LA COMMISSION DE LA CONDITION DE LA FEMME PLAIDE EN FAVEUR D'UN RENFORCEMENT DU ROLE DE LA FEMME DANS LES EFFORTS DE PAIX
Communiqué de Presse
FEM/928
LA COMMISSION DE LA CONDITION DE LA FEMME PLAIDE EN FAVEUR D'UN RENFORCEMENT DU ROLE DE LA FEMME DANS LES EFFORTS DE PAIX
19970313 La Commission de la condition de la femme a poursuivi ce matin sa table ronde sur les femmes et la prise de décision, dans le cadre de son examen du suivi de la quatrième Conférence mondiale sur les femmes. Elle a procédé à un dialogue entre délégations sur ce thème.La question des mesures qu'il conviendrait de prendre pour accélérer concrètement le processus qui vise à assurer la parité des sexes au niveau de la prise de décision a été au coeur des discussions. De nombreuses délégations ont, à cet égard, évoqué le rôle central que les femmes ont à jouer dans le contexte des efforts de paix, autant dans le domaine de la prévention des conflits, que dans celui du rétablissement de la paix et de son maintien. Dans un autre domaine, elles ont également débattu longuement de la question controversée des systèmes de quotas en tant que moyen de renforcer la présence des femmes au niveau de la prise de décision. Les délégations en faveur de ces systèmes ont expliqué qu'à la lumière du déséquilibre entre hommes et femmes dans la représentation politique, des mesures urgentes s'imposent. En ce sens, l'application temporaire du principe du quota s'avère nécessaire s'il est soutenu par un renforcement de la formation à l'intention des femmes candidates. Les autres représentants ont, en revanche, avancé que l'instauration d'un tel système risque de pénaliser les femmes. Le développement de leur compétence et l'établissement de conditions favorables à leur entrée dans la vie politique renforcera naturellement leur présence dans les organes élus ou décisionnels.
La Commission se réunira de nouveau cet après-midi, à 15 heures. Elle poursuivra sa table ronde sur les femmes et l'économie, entamée hier, mercredi 14 mars, dans l'après-midi.
TABLE RONDE SUR LA FEMME ET LA PRISE DE DECISION (suite)
Dialogue entre les représentants des gouvernements
Plusieurs intervenants, et notamment les représentants de la Namibie, du Costa Rica, de l'Equateur, de la Finlande, de l'Argentine, ont mis l'accent sur l'importance qu'il faut accorder au renforcement du rôle de la femme dans le contexte des efforts de paix, de la prévention des conflits, du rétablissement de son maintien. La représentante de la Namibie a évoqué le rôle essentiel que les femmes ont joué dans ce contexte depuis l'accession de son pays à l'indépendance, il y a sept ans. En 1989, le Président de la Namibie, alors qu'il devait préparer la population au retour des réfugiés et à leur réintégration, mais aussi à celle des combattants dans la société, a veillé à assurer la pleine participation de la femme à cette entreprise. Le succès du processus de paix en Namibie est en grande partie dû au rôle central que la femme a joué dans ce contexte. Selon la représentante, il conviendrait d'examiner de plus près les expériences fructueuses de ce type dans le monde, afin d'identifier les moyens les plus appropriés de s'assurer que la femme puisse jouer pleinement son rôle central en tant qu'agent de la paix. Elle a ajouté qu'une conférence sur la question avait eu lieu, dans son pays, récemment, et que les résultats mériteraient d'être examinés par la Commission. La représentante de la Finlande a, quant à elle, évoqué une réunion du même type organisée récemment par le Conseil de l'Europe à Helsinski, et dont les recommandations mériteraient également d'être examinées.
La représentante du Costa Rica a appuyé l'idée selon laquelle il conviendrait de se pencher plus avant sur les moyens de renforcer la participation des femmes aux efforts de paix, ainsi que ceux qui permettraient de mettre fin au cercle vicieux actuel du détournement des ressources du développement à des fins militaires, et à la gestion de crises humanitaires accablantes. Les représentants de la Syrie, du Liban, ainsi que la représentante de l'Observateur de la Palestine, ont mis en exergue la nécessité d'accorder toute l'attention qu'elle mérite à la situation dramatique des femmes subissant les effets de l'occupation étrangère et, en particulier, le sort de celles vivant dans les parties de leur territoire occupées par l'armée d'Israël. La représentante de l'Observateur de la Palestine a fait part de l'attention que l'Autorité palestinienne accordait à la promotion de la femme au niveau de la prise de décision, et du rôle central que les femmes jouent dans le cadre du processus de paix, mais a considéré que l'avenir de cette progression dépend aujourd'hui de l'issue du processus de paix. La représentante d'Israël, a, pour sa part, souligné que les conditions de vie de la femme arabe dans son pays s'était fortement améliorée depuis la création de l'Etat d'Israël et ce, grâce aux mesures prises par les gouvernements successifs en faveur de ces dernières, et en particulier l'adoption de lois protégeant leurs droits, telles que la loi élevant l'âge minimal du mariage des filles à 17 ans, la loi sur l'enseignement obligatoire
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des filles et des garçons jusqu'à 16 ans, celle interdisant la polygamie et d'autres lois garantissant leurs droits sociaux, tels que celui à recevoir des allocations familiales ou le droit à des congés de maternité. A cet ensemble de lois, s'ajoutent en outre toute une série de mesures qui ont été prises afin d'accélérer la promotion de la femmes arabe dans la société, tels que l'organisation de cours de rattrapage scolaire et de formation professionnelle.
