AG/L/170

LE COMITE PREPARATOIRE POUR LA CREATION D'UNE COUR CRIMINELLE INTERNATIONALE POURSUIT L'EXAMEN DE LA COMPOSITION ET L'ADMINISTRATION DE LA COUR

20 août 1996


Communiqué de Presse
AG/L/170


LE COMITE PREPARATOIRE POUR LA CREATION D'UNE COUR CRIMINELLE INTERNATIONALE POURSUIT L'EXAMEN DE LA COMPOSITION ET L'ADMINISTRATION DE LA COUR

19960820 APRES-MIDI AG/L/170 La nécessité d'une cour souple, efficace et économe est soulignée par nombre de délégations

Le Comité préparatoire pour la création d'une cour criminelle internationale, présidé par M. Adriaan Bos (Pays-Bas), a poursuivi, cet après-midi, l'examen des questions d'organisation de la cour, et notamment des points concernant l'institution, la composition et l'administration de la future cour. Ce faisant, un échange de vue a eu lieu sur les articles 1 à 19 du projet de statut qu'avait présenté en juillet 1994 la Commission du droit international (CDI).

Les représentants des pays suivants sont intervenus : Irlande, Koweït, Portugal, Pays-Bas, Danemark, Venezuela, Autriche, Argentine, Egypte, Singapour, Canada, Guatemala, Allemagne, Malte, Thaïlande, Hongrie, Indonésie, République de Corée, Pakistan et Slovaquie.

D'une manière générale, les délégations ont évoqué les critères requis pour les futurs juges, tels que l'intégrité, l'impartialité, l'indépendance et la double compétence en droit pénal et en droit international. Plusieurs délégations ont toutefois estimé que l'expérience en matière pénale devait primer sur celle en matière de droit international. La plupart des délégations ont appuyé les principes de la représentation géographique équitable, d'équilibre entre les différents systèmes juridiques et d'égalité entre les sexes. Toutefois, nombre de représentants ont jugé que ces principes devraient être appliqués de façon souple, afin d'attirer les meilleurs candidats en vue d'une plus grande efficacité de la cour. Quelques délégations se sont déclarées opposées au principe de rotation des juges entre la chambre de première instance et la chambre des recours. La limite d'âge des juges, ainsi que la durée de leur mandat et son éventuel renouvellement ont également été abordés. Plusieurs représentants ont jugé nécessaire de veiller à la maîtrise des dépenses budgétaires de la future juridiction.

Le Comité préparatoire poursuivra l'examen des questions d'organisation, demain matin, mercredi 21 août, à 10 heures.

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Examen des questions d'organisation: institution, composition et administration de la cour (articles 1 à 19 du projet de statut de la Commission du droit international (CDI) qui figure au document A/49/355)

Echange de vues

Le représentant de l'Irlande a prôné la mise en place d'un système permettant au juge d'être impartial et indépendant. Selon lui, le juge devra avoir une compétence en matière de droit pénal et de droit international. La cour qu'entend établir le Comité préparatoire mérite d'être dotée de juges compétents, travaillant sur une base permanente et ayant une connaissance parfaite de leur sujet. L'Irlande partage le point de vue de la Fédération de Russie et du Mexique sur la nécessité pour la cour de refléter par sa composition les principaux systèmes juridiques et de respecter le principe d'une représentation géographique équitable. En fait, seule l'universalité de la cour garantira son efficacité.

Le représentant du Koweït a jugé nécessaire que le statut de la cour respecte le principe d'une représentation géographique équitable et reflète les principaux systèmes juridiques.

La représentante du Portugal a mis en exergue l'obligation pour les juges d'être impartiaux, intègres et indépendants. La représentante a estimé que le première paragraphe de l'article 6 doit être amendé dans le sens de l'article 2 du statut de la Cour internationale de Justice (CIJ). Les candidats doivent avoir double compétence en droit pénal et en droit international. Pour autant, ceux-ci ne devraient pas forcément être des juges. Ils pourraient être des juristes ou des avocats. Le Portugal est favorable à un nombre limité de juges ainsi qu'à l'élection des juges par les Etats Parties. Il appuie la proposition de la Norvège relative à l'équilibre à maintenir entre les sexes.

Le représentant des Pays-Bas, se référant à la proposition visant à créer une chambre d'instruction, a jugé préférable de désigner un seul juge pour remplir cette fonction afin de doter la chambre de première instance des moyens indispensables à son fonctionnement. On pourrait envisager que les juges soient élus par l'Assemblée générale des Nations Unies à l'instar de ce qui se fait pour la CIJ. Les juges ne devront pas impérativement être des ressortissants des Etats parties. Le statut doit garantir un équilibre satisfaisant entre les sexes. A cet égard, les Pays-Bas se félicitent de l'accueil favorable qu'a reçu la proposition de la Norvège.

