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AG/L/176

COMITE PREPARATOIRE POUR LA CREATION D'UNE COUR CRIMINELLE INTERNATIONALE : LES DELEGATIONS AFFINENT LEURS PROPOSITIONS

27 août 1996


Communiqué de Presse
AG/L/176


COMITE PREPARATOIRE POUR LA CREATION D'UNE COUR CRIMINELLE INTERNATIONALE : LES DELEGATIONS AFFINENT LEURS PROPOSITIONS

19960827 MATIN AG/L/176 Elles demeurent divisées sur l'interprétation du principe de complémentarité

Le Comité préparatoire pour la création d'une cour criminelle internationale a entendu ce matin la présentation de propositions supplémentaires relatives aux questions examinées à la session de mars-avril. Les représentants des pays suivants ont pris la parole : France, Croatie, Japon, Allemagne, Etats-Unis, Bélize, Danemark, Egypte, Singapour et Nouvelle-Zélande. L'observateur de la Suisse est également intervenu.

Les délégations sont revenues sur le principe de complémentarité, à la suite des précisions apportées sur ce point par le représentant de la France. Une délégation s'est demandée si la complémentarité doit toujours être comprise au sens de subsidiarité. Quelques délégations ont souligné les inconvénients que présentaient l'article 34 du projet de texte français relatif au consentement des Etats, l'une d'entre elles déclarant cette disposition inutile et néfaste. Une délégation a souligné que le principe de complémentarité devrait tenir compte des processus de réconciliation nationale survenus depuis une décennie.

Les représentants ont également abordé la définition des crimes qui entreront dans le champ de compétence de la cour, notamment le crime d'agression, qui pour l'un d'entre eux devrait être limitée à la guerre d'agression, et aux crimes de guerre, qu'un représentant souhaiterait limité aux conflits armés non internationaux, ce afin d'éviter tout chevauchement avec les crimes contre l'humanité. Une délégation a proposé que soit ajouté dans le noyau dur des crimes à connaître par la cour, ceux commis contre le personnel des Nations Unies et le personnel associé.

Le Comité préparatoire se réunira cet après-midi, à 15 heures 30, pour entendre la présentation des rapports des groupes informels.

Présentation de propositions supplémentaires relatives aux questions examinées à la session de mars-avril

Echanges de vues

Le représentant de la France, rappelant que la création d'une cour criminelle permanente sera un accomplissement sans précédent, a estimé que la Convention doit être signée et ratifiée aussi largement que possible. Cette institution doit être viable. En conséquence, il faut prendre le temps d'approfondir les questions. Il a indiqué qu'une année supplémentaire de travail devrait suffire avant de réunir une conférence diplomatique. Mil neuf cent quatre-vingt dix huit est une date à ne pas à exclure. Rappelant que sa délégation a proposé un projet complet sur la création de la cour, il a fait observer que, pour ce qui est de l'agression, sa délégation s'en tient à la définition du tribunal de Nuremberg, c'est-à-dire la guerre d'agression. Le Conseil de sécurité devrait qualifier la situation en question, sans pour autant se prononcer sur le caractère criminel des faits et la responsabilité de leurs auteurs. S'agissant du rôle du Conseil, il a déclaré s'en tenir aux dispositions recommandées par la Commission du droit international.

Le représentant a affirmé que le principe de complémentarité est indispensable. Constatant le silence du projet de statut sur le sujet, il a souligné que la mise en oeuvre de ce principe est un élément essentiel au statut de la Cour. Le principe de complémentarité doit pouvoir être mis en oeuvre dès qu'une plainte est portée devant la cour. Le deuxième moment, où il convient aux Etats de constater la compétence de la cour, intervient quand il leur est demander de procéder au transfert d'une personne suspectée ou accusée. Un Etat peut également soulever cette exception d'incompétence au début du procès. Les possibilités de contestations devraient être ouvertes aux Etats mais aussi aux individus mis en cause. Il faut assurer un bon fonctionnement de la Cour, qui dépendra de la bonne volonté des Etats. Il convient cependant d'agir avec prudence et s'entourer d'un maximum de garanties. Il faut que la cour puisse être créée avant le début du siècle.

La représentante de la Croatie a demandé ce qu'il arrivera aux affaires en suspens devant le tribunal pour l'ex-Yougoslavie après la création de la cour criminelle internationale, car sa création mettra un terme à tous les tribunaux spéciaux. Elle a souhaité que des dispositions soient incluses en ce sens.

Le représentant du Japon a souhaité que les crimes de guerre soient définis avec clarté, précision et spécificité. Une définition des crimes devrait être incluse dans le statut. Il a estimé que les définitions devraient être exhaustives, tout en reconnaissant qu'il faut une certaine souplesse en la matière. Les crimes de guerre devraient être limités aux infractions d'une gravité exceptionnelle. S'agissant de la nature du conflit

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armé, il a émis le voeu que soient exclus les conflits armés non internationaux, pour éviter tout chevauchement avec les crimes contre l'humanité.

Le représentant de l'Allemagne, revenant à la présentation de la délégation française, a toutefois mentionné que le critère d'assentiment, prévu dans l'article 34 du projet français, n'a rien à voir avec la complémentarité, est inutile, nuit à toute l'entreprise et ne devrait pas figurer dans le statut de la cour. Le statut de la cour traitera du noyau dur des crimes, ce qui veut dire que les Etats ne peuvent en disposer librement. En ce qui concerne la responsabilité pénale, il a rappelé que les Etats ont le devoir de poursuivre les auteurs de ces crimes. Qu'arriverait-il au tribunal s'il fallait obtenir le consentement, comme le prévoit l'article 34?.