Au cours de ce dialogue, les interventions ont une nouvelle fois porté sur les moyens d'accélérer le processus d'intégration des femmes dans les sphères décisionnels. Ainsi, la représentante de la France a annoncé que la Chambre des députés de son pays a tenu hier un débat sur la représentativité des femmes qui n'occupent pour le moment que 6% des sièges au Parlement. Dans ce cadre, le Premier Ministre s'est prononcé en faveur du principe des quotas, comme solution temporaire pour une période de dix ans, arguant que c'est une mesure nécessaire au rééquilibrage de la représentativité entre les hommes et les femmes. Pour éviter que le mécanisme des quotas ne se retourne contre les femmes, la représentante a plaidé pour la constitution de "de viviers de femmes" aptes à prendre des responsabilités politiques. Il faut, pour ce faire, entamer des actions pour vaincre les réticences des femmes elles-mêmes, créer des réseaux et améliorer leur formation. Il faut également mener une action auprès du personnel politique masculin qui se sent menacé et qui considère encore qu'"il est plus facile de céder la place à une femme dans l'autobus qu'au Parlement".
A cette fin, il conviendrait, par exemple, d'envisager le partage du pouvoir en limitant le cumul des mandats, d'introduire un critère de participation des femmes dans le financement par l'Etat des partis politiques et de faire pression auprès des électeurs. Les représentantes de l'Argentine et du Brésil se sont également prononcées en faveur du quota pour une période provisoire en expliquant que l'introduction de cette mesure, dans leur pays, a contribué à renforcer la présence des femmes dans les instances politiques. Le succès d'un tel mécanisme, ont-elles souligné, demeure toutefois tributaire de la qualité de la formation offerte aux femmes. Etayant ces propos, la représentante de la Guinée a expliqué que dans son pays, la règle des quotas s'est révélée infructueuse en raison du taux d'analphabétisme élevé au sein de la population féminine. Partant, la nouvelle politique de promotion de la femme s'est plutôt attachée à mettre l'accent sur la formation et sur l'accession de la femme au pouvoir économique tant il est vrai que pouvoir économique et pouvoir politique sont étroitement liés. Sur ce point, la représentante du Canada a fait valoir que le manque de ressources constitue souvent un des principaux obstacles à la participation des femmes au pouvoir politique. C'est pourquoi, les partis politiques de son pays ont procédé à la désignation de fonds pour financer les campagnes électorales des femmes.
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Intervenant, à son tour, la représentante du Mali a estimé que la question de l'accession des femmes à la prise de décision politique doit s'analyser à deux niveaux. Le premier niveau concerne la sphère administrative dont l'accès se fait par nomination. Dans ce contexte, en effet l'éducation et la formation se dégagent comme les éléments susceptibles de créer les conditions objectifs du changement. Il n'en va pas de même pour le deuxième niveau qui concerne l'accession aux organes d'élus. Ici, a-t-elle avancé, la formation ne saurait suffire sans une sensibilisation des populations en ce qui concerne le bien fondé de la présence des femmes dans la vie politique. Il faut en outre procéder à une éducation civique et politique des femmes et à la mise en place de programmes de formation à l'intention des femmes candidates. Cette politique qui a été lancée au Mali a déjà porté ses fruits.
Pour la représentante de la République dominicaine, la clé d'une participation plus active des femmes à la prise de décision politique réside d'abord dans l'apprentissage de la négociation et de la concertation, à l'instar des hommes. La représentante de la Malaisie a, elle, appelé les femmes à cesser de "crier" à la discrimination en imputant l'absence des femmes dans les plus hautes sphères politiques au champ restreint de leur programme. Elles doivent apprendre à séduire le plus grand nombre d'électeurs en dépassant les préoccupations spécifiquement féminines et s'intéresser à toutes les questions de la vie politique, économique et sociale.