Le représentant du Danemark a déclaré que sa délégation est favorable au projet de la CDI. Il a toutefois jugé nécessaire de l'affiner. Il a appuyé l'idée d'établir l'égalité entre les sexes. Les juges de la cour doivent posséder une très large expérience, notamment dans la conduite des

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procès criminels. Une expérience en droit international, et particulièrement en droit humanitaire, est aussi essentielle. Une évaluation des différents candidats permettra à la cour de profiter de l'expérience des plus qualifiés. Il a proposé d'inclure dans le statut un âge obligatoire pour la retraite des magistrats, qui est dans la plupart des cours européennes de 70 ans.

Le représentant a estimé que 18 juges étaient un chiffre satisfaisant. Mais des juges supplémentaires seront nécessaires, a-t-il souligné, pour répondre aux besoins de la cour. Rappelant que l'institution sera permanente, il a précisé que cela ne veut pas dire que tous les juges ou tout le personnel devront être disponibles en tout temps.

Le représentant du Venezuela a indiqué, s'agissant de la composition de la cour, que le principe de la répartition géographique est essentielle, de même que la prise en compte des différents systèmes juridiques. Les juges doivent être intègres et impartiaux. Le nombre des juges peut être 18, élus pour cinq ans. Il faut mettre en place un mécanisme sur la base d'une élection unique. Les juges doivent être des ressortissants des Etats parties.

La représentante de l'Autriche a demandé quel type de chambre il faut établir. Il faudrait qu'il y ait deux chambres de première instance et une chambre des recours. La chambre des recours devrait comprendre davantage de juges que la chambre de première instance. Elle n'a pas jugé nécessaire d'établir une rotation entre les membres de la chambre de première instance et la chambre des recours. En ce qui concerne le nombre requis de juges, la représentante a indiqué que sa délégation était assez souple.

La représentante de l'Argentine a estimé que la plus grande partie des juges devrait être expert en matière pénale, puisque la cour sera une juridiction pénale. Elle a appuyé les propositions faites notamment sur l'égalité entre les sexes et la répartition géographique équitable, en précisant toutefois que ces critères doivent être appliqués de façon souple, afin que l'on puisse obtenir les meilleurs juges. Elle a déclaré que le mandat de neuf ans sans réélection, proposé dans le projet, est une solution acceptable.

Le représentant de l'Egypte a rappelé que le débat qui a lieu actuellement au sein du Comité préparatoire en ce qui concerne la composition et l'administration de la cour ne constitue qu'un premier tour d'horizon, qui ne préjuge en rien des solutions qui seront retenues. "A priori, nous ne savons pas si la cour sera compétente pour juger les responsables ou tous les acteurs ayant participé au crime", a-t-il souligné. A l'instar de la France, l'Egypte estime que des considérations financières et budgétaires ne doivent pas, au stade actuel de la réflexion, déterminer la composition de la cour et le nombre de ses juges. Certaines estimations montrent que le budget annuel de la cour s'élèverait à 70 millions de dollars. Or justement, les prévisions

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indiquent, qu'au départ, près de 70 Etats seront parties au statut de la cour, ce qui fait, en moyenne, un million par Etat. L'Egypte s'oppose à l'instauration du principe de rotation que ce soit au sein des chambres ou d'une chambre à l'autre. Le représentant a prôné la mise en place d'une chambre d'instruction. Il a appuyé l'intervention de l'Italie pour ce qui est de la qualité des juges. Celle-ci avait défendu l'instauration d'un système équilibré et diversifié. La nationalité d'un juge ne doit pas forcément être celle des Etats parties. L'Egypte est d'avis que le mandat des juges devrait être plus court que celui proposé par la CDI, et que ce mandat devra être renouvelable. Elle est favorable à l'imposition d'une âge limite. L'Egypte propose qu'une étude de faisabilité soit faite afin de déterminer les coûts de la création et du fonctionnement de la future cour.

Le Président du Comité préparatoire, M. Adriaan Bos (Pays-Bas), a rappelé, s'agissant des coûts relatifs à la création et au fonctionnement de la cour, qu'une étude a déjà été faite.

Le représentant de Singapour a proposé que le statut affirme la nécessité pour les juges de la future cour d'avoir une expérience en matière de justice pénale, ce qui n'exclut nullement la possibilité pour des juristes ou des avocats de se porter candidats. Les candidats ne devraient pas être uniquement des ressortissants des Etats parties. Ces derniers devraient avoir voix exclusive au chapitre en ce qui concerne les questions d'administration de la cour, et plus particulièrement pour la nomination des juges. Singapour est d'avis que la compétence et le mérite des juges doivent constituer les critères essentiels qui doivent présider au recrutement. Il faut, en revanche, écarter le principe de la répartition géographique équitable, qui comporte de nombreux risques. Singapour estime que le mandat du juge doit être d'au moins neuf ans et être renouvelable.

Le représentant du Canada a indiqué que sa délégation partage le point de vue du Royaume-Uni et de la Suisse en ce qui concerne le nombre de juges et de chambres. Le Canada juge nécessaire cependant de pouvoir, selon que de besoin, faire appel à des juges qui viendraient épauler les 18 juges prévus par le projet de la CDI. Il pense que le système de désignation retenu pour la Cour internationale de Justice doit être repris dans le statut de la future cour. Cela contribuera à clarifier les relations qui existeront entre la future instance judiciaire internationale et le système des Nations Unies. Le Canada appuie l'opinion du Lesotho concernant les risques de conflit d'intérêts et les incompatibilités susceptibles d'entraîner la récusation d'un juge.

