SG/SM/6410

LA CONVENTION SUR LES MINES ANTIPERSONNEL MARQUE UN GRAND PAS DANS LE DESARMEMENT MONDIAL

4 décembre 1997


Communiqué de Presse
SG/SM/6410


LA CONVENTION SUR LES MINES ANTIPERSONNEL MARQUE UN GRAND PAS DANS LE DESARMEMENT MONDIAL

19971204 A l'occasion de la signature de la Convention, le Secrétaire général rappelle le rôle important de l'ONU dans les opérations de déminage

Ci-après l'allocution prononcée par le Secrétaire général, M. Kofi Annan, à l'occasion de la cérémonie de signature de la Convention sur les mines antipersonnel, Ottawa, 3 décembre :

Je me réjouis tout particulièrement d'être parmi vous aujourd'hui. Lorsque l'on sait combien le Gouvernement canadien s'est dépensé pour mettre les mines antipersonnel hors la loi, il n'est que justice que la Convention qui marque l'aboutissement de ses efforts soit ouverte à la signature à Ottawa.

L'occasion qui nous réunit ici fera date. L'histoire retiendra que, le 3 décembre 1997, plus de cent gouvernements se sont formellement engagés à ne plus produire, vendre, ni utiliser ces sinistres engins de mort que sont les mines terrestres.

Vous pouvez être fiers de compter parmi les premiers signataires de cette importante Convention.

Nous sommes réunis ici aujourd'hui dans la joie pour marquer, en ce temps plein d'espoir, une victoire historique remportée au profit des personnes faibles et vulnérables de ce monde.

Ces personnes sont celles qui d'année en année sont les victimes du fléau que constituent les mines terrestres, qui ont payé de leur vie ou en ont perdu leurs membres. Ce sont elles et leurs enfants qui recevront en récompense la sécurité et le respect que cette interdiction rend possibles.

Cette Convention doit son existence à une alliance planétaire d'individus et de gouvernements, de mouvements de base et d'organisations mondiales à vocation humanitaire.

Cette alliance a couvert de honte le monde et lui a dessillé les yeux, a dénoncé ses prétextes et révélé les possibilités qui s'offrent à lui. Elle a dressé devant nous tous un miroir mettant à nu la méchanceté de l'homme dans sa folie et démontrant la sagesse du courage dont il est capable.

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Elle a pour une fois fait de la "communauté internationale" une vérité vivante et vibrante et non un espoir lointain. Seule une "communauté internationale" vivante et vibrante pouvait se mobiliser par-delà les frontières et les régions en vue d'éliminer ce fléau planétaire.

Aujourd'hui — alors que plus de cent Etats signent la Convention sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la production et du transfert de mines antipersonnel et sur leur destruction — nous réaffirmons l'espoir dont est porteuse la communauté internationale.

En tant que Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies, c'est pour moi un motif de fierté et un privilège que d'exercer les fonctions de dépositaire de la Convention et je m'engage à m'acquitter de cette responsabilité avec foi et attention.

La communauté internationale de demain, telle qu'elle est représentée aujourd'hui dans cette salle, sera une association de gouvernements, de membres de la société civile et d'organisations internationales qui parleront d'une seule voix au nom de tous les civils innocents tués, mutilés et menacés par les mines terrestres. Cette association vient de faire entendre sa voix.

Une raison, et non des moindres, pour laquelle elle a su faire entendre sa voix tient au dévouement de tous les instants de centaines d'organisations non gouvernementales regroupées au sein de la Campagne internationale en faveur de l'interdiction des mines terrestres.

Lorsque le prix Nobel de la paix a été décerné à cette coalition de conscience historique, ainsi qu'à sa coordinatrice Mme Jody Williams, l'humanité s'en est réjouie. On venait de saluer et de récompenser justement la promesse dont est porteur l'homme se dressant seul contre un mal planétaire.

Toutefois, la Campagne internationale en faveur de l'interdiction des mines terrestres ne s'est pas contentée de mobiliser l'opinion publique. Ses nombreux membres ont également exercé des pressions sur les gouvernements qui, à leur tour, ont été mus par la lame de fond de l'opinion publique. Ils finirent par devenir les partenaires des gouvernements mêmes dans une expression remarquable de la "nouvelle diplomatie".

