DH/G/582

LE COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT EXAMINE LE RAPPORT DU PARAGUAY

29 mai 1997


Communiqué de Presse
DH/G/582


LE COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT EXAMINE LE RAPPORT DU PARAGUAY

19970529

Genève, 28 mai -- Le Comité des droits de l'enfant a examiné, cet après-midi, le rapport complémentaire qu'il a demandé au Paraguay de lui présenter à l'issue de l'examen du rapport initial du Paraguay en octobre 1994. Les membres du Comité ont formulé des observations préliminaires sur le rapport. Les observations finales seront adoptées en séance privée et rendues publiques à la fin de la session, le vendredi 6 juin.

Les membres du Comité ont notamment demandé au Paraguay d'accélérer la réforme du système judiciaire afin de réduire la durée de détention avant procès des mineurs et de leur permettre d'exercer leur droit à un procès équitable. Ils ont invité les autorités du Paraguay à poursuivre leurs efforts en accordant la priorité aux enfants vulnérables comme les fillettes domestiques ou prostituées et les enfants des rues.

La délégation paraguayenne était dirigée par Mme Cristina Muñoz, Ministre chargée du Secrétariat de la femme, accompagnée de M. Arnaldo Giménez Cabral, Vice-Ministre de la justice, Mme Suzana Ortiz Carrizosa, Coordinatrice du programme national pour les enfants au Secrétariat de l'action sociale, ainsi que M. Eladio Loizaga, Représentant permanent du Paraguay auprès de l'Office des Nations Unies à Genève et d'autres membres de la Mission permanente.

Présentant le rapport, Mme Cristina Muñoz a indiqué que des progrès considérables et des changements profonds ont été faits en faveur des enfants au Paraguay depuis le passage à la démocratie, il y a 8 ans, et depuis la ratification de la Convention relative aux droits de l'enfant. L'avant-projet du code du mineur qui vise la protection complète de l'enfant, telle que prévue par la Convention, a été adopté le mois dernier par la Chambre basse du Parlement.

Le Comité reprendra ses travaux demain, à 10 heures, pour examiner la coopération avec d'autres organes des Nations Unies, les institutions spécialisées et d'autres organismes compétents. Dans l'après-midi, à 15 heures, il commencera l'examen du rapport initial de l'Algérie.

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Rapport du Paraguay

À l'issue de l'examen du rapport initial du Paraguay, en octobre 1994, le Comité avait constaté que les informations contenues dans le rapport et le dialogue auquel son examen avait donné lieu n'avaient pas permis une évaluation approfondie de la manière dont les droits de l'enfant sont mis en oeuvre au Paraguay. Le Comité avait donc demandé au Paraguay de lui présenter un rapport complémentaire dans un délai d'un an.

Le rapport initial, signalait notamment que la situation dont le gouvernement avait hérité de la dictature en 1989 était caractérisée par des indicateurs sociaux et économiques très préoccupants, particulièrement négatifs en ce qui concernait les enfants, étant donné que le pays comptait 1 943 954 mineurs âgés de moins de 18 ans, ce qui représentait 47 % de la population totale.

Le rapport complémentaire indique notamment qu'en 1992 a été adopté le Plan national d'action pour l'enfance, élaboré en vue d'atteindre les buts et objectifs du Sommet mondial pour les enfants. Un Comité technique interministériel a été institué en vue de relancer le Plan national d'action pour l'enfance. Le Gouvernement a proclamé la semaine du 9 au 16 août, «Semaine pour les droits de l'enfant». En 1995, a été créé le Forum permanent pour les droits de l'enfant, chargé d'élaborer un avant-projet de code de l'enfant et de l'adolescent conforme à la Convention. Le Ministère de la santé publique a créé le Centre national de défense des droits de l'enfant qui s'occupe de planifier et de mettre en oeuvre, de façon coordonnée, des programmes visant à promouvoir les droits de l'enfant.

