les femmes ne sont pas en mesure d'invoquer la Constitution pour se protéger dans les domaines où elles sont victimes de mesures discriminatoires. Un amendement à la Constitution visant à interdire par la loi la discrimination fondée sur le sexe est en préparation. Des mesures d'intégration active ont également été adoptées afin de promouvoir les femmes dans le secteur public car seulement 12% de postes de rang élevé sont occupés par des femmes dans la fonction publique. L'objectif est de porter ce chiffre à 33% d'ici à l'an 2000.

En ce qui concerne les stéréotypes, il existe de nombreuses pratiques traditionnelles et culturelles qui entravent directement ou non la promotion de la femme. C'est la cas des promesses de mariage à un âge précoce et du paiement d'une dot. Les médias ont tendance à approuver la domination de l'homme. En revanche, la pratique de l'excision est rare au Zimbabwe.

L'attitude de la société face à la prostitution est caractérisée par une désapprobation totale. Sur le plan juridique, la prostitution est interdite et le fait de tenir une maison de tolérance, de pratiquer le proxénétisme et de faire livrer des femmes à la prostitution sont des délits. Toutefois, la police a tendance à arrêter sans discernement les femmes qu'elle prend pour des prostituées, en particulier lorsqu'elles ne sont pas accompagnées d'hommes la nuit dans les rues, les hôtels ou les boîtes de nuit. Il existe peu de mesures de prévention et de réinsertion des prostituées.

La Constitution et la loi électorale de 1990 autorisent les femmes à voter aux élections générales et partielles et à se présenter aux élections présidentielles et législatives. Toutefois, les femmes ne se présentent pas aux élections aussi souvent que les hommes et leur participation politique se limite à voter pour élire des hommes. Traditionnellement, le rôle de la femme consiste à prendre soin de leur époux et enfants, c'est pourquoi sa participation active à la vie politique et publique suppose l'existence d'un système d'appui au niveau domestique. Il en résulte, par exemple, que pour la législature 1995-2000, le Parlement ne comprend que 21 femmes, dont 2 nommées par le Président et 1 membre ès-qualité, sur un nombre total de sièges de 150. Des efforts ont été faits pour faire participer les femmes aux structures politiques et administratives au niveau de la base en augmentant le nombre de leurs représentantes aux Ward Development Committees et aux Village Development Committees, qui doivent réserver au moins de leur sept sièges à une femme.

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Le système éducatif est encore marqué par le passé colonial du pays, époque de discrimination contre les Noirs (et surtout les filles). Pour garantir l'égalité d'accès à l'éducation, le Gouvernement a instauré un système d'enseignement primaire gratuit et obligatoire pour tous les enfants. Toutefois, en raison du programme économique d'ajustement structurel actuellement en cours, les frais de scolarité ont été réintroduits. Entre 1979 et 1989, l'enseignement primaire a vu augmenter de 195% le nombre des filles. En 1989, on trouvait alors le même nombre de filles et garçons dans le primaire, encore que les cas d'abandon de scolarité restaient plus élevés chez les filles. Le faible nombre de filles dans le secondaire s'explique par le manque de ressources pour régler les frais de scolarité, par les cas de grossesse (même si désormais, dans les collèges, les étudiantes enceintes ne sont plus obligées d'interrompre leurs études jusqu'à l'accouchement) et par l'attitude des parents qui donnent la préférence et la priorité à l'éducation des garçons. Dans l'enseignement supérieur, depuis l'application récente de la politique en faveur de l'accès des femmes à l'université, le nombre d'étudiantes est passé à 35% des inscrits en première année, contre 25% environ auparavant. Il n'existe aucun mécanisme de contrôle de la fréquentation scolaire et les abandons en cours d'études se poursuivent. La majorité des femmes qui ont fait des études travaillent dans le secteur public et dans les secteurs de la santé et de l'éducation. Le personnel enseignant des écoles primaires et secondaires est généralement masculin, sauf dans les jardins d'enfants qui sont essentiellement confiés à des femmes.