Permettez-moi ici de rendre hommage aux Gouvernements canadien, norvégien, autrichien, belge et sud-africain qui ont joué un rôle de premier plan pour que cette Convention voie le jour.

Votre réussite a l'heur de rappeler qu'il ne faut pas être une superpuissance mondiale pour influer sur l'avenir de la paix et de la sécurité internationales.

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La Convention d'Ottawa fera date dans l'histoire du désarmement. A cela il n'y a aucun doute. Je suis convaincu qu'elle insufflera le dernier élan nécessaire à une interdiction universelle s'imposant à tous les pays producteurs et victimes.

La Convention vient rompre l'engrenage de violence et de destruction aveugles qui s'enclenche dès que la mine est posée et ne s'arrête que lorsqu'elle est enlevée.

Nous devons maintenant consacrer nos énergies et notre imagination à la cause du déminage de sorte que la victoire que nous célébrons aujourd'hui ne soit pas sans lendemain.

Nous nous devons de veiller à ce que les techniques et les ressources nécessaires pour débarrasser la planète des mines soient enfin durablement mises à disposition, y compris en donnant aux pays qui n'ont pas les ressources nécessaires pour détruire leurs stocks des moyens de le faire.

Nous devons oeuvrer avec encore plus de persévérance à enlever les millions de mines qui constituent un fléau au lendemain des conflits, de la Bosnie à l'Angola et au Cambodge.

Chaque mine enlevée permet sans doute de sauver une vie. Chaque mine enlevée nous rapproche un peu plus de l'objectif d'instaurer les conditions d'une paix durable et productive. La présence — ou rien que la crainte de la présence — d'une seule mine terrestre peut empêcher de cultiver tout un champ, privant ainsi une famille de ses moyens d'existence et tout un village de nourriture.

De fait, les mines peuvent empêcher ou entraver le développement même.

Trop souvent, les pays en développement sont doublement affligés — de pauvreté et de guerre — les mines terrestres étant la blessure la plus permanente et la plus destructrice laissée par la guerre. Si elles ne sont pas éliminées, il sera beaucoup moins facile aux réfugiés de regagner leurs foyers, les terres incultes seront beaucoup plus difficilement accessibles, et la paix proprement dite restera un mirage.

Je crois comprendre, Monsieur le Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères, M. Axworthy, que l'on travaille déjà à une initiative Ottawa 2 destinée à mobiliser un appui international coordonné en faveur de l'aide aux victimes et du déminage. Je salue chaleureusement cette initiative et je promets que des organismes des Nations Unies mobiliseront toutes leurs ressources pour y apporter leur contribution.

Déjà plus de six mille spécialistes du déminage sont affectés à des programmes des Nations Unies ou bénéficient de l'appui des Nations Unies dans sept pays. Ces programmes consistent notamment dans le quadrillage des champs

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de mines, des programmes de sensibilisation au danger des mines en vue de réduire le nombre de victimes, la formation de spécialistes du déminage locaux et la création d'écoles de déminage.

Au Siège de l'ONU à New York, j'ai regroupé toutes les fonctions relatives aux mines terrestres au sein du Département des opérations de maintien de la paix dans le cadre de la réforme que j'ai entreprise.

Cette réorganisation nous permettra de répondre plus efficacement aux besoins de déminage humanitaire ainsi qu'aux demandes d'assistance émanant de nos partenaires. Elle permettra à l'Organisation des Nations Unies de participer le plus pleinement et efficacement possible à la lutte contre les mines terrestres.

L'Organisation des Nations Unies a pour mission de faire de la sécurité de la personne une réalité durable pour tous. Notre oeuvre au service du développement, de l'enfance, de la santé et de l'environnement tout autant que notre action dans les domaines de la paix et de la sécurité obéissent à cette mission. Aujourd'hui plus que jamais — cette année plus que jamais — on voit dans le désarmement un élément essentiel de la sécurité des personnes.

La signature de la Convention d'Ottawa aujourd'hui marque un grand pas en avant non seulement dans le désarmement mondial, mais également dans l'expansion de la promesse de sécurité pour l'homme. Je vous adresse mes félicitations et je rends hommage à votre réussite dans cette cause des plus nobles. Le monde n'en est que meilleur et plus sûr.

Je vous remercie.

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