DH/G/437

LA SOUS-COMMISSION CONTINUE D'EXAMINER LA QUESTION DE LA VIOLATION DES DROITS DE L'HOMME PARTOUT DANS LE MONDE

7 août 1996


Communiqué de Presse
DH/G/437


LA SOUS-COMMISSION CONTINUE D'EXAMINER LA QUESTION DE LA VIOLATION DES DROITS DE L'HOMME PARTOUT DANS LE MONDE

19960807 Genève, 7 août -- La Sous-Commission de la lutte contre les mesures discriminatoires et de la protection des minorités a poursuivi, ce matin, son débat sur la question de la violation des droits de l'homme et des libertés fondamentales partout dans le monde.

Un expert a mis l'accent sur le fait que le droit le plus fondamental, à savoir le droit à la vie, est aujourd'hui le plus gravement violé à travers le monde, que ce soit par le biais de massacres, d'exécutions sommaires, d'embargos économiques, de déséquilibres économiques, ou de comportements individuels intolérants. Un autre expert a souligné que si l'importance des droits de l'homme est universellement reconnue, il ne sera pas possible d'en assurer le respect sans tenir compte des particularités régionales, historiques, culturelles, religieuses dans lesquelles ils s'inscrivent. Un troisième membre de la Sous-Commission a déploré le fait que la troisième génération des droits de l'homme, qui comprend notamment le droit au développement, ait pratiquement disparu. Il a par ailleurs estimé que, si la mondialisation a, pour l'heure, permis d'asseoir l'hégémonie des États-Unis, il faudra à l'avenir compter avec d'autres puissances occidentales, avec la Chine et avec la Russie. Il a également affirmé que les Africains ne doivent pas accepter un second pillage de leur continent et résister aux nouvelles forces de «recolonisation».

Sri Lanka et la Turquie sont intervenues pour exprimer leur volonté de combattre le terrorisme qui sévit sur leurs territoires respectifs.

Les organisations non gouvernementales suivantes ont également pris part au débat: Fédération internationale des droits de l'homme, Conseil international de traités indiens, Centre Europe-Tiers monde, Fédération mondiale de la jeunesse démocratique, Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples, Organisation arabe pour les droits de l'homme, International Human Rights Association of American Minorities, International Educational Development et Humanitarian Law Project, Association internationale des juristes démocrates, International Work Group for Indigenous Affairs, Ligue internationale pour les droits et la libération des

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peuples, Survivance internationale, Fédération internationale de l'action des chrétiens pour l'abolition de la torture. Ces organisations se sont attachées à dénoncer les violations des droits de l'homme dont souffrent nombre de populations, et particulièrement certaines minorités autochtones, à travers le monde.

La Sous-Commission a nommé son troisième Vice-Président en la personne de M. Hector Fix Zamudio (Mexique).

Cet après-midi, à 15 heures, le Groupe de travail sur l'administration de la justice et les droits de l'homme des détenus se réunira sous la présidence de M. Louis Joinet, expert de la France. La Sous-Commission poursuivra demain matin à 10 heures, en séance plénière, son débat sur la question de la violation des droits de l'homme partout dans le monde.

Déclarations des experts

M. EL-HADJ GUISSÉ, expert du Sénégal, a déclaré que le droit le plus gravement violé aujourd'hui est le droit à la vie, qui est pourtant le plus fondamental. À cet égard, le continent africain constitue l'exemple le plus frappant avec le Rwanda et le Burundi. Toutefois, a-t-il poursuivi, il n'y a pas que les massacres organisés qui portent atteinte au droit à la vie. Les infanticides, désormais fréquents dans tous les pays du monde, les assassinats d'enfants de la rue, les exécutions sommaires, les disparitions forcées sont monnaie courante et leurs victimes se comptent par milliers.

M. Guissé a également constaté que les industries d'armement sont aujourd'hui les seules qui soient florissantes et les trafiquants d'armes sont les nouveaux riches de nos sociétés. Il convient à cet égard de relever que les cinq membres du Conseil de sécurité fournissent à eux seuls 85 à 90% des armes utilisées dans le monde. Mais le droit à la vie est également violé lorsque l'on maintient des populations entières dans un état de pauvreté absolue qui les conduit inévitablement à la mort par la faim, la maladie et la misère. Le déséquilibre économique du monde, en excluant la majorité de la population de la jouissance des richesses et des ressources de notre planète, conduit aussi à l'extermination progressive des populations pauvres. De plus, en détruisant l'écosystème et en violant ainsi le droit de chacun à un environnement sain, les industries polluantes et les trafiquants de déchets portent également atteinte au droit à la vie.

