LE CONSEIL DE SECURITE TIENT UN DEBAT SUR LA SITUATION EN AFGHANISTAN : LES DELEGATIONS SOULIGNENT L'IMPOSSIBILITE D'UNE SOLUTION MILITAIRE
Communiqué de Presse
CS/804
LE CONSEIL DE SECURITE TIENT UN DEBAT SUR LA SITUATION EN AFGHANISTAN : LES DELEGATIONS SOULIGNENT L'IMPOSSIBILITE D'UNE SOLUTION MILITAIRE
19970414 Elles demandent aux parties belligérantes de participer à des négociations de bonne foiRéuni sur la présidence de M. Antonio Monteiro (Portugal), le Conseil de sécurité a tenu cet après-midi un débat sur la situation en Afghanistan. Il a entendu, à cette occasion, le Ministre des affaires étrangères par intérim de l'Afghanistan qui a déclaré que les espoirs de paix durable en Afghanistan s'érodent au gré des interventions militaires et des intérêts des grandes compagnies qui font obstacle à la paix.
Accusant les Taliban de soutenir le terrorisme international, d'abriter ses pourvoyeurs de fonds et de commettre des violations contre les droits de l'homme, en particulier contre les droits des femmes, le représentant a indiqué que selon des sources sûres, "ce groupe de mercenaires armés", soutenu par des forces étrangères, s'apprête à mener dans les prochains jours, une attaque massive contre le nord de l'Afghanistan.
Le représentant a souligné qu'une solution militaire au conflit afghan ne ferait que menacer la paix et la sécurité dans l'ensemble de la région. Le Conseil de sécurité, a-t-il dit, doit prendre des mesures appropriées, y compris des sanctions contre les Taliban et leurs partisans, fournisseurs d'armes et d'appui logistique.
Les représentants des pays membres suivants du Conseil de sécurité ont pris part au débat : Fédération de Russie, Chine, Egypte, Royaume-Uni, Guinée Bissau, France, Pologne, Chili, République de Corée, Kenya, Japon, Etats-Unis, Costa Rica et Suède.
Le Conseil de sécurité poursuivra son débat sur la situation en Afghanistan demain mardi 15 avril à 16 heures.
Le rapport du Secrétaire général sur la situation en Afghanistan et ses conséquences pour la paix et la sécurité internationales (S/1997/240) expose les principaux événements qui se sont produits en Afghanistan pendant les trois premiers mois écoulés depuis l'adoption l'adoption de la résolution 51/195 B en date du 17 décembre 1996 dans laquelle l'Assemblée a prié le Secrétaire général de lui présenter, durant sa cinquante et unième session, des rapports trimestriels sur les progrès de la Mission spéciale des Nations Unies en Afghanistan. Il est noté que la situation militaire a connu un nouveau retournement au début de 1997 : les Taliban ont enlevé la plupart des positions tenues au nord de Kaboul par la coalition des forces de l'opposition, sous le nom de Conseil suprême pour la défense de l'Afghanistan, qui regroupe le Mouvement islamique national d'Afghanistan, dirigé par le général Rashid Dostum, le Jamiat-i-Islami, dirigé par M. Burhanuddin Rabbani et le commandant Ahmed Shah Massoud, et le Hezb-i-Wahdat, dirigé par M. Karim Khalili. Les Taliban semblent vouloir pousser plus loin leur offensive militaire pour prendre les régions que tient encore le Conseil suprême pour la défense de l'Afghanistan.
La situation sur le front reste des plus instables. et on signale des préparatifs en vue de la reprise des combats lorsqu'arrivera le printemps. À la fin de la période sur laquelle porte le présent rapport, 19 des 30 provinces d'Afghanistan ainsi que des parties importantes des provinces de Badghis, de Parwan et de Kapisa, étaient tenues par les Taliban. Les forces du Conseil suprême pour la défense de l'Afghanistan étaient confinées dans les huit provinces du nord et dans certaines parties des provinces de Badghis, de Parwan et de Kapisa. À en juger d'après leurs déclarations et d'après leurs activités sur le terrain, les Taliban semblent décidés à se rendre maîtres, militairement et politiquement, de l'Afghanistan tout entier et à y instaurer un État islamique selon la conception qu'ils s'en font. Ils considèrent l'autre partie comme faisant obstacle à ce but. Tout en consolidant leurs positions dans les deux tiers du pays dont ils sont maîtres, les Taliban ne cessent d'insister pour que la communauté internationale les reconnaisse formellement comme le véritable gouvernement islamique de l'Afghanistan, habilité à occuper le siège de l'Afghanistan à l'Assemblée générale des Nations Unies. L'alliance qui constitue le Conseil suprême pour la défense de l'Afghanistan s'élève contre le fait que les Taliban imposent leur volonté au reste de l'Afghanistan par la force. De l'avis général, tant les Taliban que le Conseil suprême pour la défense de l'Afghanistan auraient reçu une aide matérielle et financière d'alliés extérieurs. L'évolution récente de la situation militaire en Afghanistan, en particulier les dernières avancées des Taliban vers le nord, inquiète beaucoup les pays de la région et au-delà. Le Conseil a demandé aux parties de cesser le feu et de chercher à résoudre rapidement le conflit par voie de négociation. Il a réaffirmé aussi qu'il appuyait pleinement les efforts déployés par la Mission spéciale des Nations Unies en Afghanistan pour rétablir la paix. Certains aspects de la politique des Taliban, en particulier en ce qui concerne l'accès des femmes à l'éducation et à l'emploi et d'autres questions relatives aux droits de l'homme, restent un sujet de graves préoccupations.