Dans le domaine de l'emploi, l'entreprise privée et la fonction publique sont soumises à des législations différentes. Toutes deux interdisent cependant la discrimination fondée sur le sexe. Les femmes, qui représentent environ un quart de la population active, sont surtout présentes dans des secteurs qui font appel à leurs compétences maternelles et qui sont aussi les moins bien payées. Les femmes ont en général un emploi à temps partiel ou un contrat à durée déterminée et par conséquent n'ont droit à aucun des avantages sociaux (congé de maladie et de maternité, retraite et primes) des autres salariés. Les salariées ont droit à 90 jours de congés de maternité payés, mais elles ne perçoivent qu'une partie de leur salaire. La loi limite a 3 le nombre de congés de maternité payés qu'une femme peut réclamer à un même employeur. De plus, l'employée ne peut prendre qu'un seul congé de maternité par période de deux ans. Les règlements de la fonction publique excluent le paiement des congés-maladie liés directement ou indirectement à une grossesse.

Les conditions de travail des employés de maison (dont 55% sont des femmes) sont régies par la législation, qui n'est que rarement respectée. Les domestiques sont mal payés, congédiables sans préavis et travaillent de longues heures sans percevoir d'allocations de maternité. Le secteur non structuré où 64% des travailleurs sont des femmes n'est pas lui non plus bien protégé par la législation du travail.

La politique médico-sanitaire est axée sur les soins de santé primaires. Afin de réduire les disparités entre les communautés rurales et urbaines,

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depuis le 1er mars 1995, les centres de soins ruraux dispensent gratuitement leurs services. Le taux de natalité est de 25,5 naissances pour 1000 habitants et l'indice de fécondité de 5,91 enfants par femme. En 1985, un Conseil national pour la planification familiale a été créé par décret. Il met en place des programmes qui s'adressent également aux hommes et aux jeunes. Les cliniques sont chargées de distribuer gratuitement des produits de contraception. La plupart des femmes préfèrent la pilule à tout autre moyen. Les jeunes femmes célibataires peuvent éprouver des difficultés à obtenir des moyens anticonceptionnels, car il n'est pas rare que le personnel médical estime les jeunes filles trop jeunes pour être sexuellement actives ou ne pas en avoir besoin du fait qu'elles ne sont pas mariées. En 1991, au moins 72% des femmes ont été suivies pendant leur grossesse par du personnel médical qualifié. L'avortement reste interdit sauf dans des circonstances exceptionnelles, notamment lorsque la femme est enceinte à la suite de relations sexuelles illicites ou que la grossesse menace gravement sa santé. Un programme national de coordination de la lutte contre le sida a été lancé et porte sur l'éducation, les services consultatifs, la modification des attitudes et le traitement. Des programmes de lutte contre le sida spécialement destinés aux femmes ont également été élaborés

Aucune loi n'interdit aux femmes de contracter des emprunts auprès de banques ou d'autres institutions financières. Néanmoins les prêts ne sont souvent consentis qu'après consultation du mari, qui doit parfois se porter garant. Pour l'instant, l'aide apportée aux femmes qui dirigent une entreprise reste limitée. Elle est, de plus, essentiellement dirigée vers le secteur structuré, alors que dans le secteur non structuré 67% des petites entreprises sont dirigées par des femmes.

La majorité des femmes vivent en zone rurale et travaille dans le secteur agricole alors que le travail et la production agricole ne sont guère reconnus. Etant donné que les femmes vivant dans les zones agricoles n'ont pas accès aux terres en leur nom propre, elles ne peuvent pas s'en servir pour garantir des prêts. Les autorités s'efforcent actuellement de leur consentir des prêts afin d'améliorer leur rendement agricole. Dans certaines zones rurales, les femmes se sont organisées en groupements d'auto-assistance et en coopératives afin de réaliser des économies d'échelle. Il n'existe pas de programmes de sécurité sociale spécialement conçus pour les populations rurales.

