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DH/G/519

LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME ENTEND ONZE ÉTATS MEMBRES SUR LA QUESTION DE LA VIOLATION DES DROITS DE L'HOMME

10 avril 1997


Communiqué de Presse
DH/G/519


LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME ENTEND ONZE ÉTATS MEMBRES SUR LA QUESTION DE LA VIOLATION DES DROITS DE L'HOMME

19970410 Genève, le 10 avril -- Commission des droits de l'homme a poursuivi, ce matin, son débat sur la question de la violation des droits de l'homme où qu'elle se produise dans le monde, en particulier dans les pays et territoires coloniaux et dépendants, et notamment, question des droits de l'homme à Chypre.

À ce titre, elle a entendu des déclarations des représentants des pays suivants: Chine, Malaisie, Inde, Nicaragua, Pakistan, Indonésie (au nom de l'Organisation de la Conférence islamique), Afrique du Sud, Fédération de Russie, Brésil, Canada et Cuba.

Le représentant du Nicaragua a qualifié le régime cubain de dictature perpétuelle et estimé que le problème à Cuba réside entre le peuple et le régime qui l'opprime depuis 38 ans. Le représentant de Cuba a pour sa part affirmé que son peuple ne peut que se sentir trahi par le fait que le peuple frère du Nicaragua ait pour représentant un «terroriste patenté qui a prétendu dénoncer les violations des droits de l'homme à Cuba mais n'est parvenu qu'à raviver la triste mémoire d'un dictateur, Luís Somoza».

Le représentant du Pakistan a indiqué qu'hier, l'Inde et le Pakistan ont décidé de poursuivre à Islamabad les pourparlers commencés récemment à New Delhi sur le Cachemire. Il a exprimé l'espoir que ce dialogue permettra d'adopter des mesures qui feront cesser les violations des droits de l'homme au Cachemire. La représentante de l'Inde a déploré l'approche sélective et l'attitude de confrontation adoptées par la Commission. Elle a estimé qu'il fallait reconnaître les limites de mécanismes tels que les rapporteurs spéciaux, lorsqu'ils se heurtent à des systèmes politiques ou culturels différents qui les perçoivent comme des instruments de pression utilisé par un système contre un autre.

Le représentant de la Fédération de Russie a notamment déclaré que si les hostilités ont cessé en Tchétchénie en 1996, beaucoup de problèmes subsistent et que le processus de négociation est fragile. Il a par ailleurs attiré l'attention de la Commission sur la situation préoccupante de la population russophone en Lettonie et en Estonie.

Le représentant de la Malaisie a souligné que le respect durable des droits de l'homme ne peut être imposé par des sanctions et des pressions. Il a estimé que les récents événements dans la région africaine des Grands Lacs et dans l'ex-Yougoslavie témoignent de l'impasse morale dans laquelle se trouve aujourd'hui l'humanité. Le représentant du Canada a déclaré que la Commission a pour responsabilité fondamentale d'élaborer des normes sur les droits de l'homme et de trouver des moyens efficaces de mettre ces principes et ces arrangements en pratique. Aucun gouvernement n'a le monopole de la moralité suprême et aucun pays ne peut se targuer de ne pas avoir de problèmes, a dit le représentant. Le représentant de l'Afrique du Sud a souligné qu'aucun pays n'est parfait en matière de droits de l'homme et que personne ne saurait s'arroger le monopole de la sagesse dans ce domaine. La multiplication des niveaux de pouvoir dans un pays, le silence face aux violations des droits de l'homme, le terrorisme et le racisme sont autant de facteurs qui ont un impact négatif sur les droits de l'homme. Le représentant du Brésil a pour sa part souligné l'importance de tous les éléments du système de protection des droits de l'homme des Nations Unies, y compris en ce qui concerne l'examen de situations particulières.