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La Mission spéciale a continué à concentrer ses efforts sur la conclusion d'un cessez-le-feu immédiat en organisant des négociations entre les belligérants et en leur offrant ses bons offices. À cette fin, le Chef de la Mission spéciale et ses collaborateurs ont rencontré à plusieurs reprises les Taliban et les dirigeants du Conseil suprême pour la défense de l'Afghanistan, ainsi que d'autres personnalités afghanes. Le Chef de la Mission spéciale a eu diverses consultations également avec d'autres États Membres pour leur demander de contribuer aux activités de la Mission spéciale et pour coordonner leur assistance.
En conclusion du rapport, le Secrétaire général propose de convoquer à brève échéance une réunion des pays concernés, dans des conditions analogues à celles qui avaient présidé à la réunion qui s'était tenue à New York le 18 novembre 1996. La nouvelle réunion aurait pour objet de réévaluer la situation après les récents événements politiques et militaires et d'étudier les moyens de promouvoir un règlement négocié du conflit, notamment en renforçant les efforts déployés par l'Organisation des Nations Unies pour rétablir la paix.
Débat
M. A.R. GHAFOORZAI, Ministre des affaires étrangères par intérim de l'Afghanistan, a déclaré que la nation afghane voit ses chances d'une paix durable s'éroder du fait des interventions militaires et des intérêts des grandes compagnies qui font obstacle à la paix. Si la question afghane n'est pas traitée avec sincérité et prudence, l'Afghanistan constituera un danger sérieux ayant de nombreuses implications. Il incombe, en conséquence, au Conseil de sécurité de noter les effets déstabilisateurs que la situation en Afghanistan peut avoir potentiellement. Les principes de la Charte auxquels les Etats membres ont souscrit exigent des signataires qu'ils s'abstiennent, dans leurs relations internationales, d'ingérence et d'intervention dans les affaires intérieures d'autres Etats et qu'ils fondent leurs relations sur les principes reconnus d'égalité et de respect mutuel.
De même, recruter, armer, entraîner et envoyer des groupes de mercenaires armés pour déstabiliser un autre Etat ou compromettre un processus politique constituent des pratiques qui violent les principes du droit international. De telles pratiques méritent une condamnation ferme de la communauté internationale. Les Taliban incarnent ces groupes armés qui soutiennent le terrorisme international, abritent leurs financiers et ne montrent aucun respect pour les droits de l'homme. La dernière brèche aux droits de l'homme a été un nettoyage ethnique qui a conduit à la disparition de 140 000 Afghans non Pashtun. Le 8 avril dernier, la Commission des droits de l'homme à Genève a pris connaissance d'un rapport selon lequel 250 000 afghans avaient été déplacés depuis octobre 1996. Depuis janvier 1997, le nombre de victimes d'expulsions forcées imposées par les Taliban a dépassé 150 000. Poursuivant, le représentant a attiré l'attention sur le fait que selon des sources sûres, les mercenaires Taliban, qui reçoivent une aide extérieure,
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sont en train de préparer, pour les prochains jours, une attaque massive contre le nord de l'Afghanistan. Des milliers de milices de l'extérieur dont l'identité et la nationalité ont été expliquées dans les communications précédentes adressées au Président du Conseil de sécurité et au Secrétaire générale sont également mobilisées. L'Afghanistan souhaite que le Conseil de sécurité prenne des mesures appropriées pour arrêter cette attaque qui risque non seulement de causer une catastrophe sociale mais également d'affecter le processus de paix.
