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PAL/G/119

RÉUNION INTERNATIONALE DES ONG ET COLLOQUE DES ONG D'EUROPE SUR LA QUESTION DE PALESTINE: DÉBAT SUR JÉRUSALEM ET LES PALESTINIENS RÉFUGIÉS ET DÉPLACÉS

3 septembre 1996


Communiqué de Presse
PAL/G/119


RÉUNION INTERNATIONALE DES ONG ET COLLOQUE DES ONG D'EUROPE SUR LA QUESTION DE PALESTINE: DÉBAT SUR JÉRUSALEM ET LES PALESTINIENS RÉFUGIÉS ET DÉPLACÉS

19960903 Genève, 3 septembre -- La Réunion internationale des organisations non gouvernementales et le Colloque des organisations non gouvernementales d'Europe sur la question de Palestine ont examiné, ce matin, les questions relatives aux Palestiniens réfugiés et déplacés et à Jérusalem.

M. Rashid Khalidi, de l'Université de Chicago, a déclaré que les États- Unis ont permis que la résolution 194 de l'Assemblée générale relative aux réfugiés tombe dans l'oubli, préférant que les questions en suspens entre Israël et les Palestiniens fassent l'objet de négociations entre les parties. Il est d'autant plus difficile d'appliquer cette résolution, qui date de 1948, que, souvent, les maisons et les villages des réfugiés n'existent plus et que le nombre des réfugiés a été plusieurs fois multiplié.

M. Avishai Margalit, de l'Université hébraïque de Jérusalem, a estimé que le processus de négociation actuel consiste davantage à éviter la guerre qu'à négocier la paix. Le noeud du problème réside davantage dans les concepts d'honneur et d'humiliation que dans les questions techniques. C'est pourquoi les réfugiés dans les camps sont au centre de la question globale des réfugiés car ce sont eux qui sont humiliés.

Des participants ont ensuite procédé à un bref échange de vues sur la question des réfugiés.

M. David Andrews, ancien Ministre des affaires étrangères de l'Irlande, a déclaré qu'aujourd'hui, la communauté internationale doit convaincre le Gouvernement israélien de M. Benjamin Netanyahou que la voie qu'il suit n'est pas la bonne.

Intervenant sur la question de Jérusalem, M. Gershon Baskin, Directeur du Centre de recherche et d'information Israël-Palestine de Jérusalem, a déclaré que les Israéliens et les Palestiniens doivent se réunir pour faire valoir la vision d'une Jérusalem à la fois unie et partagée sous la devise: «Jérusalem unie, une ville, deux capitales». Les Palestiniens de Jérusalem doivent relever se présenter aux élections municipales de la ville afin de

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transformer les réunions du conseil municipal en véritable forum débattant de l'avenir de Jérusalem. M. Giorgos Dimitrakopoulos, Vice-Président de l'Association parlementaire pour la coopération euro-arabe, a attiré l'attention sur le fait que Rome pourrait peut-être servir de modèle à cet égard dans la mesure où elle est à la fois la capitale de l'État italien et celle de l'État du Vatican. M. Albert Aghazarian, de l'Université de Bir Zeit, a affirmé que Jérusalem est plus divisée que jamais et qu'il n'y a pas de communication à proprement parler entre les différentes parties de l'agglomération.

Plusieurs participants ont ensuite pris part à un échange de vues sur la question de Jérusalem.

La Réunion internationale des organisations non gouvernementales et le Colloque des organisations non gouvernementales d'Europe sur la question de Palestine reprendront leurs travaux en séance plénière demain matin, à 10 heures, pour débattre du thème principal de la réunion: «Édification de partenariats entre ONG en vue d'un règlement juste et global: définition des priorités et exécution de plans d'actions». Cet après-midi, trois ateliers d'ONG se réuniront, à partir de 15 heures, pour analyser les questions relatives, respectivement, aux colonies de peuplement israéliennes, à Jérusalem et à la situation des réfugiés.

Déclarations sur la question des réfugiés et déplacés palestiniens

M. RASHID KHALIDI, Directeur du Centre d'études internationales de l'Université de Chicago, a affirmé que, pour qu'une solution puisse être trouvée au problème des réfugiés, il sera crucial qu'Israël accepte sa part de responsabilité face à cette question. Cela implique une reconnaissance que l'action délibérée des pères fondateurs d'Israël a poussé plus de la moitié du peuple palestinien à l'exode entre 1947 et 1949. Cela sera d'autant plus difficile à admettre que la guerre de 1948 est présentée en Israël comme une guerre d'indépendance.