Le représentant de l'Indonésie, au nom des pays membres de l'Organisation de la Conférence islamique, a mis l'accent sur la situation dans les territoires arabes occupés et en Bosnie-Herzégovine. La délégation chinoise est intervenue sur le sous-point relatif à la situation des droits de l'homme à Chypre.

La Commission continuera son débat sur la violation des droits de l'homme cet après-midi, à partir de 15 heures. Au cours de cette séance, qui se prolongera dans la soirée, la Commission devrait entendre les derniers orateurs sur cette question et entamer son débat sur les droits de l'enfant. Mme Ofelia Calcetas-Santos, Rapporteur spécial sur la question de la vente d'enfants, de la prostitution des enfants et de la pornographie impliquant des enfants, présentera alors son rapport.

M. WANG GUANGYA (Chine) s'est dit extrêmement préoccupé par la situation à Chypre et a souhaité que l'indépendance et la souveraineté de ce pays soient respectées. Il a souligné que les résolutions pertinentes des Nations Unies doivent être appliquées afin de pouvoir parvenir, enfin, à une résolution de ce conflit. Il a estimé que les parties en conflit ont fait de sérieux efforts afin de trouver une solution juste à leur différend et a souhaité qu'elles entament dès à présent des négociations en coopération étroite avec les Nations Unies. La Chine appuie les efforts déployés à cet égard par le Secrétaire général de l'Organisation.

M. DATO HISHAMMUDDIN TUN HUSSEIN (Malaisie) a déclaré que la promotion des droits de l'homme passe par la coopération, le respect mutuel et la consultation ainsi que par le dialogue entre les nations et avec les

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institutions internationales plutôt que par des relations conflictuelles. Il a ajouté que le respect durable des droits de l'homme ne peut être imposé par des sanctions et des pressions. Les droits de l'homme doivent être appliqués de manière non discriminatoire. On ne peut pas d'un côté frapper d'ostracisme le Myanmar et de l'autre protéger Israël. La Bosnie, pour sa part, a subi des dommages incalculables. La passivité de nations européennes apparemment puissantes lorsque le génocide s'est produit à leur porte a porté préjudice à l'autorité morale que l'Occident s'arrogeait. Toute démocratie durable exige le développement d'institutions et de politiques à long terme. Des transplantations brutales ne fonctionnent jamais.

La conviction de certains que les idées et valeurs qui sont les leurs sont universelles a mené à l'incapacité d'accepter le principe de diversité. Or les priorités ne sont pas les mêmes pour tous en matière de droits de l'homme. Le représentant a souligné que le marché de la drogue est particulièrement développé dans le Nord. Les pays développés consomment l'essentiel des ressources naturelles et font face à des régressions sociales. En outre, si le gouvernement d'un pays particulier empêche son propre peuple de s'exprimer en faveur de réformes démocratiques, la communauté internationale doit jouer un rôle essentiel en exerçant des pressions en faveur du changement. Les événements récents dans la région africaine des Grands Lacs et dans l'ex-Yougoslavie témoignent de l'impasse morale dans laquelle se trouve aujourd'hui l'humanité. S'agissant de la Bosnie-Herzégovine, la délégation de la Malaisie estime que ceux qui se sont rendus coupables de crimes de guerre doivent être traduits en justice et punis. La paix échouera dans ce pays si elle ne s'accompagne pas d'une vigoureuse et rapide reconstruction économique et d'un effort de redressement. Pour cela, le pays a besoin de l'assistance extérieure. Ces efforts sont indispensables pour stabiliser la paix en Bosnie-Herzégovine.