L'Afghanistan a toujours souligné la nécessité de créer une atmosphère positive dans la région qui serait propice au règlement de la crise actuelle. Le souhait du peuple afghan a été accepté par tous les pays voisins à l'exception d'un seul. L'Afghanistan espère que le nouveau gouvernement pakistanais abandonnera la position de l'administration précédente et adoptera une attitude de fraternité, de bon voisinage et de respect mutuel. La cessation d'une assistance aux Taliban constituerait une première étape vers la réconciliation, la paix et la stabilité en Afghanistan.
D'autre part, le représentant a souligné que son pays est conscient de l'importance économique du projet de pipeline de gaz et de pétrole qui doit partir du Turkménistan jusqu'au Pakistan et probablement l'Inde en passant par l'Afghanistan. L'importance qu'attachent les pays industrialisés et les grandes compagnies à ce projet a donné lieu à un jeu politique classique et à une lutte pour le contrôle de l'ancienne route de la soie. Les implications politiques de cette compétition sont sur le point de compromettre la paix et la stabilité régionales. L'Afghanistan réitère sa position selon laquelle la construction de ce projet devrait être menée par un consortium représentant toutes les compagnies multinationales intéressées. Dans le cas contraire, l'Afghanistan serait disposé à négocier avec une compagnie qui ne liera le projet à aucune condition politique et serait prête à prendre des mesures préliminaires pour la mise en oeuvre du projet.
Le représentant a souligné que la solution militaire en Afghanistan constitue une menace pour la paix et la sécurité dans la région. L'Afghanistan est convaincu que le Conseil de sécurité doit prendre des mesures appropriées, y compris des sanctions contre les Taliban et leurs partisans qui leur fournissent des armes et un appui logistique. Concluant, le représentant a expliqué que son intervention visait à attirer l'attention du Conseil sur les implications dangereuses que peut avoir l'assistance apportée aux Taliban. Cette assistance, a-t-il insisté, représente une menace pour la démocratie, les droits de l'homme, la paix et la stabilité non seulement en Afghanistan mais également dans l'ensemble de la région.
M. SERGEY LAVROV (Fédération de Russie) a déclaré que la situation en Afghanistan était toujours aussi dangereuse que par le passé. Elle constitue une menace pour la paix et la sécurité dans la région. Elle contient le danger d'une catastrophe humanitaire à grande échelle. La Fédération de Russie est préoccupée par le fait que les Taliban continuent à prendre l'initiative militaire et que les pourparlers du groupe inter-afghan n'ont pas
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donné de fruits. Elle appelle toutes les parties afghanes à respecter la Mission des Nations Unies et à s'engager dans la voie des négociations. La réconciliation nationale ne sera possible que par la création d'un gouvernement de transition ayant une base large.
La Fédération de Russie appuie sans réserve les activités de la Mission spéciale et est prête à coopérer avec elle. Il faut que le Conseil de sécurité continue à suivre la situation et réagisse par des mesures appropriées. La cessation de la livraison d'armes doit être immédiate. Les Etats qui ont une influence ne doivent épargner aucun effort. La situation humanitaire appelle de nouvelles mesures. L'aide humanitaire ne doit pas être utilisée comme une monnaie d'échange mais doit profiter à tous ceux qui en ont besoin. La Russie contribue à cet effort avec les pays d'Asie centrale et prend des mesures pour encourager le dialogue politique. Elle espère que l'on parviendra à un règlement et est favorable à l'adoption par le Conseil de sécurité d'une déclaration qui confirmerait l'attitude de base des Nations Unies sur la question.
M.WANG XUEXIAN (Chine) a espéré que le débat créera des conditions propices au règlement politique de la question afghane. Le conflit afghan a conduit à l'instabilité de la région. La Chine estime que la réalisation de la réconciliation nationale est un élément clé pour résoudre le conflit. Les parties devraient d'abord montrer la volonté politique nécessaire, mettre en oeuvre un cessez-le-feu et mettre fin aux hostilités immédiatement. La Chine prie les parties de tenir compte des intérêts fondamentaux du peuple afghan et d'établir un gouvernement stable à large assise, que toutes appuieraient. Elle salue la Mission Spéciale des Nations Unies et le travail du Représentant spécial. Elle espère que les efforts de la communauté internationale contribueront à un règlement de la situation en Afghanistan.
