SG/SM/6409

LE SUCCES DE LA MISE EN OEUVRE DE L'AGENDA POUR LE DEVELOPPEMENT EXIGE VOLONTE POLITIQUE ET REFORMES

4 décembre 1997


Communiqué de Presse
SG/SM/6409
GA/EF/2802


LE SUCCES DE LA MISE EN OEUVRE DE L'AGENDA POUR LE DEVELOPPEMENT EXIGE VOLONTE POLITIQUE ET REFORMES

19971204 On trouvera ci-après le texte de la déclaration que le Secrétaire général de l'ONU, M. Kofi Annan, a prononcée aujourd'hui devant la Deuxième Commission (Commission économique et financière) de l'Assemblée générale, à propos de la mise en oeuvre de l'Agenda pour le développement :

C'est un grand plaisir pour moi de répondre à l'invitation de l'Ambassadeur du Venezuela, S. E. Oscar de Rojas', et d'informer la Deuxième Commission des progrès réalisés dans la mise en oeuvre de l'Agenda pour le développement. Comme vous le savez, la promotion du développement est à mes yeux l'un des objectifs essentiels de l'Organisation; elle permet également de vérifier l'efficacité du programme de réformes que j'ai entrepris.

L'Assemblée a enregistré jusqu'ici, s'agissant de ce programme, des résultats qui donnent satisfaction. Je voudrais exhorter les Etats Membres à continuer sur cette lancée.

L'adoption de l'Agenda pour le développement, qui s'est faite pratiquement sotto voce à l'issue de négociations longues et parfois frustrantes, revêt une grande signification tant politique que technique.

Sur le plan politique, cela signifie qu'en dépit de leurs divergences, tous les groupes de pays souhaitent doter la communauté internationale d'un cadre commun dans le double but de réaffirmer la place centrale que le développement occupe dans l'agenda international et d'axer des efforts renouvelés sur la diffusion et le partage des bienfaits du développement.

Sur le plan technique, cette adoption est importante à plusieurs titres.

D'abord, elle traduit un consensus naissant quant à ce que signifie le développement dans le nouvel environnement international.

Ensuite, elle atteste que le développement international repose sur la solidarité et le partenariat et non sur des intérêts conflictuels. Autrement dit, si les différents pays sont, en dernière analyse, responsables de leur développement, les efforts qu'ils déploient ne peuvent porter de fruits que dans un cadre multilatéral efficace et capable de disséminer aussi largement que possible les avantages de la mondialisation tout en en minimisant les risques et les coûts.

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L'Agenda se caractérise par son ampleur sans précédent et sa grande complexité.

Il comporte des programmes et des mesures qui couvrent tous les domaines du développement économique et social, font place tant à l'approche participative qu'à la protection des droits de l'homme et élargissent les liens entre l'intervention humanitaire et le développement.

L'Agenda est également ancré dans la conviction profonde que le développement exige une approche globale et intégrée : il doit être entrepris simultanément sur plusieurs fronts.

Après tout, quel est l'intérêt d'une croissance économique qui ne profite qu'aux riches? Qui peut garder une énergie créatrice dans un contexte d'instabilité ou de corruption des institutions? Quel sens aurait la coopération internationale au service du développement en cas de relèvement des obstacles au commerce et de fléchissement des cours des produits de base?

L'Agenda comprend des programmes et des mesures qui nécessitent l'intervention, individuelle ou collective, des Etats et de la communauté internationale, y compris du système des Nations Unies. Il met ainsi en lumière, dans le cadre des politiques nationales et de l'environnement international, les interactions et les synergies les plus propices à la croissance et au développement durable.

Mais c'est là que résident aussi les principaux obstacles auxquels se heurte la mise en oeuvre de l'Agenda. Permettez-moi d'en souligner trois.

En premier lieu, à l'échelle nationale comme à l'échelle internationale, il s'agit de concilier la sélectivité et les priorités ave la nécessité de mener des actions sur plusieurs fronts simultanément.

Au niveau national, tout pays peut librement déterminer ses priorités et choisir la voie qu'il suivra, mais il doit le faire en connaissant parfaitement l'ensemble des forces internes et externes qui influent sur ces priorités et déterminent les chances de réussite.