M. Guissé a également dénoncé «la mise à mort en masse de certaines populations vulnérables» que constitue l'embargo imposé à certains États en guise de sanction. Il a ainsi souligné que des milliers d'enfants iraquiens ont perdu la vie durant la période d'embargo total qui a frappé l'Iraq.

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L'expert a par ailleurs tenu à dénoncer la situation des réfugiés de par le monde, estimant que, de nos jours, «les camps de réfugiés sont des camps de concentration et d'extermination sous l'oeil bienveillant de la communauté internationale». M. Guissé a enfin déploré les conditions de vie dégradantes qui règnent dans les milieux carcéraux où des milliers de détenus meurent dans le silence complice des autorités.

M. FAN GUOXIANG, expert de Chine, a fait valoir que si l'importance des droits de l'homme est reconnue universellement, il n'en reste pas moins qu'il est impossible de parvenir à assurer leur respect universel sans tenir compte des particularités régionales, historiques, culturelles et religieuses dans lesquelles ils s'inscrivent. La notion même de droits de l'homme s'est développée au cours des siècles, et est étroitement liée à l'environnement social spécifique qui a permis sa conceptualisation. En Europe, par exemple, la notion de droits de l'homme est intimement liée à une dimension politique tandis qu'en Amérique latine, elle est davantage marquée par la notion de coopération, de dialogue et de solidarité jugée indispensable à la réalisation des droits de l'homme. En Afrique, la Déclaration de Tunis a mis l'accent sur le fait que la liberté politique est vaine si elle n'est pas accompagnée par le respect des droits économiques, sociaux et culturels des peuples. En Asie, la déclaration de Bangkok de 1983 a mis l'accent sur l'importance du respect des notions de souveraineté et d'intégrité territoriale, de non-ingérence dans les affaires intérieures des États et de non-recours au principe des droits de l'homme comme moyen de pression.

Les droits de l'homme, a poursuivi l'expert, ne sont pas des idées abstraites et informes, elles reflètent au contraire les conceptions et les philosophies, les cultures et les religions des différentes communautés humaines. La tradition occidentale considère les droits de l'homme comme des droits de l'individu tandis que les pays en développement ont davantage tendance à les envisager en tant que droits collectifs, droits des communautés économiques et sociales, droits des nations. En raison de leur évolution historique, les pays en développement mettent l'accent sur le droit à l'indépendance et au développement, alors que, pour leur part, les pays orientaux insistent sur l'engagement envers la famille, le voisinage, la communauté et la nation. La tradition asiatique ne reconnaît pas la liberté absolue et illimitée des individus. L'expert a souligné que si les politicologues occidentaux estiment que la démocratie et la liberté politique ouvrent la voie au développement économique, les experts des pays en développement soulignent que l'harmonie sociale et le progrès économique conditionnent la réalisation des droits civils et politiques.

Les droits de l'homme ont une valeur universelle, a poursuivi M. Fan, mais si nous voulons assurer leur respect universel, il importe au plus haut point de respecter les traditions et les traits spécifiques des différentes régions du monde. Nous vivons dans un monde qui n'est plus ni bipolaire ni

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unipolaire mais qui évolue dans une multitude de directions, a-t-il dit. Il faut que nous nous dotions d'un véritable «pluralisme démocratique international». Ce dont nous avons besoin, c'est d'une universalité impartiale du concept de droits de l'homme, pas d'une hégémonie politique recouverte du voile des droits de l'homme, a estimé l'expert.

M. AHMED KHALIFA, expert de l'Égypte, a affirmé que le fait que la situation des droits de l'homme à travers le monde se soit détériorée ces dernières années est un mauvais signe, tout comme est regrettable la «quasi- disparition» de la troisième génération des droits de l'homme qui comprend notamment le droit au développement. Il a estimé que, si les responsables du massacre de Srebrenica sont incontestablement les Serbes de Bosnie, la communauté internationale détient également une part importante de responsabilité. À cet égard, la communauté internationale doit affermir sa volonté de punir les responsables. L'expert a estimé nettement insuffisants les efforts déployés par le Tribunal pénal international de La Haye.

