SG/SM/6163

LE TRAITÉ VISANT L'INTERDICTION DES ARMES NUCLÉAIRES EN AMÉRIQUE LATINE EST UN DES PILIERS DU RÉGIME DE NON-PROLIFÉRATION À L'ÉCHELLE MONDIALE, DÉCLARE LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL

26 février 1997


Communiqué de Presse
SG/SM/6163
DC/2575


LE TRAITÉ VISANT L'INTERDICTION DES ARMES NUCLÉAIRES EN AMÉRIQUE LATINE EST UN DES PILIERS DU RÉGIME DE NON-PROLIFÉRATION À L'ÉCHELLE MONDIALE, DÉCLARE LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL

19970226 On trouvera ci-après le texte du message de M. Kofi Annan, dont il a été donné lecture, en son nom, à Mexico, le 14 février, par M. Hans Blix, Directeur général de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), à l'occasion du trentième anniversaire de l'ouverture à la signature du Traité visant l'interdiction des armes nucléaires en Amérique latine et dans les Caraïbes (Traité de Tlatelolco):

Nous commémorons aujourd'hui une manifestation importante de la volonté générale de mettre fin à la menace que les armes nucléaires font peser sur le monde : le Traité de Tlatelolco, l'un des piliers du régime de non- prolifération nucléaire à l'échelle mondiale.

Lorsque le Traité a été ouvert à la signature à Mexico, il y de cela trente ans, U Thant a déclaré que les pays d'Amérique latine et des Caraïbes pouvaient légitimement s'enorgueillir du résultat de leur propre initiative et de l'aboutissement de leurs propres efforts. Je suis fier de reprendre à mon compte les paroles de mon éminent prédécesseur, et de louer à mon tour la contribution concrète apportée par cette région à la réalisation de l'un des objectifs majeurs de l'ère nucléaire : l'avènement d'un monde exempt d'armes nucléaires.

Il y a trente ans, l'Est et l'Ouest étaient prisonniers de la guerre froide et d'une course à l'armement dont les armes nucléaires et classiques étaient les enjeux. Les craintes suscitées par la crise qu'ont traversée les Caraïbes au début des années 60 n'étaient pas oubliées, et chacun avait assurément conscience que le déclenchement d'une guerre nucléaire, ou même d'un conflit nucléaire localisé, serait une catastrophe pour la planète toute entière — pour les États dotés d'armes nucléaires comme pour les autres.

De cette terreur est née la volonté de dénucléariser de vastes régions du monde. De même qu'ils s'étaient déjà défaits de leurs liens coloniaux, les États non dotés d'armes nucléaires ont cherché et trouvé un moyen de déclarer qu'ils entendaient bien se tenir à l'écart de la course aux armements nucléaires. Constatant l'application réussie du principe de la dénucléarisation aux zones inhabitées de l'Antarctique et à l'espace, ils ont proposé la création en Amérique latine et dans les Caraïbes d'une zone exempte d'armes nucléaires.

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L'Assemblée générale des Nations Unies a entériné cette idée en 1963. Quatre années d'intenses négociations ont suivi, sous la direction avisée d'Alfonso Garcia Robles, éminent diplomate mexicain, prix Nobel de la paix. Les travaux ont abouti au traité historique interdisant les essais, l'utilisation, la fabrication, la production ou l'acquisition d'armes nucléaires dans une vaste zone géographique où vivent des centaines de millions d'habitants.

Ce traité est désormais en vigueur dans la quasi-totalité des États parties, c'est-à-dire pratiquement tous les États de la région. Les cinq États dotés d'armes nucléaires se sont engagés, dans les protocoles additionnels, à respecter le statut de la région, et à ne pas utiliser ni menacer d'utiliser des armes nucléaires contre les Parties contractantes.

Et puis, avec la création de l'OPANAL (Organisme pour l'interdiction des armes nucléaires en Amérique latine et aux Caraïbes), chargé de veiller à l'exécution des obligations, le Traité a ouvert une voie nouvelle, encourageant les Parties contractantes à intensifier la coopération interrégionale. Le Traité a aussi créé un lien sans précédent entre un organisme régional de surveillance, l'OPANAL, et l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), qui constituent ensemble le cadre institutionnel d'exécution et de vérification. L'adhésion juridique des parties aux accords de garantie a renforcé l'assurance et la conviction que les normes internationales d'utilisation de l'énergie nucléaire à des fins pacifiques sont effectivement reconnues.