M. NABIL E. ELARABY (Egypte) a exprimé la reconnaissance de son pays pour les efforts déployés par le Représentant spécial des Nations Unies. La situation en Afghanistan se détériore depuis neuf ans et tous les pays de la région en souffrent. Des terroristes sont formés en Afghanistan; deux camps d'entraînement y auraient été réouverts. Certaines parties favorisent l'intervention militaire. Des mesures pratiques devraient être prises afin que les résolutions du Conseil de sécurité sur l'Afghanistan soient appliquées. La Mission des Nations Unies devrait encourager le cessez-le-feu, l'échange de prisonniers et des mesures d'établissement de la confiance. La proposition du Secrétaire général pour une rencontre des factions, en-dehors de l'Afghanistan et sous la supervision des Nations Unies constitue une base solide pour des initiatives de paix. L'Egypte espère que la Secrétaire général proposera un plan clair à cet égard. Le mouvement des non-alignés a exprimé sa préoccupation relativement à la situation en Afghanistan. Les préoccupations de ces pays de même que celles des pays de la Communauté des Etats Indépendants, devraient être utilisées pour appuyer les efforts en faveur de la paix.
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Certaines des parties en Afghanistan manquent de la volonté politique nécessaire. Le point de départ de tout effort de paix des Nations Unies devrait être la cessation de l'appui militaire extérieur au conflit. La situation tendue dans le pays, la présence de mines, la situation des réfugiés et la crise humanitaire ont eu de graves répercussions sur le peuple d'Afghanistan. L'infrastructure nationale doit être réhabilitée. L'aide économique doit être liée au degré de flexibilité dont feront preuve les parties à l'égard du processus de paix.
M. ALFREDO LOPES CABRAL (Guinée-Bissau) a déclaré que son pays se félicite de l'attention particulière que le Secrétaire général lui-même porte à ce conflit et approuve toutes ses initiatives en vue de trouver une solution durable. Elle se réjouit des résultats déjà obtenus dans ce sens par la Mission Spéciale des Nations Unies en Afghanistan. La communauté internationale, notamment les pays de la région, doivent faire tout ce qui est en leur pouvoir pour convaincre les factions afghanes de la nécessité de mettre fin aux combats et de s'engager sans plus tarder dans la voie de le négociation. Il ne saurait y avoir de solution militaire acceptable car la paix doit se fonder sur une réconciliation nationale et sur le droit de toutes les factions à participer à la formation d'un Gouvernement représentatif de toutes les composantes de la population afghane dans sa diversité pluri- ethnique. Les leaders des factions afghanes doivent s'inspirer des principes de la démocratie pour favoriser la création de structures politiques, sociales et économiques nouvelles qui respectent l'égalité des citoyens et des sexes. L'Afghanistan mérite de retrouver sa place dans le concert des Nations. La délégation de Guinée-Bissau se réjouit de la convocation par le Secrétaire général d'une seconde conférence le 16 avril prochain, réunissant les pays concernés par la crise afghane. Elle espère que cette réunion permettra aux participants d'étudier tous les moyens de mettre fin aux hostilités en favorisant les discussions intra-afghanes, de même que les modalités d'application des recommandations du Forum international sur l'assistance humanitaire à l'Afghanistan en janvier dernier à Ashgabat.
Les Nations Unies doivent continuer de jouer leur rôle dans la recherche d'une solution pacifique à ce conflit. Le Conseil de sécurité doit inscrire sa démarche dans cette direction en s'assurant de la pleine participation de toutes les parties concernées à des négociations en vue de la réconciliation nationale et de la formation d'un Gouvernement largement représentatif. Il convient d'encourager les pays de la région à tout mettre en oeuvre pour arrêter le flot des armes en direction de l'Afghanistan et à coopérer avec la Mission Spéciale de l'ONU tout en s'abstenant de toute ingérence préjudiciable à un rapprochement entre les factions. Les leaders afghans doivent s'engager devant la communauté internationale à arrêter le trafic de drogue et à ne pas faire du pays le terreau du terrorisme international. Il faut veiller à la sécurité du personnel des organisations humanitaires. Les femmes et les jeunes filles afghanes ne doivent pas être soumises à des lois discriminatoires qui constituent une atteinte à l'exercice de leurs droits fondamentaux.