MME ARUNDHATI GHOSE (Inde) a déploré l'approche sélective et l'attitude de confrontation adoptées au sein de la Commission des droits de l'homme. Elle s'est dit profondément préoccupée par la «nature Nord-Sud» des débats et l'utilisation cynique de cette instance et des droits de l'homme en général à des fins politiques. L'Inde suggère à cet égard que l'approche en matière de droits de l'homme se fonde sur des faits vérifiés et non plus exclusivement sur des allégations. Elle souhaite que les mécanismes dans le domaine des droits de l'homme soient mis sur pied en consultation avec le pays concerné. Une relation de confiance doit s'établir afin que des solutions émergent de l'interaction entre les gouvernements concernés et les mécanismes des droits de l'homme. S'agissant des différents mécanismes, la représentante a suggéré que les rapporteurs spéciaux ne se contentent pas d'établir des faits, mais qu'ils accomplissent également des missions de bons offices. Il faut aussi reconnaître les limites de tels mécanismes lorsqu'ils se heurtent à des systèmes politiques ou culturels différents qui les perçoivent comme des instruments de pression utilisé par un système contre un autre. L'objectif

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doit toujours être la protection et la promotion des droits de l'homme des victimes de violations et non la promotion et la protection des instruments créés à cet effet, a estimé Mme Ghose. Les États membres de la Commission ne doivent pas s'ériger en juges, car il n'y a pas de pays qui ne connaisse des violations des droits de l'homme. La représentante a notamment demandé par quelles méthodes l'Union européenne et les États-Unis combattent le racisme dans leurs pays, et comment les droits des populations autochtones sont protégés en Amérique et en Océanie. L'Inde est engagée dans un processus auquel participent les institutions démocratiques et la société civile, afin d'assurer la protection de l'État de droit. Parmi les efforts réalisés par le Gouvernement en matière de protection des droits de l'homme et de développement économique, la représentante a notamment souligné l'instauration du dialogue avec les militants du nord-est du pays et le lancement d'un programme économique, ainsi que la tenue d'élection démocratiques au Pundjab et au Jammu-et-Cachemire. S'agissant des sanctions à l'encontre des forces de l'ordre ayant commis des violations des droits de l'homme, Mme Ghose a assuré que l'Inde prend toutes les mesures nécessaires afin que les auteurs de tels crimes soient punis.

M. LUIS ZUÑIGA (Nicaragua) a déclaré que le régime cubain possède dans ses lois une contradiction et une négation évidente des principes et des droits fondamentaux. «Nous sommes en présence d'une dictature légale et perpétuelle», a affirmé le représentant. Ainsi, selon les principes légaux en vigueur dans l'île, toutes les institutions de la nation, le Conseil d'État, le Conseil des Ministres et l'Assemblée du pouvoir populaire sont subordonnés à l'autorité du parti communiste. L'absence de structures démocratiques s'étend aussi au pouvoir judiciaire, qui est également soumis au parti communiste. Outre l'interdiction absolue de toute initiative politique, le régime cubain a donné un caractère légal à ses injustices grâce à un code pénal qui l'autorise à réprimer la dissidence politique pacifique et l'activisme de défense des droits de l'homme. Au moins sept articles du code pénal définissent les supposés délits passibles de peine de mort, a-t-il ajouté. À cet égard, le représentant a attiré l'attention de la Commission sur les cas de Humberto Real Suárez, condamné à mort, et de Walter Van der Deer, qui risque d'encourir le même sort.

Qu'il y ait des cas d'assassinats en masse ou d'exécutions par peloton dans un pays comme Cuba qui ne connaît pas de conflit civil ni de guérilla, est injustifié et intolérable et démontre un état de répression et de cruauté hautement condamnables. Le représentant a par ailleurs dénoncé la discrimination offensante que constitue l'existence d'un double système de santé, l'un pour le peuple, et l'autre pour les étrangers et l'élite du parti. Le problème de Cuba n'est pas celui d'un affrontement politique avec les États-Unis, contrairement à ce que le régime cubain veut faire croire à l'opinion publique mondiale, a déclaré le représentant du Nicaragua. Le problème se trouve entre le peuple et le régime qui l'opprime depuis 38 ans, un régime qui s'est approprié la nation et a éliminé tous les droits, a-t-il ajouté.