Ce sont là des réalisations capitales. Il est tout aussi significatif que le Traité ait inspiré la création de zones exemptes d'armes nucléaires dans d'autres régions du monde, en vertu des traités de Rarotonga (pour le Pacifique Sud), de Bangkok (pour l'Asie du Sud-Est) et de Pelindaba (pour l'ensemble de l'Afrique). Ces zones ont certes des caractéristiques et des préoccupations propres, mais ceux qui les ont créées se sont largement inspirés de l'expérience et de l'exemple des pays d'Amérique latine et des Caraïbes. Plus de 110 États Membres de l'Organisation des Nations Unies sont parties à ces accords. Ils constituent, l'Antarctique y compris, un ensemble exempt d'armes nucléaires qui recouvre une région étendue et densément peuplée de l'hémisphère sud.

D'autres initiatives visent à créer de nouvelles zones exemptes d'armes nucléaires. Leur reconnaissance, si elles font l'objet d'un commun accord entre les États de la région et les autres États concernés, serait un atout pour la coopération régionale en matière de sécurité et marquerait une nouvelle étape de l'avènement d'un monde dénucléarisé.

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Nous sommes à l'aube d'un nouveau siècle et d'un nouveau millénaire. Alors que la guerre froide s'éloigne dans le passé, les nations en sont encore à repenser leurs besoins en fait de sécurité. Les réductions massives des stocks d'armes nucléaires ont fait de la fin de la guerre froide une réalité concrète. L'élimination des armes nucléaires, à laquelle aspire l'ensemble de l'humanité, est un objectif réalisable à long terme. Le régime de non- prolifération des armes nucléaires se trouve considérablement renforcé par la prorogation, pour une durée indéfinie, du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires et l'adoption et la signature par 140 États du Traité sur l'interdiction complète des essais nucléaires. Je saisis l'occasion qui m'est donnée ici pour engager tous les États signataires, en particulier les États dotés d'armes nucléaires, à respecter scrupuleusement, à compter d'aujourd'hui et jusqu'à l'entrée en vigueur du Traité, l'esprit dans lequel les interdictions y sont énoncées.

La situation s'est améliorée aussi en ce qui concerne d'autres armes de destruction massive. La Convention sur les armes chimiques entrera en vigueur le 29 avril prochain, et instituera une norme juridique internationale interdisant l'utilisation d'armes chimiques sous quelque forme que ce soit et imposant aux États de les éliminer totalement de leurs arsenaux. Je demande également instamment à tous les États, spécialement aux détenteurs déclarés d'armes chimiques (la Fédération de Russie et les États-Unis d'Amérique), de ratifier la Convention. Leur participation est essentielle à l'instauration d'un régime juridique solide et efficace aux fins du désarmement chimique. S'agissant des armes biologiques, les États parties à la Convention sur les armes biologiques étudient les moyens de donner davantage de poids à ce traité en y associant un système international de vérification.

Je me félicite de ces initiatives et les résultats obtenus jusqu'à présent me rendent optimiste. Pourtant, comme je l'ai indiqué récemment lors de la Conférence du désarmement, des incertitudes et de graves problèmes demeurent, tant sur le plan de l'armement nucléaire que sur celui des armes classiques, et il faut convenir d'un programme d'action en matière de sécurité internationale qui tienne compte de la rapide évolution du monde dans lequel nous vivons.

Bien que né de la terreur et alimenté par le scepticisme, le Traité de Tlatelolco est venu à maturité et est désormais un facteur de stabilité des relations internationales. La volonté de libérer le monde du péril nucléaire et des accumulations excessives d'armes classiques peut s'inspirer utilement de son élaboration et de son évolution. Je suis persuadé que le pragmatisme, le consensus, les mesures de confiance et la persévérance qui ont permis au Traité de Tlatelolco d'exister et de s'imposer nous permettront de nous acquitter concrètement de notre obligation de garantir la paix et la sécurité internationales dans toutes leurs dimensions.

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