M. Khalifa a ensuite mis en exergue deux phénomènes qui ont retenu son attention, à savoir la mondialisation et la «recolonisation». Il a observé que la mondialisation aboutissait à une hégémonie politique et culturelle, la Guerre du Golfe s'étant ajoutée à ce phénomène pour permettre aux États-Unis d'occuper une nouvelle place sur la scène internationale. Mais «un joueur unique se fatigue rapidement et le ballon ne peut pas être toujours dans son camp» a-t-il poursuivi. M. Khalifa a ainsi relevé que les États-Unis imposent des embargos économiques sur Cuba et d'autres pays alors que les alliés de Washington ne l'entendent pas de la même oreille. L'hégémonie ne saurait être tolérée, a déclaré l'expert, confiant dans le fait que d'autres acteurs ne tarderont pas à investir la scène internationale. Ainsi, face à Washington, la Chine n'a pas reculé et est parvenue à obtenir la clause de la nation la plus favorisée. Avec d'autres pays occidentaux et «l'ours russe qui dort avec un oeil ouvert», la Chine est un des acteurs sur lesquels il faudra compter sur la scène internationale.

L'expert a par ailleurs reconnu que le continent africain a certes besoin d'aide mais qu'il ne faut pas dilapider ses ressources. Il ne faut pas non plus s'ingérer dans les affaires intérieures des pays africains qui doivent résister aux nouvelles forces de recolonisation. «Les Africains ne doivent pas admettre un second pillage de leur continent» a déclaré M. Khalifa. En outre, il est évident que les économies ne se développent pas en présence de chars étrangers. Ainsi, a conclu l'expert, dans le domaine des droits de l'homme, «nous sommes en train de défaire ce qui avait été fait».

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Autres déclarations

M. ABDOUL GADIRY DIALLO (Fédération internationale des droits de l'homme) s'est inquiété de la dégradation de la situation en Turquie où, en 1995, son organisation a recensé 461 journalistes détenus, 231 disparitions en détention et 1412 allégations de torture. Il a en conséquence souhaité que la Sous-Commission demande au Gouvernement turc d'accepter sans délai l'application de toutes les procédures spéciales en matière de droits de l'homme, en particulier par la visite du Rapporteur spécial sur la liberté d'opinion et d'expression et du Rapporteur spécial sur les exécutions sommaires. Il s'est également inquiété de la «très grave dégradation» de la situation des droits de l'homme en Tunisie et a rappelé que le Parlement européen a adopté pour la première fois, le 23 mai dernier, une résolution faisant part de sa consternation face à la dégradation de la situation dans le pays. Le représentant a également mis l'accent sur les violations massives et systématiques qui, de l'avis de son organisation, se poursuivent en Chine. Il a notamment indiqué que la détention arbitraire est une pratique courante dans le pays, régi par un arsenal de réglementations administratives dont la forme la plus courante est la rééducation par le travail, peine, a-t-il précisé, qui est administrée par la police en dehors du cadre judiciaire. Le représentant a appelé la Sous-Commission à condamner les violations des droits de l'homme en Chine.

Mme ANDREA CARMEN (Conseil international de traités indiens) a dénoncé les effets de la colonisation sur les peuples autochtones, et particulièrement sur leur droit à pratiquer leurs religions traditionnelles. Citant les situations qui prévalent aux États-Unis, notamment en Arizona et au Montana; au Canada, notamment en Ontario et en Colombie britannique; au Guatemala; et dans la région située entre le Sud de la Californie et le Nord du Mexique, elle a fait état de déplacements et de réinstallations forcées de populations autochtones, de la perte de leur médecine traditionnelle et de pollution voire de destruction de leurs terres sacrées. Elle a demandé à la Sous-Commission de reconnaître que le droit des peuples autochtones à pratiquer leurs religions traditionnelles ne saurait être dissocié de leur droit à vivre sur leurs terres d'origine. Elle souhaité que le Rapporteur spécial sur la question de l'intolérance religieuse, M. Abdelfattah Amor, se rende notamment en Arizona et en Colombie britannique.

