En cours au Siège de l'ONU

SG/SM/6214

LE SECRETAIRE GENERAL AFFIRME QUE LA DIMENSION REGIONALE EST NECESSAIRE AUX NATIONS UNIES

22 avril 1997


Communiqué de Presse
SG/SM/6214


LE SECRETAIRE GENERAL AFFIRME QUE LA DIMENSION REGIONALE EST NECESSAIRE AUX NATIONS UNIES

19970422 Ci-après le texte de la déclaration que le Secrétaire général des Nations Unies, M. Kofi Annan, a faite à l'ouverture de la cinquantième session de la Commission économique pour l'Europe :

Je suis heureux de pouvoir m'adresser à la Commission économique pour l'Europe à l'occasion de son cinquantième anniversaire. En dépit des contraintes de mon emploi du temps, je tenais à être présent ici aujourd'hui, parmi vous, à Genève. Et cela pour deux raisons.

Tout d'abord, pour rendre hommage à la contribution de votre Commission aux idéaux de la Charte durant les cinquante dernières années.

Mais aussi, pour partager avec vous quelques idées sur tout ce que vous pouvez apporter à la solution des problèmes régionaux et globaux auxquels nous serons confrontés dans l'avenir.

La Commission économique pour l'Europe a su être, avec succès, pendant un demi-siècle, tout à la fois un instrument de dialogue et un créateur de normes.

Le dialogue, votre commission a su l'instaurer pendant la longue période de la guerre froide, à un moment où l'Europe était divisée entre l'Est et l'Ouest. Surmontant cette opposition et les stériles débats qui l'ont souvent caractérisée, la Commission économique pour l'Europe a réussi à favoriser l'échange d'informations et de connaissances aussi bien dans les domaines économique que dans les secteurs les plus techniques.

Cela a favorisé la rencontre entre spécialistes des deux blocs et la négociation de conventions ainsi que l'établissement de normes dans des domaines variés, et notamment ceux des transports, de l'environnement, des statistiques et du commerce. Vous avez donc su, dans les moments les plus difficiles, croire en l'Europe et favoriser son intégration.

Nous avons aujourd'hui de nouveaux défis à affronter. Le premier d'entre eux concerne la délicate dialectique entre globalisation et marginalisation.

En posant ainsi le problème, je ne veux pas insinuer que globalisation et marginalisation sont nécessairement liées. Mais je veux souligner que, si nous

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connaissons bien les avantages offerts par la globalisation, il ne faut pas, cependant, en sous-estimer les risques.

Ces risques ne sont pas abstraits. Ils peuvent tous nous concerner. Ils peuvent concerner tout aussi bien un ami, une famille du voisinage, un compatriote travaillant dans un secteur en déclin, un pays en transition ou même un continent tout entier.

Il faut donc être attentif au fait que la plupart des questions auxquelles nous sommes confrontés sont des problèmes globaux, qui dépassent le seul cadre des Etats et qui nécessitent donc, non seulement une coopération internationale, mais aussi la participation pleine et entière de chaque citoyen, de chaque pays et de tous les continents.

Les gouvernements, les entreprises, les autorités locales, les organisations non gouvernementales sont désormais des acteurs de la scène internationale et doivent prendre en charge eux-mêmes, au niveau régional et au niveau global, leur propre pratique, leur propre code de conduite, leur règle de comportement, tout en interagissant les uns avec les autres.

Les Nations Unies, en tant qu'organisation interétatique, ne peuvent pas ignorer les autres acteurs de la vie internationale si elles veulent continuer à servir avec efficacité «les peuples des Nations Unies».

Certes, il n'est pas facile d'établir un partenariat avec la multitude de ces acteurs, ni de partager avec eux des valeurs et des règles communes. Mais tel est précisément le rôle des Nations Unies, au nom de son universalité, de son sens du dialogue et de l'idée qu'elle se fait du multilatéralisme.

Ces deux considérations m'amènent à parler du régionalisme. Vous vous êtes peut-être demandé pourquoi j'ai associé la globalisation et la marginalisation et pas la globalisation et le régionalisme.

Je l'ai fait parce que pour moi le régionalisme n'est pas opposé à la globalisation, c'est plutôt une étape vers la globalisation : en même temps, le régionalisme peut être un rempart puissant contre la marginalisation. Les facteurs régionaux ont tendance à lier tous les acteurs ensemble dans un partenariat pragmatique.

En Europe, toutes les organisations régionales et sous-régionales s'adaptent à cette évolution en adoptant de nouvelles approches, en élargissant leur champ d'action et, dans certains cas, en admettant de nouveaux membres. En outre, avec la fin de la guerre froide, de nouveaux arrangements sous- régionaux ont commencé à apparaître.

Vu l'ampleur et la complexité des problèmes à régler, c'est une réponse saine aux divers besoins exprimés par les pays et les groupes de pays de la région. La difficulté est qu'il faut chercher à établir des complémentarités en termes de mandats et d'adhésion pour éviter les doubles emplois et renforcer

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la coopération lorsque des efforts conjoints sont nécessaires. C'est également que chaque organisation doit concentrer ses activités sur les domaines dans lesquels elle a fait ses preuves.