Le mariage est régi par le droit civil et par le droit coutumier. Il existe trois types de mariage, à savoir le mariage civil (le seul monogame), le mariage coutumier enregistré et le mariage coutumier non enregistré, qui n'est pas considéré comme valide par la loi. La tutelle des enfants légitimes revient en général au père. Une femme peut prendre ou non le nom de famille de son mari. Cependant, le domicile du mari détermine celui du couple. La loi fixe l'âge du consentement à 16 ans pour les filles et à 18 ans pour les garçons. La violence familiale reste endémique et très souvent les victimes ne portent pas plainte. Le viol n'est pas considéré comme violence domestique

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car la législation n'a pas encore tranché la question de savoir si des rapports sexuels entre époux sans le consentement de l'un d'entre eux constituent un viol. La victime peut se tourner vers un tribunal et demander une ordonnance imposant certaines restrictions qui empêchent l'auteur de violences de récidiver, mais une grand nombre de la population, surtout dans les zones rurales, ignore ce droit. Les policiers reçoivent une formation sur cette question, mais en général les femmes sont contraintes de retirer leur plainte car leur mari est le gagne-pain de la famille et elles n'ont pas intérêt à ce qu'il soit emprisonné.

Présentation du rapport par l'Etat partie

Mme T.V. LESABE, Ministre des affaires nationales, de la création d'emplois et des coopératives du Zimbabwe, a dans ses remarques introductives affirmé que le Zimbabwe est probablement l'Etat du continent africain le plus avancé en ce qui concerne les questions propres aux femmes. Elle en a pris pour preuve la création d'un mécanisme national pour la promotion des femmes, la nomination au sein de chaque ministère d'une personne spécialement chargée des questions de parité et l'établissement d'un comité interministériel sur les droits de l'homme. Elle a cependant reconnu que des obstacles subsistent et ralentissent la marche vers l'égalité entre les sexes, tels certains stéréotypes négatifs à l'égard des femmes et des pratiques et lois coutumières rétrogrades. C'est conscient de ces freins que le Gouvernement du Zimbabwe a mis en place un Programme national d'action pour les femmes ainsi que la stratégie nationale "Vision 2020". Mme Lesabe a également indiqué que le rapport aujourd'hui soumis à l'examen des expertes est le fruit d'une large consultation entre les autorités publiques, les organisations non gouvernementales et les institutions de recherche spécialisées dans les questions de sexospécificité et du développement. Elle a également assuré les membres du Comité que la poursuite des efforts vers la parité entre les sexes et la mise en place d'actions concrètes restent de première priorité pour son Gouvernement.

Prenant la parole pour présenter oralement le rapport, M. J.M. ZAMCHIYA, Secrétaire permanent du Ministère des affaires nationales, de la création d'emplois et des coopératives, a indiqué que la Constitution du Zimbabwe, qui jusqu'en 1997 était muette sur les problèmes de discrimination à l'égard des femmes, pose désormais clairement l'interdiction de toute discrimination fondée sur le sexe. Outre l'amendement apporté à la Constitution, la Loi sur les relations du travail, la Loi sur les services publics et la Loi sur la discrimination sexuelle mettent cette discrimination fondée sur le sexe hors- la-loi. Les femmes qui sont victimes de discrimination peuvent obtenir justice auprès des tribunaux ainsi que du bureau du médiateur (ombudsman), dont en 1997 les pouvoirs ont été étendus pour englober désormais les questions de violations des droits de l'homme. M. Zamchiya a toutefois déclaré que cette dernière modification est encore trop récente pour pouvoir en estimer les effets. Il a ajouté que le Gouvernement a également fait en sorte que les tribunaux fournissent une protection aux témoins et aux victimes

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vulnérables, le plus souvent des femmes et des enfants, qui viennent faire déposition. Depuis la mise en place de ces mesures, le nombre d'affaires d'abus et de viols d'enfants portées devant les tribunaux a augmenté. Toutefois, il a reconnu qu'il ne dispose pas de chiffres relatifs à la violence contre les femmes car celles-ci hésitent encore à porter plainte. Les policiers chargés de ces affaires ont été formés et sensibilisés à ces questions. Le Gouvernement va mener une étude afin de déterminer s'il lui faut mettre en place une loi spécifique de lutte contre la violence envers les femmes.