Tout pays doit également avoir un certain sens des responsabilités quant aux répercussions que ses choix auront sur les autres pays et sur la scène internationale puisque, dans un monde en cours de mondialisation, ces choix influeront nécessairement sur le destin de tous.

Pour ce qui est du système des Nations Unies, il s'agit d'adopter, pour la coordination interinstitutions, une nouvelle approche qui valorise une plus nette division du travail. Toutefois, cette répartition améliorée des responsabilités doit découler d'une stratégie commune précise et d'une perception claire des enjeux communs qui appellent des interventions complémentaires, une programmation concertée et des initiatives conjointes.

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En deuxième lieu, il s'agit d'avoir la volonté politique de respecter les règles du partenariat et de la solidarité. L'interdépendance croissante enregistrée dans tous les domaines de l'activité humaine corrobore cet impératif.

L'avenir du bien-être de l'humanité dépend de plus en plus du courage et de la perspicacité dont les dirigeants feront preuve dans la perception du sens véritable de l'interdépendance et dans son application dans les faits.

La solidarité demeure l'un des principaux piliers de la coopération internationale. En effet, l'élargissement et le renforcement des marchés offrent l'occasion de donner un sens nouveau à la solidarité en trouvant de nouveaux alliés. En ouvrant la voie aux investissements et à la croissance tout en créant de nouvelles alliances, on aura peut-être trouvé la clef de la réussite en matière de développement. En même temps, il faut redonner à la solidarité ses bases morales et sa raison d'être.

Or, pourrait-il exister une meilleure raison d'être que de donner des espoirs et des chances à des millions d'individus qui se trouvent exclus de l'économie mondiale et qui n'ont pas l'occasion de se mesurer à d'autres à armes égales?

Il est de notre devoir de redoubler d'efforts au service de la solidarité, afin d'en renforcer le sens non seulement économique mais aussi moral.

Le renversement du déclin de l'aide publique au développement (APD) et la recherche de nouvelles formes de financement du développement sont au coeur de cette entreprise.

Parallèlement, l'Agenda pour le développement nous rappelle que nous ne pouvons pas nous permettre de ne rien faire. À l'échelle mondiale, de nombreuses forces continuent de s'exercer sur l'humanité et les institutions en modifiant ainsi le cadre de la coopération internationale. La mondialisation a des retombées positives et négatives d'une ampleur sans précédent. En effet, les bienfaits que l'accroissement du commerce et des investissements et le relèvement du niveau de vie ont apportés à des millions d'individus s'opposent aux maux que sont l'écart croissant des revenus, la dégradation de l'environnement et le trafic illégal des drogues.

L'aptitude de la communauté internationale à susciter la volonté politique de faire face à ces changements aura une incidence décisive sur la mise en oeuvre de l'Agenda pour le développement.

Nous avons besoin de cadres auxiliaires efficaces pour diffuser plus largement les bienfaits de la mondialisation et pour éviter la répercussion des perturbations et des contre-coups. Nous savons que les pays qui

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s'efforcent de participer aux marchés mondiaux ont besoin d'un appui accru. Nous devons également envisager de nouvelles alliances qui transcendent les schémas classiques. Nous devons être prêts à tenter de nouvelles démarches, à bâtir de nouveaux partenariats. Nous devons être prêts à mobiliser l'appui des protagonistes qui définissent de plus en plus quelles sont les perspectives du développement. Tout cela est à notre portée à condition de mobiliser la volonté politique requise.

Je suis parfaitement conscient qu'il est de mon devoir, en tant que Secrétaire général, de présenter à la communauté internationale des propositions et des conseils. Je proposerai les moyens de venir à bout globalement et avec perspicacité des difficultés inhérentes au développement et de renforcer le partenariat et la solidarité au sein de la communauté internationale dans la mise à exécution de l'Agenda pour le développement.

Pour ce faire, je ne ménagerai aucun effort auprès des gouvernements et des mécanismes intergouvernementaux du système des Nations Unies. Je m'efforcerai également de faire en sorte que le secteur privé et la société civile apportent une contribution décisive aux efforts de développement. Il s'agit là d'une nouvelle fonction du Secrétaire général dont j'entends m'acquitter pleinement.

Mais c'est à l'Assemblée qu'il appartient, en définitive, de trouver la volonté politique nécessaire pour exécuter l'Agenda.

