LE COMITE PREPARATOIRE POUR LA CREATION D'UNE COUR CRIMINELLE INTERNATIONALE ACHEVE L'EXAMEN DES FONCTIONS ET POUVOIRS DE LA CHAMBRE DE PREMIERE INSTANCE
Communiqué de Presse
AG/L/166
LE COMITE PREPARATOIRE POUR LA CREATION D'UNE COUR CRIMINELLE INTERNATIONALE ACHEVE L'EXAMEN DES FONCTIONS ET POUVOIRS DE LA CHAMBRE DE PREMIERE INSTANCE
19960816 MATIN AG/L/166 La question des droits de l'accusé au centre des discussionsDans le cadre des travaux de sa deuxième session de fond entamés le 12 août dernier, le Comité préparatoire pour la création d'une cour criminelle internationale a poursuivi, ce matin, sous la présidence de M. Adriaan Bos (Pays-Bas), l'examen des questions relatives à la procédure, à la nécessité d'un procès impartial et aux droits de l'accusé. Le Comité a poursuivi et achevé son échange de vues sur le libellé de l'article 38 du projet de statut tels que proposés par la Commission du droit international (CDI), qui a trait aux fonctions et pouvoirs de la Chambre de première instance.
A ce titre, les représentants des pays suivants ont pris la parole : Argentine, Mexique, Etats-Unis, Israël, Malaisie, Singapour, Venezuela, Fédération de Russie, Royaume-Uni, Autriche, Indonésie, Chine et France.
Le Comité préparatoire a ensuite entamé l'examen de l'article 41 du projet de statut qui traite des droits de l'accusé. Les représentants des pays suivants ont pris part à l'échange de vues sur cet article : Australie, Suisse, Singapour, Etats-Unis, République tchèque, Argentine, France, Canada, Mexique, Nouvelle-Zélande, Lesotho, Japon, Inde et Saint-Siège.
La prochaine séance du Comité préparatoire aura lieu le lundi 19 août, à 10 heures.
Poursuite de l'échange de vues sur l'article 38 du projet de statut relatif aux fonctions et pouvoirs de la Chambre de première instance
Le représentant de l'Argentine a souligné que tout avocat de droit civil estimerait pour le moins surprenante la règle prévue à l'article 38 d). Il est clair que plaider coupable fait partie du système de Common Law. L'Argentine propose toutefois de combiner des éléments des deux systèmes, à savoir la procédure abrégée du système civil et le plaider coupable du Common Law. Ainsi, la Chambre de première instance pourrait entendre de nouveau le Procureur et un résumé des preuves à charge; le juge écouterait également l'accusé. Finalement, si la chambre de jugement estime que la procédure ordinaire convient mieux, elle peut refuser que le jugement soit instruit de manière accélérée.
La représentante du Mexique a déclaré que ce concept, celui prévu à l'article 38 d) n'existe pas dans tous les systèmes juridiques. Le projet de statut omet les conséquences de ce genre de déclarations. Il devrait expliciter ce concept. Le Mexique estime que l'on ne saurait prononcer une condamnation sur la base d'aveux. Un aveu ne saurait constituer une preuve. Une déclaration de culpabilité ne pourrait avoir de conséquences directes sur le jugement. Elle ne saurait être obligatoire. Il faut indiquer à l'accusé qu'il n'est pas obligé de plaider coupable ou non coupable. Concernant le paragraphe 5, alinéa d), le Mexique estime que ce pouvoir ne devrait pas pour le moment être accordé à la chambre.
Le représentant des Etats-Unis a souhaité davantage de précision sur l'établissement de la chambre de première instance, notamment les conditions d'admissibilité. S'agissant de la déclaration de culpabilité, les Etats-Unis favorisent à la solution de compromis. Ils estiment que la procédure abrégée présentée par le Canada et l'Argentine mérite un examen attentif. Le juge n'est pas tenu à accepter une déclaration ni une demande d'indulgence. La cour doit s'assurer de l'intégrité des résultats avant de prononcer le jugement. Le huis clos devrait rester une exception car la notion de siéger en secret nuirait à l'intégrité de la cour. Le paragraphe 4 devrait par conséquent préférer le procès public.