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M. MUNIR AKRAM (Pakistan) a souligné la corrélation directe qui existe entre la paix et la sécurité internationales et le respect des droits de l'homme. Il s'est dit préoccupé par les situations en Bosnie-Herzégovine et en Palestine. En Bosnie-Herzégovine, l'accord de paix doit être mis en oeuvre de bonne foi et les personnes responsables de crimes de guerre doivent être traduites devant le Tribunal pénal international. D'autre part, toute violation des droits de l'homme telle que la décision de créer de nouvelles colonies de peuplement ne peut que retarder le processus de paix au Moyen-Orient.

Le représentant pakistanais a déclaré que le peuple du Cachemire a, au cours des sept dernières années, subi une répression féroce pour avoir voulu exercer son droit à l'autodétermination. Constatant l'échec des tentatives menées notamment par les Nations Unies pour normaliser la situation au Cachemire, il a souligné que l'armée indienne est toujours déployée en grand nombre dans cette vallée. Il a rappelé que le CICR n'a pas pu accéder librement aux centres de détention. S'agissant des prétendues élections qui ont été organisées par l'Inde en mai et septembre 1996, il a affirmé qu'il y avait, durant ce processus électoral, un soldat indien pour chaque votant au Cachemire. En revanche, aucun observateur international n'a pu assister à ces élections. Un «régime fantoche» a donc été installé par l'Inde qui essaie de le faire passer pour représentatif d'un peuple opprimé dont elle occupe en fait le territoire. Le représentant pakistanais a affirmé l'engagement de son pays à poursuivre un dialogue de bonne foi sur le Jammu-et-Cachemire et à normaliser ses relations avec l'Inde. À cet égard, il a rappelé que le Ministre des affaires étrangères du Pakistan s'est rendu à New Delhi le mois dernier pour participer à des négociations. «Toute solution au Cachemire doit se fonder sur la volonté librement exprimée du peuple du Jammu-et-Cachemire» a souligné le représentant pakistanais. Il a précisé qu'hier, l'Inde et le Pakistan ont décidé de poursuivre les pourparlers à Islamabad. Il a espéré que ce dialogue permettra d'adopter des mesures qui feront cesser les violations des droits de l'homme au Cachemire. La question clef en litige est le droit à l'autodétermination au Cachemire, a-t-il souligné.

M. HASSAN WIRAJUDA (Indonésie), à mis l'accent, au nom des pays membres de l'Organisation de la Conférence islamique, sur la situation actuelle dans les territoires arabes occupés et en Bosnie-Herzégovine. Il a souligné que la vie des Palestiniens dans les territoires occupés est à nouveau dominée par la peur en raison de la violence aveugle exercée par les autorités israéliennes. Est-ce là la paix dont nous parlions à Madrid, a demandé le représentant, et devons-nous laisser sans rien dire les violations des droits de l'homme prendre le pas sur l'histoire ? L'OCI demande à la Commission de mettre en place une procédure renforcée par laquelle elle exigerait d'Israël de mettre un terme au recours systématique à la force et qu'il cesse immédiatement la construction de la colonie juive de peuplement à Jabal abu Ghneim.

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Pour ce qui est de la Bosnie-Herzégovine, l'OCI est gravement préoccupée par la violation du droit au retour et de la liberté de mouvement des personnes déplacées ainsi que des allégations d'évictions forcées. Le représentant a noté qu'en dépit de l'évolution positive qu'a connu l'application des Accords de Dayton, des difficultés subsistent quant à l'arrestation de criminels de guerre. L'OCI rappelle à cet égard qu'il est très important d'établir une distinction très nette entre les victimes et les agresseurs et que punir les victimes en même temps que leurs agresseurs ne fera que retarder le processus de reconstruction en Bosnie-Herzégovine.