Cela m'amène au troisième obstacle, qui est la réforme de l'Organisation des Nations Unies proprement dite et de l'ensemble du système.

La réforme doit se faire de manière perspicace, en évaluant les changements qui affectent l'environnement dans lequel nous agissons, en définissant et en exploitant les forces institutionnelles, en affinant les rôles et en recadrant les activités en fonction des priorités essentielles, parmi lesquelles la promotion du développement occupe le premier rang.

Les obstacles auxquels se heurtent l'Organisation et le système des Nations Unies dans la mise en oeuvre de l'Agenda pour le développement ressemblent beaucoup aux obstacles que j'ai énumérés dans mon programme de réformes générales.

La concertation, la synergie et la souplesse accrues que j'ai fixées comme objectifs dans mon programme de réformes sont également indispensables si l'on veut doter l'Organisation des moyens de donner effectivement suite à l'Agenda pour le développement.

En définissant les principales forces institutionnelles de l'Organisation dans mon programme de réformes, j'ai souligné la vocation à l'universalité et le caractère englobant du mandat de l'ONU qui en font un lieu de rencontre unique et indispensable.

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La manifestation la plus marquante de cette force tient à la capacité normative de l'ONU qui, dans le domaine du développement, est directement associée à l'appui aux politiques nationales et étayée par les capacités opérationnelles de ses fonds et programmes.

La plupart des mesures et des propositions présentées dans mon programme de réformes concernent directement la capacité de l'Organisation de répondre efficacement aux impératifs fixés dans l'Agenda.

J'ai évoqué tout à l'heure le rôle crucial de l'Assemblée générale. Les propositions de réforme que j'ai faites à propos de l'Assemblée générale visent à renforcer sa capacité à encourager l'action des gouvernements et du système des Nations Unies pour la mise en oeuvre de l'Agenda. Ces propositions tendent à recentrer les travaux de l'Assemblée sur les questions éminemment prioritaires et à reprendre les principaux aspects des récentes conférences des Nations Unies dans les méthodes de travail de l'Assemblée. J'ai également proposé, comme vous le savez, qu'un débat de haut niveau de l'Assemblée soit consacré à titre prioritaire à la question du "financement international du développement", qui est au coeur de l'Agenda pour le développement.

Ces recommandations cadrent bien avec les propositions de la Deuxième Commission elle-même concernant la reprise du dialogue sur le renforcement de la coopération internationale pour le développement fondée sur le partenariat, qui est l'un des principaux moyens d'assurer le suivi de l'Agenda pour le développement.

La nouvelle structure de direction et de gestion que j'ai présentée repose sur le concept d'un Secrétariat unique qui engloberait les départements du Secrétariat ainsi que les secrétariats des programmes et des fonds. Il se compose de quatre comités exécutifs — dont deux chargés respectivement des affaires économiques et sociales et de la coopération pour le développement, auxquels il incombe donc directement de déterminer la suite que l'Organisation donnera aux impératifs fixés dans l'Agenda. Les fonctions envisagées pour le nouveau poste de vice-secrétaire général et la création d'un groupe de la planification stratégique au sein de mon bureau exécutif sont également très pertinentes.

La fusion de différentes entités du Secrétariat dans les domaines économique et social pour constituer un seul Département des affaires économiques et sociales, la création d'un secrétariat fonctionnel du Conseil économique et social dirigé par un fonctionnaire de rang élevé, enfin une meilleure répartition des tâches entre la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED) et le Département des affaires économiques et sociales : toutes ces mesures devraient permettre à l'Organisation des Nations Unies de mener une action plus efficace en faveur de la coordination et du développement macroéconomique.

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Je souhaiterais à cette occasion vous informer que l'un des résultats de l'examen que j'ai entrepris quant aux rôles respectifs du nouveau Département et de la CNUCED dans le domaine macroéconomique sera, à compter de janvier 1999, d'établir un rapport unique — une déclaration unique de l'ONU — sur la situation et les perspectives économiques dans le monde. Il sera pour cela fait appel aux capacités de l'Organisation disponibles tant à New York qu'à Genève.