M. ABDESIAM OMAR LAHCEN (Centre Europe-Tiers Monde) a évoqué les intimidations et les emprisonnements de nombreux Sahraouis. Depuis l'entrée du cessez-le-feu en septembre 1991, des centaines de Sahraouis ont été traduits devant les tribunaux, souvent militaires, qui les ont condamnés pour avoir manifesté pacifiquement. En mai dernier, de nombreux jeunes ont été arrêtés et torturés pour avoir distribué des tracts et brandi le drapeau de la République arabe sahraouie démocratique. Il a demandé à la Sous-Commission de procéder à des vérifications sur ses allégations si elle le juge souhaitable et de procéder à la nomination d'une commission d'enquête qui devrait se rendre dans le territoire et dans les camps de réfugiés afin de témoigner de la situation.

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M. ERDAL KILLI (Fédération mondiale de la jeunesse démocratique) a dénoncé les violations des droits de l'homme et des libertés fondamentales en Turquie, où les droits de l'homme des Kurdes sont violés de manière persistante. Il a déploré que la guerre entre le PKK et l'armée turque ait causé, ces dernières années, de nombreuses victimes parmi les civils. Il a estimé que le Gouvernement d'Ankara est responsable de cette guerre dans la mesure où les Kurdes revendiquent l'exercice de leur droit inaliénable à l'autodétermination. Il a également affirmé que la situation s'est détériorée ces derniers temps avec la militarisation intensive du conflit, et le recours à des mercenaires qui occupent les villages kurdes. Le Gouvernement turc a également évacué de force les habitants kurdes de plus de 3 000 villages. La Turquie doit respecter la Convention internationale sur le crime de génocide et toutes les parties au conflit, particulièrement le Gouvernement turc, doivent prendre des mesures pour assurer le respect des droits de l'homme dans le pays.

M. JUSFIQ HADJAR (Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples) a attiré l'attention de la Sous-Commission sur la situation en Indonésie. La semaine dernière encore, des jeunes gens, probablement une centaine, ont été assassinés à l'arme blanche pour avoir voulu parler de leur avenir dans les locaux du Parti démocratique indonésien. Nul ne sait où ils se trouvent aujourd'hui, a-t-il dit. Les chrétiens indonésiens sont également persécutés, a-t-il dit; plus de 200 églises ont été brûlées depuis trois ans. Le représentant, qui a rappelé que la Sous-Commission est tenue informée depuis dix ans des graves violations des droits de l'homme qui ont cours en Indonésie, a estimé qu'il est grand temps qu'elle prenne les mesures nécessaires pour mettre un terme à ces violations.

Un représentant (Organisation arabe pour les droits de l'homme) a dénoncé l'escalade de la violence dans un grand nombre de pays arabes. Il a également dénoncé le bouclage imposé à Gaza par Israël depuis janvier dernier ainsi que l'exode des populations dans le Sud Liban et dans la plaine de la Bekaa. À Canaa, les forces israéliennes ont poursuivi et assassiné des civils qui fuyaient la ville, a-t-il ajouté. Il a estimé que le blocus économique contre l'Iraq devrait être levé. Si la conscience internationale s'est réveillée pour libérer le Koweït, pourquoi n'intervient-elle pas pour sauver les enfants qui sont victimes de cet embargo? Le représentant a également attiré l'attention de la Sous-Commission sur les violations de droits de l'homme dont sont victimes nombre d'activistes des droits de l'homme, parmi lesquels figure un membre du Conseil d'administration de l'Organisation arabe pour les droits de l'homme.

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Mme GERMAINE TREMMER (International Human rights Association of American Minorities) a évoqué la situation de la nation Nuxalkmc, au Canada, qui se bat contre des projets de déforestation dans la province de Colombie britannique, processus qui pollue les rivières et la terre et détruit les écosystème de la région. Ceux qui ont publiquement protesté ont été arrêtés et incarcérés et se voient refuser des soins médicaux. La représentante a fait valoir que, sous le couvert du développement économique de la région, c'est un véritable génocide qui est train de se produire. Elle a en conséquence souhaité que la Sous-Commission désigne un rapporteur spécial chargé d'examiner la situation dans la province et qu'elle demande l'examen immédiat de toutes les procédures en cours, en violation des droits de la nation Nuxalkmc.