M. JACOB SELEBI (Afrique du Sud) s'est déclaré conscient qu'il reste encore une immense tâche à accomplir pour que la jouissance des droits de l'homme devienne une réalité pour toute la population en Afrique du Sud. Il a souligné qu'aucun pays n'est parfait en matière de droits de l'homme et que personne ne saurait s'arroger le monopole de la sagesse à cet égard. Le représentant a mis l'accent sur quatre facteurs qui ont un impact négatif sur les droits de l'homme : les différents niveaux de pouvoir dans un pays, le silence face aux violations des droits de l'homme, le terrorisme et le racisme. Dans certaines situations de violations, une partie au conflit, généralement le Gouvernement, est en position de force, comme en Israël, au Nigéria, au Myanmar et au Soudan. En ce qui concerne Israël, il s'est dit attristé de la détérioration du processus de paix et a demandé le respect des engagements pris. La situation au Nigéria est également une grave source de préoccupation et le Gouvernement nigérian est instamment prié de libérer tous les prisonniers politiques et de respecter les normes internationales en matière de droits de l'homme. Le Gouvernement du Myanmar est prié d'engager un dialogue avec tous les dirigeants politiques et de mettre fin aux exécutions extrajudiciaires, au meurtre de civils, aux tortures et aux arrestations arbitraires. Au Soudan, l'Afrique du Sud demande à toutes les parties au conflit de parvenir à un règlement négocié.

Le représentant a par ailleurs souligné que la Commission doit se garder d'utiliser les différences culturelles et religieuses comme prétexte à la violation des droits de l'homme. À cet égard, les différentes parties concernées en Afghanistan sont appelées à respecter les droits de l'homme et les libertés fondamentales, notamment les droits des femmes. À Chypre, les résolutions du Conseil de sécurité doivent être appliquées et l'occupation doit prendre fin. Dans la région des Grands Lacs, c'est le silence qui est partiellement responsable des événements tragiques du Rwanda, du Burundi et du Zaïre. Le Gouvernement d'Afrique du Sud collabore à l'élaboration d'une solution à la crise dans cette région, a souligné le représentant. Par ailleurs, l'Afrique du Sud observe avec inquiétude une recrudescence des actes de terrorisme, y compris le terrorisme d'État, et condamne de tels actes de terrorisme à l'encontre de la population civile. Enfin, face au racisme, la communauté internationale doit prendre des mesures concrètes contre toutes les formes de ce fléau, notamment lorsqu'il vise les migrants, les minorités et les étrangers, a affirmé le représentant.

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M. BORIS S. KRYLOV (Fédération de Russie) a affirmé que, dans certaines régions du monde, l'isolement national est un culte; le nationalisme agressif est largement répandu. Rappelant notamment que l'an dernier, pour la première fois de son histoire, la Russie a démocratiquement réélu un Chef de l'État, il a estimé que la tâche urgente à laquelle le pays est désormais confronté consiste à améliorer le système de contrôle civil sur les activités des organes de l'État. Il a reconnu que les réformes démocratiques dans le pays s'accompagnent de conséquences telles que le déclin de la production et le retard dans le paiement des salaires et des pensions. La Russie est en train d'harmoniser sa législation pour la rendre conforme aux normes du Conseil de l'Europe que le pays a rejoint l'an dernier. Un projet de loi visant à accorder aux particuliers le droit de déposer plainte devant la Commission européenne des droits de l'homme sera présenté au Parlement russe. Le représentant a souligné que, depuis août 1996, son pays a adhéré au moratoire sur l'exécution de la peine de mort. Le 28 février dernier, le Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie a signé le Protocole VI de la Convention européenne sur l'abolition de la peine capitale. Cependant, a souligné le représentant russe, il faudra déployer d'importants efforts pour persuader le Parlement et l'opinion publique que la peine de mort n'est pas le meilleur moyen d'éliminer les crimes graves.

