PAL/G/118

RÉUNION INTERNATIONALE DES ONG ET COLLOQUE DES ONG D'EUROPE SUR LA QUESTION DE PALESTINE: DÉBAT SUR LES COLONIES DE PEUPLEMENT ET LES RÉFUGIÉS

3 septembre 1996


Communiqué de Presse
PAL/G/118


RÉUNION INTERNATIONALE DES ONG ET COLLOQUE DES ONG D'EUROPE SUR LA QUESTION DE PALESTINE: DÉBAT SUR LES COLONIES DE PEUPLEMENT ET LES RÉFUGIÉS

19960903 Genève, 2 septembre -- La Réunion internationale des organisations non gouvernementales et le Colloque des organisations non gouvernementales d'Europe sur la question de Palestine ont entamé, cet après-midi, leur débat consacré aux «questions fondamentales se posant dans le cadre d'un règlement juste et global». L'attention s'est porté en particulier sur les questions relatives aux colonies de peuplement israéliennes dans le territoire palestinien occupé, ainsi que sur les réfugiés et déplacés palestiniens. La réunion conjointe a également achevé l'examen de l'évolution politique récente.

Intervenant sur la question des colonies de peuplement israéliennes dans le territoire palestinien occupé, M. Sharif S. Elmusa, Maître de recherche à l'Institut d'études palestiniennes de Washington, a insisté sur le lien qui existe entre terre et eau dans le contexte du conflit palestinien. Rappelant que la source du Jourdain se trouve sur les hauteurs du Golan, il a souligné que la Syrie n'acceptera pas un accord sur l'eau sans qu'il y ait un accord sur la terre, pas plus que M. Netanyahou n'acceptera d'accord sur la terre sans qu'il y ait un accord sur l'eau. Pour sa part, M. Jan de Jong, Consultant pour la planification au Saint-Yves Legal Resource and Development Center de Jérusalem, a fait un exposé sur les diverses options de planification urbaine qui s'offrent pour envisager l'avenir d'Israël et des territoires palestiniens.

Mme Zahaba Galon, Secrétaire général du Ratz et membre de la Knesset, a déclaré que «nous devons faire basculer dans notre camp les colons qui ne cherchent pas la guerre et qui reviendraient en Israël en échange d'une juste restitution de leurs maisons». M. Geoffrey Aronson, Rédacteur en chef de la Fondation pour la paix au Moyen-Orient de Washington, estimant que les Palestiniens ont été gagnés à l'idée que les colonies et la paix ne sont pas des objectifs irréconciliables, a déclaré qu'il pourrait y avoir la paix avec les colonies.

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Intervenant sur la question des réfugiés et déplacés palestiniens, M. Leonard J. Hausman, Directeur de l'Institut de politique économique et sociale du Moyen-Orient de l'Université d'Harvard, a notamment déclaré que le nombre de réfugiés qui rentreront dans un État palestinien en gestation dépend notamment des opportunités économiques qui leur seront offertes et de la croissance de l'emploi dans le secteur privé. La solution du problème des réfugiés palestiniens passe par une réintégration des travailleurs Palestiniens dans l'économie israélienne.

Analysant les réactions du monde arabe et de la communauté internationale face à l'évolution politique récente, M. Mohamed Hamroush, Président du Comité égyptien pour la solidarité, et M. Michael Hindley, député européen du Royaume-Uni, ont fait des déclarations. M. Hamroush a notamment affirmé qu'Israël, qui faisait auparavant figure d'État épris de paix dans une masse d'États arabes hostiles, donne aujourd'hui l'image d'un État agressif isolé dans un monde arabe épris de paix. M. Hindley a pour sa part attiré l'attention sur les difficultés que rencontre l'Union européenne dans la construction d'une politique étrangère commune. Il a toutefois souligné que l'Union européenne dispose de certains moyens pour influencer le processus de paix. Un bref échange de vues sur ces questions s'est ensuivi.

La Réunion internationale des organisations non gouvernementales et le Colloque des organisations non gouvernementales d'Europe sur la question de Palestine poursuivra, demain matin, à 10 heures, l'examen des questions fondamentales qui se posent dans le cadre d'un règlement juste et global, plus particulièrement en ce qui concerne Jérusalem et les problèmes des réfugiés et personnes déplacées.

Déclarations sur l'évolution politique récente

M. AHMED HAMROUSH, Président du Comité égyptien pour la solidarité, a estimé que la région du Moyen-Orient est entrée dans une phase de changement qui a débuté non pas avec la victoire électorale de M. Benjamin Netanyahu mais avec le regain d'activité du courant extrémiste et terroriste hostile au processus de paix, tant en Israël que dans le monde arabe. Le problème qui se pose aujourd'hui est le changement d'orientation radical qui s'est opéré dans le camp israélien après la victoire électorale de M. Netanyahu. Mais M. Hamroush a également rappelé les erreurs commises par l'ancien Premier Ministre israélien Shimon Pérès, notamment lors de l'incident de Qana. Alors qu'auparavant Israël faisait figure d'État épris de paix dans une masse d'États arabes hostiles, il donne aujourd'hui l'image d'un État agressif isolé dans un monde arabe épris de paix. Les forces de paix dans la société israélienne devraient faire pression sur le Gouvernement de M. Netanyahu en vue de le faire renoncer à ses méthodes et à ses politiques lourdes de menaces.