Le représentant d'Israël a souligné que la déclaration de l'accusé n'est pas la meilleure manière d'aborder le procès. La cour doit s'assurer que l'accusé comprend bien les chefs d'accusation qui lui sont imputés.
La représentante de la Malaisie a indiqué que son pays appuie la disposition du paragraphe 1 d) de l'article 38 qui autorise l'accusé à plaider coupable ou non coupable.
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Le représentant de Singapour a estimé que pour ce qui est de l'alinéa d) du paragraphe premier de l'article 38, il convient, à l'instar de ce qu'a souligné le Canada, de parvenir à un équilibre entre des points de vue divergents et d'essayer de rapprocher des intérêts contradictoires. Il faut se demander si la cour, de par ses ressources limitées, peut se payer le luxe de conduire un procès long et donc coûteux. Il importe aussi de respecter la présomption d'innocence de l'accusé et il faut de façon générale veiller aux droits de la défense. La solution se trouve sans doute entre la tenue d'un procès et la déclaration de culpabilité faite par l'accusé. Le représentant a fait valoir que, par rapport au paragraphe 3 du projet de la CDI, les articles 63 et 64 du projet australien constituent une amélioration. Selon lui, il faut éviter le risque de sensationnalisme qui risque de porter atteinte à la sérénité des débats et à la crédibilité de la cour. De même, les témoins doivent pouvoir être interrogés et "contre-interrogés" par la défense. En ce sens, il faut amender l'alinéa b) du paragraphe 5.
Le représentant du Venezuela a souligné que l'idée de culpabilité telle qu'elle est présentée à l'article 38 est acceptable même si elle ne saurait être considérée comme déterminante pour l'issue du procès. Le projet présenté par l'Argentine, notamment les articles 74 et 75 du projet contiennent des dispositions qui pourraient être examinées au titre de l'étude de l'article 38. Il convient d'amender le paragraphe 4 du projet pour inclure la possibilité de tenir des séances à huis clos afin de protéger l'accusé et de préserver le secret des débats. Les pouvoirs de la Chambre tels qu'ils figurent au paragraphe 5 sont tout à fait acceptables.
Le représentant de la Fédération de Russie a rappelé que les différences qui existent entre les systèmes juridiques n'entraînent nullement pour l'accusé une obligation de plaider dans un sens ou dans un autre. De plus, la possibilité pour l'accusé de plaider coupable risque d'entraîner le recours à une procédure abrégée adoptée en raison du fait que l'accusé a plaidé coupable. Or, une telle procédure risquerait d'escamoter le procès. Pour toutes ces raisons, il importe donc de rejeter , le "plea bargaining" ou "marchandage des peines" que ne reconnaît pas le système russe.
Le représentant du Royaume-Uni a déclaré que le projet de statut devra inclure les meilleures dispositions de chacun des systèmes. Il convient d'utiliser au mieux les ressources disponibles et de les consacrer notamment aux cas où la culpabilité n'est pas déterminée.
Le représentant de l'Autriche a estimé que cette disposition, -celle de l'article 38, paragraphe 1d)-, est davantage associée au fait de la présence de jurés ou non. La déclaration de culpabilité n'est qu'un élément de preuve supplémentaire qui ne saurait influencer le juge. L'Autriche émet l'espoir que la procédure abrégée, suggérée par l'Argentine, mérite un examen particulier et pourrait servir de base à un compromis.
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Le représentant de l'Indonésie a déclaré que les dispositions discutées doivent être examinées dans le cadre des objectifs à l'origine de la création de la cour. Les dispositions de cet article doivent accorder à l'accusé les conditions d'un procès équitable, libre de toute motivation politique.
Le représentant de la Chine a fait remarquer que le droit chinois ne prévoit pas de dispositions à cet égard. Plaider coupable ne constitue en effet pas un fondement et ne saurait déterminer le verdict. Le juge ne saurait donc prononcer un jugement sur un simple aveu. Il devra néanmoins considérer tous les éléments associés au crime et tenir compte des autres preuves afin de déterminer la culpabilité de l'accusé.