Si les hostilités ont cessé en Tchétchénie en 1996, beaucoup de problèmes subsistent a poursuivi M. Krylov. Des négociations sont en cours et la confiance s'instaure peu à peu. Mais ce processus est fragile. Il pourrait être dangereux d'accélérer artificiellement les négociations. Le principe constant auquel se réfère la Fédération de Russie à cet égard est celui selon lequel tout problème lié aux structures internes de la Russie doit être réglé conformément à la Constitution russe. Le représentant russe a par ailleurs affirmé avoir des difficultés à saisir la raison pour laquelle, d'un côté, on examine scrupuleusement les problèmes de son pays et, de l'autre, on n'adopte pas une attitude similaire pour les problèmes des pays voisins.

Neuf ans après le retrait des troupes soviétiques d'Afghanistan, d'anciens membres des services soviétiques restent en captivité en Afghanistan. La Fédération de Russie exhorte toutes les parties, et en premier lieu le mouvement taliban, de cesser les hostilités militaires et de commencer à rechercher une large réconciliation nationale. Elle est profondément préoccupée par les informations faisant état de violence à grande échelle exercée par les taliban contre des civils dans le nord de l'Afghanistan. La violence à grande échelle en Afghanistan exige de la Commission qu'elle utilise toute son expérience pour envisager de mettre sur pied une opération des droits de l'homme en Afghanistan.

Le représentant russe a affirmé avoir l'impression que l'attention spéciale accordée par la communauté internationale au problème serbe l'a empêchée de percevoir l'émergence d'une autre crise dans les Balkans.

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Il a également demandé aux parties bosniaques d'utiliser les chances de paix créées par la communauté internationale. S'agissant du Moyen-Orient, la Fédération de Russie espère que la recherche d'une solution mutuellement acceptable de toutes les questions litigieuses dans le cadre des principes de Madrid et des accords signés permettra d'améliorer l'atmosphère des relations israélo-arabes. S'agissant de la région des Grands Lacs, il a demandé à toutes les parties impliquées de cesser le feu et de s'engager dans un dialogue politique. En ce qui concerne la situation des droits de l'homme à Chypre, il s'est dit convaincu que les progrès sont impossibles sans un accord de toutes les parties au conflit sur des principes de règlement de base.

Si «notre préoccupation vis-à-vis de la situation de la population russophone s'explique souvent par des raisons politiques», a poursuivi le représentant russe, il n'y a pas de raisons politiques à parler de 300 000 russophones en Estonie et de 700 000 russophones en Lettonie, nés dans ces pays avant qu'ils ne déclarent leur indépendance et désormais privés de nombreux droits politiques, civils, sociaux et économiques. «Ce qui est le plus incroyable, c'est que la Lettonie et l'Estonie, qui ont souffert, selon leurs propres déclarations officielles, du totalitarisme soviétique, utilisent maintenant les mêmes méthodes pour bafouer les droits de peuples autochtones», a déclaré le représentant.

M. JOSÉ AUGUSTO LINDGREN ALVES (Brésil) a rappelé que ce sont les pays en développement qui sont à l'origine de la création, par les Nations Unies, de mécanismes importants de contrôle de violations des droits de l'homme. Les mécanismes de contrôle non conventionnels, qu'il s'agisse des rapporteurs spéciaux ou des rapporteurs thématiques, sont les seuls instruments faisant autorité dont la Commission dispose, à la fois pour connaître des situations de violations des droits de l'homme et pour y remédier, a-t-il précisé.