Le représentant des Etats-Unis a rappelé que les travaux de la présente séance étaient uniquement consacrés à la présentation de propositions et non à la reprise du débat général. Le représentant a indiqué que la session d'avril a examiné de façon approfondie le principe de complémentarité. Depuis une dizaine d'années, de nombreux pays, à l'instar de l'Argentine, de l'Afrique du Sud et d'Haïti, ont essayé de réaliser une réconciliation nationale. Aussi, la façon dont la complémentarité tiendra compte des processus nationaux de réconciliation sera-t-elle fondamentale. Il importera de l'aborder dès la prochaine phase des travaux du Comité préparatoire.

Le représentant de Belize a jugé nécessaire de discuter de façon approfondie les nombreux facteurs pertinents concernant l'article 20 du projet de statut de la CDI qui est relatif aux crimes relevant de la compétence de la cour avant de présenter des propositions concrètes. Cet article doit être reformulé dans le sens des articles 17 à 20 du code sur les crimes contre la paix et la sécurité de l'humanité. En fait, chacun des paragraphes de l'article 20 du projet actuel devraient faire l'objet d'un article distinct. Il ne doit pas y avoir de disparités en matière de traitement des crimes. Il faudra déterminer pour chaque crime le degré de connaissance, d'absence d'état d'esprit, de conscience et d'inadvertance des personnes poursuivies. Tout en reconnaissant, comme le fait l'article 20 du projet de la CDI, que les crimes relevant de la compétence de la cour doivent être d'une gravité élevée, il faudrait préciser pour chaque crime ce degré de gravité. On pourrait mentionner le caractère systématique de l'"actus reus". Le statut pourrait mentionner l'échelle de grandeur de l'acte perpétré. De façon générale, il faudrait préciser tant au niveau qualitatif que quantitatif les articles du projet de statut de manière à préciser les éléments constitutifs des crimes.

Le représentant du Danemark a rappelé qu'au cours de la première session du Comité préparatoire, l'idée d'ajouter les crimes de traité à la Convention relative à la sécurité du personnel de maintien de la paix des Nations Unies avait été largement appuyée. Depuis cette première session, la Commission du droit international (CDI) a réalisé des progrès décisifs en ce qui concerne le projet de code de crimes contre la paix et la sécurité de l'humanité. Ce code

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comprend cinq crimes: le crime d'agression, le crime de génocide, le crime contre l'humanité, le crime de guerre et le crime contre le personnel des Nations Unies et le personnel associé. Pour le Danemark, le texte du nouveau code devra être examiné au cours des prochains travaux du Comité préparatoire. Les délégations pourront ainsi déterminer si le crime contre le personnel des Nations Unies et le personnel associé pourrait relever de la compétence de la future cour.

Le représentant de la Suisse a estimé que le projet présenté ce matin par la France met notamment l'accent sur le principe de complémentarité et le consentement des Etats. La Suisse souscrit à la définition du principe de complémentarité défendue par la France, notamment en ce qui concerne le caractère de subsidiarité. Il faut cependant se demander si la complémentarité doit toujours être comprise dans le sens de la subsidiarité, en particulier dans le cas du crime d'agression. La question de la complémentarité est étroitement liée à celle de la compétence de la cour et plus particulièrement à la compétence inhérente. Pourtant, l'article 34 du projet français semble constituer un tournant dans la position arrêtée par ce pays lors des travaux du Comité ad hoc. La délégation de la Suisse ne pourrait porter qu'un intérêt minime à la création d'une cour criminelle internationale dont la compétence ne serait que facultative.

Le représentant de l'Egypte a souligné que la création d'une telle institution représente un pas en avant pour l'humanité, mais l'innovation réelle dépendra des fonctions que la cour pourra exercer dans la pratique. Le crime d'agression est trop grave pour échapper à la compétence de la cour. Les crimes terroristes doivent être inclus, car c'est devenu une menace criminelle pour l'ensemble de la communauté internationale. Le principe de la complémentarité est un équilibre difficile à atteindre, a-t-il ajouté.

Le représentant de Singapour, s'agissant du principe de complémentarité, a estimé que la notion d'une absence de bonne foi de la part des autorités nationales est la mise à l'épreuve la plus appropriée pour la cour. La complémentarité est une question difficile, mais il existe un terrain d'entente possible. En ce qui concerne le rôle du Conseil de sécurité, il a déclaré qu'il peut y avoir des situations où la continuation de poursuites peut entraver les efforts du Conseil de sécurité pour répondre à des menaces ou des actes d'agression, auxquels le Conseil a la responsabilité fondamentale de répondre. En conséquence, le représentant a proposé un amendement au paragraphe de l'article 23 relatif à l'action du Conseil, qui inverse l'hypothèse de base du texte actuel.

La représentante de la Nouvelle-Zélande a présenté un amendement à l'article 2 bis, visant à laisser la porte ouverte à l'inclusion du statut de la cour dans la Charte des Nations Unies. Elle a jugé la proposition de Singapour très intéressante.

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