De nombreuses mesures positives visent également à renforcer la participation des femmes et des jeunes filles dans les secteurs de l'éducation, de l'emploi et de la vie publique et politique. Car dans la pratique, les progrès demeurent lents. Ainsi les stéréotypes sur la répartition traditionnelle des rôles entre les hommes et les femmes demeurent. Les femmes sont toujours considérées comme des mères à plein temps et des subordonnées, en dépit du fait que 35% des foyers sont dirigés par des femmes. Une enquête sur le contenu des manuels scolaires a ainsi révélé que les hommes y sont toujours présentés dans des rôles avantageux et de direction, c'est pourquoi le Gouvernement a mis en place un programme de renouvellement complet des livres scolaires.

En matière de prostitution, M. Zamchiya a reconnu que bien souvent des mesures punitives sont prises à l'encontre des femmes qui se prostituent et non contre les hommes. Le problème est que la réponse du Gouvernement demeure lente, a-t-il ajouté.

Traditionnellement les domaines de la vie publique et politique ont toujours été considérés comme relevant des hommes. Pour lutter contre ce phénomène, le Gouvernement a mis en oeuvre une politique favorable aux femmes qui demande à ce que 25% des postes au sein des conseils ruraux soient occupés par des femmes d'ici l'an 2000. Le Gouvernement a également modifié en 1996 la partie de sa Constitution relative à la nationalité afin de supprimer la discrimination permettant seulement aux citoyens mâles de transmettre leur nationalité à leur conjoint étranger. Désormais, homme ou femme, les conjoints de citoyens du Zimbabwe doivent présenter les mêmes qualifications.

M. Zamchiya a indiqué que le taux d'abandon scolaire chez les jeunes filles demeure très élevé. Il en résulte que les garçons sont plus nombreux à partir du niveau secondaire et que les jeunes filles s'inscrivant à l'université sont toujours très peu nombreuses, malgré une mesure d'encouragement développée par l'Université du Zimbabwe et qui a entraîné une augmentation de la proportion des inscrites de 26% en 1995 à 36% en 1996. Outre les schémas familiaux traditionnels qui donnent la préférence aux études des garçons, une étude a révélé que les femmes diplômées une fois dans le secteur de l'emploi sont confrontées à des problèmes de promotion et de reconnaissance de leurs capacités, ce qui tend à les décourager d'entreprendre tout type d'études.

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Afin de limiter l'abandon scolaire des jeunes filles, le Gouvernement a également pris des mesures pour permettre aux élèves enceintes de poursuivre leurs études.

La politique nationale de santé est placée sous le signe de la "Santé pour tous en l'an 2000". Les progrès en matière d'égalité d'accès aux soins de santé sont toutefois freinés par l'expansion de l'épidémie de VIH/sida. La planification familiale a été développée pour limiter la croissance de la population.

Toutes les femmes peuvent contracter des prêts, même si les banques et les institutions financières sont peu enclines à leur faire confiance. Plusieurs organisations non gouvernementales s'efforcent d'aider les femmes à en obtenir. Depuis 1991, les femmes mariées n'ont plus besoin de leur époux pour acquérir et enregistrer des biens immobiliers. En outre, la discrimination fiscale sur la base du sexe n'existe plus depuis 1995.

M. Zamchiya a reconnu que les femmes rurales continuent d'être désavantagées, car les services d'éducation et de santé sont plus limités que dans les zones urbaines. En outre, la plupart d'entre elles ne peuvent pas acquérir de terrain. Aussi alors qu'elles constituent la majeure partie de la main d'oeuvre agricole, elles n'ont pas le contrôle de la terre.