Mais une réelle réconciliation entre Israéliens et Palestiniens devra nécessairement commencer par la reconnaissance du poids de l'histoire. Le fait que l'histoire ait justement été ignorée jusqu'à présent dans les efforts visant à parvenir à un règlement de la question de Palestine explique en partie qu'une telle réconciliation n'ait pu commencer. D'autre part, le consensus international qui a accompagné l'adoption de la résolution 194 de l'Assemblée générale ne peut être ignoré. Cette résolution demande que les réfugiés qui le désirent puissent rentrer dans leurs foyers, une compensation devant être accordée en dédommagement des propriétés de ceux qui ne désirent pas rentrer. Or, en plus du rejet de cette formule par Israël, les États-Unis ont permis, depuis le processus entamé à Madrid, que cette résolution, comme

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bien d'autres, tombe dans l'oubli, préférant que les questions en suspens entre Israël et les Palestiniens fassent l'objet de négociations entre les parties. Cet abandon des engagements passés témoigne d'un rapport de force largement favorable à Israël pour déterminer les questions à débattre, au mépris du droit international.

Il est vrai qu'il est d'autant plus difficile d'appliquer la résolution 194 que souvent les maisons et les villages des réfugiés de 1948 n'existent plus et que le nombre des réfugiés, si l'on tient compte de leur descendance, s'est plusieurs fois multiplié. Mais l'application de cette résolution n'en est pas moins importante dans la mesure où elle constitue une reconnaissance des souffrances infligées au peuple palestinien depuis cinq décennies. Les résultats peu satisfaisants du processus de négociation entamé à Madrid et poursuivi à Oslo et Washington font apparaître toute la fragilité d'un cadre érigé sur des bases faibles.

M. AVISHAI MARGALIT, Professeur de philosophie à l'Université hébraïque de Jérusalem, a constaté que la question des réfugiés palestiniens n'est pas suffisamment prise au sérieux. Il n'est pas envisagé qu'elle fasse l'objet de négociations. L'objectif du processus de négociation consistera davantage à éviter la guerre qu'à négocier la paix. Le conflit entre Israël et les Palestiniens correspond à une lutte intercommunautaire plus qu'à un affrontement entre États; c'est pourquoi il est insoluble. Le noeud du problème réside dans les concepts d'honneur et d'humiliation, plus que dans les questions techniques telles que le problème de l'eau. Les réfugiés dans les camps sont au centre de la question globale des réfugiés car ce sont eux qui sont humiliés. Une part importante du désaccord entre Israéliens et Palestiniens provient des divergences dans l'approche adoptée par les deux parties face à l'histoire. S'il semble que l'espoir ne peut être placé dans une solution politique à proprement parler. Il faut en revanche aborder le problème central des réfugiés.

Échange de vues sur la question des réfugiés et déplacés palestiniens

À un intervenant qui demandait s'il ne serait pas possible de mettre en place un programme de retour des réfugiés sur le modèle de ceux utilisés en Europe de l'Est, M. Khalidi a répondu qu'accepter le principe même du retour des réfugiés relève avant tout d'une volonté politique qui, si elle était acquise, permettrait de régler le problème. Interpellé sur sa position eu égard au principe du droit au retour des réfugiés en tant que droit inaliénable du peuple palestinien, M. Margalit a assuré être en faveur de ce principe, mais a fait valoir que tout dépend en fait du contenu que l'on donne à ce droit au retour.

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Déclarations sur Jérusalem

M. DAVID ANDREWS, membre du Parlement irlandais et ancien Ministre des affaires étrangères de l'Irlande, a estimé que la solution de la question palestinienne permettrait peut-être, par analogie, de s'attaquer aux problèmes de l'Irlande du Nord. Sans dialogue, le règlement de la question de Palestine n'aurait pas progressé, a-t-il observé. L'incidence du changement de gouvernement en Israël sur le processus de paix doit encore être évalué, a-t- il ajouté. Le processus de paix doit se poursuivre et aboutir. Le souvenir du passé doit laisser la place à l'espérance en l'avenir. La stabilité économique est la première étape dans l'établissement d'une paix durable. Aujourd'hui, la communauté internationale doit convaincre le Gouvernement israélien de M. Benjamin Netanyahu que la voie qu'il suit n'est pas la bonne.