Le représentant a expliqué que ce rappel est rendu nécessaire par deux états de fait. D'une part, parce que l'on prétend souvent que le système international de protection des droits de l'homme privilégie la surveillance au détriment de la coopération et d'autre part parce que l'on dit que l'on surveillerait plus les pays en développement que les pays développés. Le Brésil ne prétend pas que la désignation de rapporteurs spéciaux soit exempte de considérations politiques ni que les informations présentées par ceux-ci soient toujours très agréables à entendre, mais rappelle que de nombreux pays en développement, notamment en Amérique centrale, ont eu à pâtir de cette réalité mais s'avancent désormais, grâce à l'assistance internationale, vers la démocratie. En choisissant de ne pas évoquer des situations particulières de violations des droits de l'homme, le Brésil ne tente pas d'éviter de parler du thème à l'examen mais au contraire souligne l'importance de tous les éléments du système de protection des droits de l'homme des Nations Unies, y compris en ce qui concerne l'examen de situations particulières. Il a souligné, à cet égard, l'importance de la solidarité internationale.

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M. ROSS HYNES (Canada) a déclaré que la Commission a deux responsabilités fondamentales, d'une part, d'élaborer des normes sur les droits de la personne et des arrangements institutionnels, et d'autre part, de trouver des moyens efficaces de mettre ces principes et ces arrangements en pratique. À cet égard, le Canada considère la coopération comme le meilleur moyen de régler les problèmes de droits de l'homme. Le représentant a déploré que certains gouvernements refusent de s'engager dans une véritable coopération avec la communauté internationale. Ainsi, la répression impitoyable du mouvement démocratique en Birmanie et une nouvelle crise humanitaire à la frontière entre ce pays et la Thaïlande menacent sérieusement la sécurité dans la région. Au Soudan, des combats acharnés et des attaques à la bombe sans discernement causent de graves souffrances, alors que l'esclavage, l'intolérance religieuse et la discrimination contre les femmes restent impunis. Au Nigéria, l'absence de gouvernement représentatif a fait disparaître l'application régulière de la loi et la primauté du droit. En Iraq, le Gouvernement n'a rien fait pour mettre un terme aux violations généralisées des droits de la personne et à dénié toute collaboration au Rapporteur de la Commission. En Iran, où la condamnation à mort de deux baha'is a été confirmée et où l'écrivain Faraj Sarkoohi a été incarcéré, rien ne laisse croire à une amélioration de la situation des droits de la personne.

Le Canada estime que les gouvernements ne peuvent honorer leurs obligations en matière de respect des droits humains en faisant un choix parmi diverses valeurs humaines ou entre développement économique et liberté politique. Le Canada est sérieusement préoccupé de l'intolérance dont sont encore l'objet les dissidents et des restrictions de la liberté d'expression, d'association et de culte en Chine en général, et au Tibet en particulier. Des motifs de préoccupation subsistent également en Indonésie, où certains cas de poursuites, comme celles de syndicalistes, semblent violer la liberté d'expression. Le Canada espère que la tendance à la détérioration de la situation des droits de l'homme au Timor oriental sera renversée par les autorités chargées de la sécurité dans cette région. Le Gouvernement du Pakistan est encouragé à combattre l'intolérance religieuse en abolissant les lois sur le blasphème et les décrets de hadood. Le Canada presse le Gouvernement cubain d'assortir les progrès réalisés en matière de droits sociaux et économiques d'une véritable ouverture sur les droits civils et politiques. S'agissant de la région des Grands Lacs, le Canada s'est dit inquiet d'allégations de graves violations des droits humains, y compris d'homicides et d'exécutions sommaires. Il condamne la violence et la terreur dirigées à l'encontre des civils et des victimes innocentes au Burundi. Au Zaïre, les parties au conflit sont engagées à trouver une solution pacifique par entente négociée. En Ex-Yougoslavie, la comparution devant le Tribunal pénal international de présumés criminels de guerre est sujette à des retards inacceptables. En Afghanistan, les droits humains demeurent sérieusement bafoués et les femmes subissent une répression inimaginable. Dans plusieurs parties de l'Inde, les mauvais traitements infligés aux prisonniers détenus par des policiers ou des militaires sont des problèmes persistants.