En matière d'égalité de traitement devant les tribunaux, plusieurs femmes se sont plaintes que les cas de violence au sein de la famille et de viols sont traités avec un certain détachement par les juges qui ont parfois distribué des peines dérisoires aux coupables. Le Gouvernement a promulgué en 1997, une loi sur l'aide judiciaire, qui devrait bénéficier à une majorité de femmes.

Les mariages sont toujours régis par la loi coutumière et la loi générale, qui accorde plus de droits aux femmes que la première. Le problème est que la plupart des femmes du pays vivent en zone rurale où le mariage se contracte sur la base du droit coutumier non enregistré. Dans les cas de divorce, les enfants en bas âge sont invariablement placés sous la garde de leur mère. La loi sur l'héritage est, tout comme celle sur le mariage, placée sous le signe de la dualité entre la loi générale et la loi coutumière. Jusqu'en juillet 1997, selon la loi coutumière, une femme ne pouvait hériter des propriétés de son mari car le droit en la matière était patriarcal. Aujourd'hui l'épouse survivante et les enfants du défunts sont les principaux bénéficiaires testamentaires. M. Zamchiya a indiqué que les organisations non gouvernementales ont joué un rôle de premier ordre dans l'adoption de cet amendement.

Le représentant a ajouté que le mécanisme national pour la promotion de la femme est en train d'établir une liste des règlements qui ne sont toujours pas conformes à la Convention. Il va les transmettre au différents ministères et organes législatifs concernés pour qu'ils en tiennent compte. Par

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ailleurs, la Convention a désormais été traduite dans les deux dialectes principaux du pays et ses articles en ont été illustrés afin que l'ensemble de la population puisse la comprendre.

Questions des expertes à l'Etat partie

Une experte a noté que peu de temps après l'accession à l'indépendance du Zimbabwe, le gouvernement a mis en place un organe de promotion de la femme. C'était onze ans avant la ratification de la Convention. Ce type d'organe étant nécessaire à la mise en oeuvre de la Convention, quels sont les obstacles auxquels vous vous êtes heurtés pour sa ratification? Comment la population y-a-t-elle accès et prend-elle connaissance de ses dispositions? Elle a par ailleurs fait état des 22 recommandations générales du Comité. Etes-vous au courant de ces recommandations? Le Programme d'action de Beijing stipule que les Etats parties doivent fournir des informations sur leur mise en oeuvre mais malheureusement, a regretté l'experte, le rapport ne contient aucune données à ce sujet alors que l'on sait que le Zimbabwe a pris une part très active à la préparation de la Conférence de Beijing. L'experte a en outre demandé si les dispositions de la Convention ont été intégrées dans la législation nationale et si une victime de discrimination pouvait porter l'affaire devant une juridiction nationale. Dans le domaine de la violence domestique, l'experte a suggéré une formation aux droits de l'homme du personnel médical.

De nombreuses expertes ont félicité le Zimbabwe pour sa ratification il y a onze ans de la Convention sans réserves et pour les amendements apportés à la Constitution du pays dans le sens de la parité des sexes. Votre engagement ne date pas d'aujourd'hui et la ratification de la Convention sans réserve constitue l'ultime étape vers la fin de la discrimination, a estimé l'une d'entre elles. Au niveau législatif il y a beaucoup d'éléments nouveaux ainsi qu'une politique globale pour la promotion de la femme basée sur ses besoins prioritaires. Des mesures positives en vue d'accroître la participation des femmes aux conseils ruraux sont également un pas dans le bonne direction. Une experte a souhaité que ces mesures s'étendent aux élections des maires, au domaine judiciaire et diplomatique. Elles ont par ailleurs dans leur ensemble félicité le représentant de l'Etat partie pour sa franchise, son ouverture d'esprit et la clarté de son rapport dans la mesure où celui-a reconnu la tâche importante qui reste à accomplir pour que cessent les pratiques discriminatoires à l'égard des femmes. Elles ont loué le gouvernement pour les témoignages de véritable volonté politique en vue de la mise en oeuvre de la Convention d'autant que les traditions culturelles du pays fortement ancrées, tendent à reléguer la femme à un rôle traditionnel. Le plus grand obstacle à la promotion de la femme sont les comportements sociaux traditionnels et nous vous félicitons des mesures prises pour lutter contre ces phénomènes, ont-elles souligné à plusieurs reprises.