À ce stade, vous demanderez peut-être : «la dimension régionale est-elle nécessaire aux Nations Unies ?» Je répondrai fermement par l'affirmative, à condition toujours qu'un rapport satisfaisant soit établi entre les entités régionales et entre ces entités et les institutions mondiales.

Je voudrais mettre en lumière deux traits distinctifs des commissions régionales des Nations Unies. Premièrement, les commissions régionales sont uniques, en ce sens qu'elles réunissent tous les pays d'une région donnée pour examiner des questions économiques et sociales. Tous les pays membres peuvent donc, quels que soient leur taille ou leur niveau de développement, se réunir et participer sur un pied d'égalité aux discussions et à la prise de décisions.

Les commissions régionales constituent ainsi des instances neutres où peuvent avoir lieu des débats de politique générale, sur la base d'analyses économiques axées sur la situation et les problèmes de la région, et où peuvent être élaborés des règles, des normes et d'autres outils d'intégration des Etats membres.

De la sorte, les commissions régionales contribuent à empêcher un développement inégal au sein des sous-régions, et à favoriser des relations économiques harmonieuses dans l'ensemble de la région. D'où le thème de votre table ronde aujourd'hui : «Comment assurer la cohésion en Europe : réponses techniques à une aspiration politique».

Deuxièmement, les commissions régionales, étant partie intégrante de l'Organisation des Nations Unies, sont bien placées pour faciliter la mise en oeuvre, sur le plan régional et sur le plan national, des engagements pris au niveau mondial par la communauté internationale dans son ensemble, dans le cadre de l'ONU. Je voudrais ici rendre hommage à toutes les commissions régionales pour le rôle actif qu'elles jouent dans la préparation et le suivi des conférences mondiales des Nations Unies.

Ces résultats obtenus au niveau régional peuvent aussi servir de modèle ailleurs. Autrement dit, ce qui est fait dans une région peut être appliqué en douceur et de façon pragmatique dans une autre région.

Des accords sur des questions environnementales, par exemple sur la pollution atmosphérique transfrontière à longue distance, sont actuellement envisagés par la Commission économique et sociale pour l'Asie et le Pacifique; le système EDIFACT/ONU est utilisé dans le monde entier; et l'Accord relatif au transport des marchandises dangereuses est à présent mondial et relève du Conseil économique et social.

On citera également les travaux entrepris avec la Commission économique et sociale pour l'Asie occidentale sur la gestion des eaux transfrontières et

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avec la Commission économique pour l'Amérique latine et les Caraïbes sur l'analyse et les politiques de réduction de la pauvreté.

Vous avez entrepris un examen détaillé et systématique des programmes de fond afin de définir vos orientations stratégiques pour l'avenir. Vous avez ainsi réussi à rationaliser le programme de travail en l'axant sur les domaines dans lesquels la Commission économique pour l'Europe a fait ses preuves et les activités qui bénéficient d'un appui dans l'ensemble de la région. La structure intergouvernementale a été sensiblement simplifiée et une plus grande souplesse a été apportée aux méthodes de travail de la Commission.

À mes yeux, les réformes appliquées à ce jour renforcent encore l'efficacité de la Commission économique pour l'Europe, et lui permettent de mieux répondre aux besoins spécifiques et aux réalités nouvelles de la région. Il faut maintenant que les réformes engagées par la Commission économique pour l'Europe et les autres Commissions régionales soient examinées globalement pour s'assurer que la réforme entreprise par l'Organisation est un exercice intégré et cohérent. Je sais que cette réforme trouve son origine dans la volonté des Etats membres d'adapter la Commission aux tâches actuelles et futures.

Enfin, j'ai été très heureux de noter que pour renforcer les avantages avérés de la Commission économique pour l'Europe et pour éviter les doubles emplois, vous avez trouvé des moyens pragmatiques d'accroître la coopération avec d'autres organisations et institutions régionales et sous-régionales et d'intensifier le dialogue avec la société civile et le monde des affaires.

Je voudrais encourager ce type de coopération. Comme je l'ai récemment souligné lors du Forum économique mondial, «les liens étroits qui existent entre le secteur privé et l'Organisation des Nations Unies sont d'une importance capitale. Ce partenariat nous a déjà permis d'atteindre d'importants objectifs économiques mondiaux».

La coopération avec les entreprises, les ONG et les autorités locales est essentielle si l'on veut rendre la globalisation efficace, limiter au maximum la marginalisation et faire face comme il convient aux menaces qui pèsent sur l'environnement mondial.

Je forme le voeu que la nouvelle Commission économique pour l'Europe puisse mettre au point de nouvelles méthodes de coopération. C'est pourquoi je suis heureux que la Table ronde de demain soit consacrée à ce sujet.

Je suis déterminé à faire en sorte qu'au XXIe siècle, l'ONU soit une organisation réformée et efficace. J'espère donc vivement travailler en collaboration étroite avec les Etats Membres en ayant ces objectifs en vue. Je vous félicite et vous adresse tous mes voeux de succès dans votre action pour répondre aux nouveaux besoins et exigences de la région.

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La réforme ne doit pas être un simple processus de changement pour le changement, elle doit plutôt, comme je l'ai déjà dit, conduire à la mise en place d'une Organisation plus compétente et plus efficace.

En entreprenant et en menant à bien votre processus de réforme, vous avez démontré que le système était capable de consensus et de progrès, aussi difficile que cela puisse être.

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