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M. JONH WESTON (Royaume-Uni) s'est déclaré préoccupé par la persistance des combats en Afghanistan. La recherche de la paix reste vitale et la Mission spéciale des Nations Unies mérite tout l'appui de la communauté internationale, a souligné le représentant. Il s'est félicité des succès enregistrés par la Mission qui a réussi à réunir les belligérants autour d'une même table. Tous les Etats sans exception doivent appuyer les efforts de la Mission et s'abstenir d'initiatives parallèles. Le représentant s'est en outre déclaré préoccupé par le fait que les parties continuent de recevoir des armes de l'extérieur. Il a invité tous les pays à adopter la même position que l'Union européenne qui a décidé d'un embargo sur les armes contre l'Afghanistan. Il ne peut y avoir de solution militaire en Afghanistan, a déclaré M. Weston, en appelant à une intensification des négociations. La paix, a-t-il poursuivi, ne saurait être durable si le pays reste divisé par des clivages ethniques. Les factions doivent mieux comprendre les conséquences de la guerre et mesurer les avantages de la paix. Les efforts de paix devraient comprendre le déminage, le retour des réfugiés, et la reconstruction économique. Le représentant a conclu en appelant à un renforcement de la lutte contre la drogue. Il a ainsi indiqué que son pays a contribué aux fonds du PNUCID à hauteur de 900 000 livres sterling et qu'il est disposé à fournir une nouvelle somme d'un million de livres sterling à condition que les parties participent véritablement à cette lutte.
M. ALAIN DEJAMMET (France) a déclaré que la France constate, comme le Secrétaire général, que les factions adverses n'aient pas donné suite aux appels répétés à la paix et semblent décidées à poursuivre l'option militaire. Pour le représentant, un telle situation ne doit pas conduire au découragement et à l'indifférence. "Les nouvelles initiatives annoncées par le Secrétaire général méritent donc notre appui", a déclaré M. Dejammet. "Nous accueillons en particulier avec satisfaction la convocation d'une nouvelle réunion des pays concernés et sommes favorables à la tenue plus régulière de telles réunions", a-t-il ajouté, avant de préciser que son pays soutient un engagement plus marqué du Conseil de sécurité.
M. Dejammet a cependant estimé que l'action du Secrétaire général et de son Représentant spécial ne peut porter ses fruits que si tous les Etats membres adoptent une attitude cohérente avec les principes formulés par les Nations Unies. Le représentant a déclaré que son pays souscrit au souhait formulé par le Secrétaire général de voir les Etats qui s'intéressent à l'Afghanistan et qui ont une influence sur ce pays coordonner leurs activités avec celles de la Mission spéciale et ne favoriser aucune des parties au détriment d'une autre. M. Dejammet a rappelé que la cessation des ingérences est indispensable, en particulier celle des fournitures d'armes, faisant valoir que les Etats qui commettent de telles ingérences ont une responsabilité particulière dans la poursuite du conflit. Il a affirmé que la France, comme ses partenaires de l'Union européenne, applique un embargo complet. Le représentant a conclu son intervention en affirmant que le règlement du conflit ne sera possible que si les parties afghanes acceptent de cesser les hostilités et de dialoguer.
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M. ZBIGNIEW MATUSZEWSKI (Pologne) a estimé que seuls une réelle réconciliation nationale, le respect des intérêts des groupes éthniques et religieux ainsi que de la longue tradition de l'Etat afghan peuvent fournir les bases d'un règlement pacifique du conflit. Les factions en guerre en Afghanistan doivent admettre que leur pays est l'héritage commun de tous les afghans et que le développement et la reconstruction du pays ne peut que profiter de la participation de tous les groupes ethniques et politiques. Les problèmes humanitaires et les violations des droits de l'homme, résultant des combats entre les parties, constituent un facteur déstabilisant supplémentaire, a ajouté le représentant. Les soulèvements et les troubles incessants provoquent le déplacement d'un nombre croissant de personnes dans différentes régions du pays. La détérioration dramatique du statut social et économique des femmes afghanes, en particulier l'accès restreint à l'éducation et à l'emploi, reste une source de préoccupation, a-t-il indiqué.
Le représentant a estimé que les Nations Unies avaient un rôle important à jouer en mettant un terme à la guerre civile et en obtenant un règlement pacifique du conflit. Il a également souligné l'importance de la Mission spéciale des Nations Unies et a réitéré le soutien de son pays aux efforts de médiation déployés par M. Norbert Holl, Représentant spécial du Secrétaire général.