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M. MICHAEL HINDLEY, Député socialiste européen du Royaume-Uni, a observé que, lorsque le processus de paix au Moyen-Orient marque le pas ou se trouve dans une situation difficile, certains estiment que l'Union européenne pourrait jouer un rôle positif, indépendant de Washington, susceptible de relancer le processus. Mais ces spéculations ne tiennent pas compte des difficultés que rencontre l'Union dans la définition d'une politique étrangère commune.

L'Union européenne dispose néanmoins de plusieurs moyens pour influencer le processus de paix. Ses relations bilatérales avec Israël constituent le premier de ces moyens permettant à l'Union d'exercer des pressions sur le Gouvernement israélien. Les relations bilatérales n'influent qu'indirectement sur le processus de paix, mais cette influence peut être décisive compte tenu de la conditionnalité que le Parlement européen peut imposer à tout accord commercial. Le deuxième moyen dont dispose l'Union européenne pour influencer le processus de paix, c'est sa diplomatie et son aide bilatérale, notamment l'aide humanitaire destinée à construire une économie palestinienne. Il convient enfin de relever que l'Union européenne a ouvert des négociations pour un accord d'association euro-méditerranéenne avec les Palestiniens. Étant donné que l'Autorité palestinienne n'a pas le statut d'État, les négociations en son nom seront conduites par l'OLP, comme l'autorisent les accords conclus entre Israël et l'OLP le 25 décembre 1995. Ces négociations ont notamment pour objectif d'intégrer les Palestiniens, en tant que partenaires à part entière, dans la zone euro-méditerranéenne dessinée par la Déclaration de Barcelone de novembre 1995.

Aperçu de l'échange de vues sur l'évolution politique récente

Un délégué a attiré l'attention sur les violations des droits de l'homme dont sont victimes certains Palestiniens vivant sur le territoire administré par l'Autorité palestinienne. Un autre orateur a affirmé que le contenu des accords d'Oslo ne répond pas aux aspirations du peuple palestinien. Les faiblesses de la déclaration euro-méditerranéenne de Barcelone ont également été soulignées.

M. Hindley a notamment déclaré qu'il faudrait «rendre des comptes» à l'opinion publique européenne quant au comportement des forces de police palestiniennes, dont les salaires sont en quelque sorte payés par les contribuables de l'Union européenne. Il a par ailleurs estimé qu'il ne serait pas bon d'exclure Israël du programme euro-méditerranéen mis en place à Barcelone. Contrairement aux États-Unis, a-t-il poursuivi, l'Union européenne n'est pas prisonnière des campagnes électorales pour exprimer sa position ou réagir aux événements. M. Hamroush a, pour sa part, demandé qu'il soit fait pression sur le Gouvernement des États-Unis, par le biais notamment des organisations non gouvernementales américaines, pour que ce gouvernement n'adopte pas automatiquement des positions qui le situent «à la traîne» d'Israël.

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Débat sur les questions fondamentales se posant dans le cadre d'un règlement juste et global

M. SHARIF S. ELMUSA, Maître de recherche à l'Institut d'études palestiniennes de Washington, a attiré l'attention sur le lien entre la terre et l'eau dans le contexte du conflit palestinien. Il a insisté sur le rôle crucial joué par l'eau dans le processus d'implantation des colonies israéliennes. La capacité d'Israël à contrôler l'emploi de l'eau par les Palestiniens dépend du contrôle qu'exerce ce pays sur la Cisjordanie. M. Elmusa a affirmé que l'étrange configuration de Jéricho résultait du refus d'Israël de laisser aux Palestiniens le contrôle des puits de la ville. Aujourd'hui, Israël prévoit de planter du coton dans la région du Néguev et du Sud, sur une zone qui représente le double de la superficie de la zone irriguée en Cisjordanie. Or, la culture du coton exige de grandes quantités d'eau. Il faut, à cet égard s'inquiéter qu'Ariel Sharon ait été nommé au poste très important de Ministre des infrastructures.

M. Elmusa a rappelé que la source du Jourdain se trouve sur les hauteurs du Golan. Aussi, la Syrie n'acceptera pas un accord sur l'eau sans qu'il y ait un accord sur la terre, pas plus que M. Netanyahu n'acceptera d'accord sur la terre sans qu'il y ait un accord sur l'eau. En outre, les stratèges israéliens ont toujours exprimé leur intention de garder sous contrôle israélien les rives du Jourdain, la rétention de cette zone par Israël atrophiant sans conteste le statut de la Cisjordanie et privant les Palestiniens de leur droit légitime à une part des ressources en eau du bassin.