Une experte a rappelé qu'en 1981, le Ministre du développement des communautés et des affaires féminines a été créé mais celui-ci a été dissous.

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Pourquoi avez-vous jugé bon de le supprimer? Une autre experte a loué la participation importante des organisations non gouvernementales au processus d'émancipation des femmes. Rappelant par ailleurs qu'il existe aujourd'hui un Département chargé de la promotion de la femme et un Centre de coordination au sein d'autres ministères, un Ministère d'Etat au sein du gouvernement et un Comité interministériel pour les droits de la personne, elle a demandé quelle était la relation entre ces entités et comment réalisent-elles ce travaille commun, quels sont le budget, les effectifs, la hiérarchie de ces institutions?

Néanmoins, le rapport ne mentionne pas comment le processus de rédaction du rapport s'est déroulé, a relevé une autre experte. Quelles sont les ONG qui y ont été associées? Est-ce que le processus de rédaction du rapport a associé les femmes. Quel est le niveau de diffusion de la Convention dans le pays par le biais par exemple d'ateliers en langue vernaculaire? Disposez-vous d'un nouveau Code de la personne et de la famille qui prenne en compte les réalité socio-culturelles assez rétrogrades et les exigences socio-économiques du pays?

Une experte a regretté que le Département de la promotion de la femme ait été transféré d'un Ministère à l'autre ce qui a eu pour résultats d'affecter les programmes existants. Elle a constaté néanmoins que la réalité économique, politique et sociale est toujours très loin de la situation idéale. En dépit de tous les droits dévolus aux femmes, seul un petit pourcentage d'entre elles connaît leurs droits. Comment allez-vous accroître la connaissance de la population à l'égard de leurs droits, qu'il s'agisse des femmes mais également des hommes? Elle a demandé comment les troubles politiques actuels, s'ils existent, affectent la vie des femmes et des enfants.

Une experte a souhaité disposer de l'amendement relatif à la discrimination fondée sur le sexe dans la Constitution. Existe t-il des lois coutumières qui favorisent la discrimination des femmes dans la réalité. Il faut que la Constitution ne puisse pas être interprété par le droit coutumier. La Constitituion couvre-t-elle tous les domaines de la société? Au sujet du mécanisme national responsable des droits de la femme, elle a demandé des précisions sur ses modalités de fonctionnement. Elle a suggéré que des responsables de haut niveau y soient associés. En Norvège , les ministres eux-mêmes ont participé à un séminaire sur les questions de parité entre les sexes. Evoquant par ailleurs le mandat élargi accordé au médiateur, l'experte a demandé si celui-ci pouvait se pencher sur tous les secteurs de la société. Bénéficie-t-il du personnel et des ressources adéquates? Les droits de la personne est un domaine très vaste, Il serait donc préférable que le médiateur se concentre sur les droits de la femme a-t-elle suggéré. Mentionnant la nouvelle Loi sur l'assistance juridique, elle a proposé d'utiliser les connaissances des étudiants en droit par le biais d'une association d'étudiants.

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Un autre membre du Comité s'est félicité de la traduction de la Convention dans les deux langues principales du pays. Elle a demandé si les femmes en ont bien connaissance et a suggéré que l'ensemble des textes juridiques en faveur des femmes pris par les autorités soient également traduits. Si la Constitution met bien hors-la-loi la discrimination fondée sur le sexe, quels sont les effets sur le droit coutumier? L'experte a également souligné que la politique nationale pour la promotion des femmes doit s'accompagner de mesures concrètes. Notant que le rapport fait état d'une étroite collaboration avec les ONG, elle a souhaité qu'une coopération particulièrement étroite soit mise en place avec les ONG féminines. Quelle est la structure de ces organisations de femmes? Des informations précises sur le montant des crédits accordés aux programmes en faveur des femmes ont également été demandées.