M. JUAN SOMAVIA (Chili) a dit attacher une grande importance aux réunions auxquelles ont participé tous les protagonistes en Afghanistan en émettant l'espoir qu'elles donneront lieu notamment à la constitution d'un gouvernement représentatif. Il est pénible de constater l'indifférence des dirigeants devant les souffrances du peuple, a-t-il poursuivi. En Afghanistan comme ailleurs, le conflit s'aggrave aux dépens des plus vulnérables. Le représentant a invité les dirigeants afghans à avancer dans le sens des propositions du Conseil de sécurité et de l'équipe du Secrétaire général des Nations Unies. Ceux qui croient en une solution militaire se leurrent, a dit M. Somavia en jugeant inquiétant que les parties se préparent à reprendre la lutte armée. Le printemps de la violence doit céder la place au printemps de la paix. Ce recours systématique à la force s'explique, a-t-il expliqué, par le fait que la communauté internationale continue de reconnaître l'usage de la force comme une source de légitimité. Il est regrettable de constater que personne ne s'oppose à ce qu'un jour le vainqueur représente l'Afghanistan aux Nations Unies. Il ne faut donc pas s'étonner si les parties continuent d'ignorer les appels à la négociation. Il faut que la communauté internationale donne une incitation positive. L'état actuel du droit et des relations internationales constituent un encouragement implicite aux solutions de force. Cette logique perverse favorise l'internationalisation des conflits car aujourd'hui aucune faction ne s'engage dans une guerre civile sans un appui extérieur et c'est le cas en Afghanistan. Le représentant a émis l'espoir que l'ingérence extérieure ne compromettra pas l'action des Nations Unies. Les livraisons d'armes aux factions et l'utilisation du territoire afghan pour le terrorisme et le trafic de drogues doivent cesser. Les pays doivent coopérer avec les Nations Unies pour éviter l'expansion de la crise afghane dans les autres régions.
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Le représentant s'est également montré préoccupé par les problèmes humanitaires en condamnant fermement les violations des droits de l'homme et des droits des femmes en particulier. L'interdiction de travail imposé aux femmes compromet le bon déroulement des activités des Nations Unies sur le terrain qui emploient un grand nombre de femmes. Le Chili ne saurait comprendre que de telles conditions puissent être imposées aux femmes au nom de la religion.
M. CHOI SUNG HONG, République de Corée, a appelé à la cessation immédiate des hostilités. La terrible situation humanitaire est un grave sujet d'inquiétude pour tous, de même que les violations renouvelées des droits de l'homme, notamment la discrimination à l'égard des femmes, attribuées au mouvement taliban, a-t-il déclaré. Après deux décennies de conflit armé, les parties afghanes doivent impérativement comprendre qu'il n'existe pas de solution militaire à leurs différences, seul un accord politique négocié est possible. Ce dernier doit poser le principe d'un cessez-le-feu immédiat, de la démilitarisation de Kaboul et de l'établissement d'un gouvernement ouvert d'unité nationale et de réconciliation assurant la période de transition. En outre, l'unité, l'intégrité et la souveraineté territoriales de l'Afghanistan ainsi que l'inviolabilité de ses frontières doivent être pleinement respectées par tous les Etats. Notant que les ingérences extérieures, notamment la livraison d'armes aux parties, détruisent les efforts de paix, le représentant a apporté son appui à un éventuel embargo sur les armes. Selon lui, tout accord global doit prendre en considération les réalités politiques et militaires car qu'on le veuille ou non, le mouvement taliban représente un protagoniste important contrôlant désormais les deux tiers du pays. Si les Nations Unies se doivent d'inciter les Taliban à un dialogue constructif, il ne faut toutefois pas que cette démarche soit perçue comme une acceptation de la volonté des Taliban de représenter l'Afghanistan auprès de l'Organisation.
Les Nations Unies doivent jouer un rôle central dans la recherche d'un règlement pacifique. Les expériences passées ont montré que les chances de résolution d'un conflit ne sont pas proportionnelles au nombre d'initiatives diplomatiques et d'artisans de la paix envoyés sur le terrain, notamment si les efforts déployés ne font pas l'objet d'une bonne coordination entre le Secrétaire général et son Représentant spécial. C'est d'impartialité et de crédibilité internationale dont l'Afghanistan a drastiquement besoin. Par ailleurs, il faut demander aux parties au conflit de prendre des engagements afin que les régions sous leur contrôle ne servent pas de bases d'entraînement ou de refuge aux terroristes ni de plaque tournante au trafic de drogues. En effet, les efforts de la communauté internationale ne peuvent réussir que dans la mesure où les parties afghanes elles-mêmes font preuve de la volonté politique de dépasser leurs différences par le dialogue.