M. GERRY FOX (International Educational Development et Humanitarian Law Project) a fait état de trois rapports émanant du réseau mexicain des droits de l'homme et qui ont été présentés devant la Commission interaméricaine des droits de l'homme le mois dernier. Il a affirmé que si le Gouvernement mexicain présente à la communauté internationale une image de pays respectueux des droits de l'homme, la réalité, pour le peuple mexicain, est tout autre. En effet, les exécutions sommaires et les disparitions sont fréquentes, la torture est une pratique d'interrogation couramment utilisée par la police en toute impunité et les menaces de mort contre les défenseurs des droits de l'homme sont de plus en plus répandues. La récente approbation d'une législation de sécurité nationale viole le droit international en matière de droits de l'homme et la corruption au sein de la police et des forces de sécurité publiques est fréquente. C'est pourquoi la Sous-Commission devrait adopter une résolution demandant au Gouvernement mexicain de prendre des mesures pour mettre un terme à l'impunité dont jouissent les responsables de ces exactions. La Sous-Commission devrait également recommander à la Commission des droits de l'homme de nommer un rapporteur spécial qui serait chargé d'enquêter sur la situation des droits de l'homme au Mexique.

M. YORIO SHIOKAWA (Association internationale des juristes démocrates) a insisté sur le mauvais traitement des travailleurs étrangers en situation irrégulière au Japon, dont le chiffre s'élevait à 280 000 en 1994. Il a expliqué qu'en raison de leur situation, les employeurs japonais se livrent à des pratiques illégales telles que le non-paiement des salaires, la rétention des passeports, les expulsions forcées. M. Shiokawa a demandé au Gouvernement japonais, de mettre fin à ces violations des droits de l'homme.

M. HAMAD MOSOUD HAMAD (International Work Group for Indigenous Affairs) a attiré l'attention sur la situation des droits de l'homme à Zanzibar, où les droits de l'homme sont bafoués par le régime actuel au mépris d'une longue tradition de garanties constitutionnelles pour le respect des droits de l'homme. Il a dénoncé les assassinats, la torture, les intimidations, les

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licenciements abusifs dont sont victimes des civils innocents et des opposants au régime. Il a déploré que des personnes soient inculpées de délits pénaux alors que leurs cas sont clairement politiques. Ainsi, toute personne affiliée à un parti d'opposition est présumée avoir commis un grave délit. Il convient également de dénoncer le monopole étatique exercé sur l'information. Le représentant a espéré que la Sous-Commission exprimera sa préoccupation en ce qui concerne la situation des droits de l'homme à Zanzibar.

Mme VERENA GRAF (Ligue internationale pour les droits et la libération des peuples) a fait valoir que la proposition de la Commission des droits de l'homme visant à établir un centre permanent des droits de l'homme en Colombie n'a pas donné de suites du côté colombien. Or, a-t-elle poursuivi, l'élimination d'opposants politiques, de dirigeants syndicaux, d'étudiants ou de défenseurs des droits de l'homme est présentée par les autorités comme faisant partie des «mesures de représailles». En outre, l'annonce par le Président Samper, en avril dernier, de son intention de rétablir la peine de mort est très préoccupante, a estimé la représentante. Elle s'est également inquiétée du sort de ceux qui ont été arrêtés en Indonésie la semaine dernière et en particulier des trois syndicalistes qui seront jugés pour «activités subversives», délits passibles de la peine de mort. Elle a également évoqué la situation au Sahara occidental et a attiré l'attention des membres de la Sous-Commission sur le cas de centaines de Sahraouis déportés vers le Maroc au moment où les autorités marocaines font venir des colons marocains que le Maroc veut imposer comme votants au référendum.