M. ALBERT AGHAZARIAN, Directeur chargé des relations publiques à l'Université de Bir Zeit, a affirmé que Jérusalem est plus divisée que jamais, alors que le mur qui séparait jadis la ville a disparu et que les réseaux de transports, notamment, se sont développés. Il n'y a pas de communication à proprement parler entre les zones de la ville. Il convient de relever que 44 000 dounams de terre ont été confisqués aux Palestiniens dans la ville et que selon Israël, les «non-Juifs» ne doivent pas avoir plus de 30% de la ville dite unifiée. Le jeu de découpage géographique des frontières amène certains quartiers, tel que celui d'Ahram, peuplé de 50 000 Palestiniens, à être rattachés à la Cisjordanie, alors que plus au nord on retrouve des quartiers rattachés à Israël. «À Jérusalem, il y toujours eu une différence très claire entre le pouvoir de la culture et la culture du pouvoir», a conclu M. Aghazarian.

M. GERSHON BASKIN, Co-Directeur du Centre de recherche et d'information Israël-Palestine de Jérusalem, a estimé que parler d'une Jérusalem unie est un voeu pieux qui relève du mythe. Le moment est venu pour les Israéliens favorables à la paix de faire comprendre à leurs concitoyens que Jérusalem sera partagée et sera la capitale de deux États. Les limites de la ville de Jérusalem sont beaucoup moins sacrées que les dirigeants israéliens veulent le faire croire. S'agissant de Jérusalem, il convient donc de briser le mythe du consensus. Les Israéliens et les Palestiniens doivent se réunir pour faire valoir la vision d'une Jérusalem à la fois unie et partagée sous la devise: «Jérusalem unie, une ville, deux capitales». Depuis trop longtemps, les Palestiniens ont laissé Israël prendre seul l'initiative sur la question de Jérusalem. Trop de Palestiniens à Jérusalem se sont abstenus de participer au processus électoral palestinien ainsi qu'aux élections municipales israéliennes auxquelles ils ne voulaient pas prendre part par peur que cela soit interprété comme une reconnaissance de la souveraineté d'Israël sur la ville. Les Palestiniens de Jérusalem doivent relever le défi de se présenter aux élections municipales de la ville. Une fois élus, ils auront ainsi l'opportunité de transformer toutes les réunions du conseil municipal en véritable forum débattant de l'avenir de Jérusalem.

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M. GIORGOS DIMITRAKOPOULOS, député européen et Vice-président de l'Association parlementaire pour la coopération euro-arabe, a déclaré que M. Yasser Arafat, après les élections palestiniennes, lui avait affirmé que, pour poursuivre le processus de paix, il fallait commencer par prendre une décision concernant le statut de Jérusalem. À cette occasion avait été souligné le fait que Rome pourrait peut-être servir de modèle dans la mesure où cette ville est à la fois la capitale de l'État italien et celle de l'État du Vatican. Avant la victoire électorale de M. Benjamin Netanyahou, il existait, s'agissant de la question de Palestine, un processus qui partait du principe de paix, alors qu'aujourd'hui l'opinion publique israélienne est divisée et que le nouveau gouvernement réagit négativement face au processus de paix.

Ce serait une erreur de croire qu'il est aujourd'hui aisé de commencer les négociations par le Liban, a par ailleurs déclaré M. Dimitrakopoulos, qui a souligné que de telles négociations impliqueraient trois acteurs: le Gouvernement libanais, la Syrie et Israël. En outre, certains acteurs non- gouvernementaux tels que le Hezbollah jouent un rôle très important au Liban. Il faut que l'Europe soit plus active au Moyen-Orient et conserve le même programme de base, tout en faisant pression pour que ce programme soit accepté. Même si elle ne joue pas un rôle de médiateur, comme cela devrait en fait être le cas, l'Europe doit en tous cas intervenir davantage dans certains domaines, notamment par le biais du programme de développement euro- méditerranéen.

Échange de vues sur la question de Jérusalem

À un orateur qui souhaitait connaître la signification exacte du concept d'une seule ville pour deux capitales, M. Baskin a répondu que cela signifiait qu'au sein de l'unité urbaine de Jérusalem, aucune restriction ne devait être imposée à la liberté de mouvement. Le représentant d'une organisation non gouvernementale a souligné les nombreuses limitations imposées à l'heure actuelle par Israël à la liberté de circulation.

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