MME ZAHABA GALON, Secrétaire général de Ratz et membre fondateur de B'Tselem, le Centre israélien d'information pour les droits de l'homme dans les territoires occupés, a déclaré que les colonies de peuplement israéliennes dans les territoires occupés symbolisent la pire politique expansionniste d'Israël. Elles corrompent par ailleurs le système judiciaire israélien en établissant deux systèmes de droit, l'un civil, pour les colons, l'autre militaire, pour les résidents palestiniens. Aujourd'hui, les colonies de peuplement israéliennes représentent la menace la plus dangereuse au processus de paix. La politique menée par le Gouvernement de M. Benjamin Netanyahu à cet égard est une violation flagrante des accords conclus. M. Yitzchak Mordechay, Ministre israélien de la défense, a annoncé qu'Israël a stationné 30 caravanes en Cisjordanie. Or, même si les caravanes ne sont pas des établissements permanents, l'expérience a démontré que tout établissement amorcé de cette manière devient permanent.

L'assertion de M. Netanyahu, qui a déclaré que «les Accords d'Oslo ne comportent aucune promesse israélienne de geler l'établissement de colonies», est juridiquement vraie mais elle ne peut-être acceptée d'un point de vue politique. Il convient de souligner que les facilités financières et fiscales qui sont accordées aux colons constituent la raison principale de l'implantation des colons. C'est pourquoi «nous devons faire basculer dans notre camp les colons qui ne cherchent pas la guerre et qui reviendraient en Israël en échange d'une juste restitution de leurs maisons», a affirmé Mme Galon. (à suivre)

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Soulignant que le précédent Gouvernement travailliste d'Israël n'avait pas saisi les opportunités créées par les Accords d'Oslo, elle a envisagé deux scénarios pour l'avenir. L'un, pessimiste, selon lequel les colonies ne pourront pas être évacuées parce qu'elles sont devenues un point prioritaire de l'ordre du jour en Israël et l'autre, optimiste, à la faveur duquel le Gouvernement du Likoud serait contraint d'admettre qu'il n'a d'autre option que d'évacuer les colonies car elles font partie du processus de paix.

M. GEOFFREY ARONSON, Rédacteur en chef de la Fondation pour la paix au Moyen-Orient (Washington) a souligné que, si l'on en juge par le nombre de fois où le Département d'État des États-Unis est obligé de faire une déclaration sur cette question, il semble que le Gouvernement de M. Benjamin Netanyahu ne réussira pas à construire de nouvelles colonies de peuplement dans le silence «comme cela lui a été conseillé». Ni M. Netanyahu, ni M. Yasser Arafat n'ont décidé de quelle façon ils souhaitent fixer le cadre des négociations. Il est probable qu'à court terme, ils aient peu de choses à négocier, si ce n'est en ce qui concerne le redéploiement à Hébron, initialement prévu pour le mois de mars. Il convient aujourd'hui de déterminer si les colonies sont un obstacle au processus de paix. Or l'un des principaux succès du processus de paix d'Oslo a été de gagner les Palestiniens à l'idée que les colonies et la paix ne sont pas des objectifs irréconciliables. Il pourrait y avoir la paix avec les colonies. Le programme de construction de colonies du Gouvernement israélien actuel, qui prévoit la construction de 2 500 unités par an, n'est guère différent du programme du gouvernement précédent qui avait accru d'environ 50 000 entre 1992 et 1996 le nombre total des colons israéliens.

M. JAN DE JONG, Consultant pour la planification au Saint-Yves Legal Resource and Development Center de Jérusalem, a mis en exergue les diverses options de planification urbaine qui s'offrent pour envisager l'avenir d'Israël et des territoires palestiniens, et éventuellement les relations entre ces deux entités. L'option dite de la tierce partie insiste sur les aspirations des Palestiniens et inclut la possibilité de l'autonomie de Jérusalem-Est. M. de Jong a toutefois souligné que l'évolution dans la région déprendra en grande partie des plans qui seront mis à exécution par Israël.

M. LEONARD J. HAUSMAN, Directeur de l'Institut de politique économique et sociale du Moyen-Orient de l'Université d'Harvard, a notamment indiqué que le nombre de réfugiés qui souhaiteront retourner dans un État palestinien en gestation dépend notamment des opportunités économiques qui leur seront offertes et de la croissance de l'emploi dans le secteur privé. À cet égard, l'absorption par Israël des Juifs de l'ex-Union soviétique peut fournir un modèle de référence pour la manière dont il faut régler les questions de l'emploi et de l'immigration dans un futur État palestinien. La solution du problème des réfugiés palestiniens passe par la réinsertion des travailleurs Palestiniens dans l'économie israélienne.

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