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Sur le continent américain, le Gouvernement colombien est exhorté à démanteler les groupes paramilitaires et à protéger la population civile contre les graves violations des droits humains par la guérilla. Au Pérou, le Canada condamne les actions du MRTA qui a investi la résidence du Japon à Lima et exhorte toutes les parties à chercher une solution rapide et pacifique au problème. Au Sri Lanka, le Canada condamne les violations de droits humains commises par les Tigres de libération de l'Eelam tamoul. Pour ce qui est de la Turquie, le Canada se réjouit des décisions du gouvernement d'écourter la période maximale permise pour une détention sans jugement et de créer un comité de coordination, de haut niveau, chargé des droits humains. En ce qui a trait aux droits de la personne, aucun gouvernement ne jouit du monopole de la moralité suprême et aucun pays ne peut se targuer de ne pas avoir de problèmes, a conclu le représentant.

M. JUÁN ANTONIO FERNÁNDEZ PALACIOS (Cuba) a fait valoir que l'orateur du Nicaragua, un «terroriste patenté», a prétendu dénoncer les violations des droits de l'homme à Cuba mais n'a en fait que tenté de raviver la triste mémoire d'un dictateur, Luís Somoza. L'attaque menée contre Cuba il y a 36 ans, par la CIA installée au Nicaragua, a été déjouée en 72 heures dans la baie des Cochons et est restée dans l'histoire comme l'événement marquant la première déroute de l'impérialisme américain dans l'hémisphère occidental. Le peuple nicaraguayen et le peuple cubain sont des frères, unis par des aspirations et des idéaux communs. Des milliers de médecins cubains, de professeurs et de conseillers ont aidé le pays à se reconstruire après la chute de Somoza et nous ne pouvons que ressentir profondément la trahison que vient de faire le gouvernement du Nicaragua, a déclaré le représentant.

M. Fernández Palacios a par ailleurs dénoncé l'arrogance de certains pays, au sein de cette Commission, qui critiquent des États et offrent des certificats d'impunité aux autres. Il a indiqué que personne mieux que les pays en développement ne connaît la signification réelle des valeurs universelles des droits de l'homme. Chez nous, la lutte contre le colonialisme a été remplacée par la lutte contre la pauvreté, l'analphabétisme et la faim, a-t-il dit. On essaie ici de sataniser certains pays et d'en faire les parias de la communauté internationale tandis que d'autres, ailleurs, violent les droits de l'homme en toute impunité. Dans les rapports de la Commission, les riches ne commettent jamais de violations, elles sont toutes commises par les pauvres, a-t-il ironisé.

Le représentant cubain a attiré l'attention, en particulier, sur la situation dans les pays de l'Union Européenne, où 18,1 millions de personnes sont sans emploi et 300 000 autres croupissent dans les prisons, au milieu d'un racisme pratiquement institutionnalisé. Il a indiqué que le Canada a connu un développement économique effréné qui n'a pas bénéficié aux populations indigènes, dont près de 800 000 seront condamnés à vivre dans l'extrême pauvreté si l'on ne fait rien pour remédier à la situation.

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Il s'est aussi préoccupé du sort des aborigènes en Australie. Le rêve américain n'existe pas et n'est plus qu'un cauchemar tragique pour des dizaines de millions d'Afro-américains, de Latino-américains et d'Asiatiques, a poursuivi le représentant. Aux États-Unis, un enfant sur cinq vit en deçà du seuil de pauvreté, chiffre qui passe à 40% pour les enfants noirs et hispaniques. Plus grave encore, un million 200 000 personnes peuplent les prisons américaines faisant des États-Unis le pays où le taux d'emprisonnement est le plus élevé au monde, a-t-il dit en assurant que si cette tendance continue, on estime qu'en l'an 2021, la majorité absolue des hommes afro-américain entre 18 et 40 ans seront en prison. L'élimination de ce genre de violations doit être l'objectif des Nations Unies. L'Organisation peut compter, à cet égard, sur la coopération pleine et entière de Cuba.

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