Le représentant de la France a rappelé que son pays n'est pas opposé, par principe, à ce que l'accusé puisse plaider coupable. Seulement, à partir du moment où l'on permet à l'accusé de plaider coupable, une procédure abrégée est mise en place. Or, c'est celle-ci que ne saurait accepter la France qui souhaite que, face à la communauté internationale, les débats puissent normalement avoir lieu et que justice soit faite, en laissant la possibilité aux témoins de participer aux débats. La France ne souhaite pas que des aveux de circonstance de l'accusé puissent escamoter le procès, ce, afin de défendre le droit des victimes dont les souffrances, elles, n'ont pas été abrégées.
Examen des questions relatives à la procédure, à la nécessité d'un procès impartial et aux droits de l'accusé : droits de l'accusé (article 41 du projet de statut)
Documentation
Aux termes du premier paragraphe de l'article 41, toute personne accusée en vertu du présent statut a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement et, sous réserve de l'article 43, publiquement, et au moins aux garanties suivantes :
a) être informée, dans les meilleurs délais et en détail, dans une langue qu'elle comprend, de la nature et des motifs de l'accusation;
b) disposer du temps et des moyens nécessaires pour préparer sa défense et communiquer avec le conseil de son choix;
c) être jugée sans retard excessif;
d) sous réserve des dispositions du paragraphe 2 de l'article 37, être présente au procès, assurer elle-même sa défense ou se faire assister par un défenseur de son choix ou bien, si elle n'a pas de défenseur, être informée de son droit d'en avoir un et se voir attribuer d'office un défenseur par la Cour, sans frais si elle n'a pas les moyens de le rémunérer;
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e) s'interroger ou faire interroger les témoins à charge et obtenir la comparution et l'interrogatoire des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge;
f) si la langue employée à l'une quelconque des audiences de la Cour ou dans l'un quelconque des documents qui lui sont présentés n'est pas une langue que l'accusé comprend et parle, bénéficier à titre gratuit de l'assistance d'un interprète compétent ou des traductions nécessaires pour satisfaire aux exigences de l'équité;
g) ne pas être forcée de témoigner contre elle-même ou de s'avouer coupable;
Le paragraphe 2 dispose que les éléments de preuve à décharge dont le Parquet vient à disposer avant la conclusion du procès sont communiqués à la défense. En cas de doute quant à l'application du présent paragraphe ou quant à l'admissibilité des éléments de preuve, la Chambre de première instance décide.
Echange de vues sur l'article 41
Le représentant de l'Australie a estimé que le respect des droits fondamentaux de la défense se rapporte directement à la question de la crédibilité de la cour, c'est-à-dire la façon dont la cour rendra justice. Il faut prendre comme point de départ les normes juridiques internationales et les comparer aux systèmes nationaux. Le paragraphe premier de l'article 30 du projet de statut qui est relatif à la signification de l'acte d'accusation constitue une garantie fondamentale. Il faudra veiller à ce que les documents soient remis à l'avocat de la défense. L'Australie appuie l'alinéa d) du premier paragraphe de l'article 41. Elle estime que, tout en appuyant le droit de l'accusé de se défendre, la cour devrait avoir le droit de désigner dans ce cas l'avocat qui conseillerait l'accusé.
L'Australie est d'avis que l'on peut également donner à l'accusé le droit de choisir son défenseur sur une liste. Le droit de l'accusé à communiquer avec son défenseur doit être reconnu par le statut. Toutefois, rien n'est prévu sur le droit de communiquer dans le secret, comme le prévoient certaines dispositions juridiques américaines. Il faut inclure dans le statut la diffusion de toutes les preuves au profit de la défense. Pour autant, l'information fournie par les Etats au Procureur devrait être protégée. Il importe de façon large de garantir que le procès est conduit avec diligence. Le projet de statut doit prévoir la possibilité de contre- interroger les témoins à charge. L'alinéa f) du premier paragraphe, dans la mesure où il ne porte pas atteinte aux droits de l'accusé, peut rester en l'Etat.
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Le représentant de la Suisse a souhaité qu'à l'alinéa d) du premier paragraphe de l'article 41 la mention "sous réserve des dispositions de l'article 37, paragraphe 2" soit supprimée. La Suisse souhaite que les dispositions relatives à la commission d'office des avocats fasse partie du statut.