Les publications phares des différentes entités de l'ONU (World Economic and Social Survey, Trade and Development Report, entre autres) s'inspireront des différentes perspectives présentées dans ce rapport unique. L'Agenda pour le développement servira bien sûr de cadre commun à cet effort accru destiné à renforcer l'impact de l'Organisation sur le développement.

À l'effort engagé, par l'intermédiaire du nouveau Département et de la CNUCED, pour répartir plus largement les avantages de la mondialisation, s'ajoute un effort accru pour lutter contre ses incidences négatives en donnant davantage de moyens à l'Office des Nations Unies à Vienne, qu'il s'agisse de trafic des drogues ou de criminalité internationale. Comme vous le savez, je m'emploie également à renforcer la capacité de l'Organisation à lutter contre la détérioration de l'environnement et à promouvoir la durabilité de l'environnement et de l'habitat.

La réussite de la mise en oeuvre de l'Agenda pour le développement dépend pour une part non négligeable de l'efficacité avec laquelle nous mettrons en pratique les accords et les normes convenus à l'échelon intergouvernemental. À cet égard, les mesures que j'ai prises pour créer un groupe des Nations Unies pour le développement et promouvoir l'élaboration d'un plan-cadre des Nations Unies pour l'aide au développement unique devraient faciliter la rationalisation des différentes activités sur le terrain et les rendre plus cohérentes.

Par ailleurs, les mesures visant à regrouper tous les fonds et programmes au sein d'un même bureau des Nations Unies placé sous l'autorité du Coordonnateur résident, et de créer des locaux communs des Nations Unies au niveau national, sont dans la droite ligne de l'appel lancé dans l'Agenda en faveur de la mise en commun des systèmes et des services administratifs.

D'autre part, l'institution d'un nouveau système de ressources de base et la création d'un Bureau du financement du développement, comme je l'ai recommandé, devraient permettre d'augmenter substantiellement les ressources consacrées aux activités opérationnelles. Les dividendes pour le développement devraient également permettre de renforcer la capacité de l'Organisation à appuyer directement les efforts de développement des différents pays.

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En ce qui concerne le Conseil économique et social et ses organes subsidiaires, j'ai fait un certain nombre de recommandations qui, je l'espère, seront utiles aux Etats Membres pour les différents bilans qu'ils ont entrepris de dresser. Par exemple, l'Agenda pour le développement engage le Conseil économique et social à exercer pleinement son rôle d'organe de coordination générale de tous les fonds et programmes de développement des Nations Unies. Ma recommandation visant à renforcer le débat que le Conseil consacre aux activités opérationnelles de développement devrait permettre d'y parvenir.

Je me suis engagé sans réserve à aider le Conseil à reconsidérer son rôle conformément aux dispositions de la Charte.

Je reconnais pleinement l'importance de la contribution que la société civile peut apporter à la mise en oeuvre de l'Agenda pour le développement. La pratique de plus en plus répandue à la Deuxième Commission et au Conseil économique et social, qui consiste à faire participer la société civile aux débats intergouvernementaux, devrait être généralisée.

Des mesures ont également été prises pour harmoniser les processus de réforme dans les différents organismes du système, afin que les nouvelles orientations et structures qui se dégagent se renforcent mutuellement et accroissent la capacité générale du système en tant que force cohérente au service de la mise en oeuvre de l'Agenda.

La proposition que j'ai avancée concernant la création d'une commission de haut niveau chargée d'examiner les instruments constitutionnels des institutions spécialisées, au titre des préparatifs de l'Assemblée du millénaire, tend vers les mêmes objectifs. L'intérêt particulier que je porte à la coopération avec les institutions de Bretton Woods est un élément important des efforts réalisés pour améliorer l'aptitude du système à donner suite à l'Agenda pour le développement.

Moins de six mois se sont écoulés depuis que l'Assemblée générale a adopté l'Agenda pour le développement. Sa mise en oeuvre vient de commencer et exigera de nous tous, pendant longtemps encore, d'énormes efforts. J'ai évoqué trois des obstacles que, selon moi, nous devrons effectivement surmonter pour réussir dans la mise en oeuvre de l'Agenda : ampleur et complexité de la tâche, volonté politique d'agir et réformes à entreprendre.

J'ai simplement essayé de proposer quelques moyens de venir à de ces obstacles. Mes propositions de réforme ne sont qu'un point de départ : il nous faut maintenant agir.

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