Examen du rapport

Présentant le rapport paraguayen, le Ministre chargé du Secrétariat de la femme, Mme Cristina Muñoz a indiqué que des changements profonds sont intervenus au Paraguay depuis la ratification de la Convention relative aux droits de l'enfant, il y a 8 ans. Les pouvoirs exécutifs ont été étroitement consultés pour l'élaboration du rapport ainsi que les organisations non gouvernementales concernées. En août 1996, a été créée une commission de rédaction plurisectorielle, composée de représentants gouvernementaux et non gouvernementaux, chargés d'étudier et d'élaborer le texte final de l'avant-projet de code du mineur. L'avant-projet vise la protection complète de l'enfant, telle que prévue dans les instruments internationaux et la Convention en particulier. L'avant-projet de code du mineur a été adopté le mois dernier avec quelques amendements par la Chambre basse du Parlement.

Les procédures d'adoption internationale ont été suspendues par une décision de la Cour suprême pour une période d'un an, a encore indiqué Mme Muñoz. Cette suspension a été prorogée de 6 mois, puis reconduite jusqu'à

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ce que la loi nationale sur l'adoption soit adoptée en la matière. Il a été décidé que les adoptions à l'étranger ne se feront plus qu'avec les pays qui auront ratifié la Convention de la Haye de 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale, signée récemment par le Paraguay.

Le recrutement forcé des enfants et des jeunes pour les obliger à faire leur service militaire a été aboli. En 1995, le Sénat a approuvé la loi relative à l'objection de conscience. L'Assemblée nationale examine actuellement un projet de loi portant modification de la Constitution en vue de supprimer le service militaire obligatoire, a ajouté Mme Muñoz.

Le Vice-Ministre de la justice, M. Giménez Cabral, a déclaré que l'Institut de rééducation Panchito López, établissement pour mineurs pénalement responsables de 15 à 19 ans, a été entièrement rénové car il n'était pas conforme aux normes. Le Vice-Ministre a sollicité, à cet égard, l'assistance financière étrangère pour la construction de nouveaux locaux. Selon une décision de la Cour suprême, aucun enfant ne peut être placé dans un établissement sans décision judiciaire. Il reste, a fait remarquer le Vice- Ministre, que les mineurs passent beaucoup plus de temps qu'ils ne devraient en détention, du fait de la lenteur des procédures. En ce qui concerne les enfants des rues, M. Giménez Cabral a indiqué que le Ministre de la justice assiste actuellement à une réunion ministérielle qui se déroule à Cartagène, en Colombie, et dont l'objectif est d'élaborer des mesures pour résoudre ce grave problème qui touche un grande nombre de pays de la région.

Répondant aux question des membres du Comité, la délégation du Paraguay a indiqué que le Plan d'action national comporte des objectifs pour l'an 2000 inspirés par ceux du Sommet mondial pour les enfants. Les trois pouvoirs de l'État se sont fixés comme objectif la protection de toute la société, et des enfants en particulier, a assuré la délégation. Des efforts considérables sont déployés dans le but de garantir l'indépendance du judiciaire et la réforme de l'enseignement. L'examen du nouveau Code de l'enfant et de l'adolescent se fait dans plusieurs instances de l'État. Les organisations non gouvernementales y sont étroitement liées. Selon Mme Muñoz, les difficultés et les retards rencontrés pour faire changer les choses sont dues à l'héritage de nombreuses années de dictature. À propos de la compatibilité des lois paraguayennes avec les dispositions de la Convention, la représentante a indiqué que la Commission des lois examinait cette question.