Le représentant de Singapour a fait valoir que, s'agissant de l'article 41, une liste des témoins à charge devrait être communiquée à la défense. Le Parquet devrait être informé de tous les moyens qui seront utilisés par la défense. Singapour est favorable au système de désignation du défenseur qui serait choisi à partir d'une liste de cinq personnes retenues en raison de leur expérience et de leur aptitude morale. Les communications entre l'accusé et le défenseurs ne sont que la conséquence d'un droit fondamental.
Le représentant des Etats-Unis a jugé fort intéressantes les déclarations faites par l'Australie et Singapour. Les Etats-Unis font valoir que le droit d'interroger et de contre-interroger les témoins est à rapprocher des dispositions relatives à leur protection. Les Etats-Unis sont fortement réservés vis-à-vis de l'interrogatoire de témoins anonymes. En effet, la cour doit éviter certains témoignages fantaisistes, mais aussi veiller à leur opposabilité et à la crédibilité des débats.
Le représentant de la République tchèque a déclaré que l'instruction et l'appel font partie de la procédure. Afin de dissiper tout doute, l'article devrait être révisé afin que le libellé "accusé" soit remplacé par "toute personne".
Le représentant de l'Argentine a déclaré que le droit à un défenseur devrait être étendu. Il faut automatiquement accorder une défense à l'accusé qui n'a pas les moyens de faire face aux dépenses inhérentes à la défense.
Le représentant de la France a estimé qu'un article sur le droit au secret de la correspondance entre l'accusé et son défenseur est absolument nécessaire.
Le représentant du Canada a déclaré qu'il ne faut pas assujettir les droits de l'accusé à ceux des victimes. Concernant l'alinéa e, le Canada estime qu'il est fondamental de contre-interroger les témoins à charge. Le Président peut demander au Procureur de soumettre des preuves à la défense.
La représentante du Mexique a estimé que tous les accusés doivent avoir le droit de s'entretenir confidentiellement avec leurs défenseurs.
La représentante de Nouvelle-Zélande a souligné l'importance de l'article 41 dans la mesure où celui-ci concerne les droits fondamentaux de l'accusé. Il importe de mentionner le droit des accusés à être présents au
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procès qui a déjà fait l'objet de discussions au sein du Comité préparatoire au titre de l'article 37. Il importe de veiller à ce que toutes les garanties de la défense soient respectées eu égard aux dispositions générales et minimales du droit international ayant trait aux droits de l'homme. Ce corpus de règles doit figurer à l'article 41. Il convient également de rappeler que toutes les personnes sont égales devant la Cour. Les garanties de la défense doivent être garanties de façon égale. Il y a également lieu d'ajouter une disposition relative au droit à réparation.
Le représentant du Lesotho a souscrit aux interventions faites par les représentants de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande. L'article 41 doit contenir les garanties minimales pour l'accusé et ne saurait comprendre une liste exhaustive des droits de l'accusé. Aussi, l'article 41 peut être accepté en l'état, même s'il faut ajouter des dispositions en ce qui concerne la confidentialité et la nécessité de faire preuve de diligence dans la conduite du procès.
Le représentant du Japon a rappelé que son pays a fait des propositions qui figurent au document A/AC.249/L.7. Selon lui, l'alinéa f) du paragraphe premier de l'article 41 qui est relatif à la traduction et l'interprétation pose un problème de coûts. Il s'agit de déterminer qui prendra ces coûts à sa charge.
Le représentant de l'Inde a mis l'accent sur le fait que les droits de l'accusé sont le point le plus important de l'administration de la justice par la future cour. Différents textes et normes juridiques internationaux contiennent des dispositions qui pourraient être repris plutôt que d'essayer de définir de façon abstraite les droits de l'accusé.
Le représentant du Saint-Siège a estimé que, s'agissant du marchandage des peines, il importe de laisser aux personnes poursuivies la possibilité de plaider coupable. Il faut rapprocher les dispositions contenues à l'article 38 de celles de l'article 41 qui a trait aux droits des accusés.
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