M. NJUGUNA M. MAHUGU (Kenya) a déclaré que six principes guident la position du Kenya en ce qui concerne l'Afghanistan : la souveraineté et l'intégrité territoriale, la non-ingérence dans les affaires intérieures des autres pays, le règlement des conflits par des négociations, l'égalité des
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droits et des chances pour tous y compris les femmes, le droit des Afghans à l'autodétermination, ainsi que le rôle central des Nations Unies de médiateur et de coordinateur du processus de paix. Le Kenya s'inquiète des rapports qui signalent la reprise des combats qui ont été la cause de déplacements importants de civils, obligeant ces derniers à vivre dans des conditions intolérables. Le Kenya se félicite des actions humanitaires entreprises par le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) en coopération avec la Croix Rouge afghane qui aide directement près d'un demi-million de personnes en Afghanistan. Le Kenya soutient les mesures amorcées par le Conseil de Sécurité à la fois du fait que la situation en Afghanistan représente une menace à la paix et à la sécurité internationale et que la situation humanitaire y est précaire. La délégation du Kenya soutient la déclaration adoptée par le Mouvement des pays non alignés sur cette question lors de la réunion ministérielle de Delhi.
Du fait que les Taliban ont un contrôle militaire quasi total de l'Afghanistan, le Kenya doute que les Taliban tiendront compte des appels en faveur d'un cessez-le-feu et de négociations avec le Conseil suprême pour la défense de l'Afghanistan. Ce contrôle militaire rend presque impossible la tâche de la Mission spéciale des Nations Unies. Avec l'offensive militaire, les Taliban tentent clairement de renforcer leur hégémonie sur le pays. Cela n'est pas l'action d'une entité qui veut négocier. Il est évident qu'un conflit de cette nature est encouragé de l'extérieur. Dans la déclaration finale du Mouvement des non-alignés, le Kenya appuie particulièrement la demande faite à tous les Etats de ne pas interférer avec les affaires internes de l'Afghanistan, notamment en arrêtant de fournir des armes et du personnel militaire. Le Kenya est particulièrement inquiet de la situation des femmes et des petites filles auxquelles on refuse le droit à l'éducation et à l'emploi. Le Gouvernement du Kenya soutient la résolution 1076 (1996) du Conseil de sécurité et particulièrement les dispositions qui accordent aux Nations Unies un rôle de coordination et de médiation.
M. HISASHI OWADA (Japon) a estimé que le maintien de l'intégrité territoriale et de l'unité de l'Afghanistan en tant qu'Etat souverain et stable est crucial pour la paix et la stabilité non seulement du sous- continent de l'Asie, mais également des autres régions asiatiques voisines. En tant que pays asiatique, le Japon est profondément préoccupé par le conflit armé qui déchire ce pays et attache une grande importance à un règlement rapide et pacifique. Toutes les factions devraient être amenées à conclure un cessez-le-feu et entamer des négociations sur la mise en place d'un gouvernement d'unité nationale. Les pays voisins devraient s'abstenir de toute influence qui exacerbe la situation et coopérer plutôt de façon constructive avec les efforts de médiation déployés par la Mission spéciale des Nations Unies. La délégation japonaise réitère que son pays est prêt à accueillir une réunion des parties en coopération avec les Nations Unies, si une telle invitation pouvait faciliter les négociations. Le Japon estime qu'en tant que pays impartial à l'égard de Afghanistan, il a un rôle à jouer pour compléter les activités de la Mission spéciale, en encourageant les parties au conflit à s'entendre sur un cessez-le-feu. Le Japon est engagé à
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contribuer aux efforts de la Mission spéciale visant à promouvoir des contacts et un dialogue directs entre les quatre factions importantes, à savoir le Dostum, les Rabbani, les Khalili et les Taliban. Par ailleurs, a indiqué M. Owada, le Japon participera le 21 avril prochain à Genève à la réunion du Groupe d'appui pour l'Afghanistan afin d'explorer les possibilités d'une approche intégrée pour la paix et la reconstruction du pays
M. EDWARD GNEHM (Etats-Unis) a rappelé que son gouvernement avait constamment demandé la fin des combats et l'instauration d'un dialogue pratique dans un esprit de compromis. On ne peut parvenir à la stabilité si un groupe essaie de diriger tout l'Afghanistan à lui seul. Tous les groupes doivent travailler à la mise en place d'un gouvernement représentatif acceptable par tous les afghans. Les Etats-Unis ne soutiennent ni les Taliban ni aucun autre groupe, mais ils ne tiennent pas non plus les Taliban pour responsables de tous les maux de l'Afghanistan. Toutes les parties sont responsables, et les Etats-Unis leur ont fait part à plusieurs reprises de leurs préoccupations concernant les camps d'entraînement de militants ou de terroristes, ou la production et le trafic de narcotiques ou la situation des droits de l'homme, en particulier le non respect des droits des femmes et des fillettes. Les Etats-Unis ont rappelé aux Taliban qu'il est de leur responsabilité de rassurer leurs voisins sur leurs intentions et de s'engager à ne pas porter atteinte à leur intégrité territoriale et à ne pas exporter leur idéologie.