Répondant à une question sur la situation des enfants qui parlent le guaraní, Mme Muñoz a indiqué que 80% de la population parle cette langue, dont 22 % ne parlent pas l'espagnol. La réforme de l'enseignement primaire prévoit l'enseignement obligatoire en guaraní et en espagnol de manière à ce qu'il n'y ait plus d'enfants marginalisés. La délégation a indiqué que 22 % du budget national est consacré à l'éducation, alors que la part allouée à la défense a été réduite. L'accès à l'éducation des enfants de couches sociales

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défavorisées est très étendu. Mme Muñoz a exprimé l'espoir que la réforme de l'enseignement supérieur consacrera le caractère obligatoire du guaraní. Elle a rappelé que la majorité des Paraguayens sont bilingues, le guaraní étant la langue de communication de base du pays. Les populations autochtones ont été associées à l'élaboration de la Constitution de 1992, a par ailleurs fait valoir la représentante.

En ce qui concerne les enfants soldats, Mme Muñoz a précisé que le recrutement forcé était chose courante à l'époque de la dictature et qu'il n'existait pas de législation en la matière. Face à cette pratique, sous la pression des plaintes déposées par la presse et de l'opinion publique, quarante généraux ont été mis à la retraite. Il semble que depuis un an, aucun cas de recrutement forcé n'a été signalé. En outre, une loi autorisant l'objection de conscience a été adoptée. En dépit de ces efforts, la représentante a reconnu que des difficultés persistaient, notamment dans les mentalités.

Évoquant la justice pour mineurs, la délégation a affirmé que, dans les prisons régionales, les détenus mineurs étaient séparés des détenus adultes. Dans la capitale, en raison du manque de locaux, la séparation n'est pas toujours possible. Il faudrait dix-sept pénitenciers de plus dans le pays, or le Paraguay ne pourrait financer que trois établissements.

Au sujet de la prostitution des enfants, la représentante a fait observer que le sujet na pas été abordé dans un passé récent. Une enquête du Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) à révélé l'ampleur du problème. Il n'y a pas encore de politique nationale sur la question, mais plusieurs institutions de l'État ont lancé des actions pour venir en aide aux fillettes prostituées et essayer d'éradiquer le problème. Un important effort d'éducation est en train d'être réalisé.

Sur les questions de nutrition, Mme Muñoz a indiqué que le gouvernement a lancé des programmes d'alimentation dans les écoles, dans les villes et dans les campagnes, pour éviter notamment les abandons scolaires. La notion de la responsabilité paternelle, notion jusqu'ici ignorée dans les textes, sera précisée et codifiée dans la nouvelle législation. D'importants efforts sont nécessaires pour mener à bien la réforme de l'état civil et assurer un meilleur accès au registre d'état civil. Il existe maintenant une pleine égalité des droits entre les enfants nés dans le cadre du mariage et en dehors du mariage.

Observations préliminaires

Les membres du Comité ont salué les progrès réalisés en si peu de temps par le premier gouvernement civil du Paraguay depuis la dictature. Ils se sont félicités de la franchise et de l'esprit autocritique dont a fait preuve la délégation au cours du dialogue avec le Comité. Ils ont souligné toutefois

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que les préoccupations persistaient face à la grave situation des enfants vulnérables, notamment les enfants abandonnés, les enfants domestiques, les enfants autochtones et les enfants des rues. Ils ont également regretté l'insuffisance des données statistiques concernant les enfants. Ils ont souligné le problème de l'absence d'un mécanisme de coordination et d'évaluation de toutes les activités entreprises en faveur des enfants.

Les membres du Comité ont demandé notamment au Paraguay d'accélérer la réforme du système judiciaire afin de réduire la durée de détention sans procès des mineurs et de leur permettre d'exercer leur droit à un procès équitable. Ils ont invité les autorités du Paraguay à poursuivre leurs efforts en accordant la priorité aux enfants vulnérables comme les fillettes domestiques ou prostituées et aux enfants des rues. Ils ont demandé que le financement des programmes destinés à la promotion des droits de l'enfant et à la protection de l'enfance soient augmentés. Ils ont recommandé que l'âge du consentement sexuel, actuellement de 14 ans, soit relevé. Ils ont souhaité que le Paraguay dépose sans délai ses instruments de ratification de la Convention de la Haye de 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale.

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