Les réformes mises en place, et notamment les amendements à la Constitution, à la Loi communale sur la terre et à la Loi sur la nationalité, permettent de modifier l'environnement afin de réellement instaurer l'égalité entre les sexes, a estimé une experte, qui a suggéré que le Gouvernement ait davantage recours aux mesures positives pour améliorer la position des femmes dans le domaine de l'emploi et pour lutter contre le phénomène de violence. Le Gouvernement a-t-il mené une étude pour savoir comment ces réformes sont acceptées et appliquées dans les communautés, a-t-elle demandé. Quels sont les rapports entre la Loi générale et le droit coutumier lorsqu'il y a contradiction? L'experte a également souhaité savoir si le Gouvernement tient compte des principes inscrits dans la Plate-forme de Beijing.

Abordant la question de la propriété matrimoniale, un membre du Comité a demandé si, sur cet aspect, le Gouvernement compte aligner le régime des mariages coutumiers non enregistrés sur celui de la Loi générale. Une experte a souhaité savoir ce que le Gouvernement fait pour lutter de manière générale contre les pratiques coutumières. Sont-elles critiquées de manière publique et officielle? Des campagnes de lutte contre les stéréotypes sont-elles mises en place et des sanctions contre les personnes qui perpétuent des pratiques hors-la-loi sont-elles prises? L'experte s'est également inquiétée du nombre croissant de femmes qui intègrent le marché informel du travail. Elle a en effet estimé que cette situation est auto-discriminatoire pour les femmes, puisqu'elles y sont mal payées et mal protégées, et a demandé si le Gouvernement envisage de limiter le coût social de ce phénomène.

Pour ce qui est des mesures spécifiques temporaires en faveur des femmes, le rapporteur du Comité a estimé que des mesures d'intégration actives envers les femmes dans tous les domaines doivent être prises d'urgence. Le Gouvernement pourrait par exemple envisager d'utiliser le système de quotas. Il a également été estimé que certaines lois positives prises dans les années 80 ne sont plus au diapason de la promotion des femmes ou encore de certains textes internationaux, telle la Plate-forme de Beijing. L'émancipation des femmes est encore trop freinée par les pratiques coutumières a regretté un membre du Comité. Toutefois, il s'est réjoui de l'extension des pouvoirs du

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médiateur et a demandé des informations plus précises sur ses fonctions. Notant que les victimes de discrimination peuvent réclamer des indemnisations, une experte a souhaité obtenir des statistiques sur les demandes présentées par les femmes. Elle a également demandé s'il existe aujourd'hui de projets de loi supplémentaires sur l'égalité entre les sexes et est-il envisagé de modifier les textes en vigueur qui sont encore discriminatoires? Elle s'est également demandée pourquoi la loi sur les pensions alimentaires ne contient aucune disposition spécifique en faveur des femmes, alors que plus de 70 000 femmes divorcées et mères de famille sont sans emploi.

Une experte a demandé si des actions positives vont également être prises en faveur de la participation des femmes à la vie politique et aux postes supérieurs de la fonction publique. Notant que le rapport fait état d'un objectif d'occupation par des femmes de 30% des postes de la fonction publique d'ici l'an 2000, elle a demandé à connaître dans le détail les mesures qui seront prises pour y parvenir.

S'agissant de l'article 5 sur l'élimination des préjugés et des pratiques coutumières, une experte a mentionné la pratique de la dot qui est encore courante. Que fait le gouvernement pour réduire cette coutume? Elle a par ailleurs demandé des informations sur la violence au foyer. Avez-vous des centres d'accueil pour les femmes victimes de la violence au foyer. Une autre experte a noté que les lois sont sans effet si elles ne sont pas assorties de dispositions actives. Le phénomène de violence à l'égard des femmes se manifeste sous des formes choquantes telle que la pratique consistant à arracher les vêtements des femmes dans la rue. Elle a demandé des renseignements supplémentaires sur les cas de viol et de mutilation génitale et comment le gouvernement y fait face.

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