Le Conseil de sécurité doit continuer à se préoccuper de la livraison incessante d'armes aux parties par des pouvoirs extérieurs, qui perpétuent le conflit. Le Gouvernement des Etats-Unis se félicite des efforts déployés par le Chef de la Mission Spéciale des Nations Unies qui peut lancer un véritable processus politique si les parties sont disposées à négocier en bonne foi. Une grande partie de la population a accepté la domination des Taliban car elle a besoin de paix et d'un semblant de vie normale et non pas d'idéologie. Le peuple afghan ne devrait pas être obligé de choisir entre la sécurité avec des contraintes politiques et l'intolérance sociale ou l'insécurité.
M. MELVIN SAENZ BIOLLEY (Costa Rica) a déclaré que sa délégation appuyait sans réserve les efforts déployés par la Mission Spéciale des Nations Unies en Afghanistan afin de parvenir à une solution pacifique et concertée du conflit. Elle appuie les efforts du chef de la Mission, M. Norbert Holl, pour favoriser des négociations directes de haut niveau entre les diverses parties au conflit, en organisant une réunion politique les rassemblant. Le Costa Rica exhorte les parties à prendre part à ces discussions activement et de bonne foi. Elle est encouragée par la décision des trois leaders de factions d'y prendre part et exhorte le dirigeant politique des Taliban à suivre cet exemple. Il faut également favoriser les négociations entre les parties aux conflit et les Etats qui ont une influence sur ces dernières sous les auspices des Nations Unies, sous la forme d'une conférence internationale ou d'un groupe de pays amis, afin de les convaincre d'adopter une solution pacifique et négociée au conflit.
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- 12 - CS/804 14 avril 1997
La délégation du Costa Rica souhaite rappeler aux parties au conflit leur obligation de respecter le droit international humanitaire protégeant les civils dans les zones sous contrôle militaire. La situation des droits fondamentaux des femmes et des enfants est particulièrement préoccupante. Ces groupes vulnérables méritent de se voir accorder un traitement préférentiel et toute discrimination à leur encontre doit être condamnée de façon unanime par la communauté internationale. Le Costa Rica est préoccupé par la situation des réfugiés et des personnes déplacées et salue à cet égard le travail des organisations non gouvernementales, de la Croix Rouge internationale et des institutions des Nations Unies. Elle est également préoccupée par les activités de certaines des parties au conflit qui menacent le travail de ces organisations. Le Costa Rica s'inquiète profondément du trafic d'armes et d'explosifs vers l'Afghanistan et de l'Afghanistan vers l'extérieur. Le trafic de narcotiques et de trésors artistiques et culturels afin de financer l'effort militaire est non seulement illégal mais aussi immoral.
M. PETER OSVALD (Suède) a fait remarquer que bien que le conflit afghan ne puisse être réglé que par les afghans eux-mêmes, la communauté internationale doit, de bonne foi, contribuer à ce règlement. Soulignant la nécessité de mettre fin à toute ingérence extérieure, le gouvernement suédois invite tous les Etats à respecter strictement la souveraineté, l'indépendance et l'intégrité territoriale, et les encourage à s'abstenir de toute livraison d'armes à l'Afghanistan, comme l'ont fait les Etats Membres de l'Union européenne. Les Nations Unies sont le médiateur le plus approprié et le plus crédible pour un règlement politique entre les parties afghanes. Tout appui éventuel doit être apporté à la Mission spéciale des Nations Unies et au Représentant spécial du Secrétaire général, M. Norbert Holl, pour ses efforts en faveur de la restauration de la paix et e la réconciliation nationale en Afghanistan. Ce n'est que par le biais d'une contribution étroitement coordonnée avec la Mission spéciale des Nations Unies en Afghanistan que la communauté internationale peut exercer des pressions sur les parties afghanes afin de régler le conflit par des moyens pacifiques, et promouvoir ainsi la stabilité régionale à long terme. En outre, la communauté internationale doit s'élever contre la discrimination croissante à l'égard des fillettes et des femmes et exiger que leurs droits soient respectés. Les droits de l'homme sont universels et ne peuvent faire l'objet de négociations, a souligné M. Osvald. Rappelant que son pays est depuis de nombreuses années l'un des contributeurs les plus importants à l'assistance humanitaire en faveur de l'Afghanistan, M. Osvald a estimé que, par le biais de l'aide continue, la communauté internationale pourrait contribuer de façon positive au processus de paix ainsi qu'au rétablissement de la réconciliation nationale.
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( suivre)