Le représentant du Guatemala a fait valoir que sa délégation souscrit à la proposition faite par les Etats-Unis en faveur d'une réduction de la durée du mandat du juge à six ans. Une telle réduction permettrait au juge d'être rééligible, ce qui inciterait davantage de personnes à se porter candidats.

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"Moins la durée du mandat du juge sera longue, moins le travail de la cour sera difficile", a affirmé le représentant. D'après lui, les ressortissants de pays qui ne sont pas partie au statut doivent avoir la possibilité de présenter leur candidature. Une telle mesure est de nature à inciter les Etats qui ne sont pas parties au statut à le devenir.

Le représentant de l'Allemagne a fait valoir que sa délégation a fait preuve de souplesse en ce qui concerne la composition de la cour. La proposition de la Suisse, à savoir combiner la tâche de la chambre de première instance avec celle la chambre d'accusation est intéressante. Ainsi, on pourrait recourir à un nombre moins élevé de juges et faire des économies. Le principe de ne retenir que les candidats les plus qualifiés et les plus compétents est noble. Mais ce principe est-il réaliste? La proposition actuelle rend le choix des juges plus ardu que celui d'un nouveau Secrétaire général des Nations Unies, a-t-il estimé. Il devrait suffire qu'un candidat soit un avocat à part entière, qu'il ait une certaine expérience en matière pénale et n'ait pas dépassé un certain âge. Pour le reste, ce sont des critères accessoires mais pas essentiels, a-t-il précisé.

La représentante de Malte a déclaré que les juges devront avoir une grande expérience en matière pénale. Elle a estimé que le droit international inclut le droit humanitaire international. On ne pourra assurer l'universalité de la cour que par le biais des Etats parties au Statut et non par la composition de la cour. Pour ce qui est du nombre de juges, elle a estimé qu'il faut garder à l'esprit des considérations financières. En même temps, il faut s'assurer que la cour dispose d'un nombre suffisant de juges.

Le représentant de la Thaïlande a indiqué que les candidats ne doivent pas être forcément ressortissants des Etats parties au statut. Il s'est déclaré en accord avec la proposition norvégienne, selon laquelle il faudrait assurer dans la sélection des juges, et ce, afin d'assurer l'universalité de la cour.

Le représentant de la Hongrie a estimé qu'il n'y a pas lieu de faire la distinction entre expérience en matière pénale et expérience en droit international. Ces critères doivent s'appliquer de manière souple. L'expérience en matière pénale doit cependant être prédominante, a-t-il précisé. Il faut inclure un âge limite pour les juges. Il convient de faire preuve de souplesse en matière d'égalité des sexes. S'agissant de l'élection, certaines des idées présentées par le Royaume-Uni ce matin sont percutantes. Il a jugé difficile de déterminer à ce stade le nombre exact des juges. En ce qui concerne le mandat des juges, il a convenu que sa délégation pouvait accepter la proposition de neuf ans sans réélection. Il a toutefois précisé qu'elle était prête à accepter un mandat plus court.

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Le représentant de l'Indonésie a déclaré que la cour doit être un organe indépendant fondé sur la signature d'une convention internationale traduisant la volonté des Etats parties. Un grand nombre de ratification du statut confèrerait à la cour l'universalité indispensable à son efficacité et à sa crédibilité. Pour leur part, les juges de la future cour doivent être compétents, intègres, impartiaux et indépendant. L'instauration d'une relation étroite entre la cour et le système des Nations Unies, à l'instar des autres organes judiciaires internationaux, contribuerait à faire de la future cour une instance efficace.

Le représentant de la République de Corée a indiqué que sa délégation appuie dans son ensemble les dispositions contenues à l'article 6 du projet de statut. Cependant, la République de Corée souhaite que soit accrue la représentativité de la cour. L'élection des juges doit se faire par l'Assemblée générale des Nations Unies afin de renforcer l'acceptabilité de la cour par la communauté internationale. La cour devra se composer de 18 juges, sauf si sa compétence est élargie. Le statut des juges de la future cour n'est pas comparable à celui des juges des autres juridictions internationales. Il est donc hasardeux en ce domaine de s'inspirer du statut des autres instances judiciaires.

Le représentant du Pakistan a estimé que les juges de la cour doivent être élus sur une base permanente. La rémunération que ces juges tireraient de leurs activités au sein de la cour devrait être leur seule source de revenus. Le Pakistan est opposé à un système de détachement de juges nationaux. Le représentant a estimé que le document auquel a fait référence le Président du Comité préparatoire ne contient pas à proprement parler une étude de faisabilité sur la future cour.

Le représentant de la Slovaquie a fait valoir, à l'instar de celui de la Suisse, que la cour doit respecter les impératifs de simplicité, de souplesse et de l'économie. Il a remarqué que la définition de la compétence de la cour sera déterminante. Il a estimé que le nombre de 18 juges tels que proposé par le statut est un plafond.

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