Poursuivant sur ce thème, la représentante du Togo, soutenue par le Japon, a souligné que la revendication des femmes ne doit pas se limiter à une représentativité politique mais s'élargir à toutes les sphères déterminant la "construction des nations". Insistant également sur l'importance d'une formation adéquate et l'attribution de moyens économiques appropriés, elle a, par ailleurs, mis l'accent sur la nécessité d'une meilleure répartition des tâches au foyer pour libérer la femme et lui permettre d'acquérir une certaine compétitivité sur le marché du travail. Etayant ces propos, la représentante de la Chine a cité l'économie politique, la gestion et le développement économique comme domaines où les femmes doivent également se distinguer. Les représentants de la Turquie et de la République islamique d'Iran ont, quant à eux, insisté sur l'importance qu'il convenait d'accorder aux campagnes de sensibilisation de l'opinion publique avec le concours des médias dans le cadre des efforts visant à susciter un changement d'attitudes dans les sociétés.
Certains intervenants ont attiré l'attention sur la parité au sein de l'Organisation. Sur ce thème, la représentante de l'Australie, soutenue par les Pays-Bas, s'est félicitée de l'engagement personnel du Secrétaire général à oeuvrer dans le sens d'une véritable parité. Elle a appelé la Commission à renouveler sa détermination à voir se réaliser l'objectif de l'attribution de 50% des postes de directions aux femmes d'ici l'an 2000. La représentante a
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également salué l'attachement de M. Annan à créer un environnement favorable à l'égalité des sexes au sein de l'Organisation en prenant note avec satisfaction de la nomination, au rang de Sous-Secrétaire générale, d'une Conseillère spéciale du Secrétaire pour les questions sexospécifiques et de la promotion de la femme.
Les interventions ont également porté sur la manière de quantifier les progrès dans la réalisation de la parité entre hommes et femmes. La représentante de la Finlande a estimé qu'il serait profitable de mener des études comparatives d'expériences de pays en matière de politique de promotion de la participation de la femme au processus de prise de décision dans les divers domaine de la vie sociale. Elle a en particulier souligné la nécessité de procéder plus avant à un examen plus approfondi des efforts faits dans ce sens pour ce qui est des mécanismes et de la pratique électorale. Le travail de l'Union interparlementaire constitue selon elle une excellente base pour l'examen de cette question.
La représentante de la Suède, prenant la parole au non des pays membres de l'Union européenne, évoquant diverses mesures favorisant l'accélération de la progression des femmes jusqu'au niveau de la prise de décision, a notamment insisté sur l'importance que revêt l'établissement de mécanisme de contrôle pour surveiller périodiquement les avancées accomplies dans ce domaine, comme c'est le cas dans son pays. Elle a également indiqué que son pays préparait actuellement son rapport national aux Nations Unies sur la mise en oeuvre des recommandations de la Conférence de Beijing, et souligné combien il était essentiel d'élaborer des stratégies concrètes afin d'atteindre les objectifs visés.
S'agissant des mécanismes de contrôle évoqués par la représentante de la Suède, mais cette fois, au niveau international, la représentante des Etats-Unis a suggéré que Mme Angela King envisage de rassembler les femmes décideurs au sein du système des Nations Unies afin de réfléchir ensemble à une stratégie concrète pour accélérer la progression des femmes jusqu'au niveau de la prise de décision dans l'Organisation.
Observations des experts
L'Experte de la Pologne a plaidé pour que les femmes aient leur place dans les négociations sur les questions comme la violence ou la famine. Elle a affirmé que la situation en Bosnie-Herzégovine, au Rwanda, ou, maintenant, dans la région des Grands Lacs aurait été moins dramatique si les femmes avaient été en mesure de participer aux négociations dès les premiers stades. Cet argument milite en faveur des quotas qui ne doit pas être vu comme un principe limitatif dans la mesure où l'objectif des femmes doit être de s'assurer au moins 40% de représentation dans les organes élus. La parité y est extrêmement importante, a-t-elle ajouté en concluant que le système
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des quotas doit s'appliquer à la préparation des listes électorales et être stimulé par d'autres instruments comme des aides financières. Prenant le contre-pied de cette argument, l'experte de l'Espagne a estimé que le principe des quotas ne peut être envisagé comme une solution de fond. Elle s'est plutôt prononcée en faveur d'une amélioration de la formation professionnelle et d'une éducation dans le cadre familiale. Sans l'imposition de quotas, l'Espagne compte aujourd'hui 50% de filles inscrites dans les universités et quatre femmes au Gouvernement, qui compte 11 ministères. Ces femmes n'ont pas hérité de portefeuilles non prioritaires, comme on pourrait le croire, puisqu'elles dirigent la justice, l'environnement, l'éducation et l'agriculture.
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