M. Z. KALIMOA (Survivance internationale) a centré son intervention sur la situation des droits de l'homme des Batwa au Rwanda. Dans ce pays, la forte majorité des Bahutu et des Batutsi profitent de leur position privilégiée pour écraser la minorité des Batwa, laissée à elle-même dans une misère extrême. Les pygmées Batwa, qui sont pourtant les pionniers du peuplement du Rwanda, ne disposent plus de lopins de terre, ils ne sont pas représentés dans les structures administratives, n'ont pas accès à la scolarisation, à l'emploi ou à l'usufruit de leur patrimoine forestier. Les églises non plus n'ont rien fait pour les Batwa a ajouté le représentant. M. Kalimoa a demandé que les Batwa emprisonnés à la suite des événements de 1994 comparaissent sans tarder devant la justice et qu'une assistance internationale leur soit apportée notamment pour que des avocats soient mis à leur disposition.

M. ZE ROBERTO SEIXAS (Fédération internationale de l'action des chrétiens pour l'abolition de la torture) a évoqué les tortures et les mauvais traitements dont il a été le témoin en tant qu'infirmier dans plusieurs hôpitaux du Timor oriental ainsi que les électrochocs et les brûlures qui lui ont été infligés lorsqu'il était en détention en 1983. Il s'est demandé pourquoi la communauté internationale, qui est régulièrement tenue informée

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des violations massives des droits de l'homme en Indonésie, n'a pris aucune mesure efficace pour mettre un terme à la terreur qu'inflige le Gouvernement indonésien à la population. «Ce n'est pas parce que nos droits sont violés depuis plus de 20 ans qu'ils sont moins importants que ceux des Koweïtiens ou des Bosniaques» a-t-il notamment déclaré. Il a en conséquence exhorté la Sous-Commission à demander l'envoi d'une mission de visite au Timor oriental du Groupe de travail sur la détention arbitraire ainsi que du Groupe de travail sur les disparitions forcées.

M. H.E. BERNARD A.B. GOONETILLEKE (Sri Lanka) a réitéré l'engagement de son Gouvernement en faveur d'une solution pacifique des problèmes impliquant les provinces du Nord et de l'Est du pays, solution qui devrait être trouvée grâce aux délibérations en cours au sein du Comité parlementaire sur la réforme constitutionnelle. Sri Lanka se félicite des mesures prises récemment par certains membres de la communauté internationale pour lutter contre le terrorisme. Il a ajouté que depuis la dernière session de la Sous-Commission, Sri Lanka a été le théâtre d'une escalade des actes terroristes. Ces attaques visaient à ruiner l'économie de l'île et à amener le Gouvernement à riposter afin de justifier en retour la poursuite du combat armé du LTTE (Tigres tamouls). Le Gouvernement de Sri Lanka est à la recherche de stratégies alternatives permettant d'impliquer la population tamoule du Nord de la péninsule dans le processus de paix. Le retour volontaire, dans la péninsule de Jaffna, de près de 450 000 civils Tamouls déplacés internes, après l'intervention dans la région des forces de sécurité, est une réaffirmation de la confiance que la communauté tamoule a placé dans le Gouvernement et dans le processus de paix. Le Gouvernement est conscient du fait que la paix ne pourra être restaurée si le processus en cours au sein du Comité parlementaire ne s'accompagne pas de mesures sérieuses visant à réhabiliter et réinstaller les personnes qui sont revenues dans la péninsule de Jaffna, région qui doit en outre être reconstruite.

M. TUGAY ULUCEVIK (Turquie) a fait valoir que le terrorisme, qui ne connaît pas de frontières, continue de faire des victimes partout dans le monde et que la Sous-Commission doit s'efforcer de parvenir à élaborer un document de travail sur le terrorisme et les droits de l'homme. La Turquie, a-t-il indiqué, a été elle-même victime de campagne odieuses de terroristes du PKK qui ont coûté la vie à des milliers de civils innocents. Il est étonnant, a-t-il poursuivi, que ce soient les terroristes qui expliquent que leur violence aveugle sert en réalité à défendre les droits de l'homme. Rappelant que son pays est déterminé à mettre un terme au terrorisme du PKK tout en s'efforçant de bien distinguer entre les victimes et les coupables, M. Ulucevik s'est étonné que son pays soit l'objet de tant de critiques au moment même où il livre combat au terrorisme du PKK. Il a expliqué que son pays a pris des mesures importantes pour améliorer la défense des droits de l'homme et assurer, notamment, une meilleure représentation politique de toutes les composantes de la société turque. La loi anti-terroriste a également été récemment amendée avec effet rétroactif et deux cents détenus ont été ainsi libérés.

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