LE CONSEIL DE SECURITE EST GRAVEMENT PREOCCUPE PAR LES INFORMATIONS RECENTES SUR L'EVOLUTION DE LA SITUATION POLITIQUE AU BURUNDI
Communiqué de Presse
CS/715
LE CONSEIL DE SECURITE EST GRAVEMENT PREOCCUPE PAR LES INFORMATIONS RECENTES SUR L'EVOLUTION DE LA SITUATION POLITIQUE AU BURUNDI
19960724 APRES-MIDI CS/715 Il condamne toute tentative de renverser le gouvernement légitime actuel ainsi que le récent massacre de civils à BugendanaA la suite de consultations officieuses sur la situation au Burundi, le Président du Conseil de sécurité, M. Alain Dejammet (France), a fait cet après-midi la déclaration suivante, au nom des membres du Conseil:
"Le Conseil de sécurité est gravement préoccupé par les informations récentes sur l'évolution de la situation politique au Burundi. Il condamne vigoureusement toute tentative de renverser le Gouvernement légitime actuel par la force ou par un coup d'État.
Le Conseil prend note de la lettre datée du 22 juillet 1996 que le Secrétaire général a adressée à son Président (S/1996/591). Il condamne le massacre de civils, dont plus de 300 femmes, enfants et vieillards à Bugendana, commune de la province de Gitega. Il appelle toutes les parties au conflit du Burundi à cesser immédiatement tout acte de violence et à coopérer pleinement avec tous ceux qui cherchent à mettre fin au cycle vicieux de la violence. Il invite instamment toutes les parties à faire preuve de modération et il demande aux autorités du Burundi de procéder à une enquête appropriée sur le massacre.
Une fois de plus, le Conseil demande instamment aux autorités et à toutes les parties concernées au Burundi de mettre à l'écart leurs divergences, de renoncer à l'emploi de la force et de faire preuve de la ferme volonté politique de parvenir à un règlement rapide du conflit.
Le Conseil déplore le rapatriement forcé de réfugiés rwandais auquel il a été procédé récemment dans les camps de réfugiés de Kabezi et de Ruvumbu et appelle le Gouvernement du Burundi à honorer les obligations internationales qu'il a assumées en vertu de la Convention du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, et à renoncer à toute nouvelle mesure de refoulement des réfugiés. Le Conseil est également préoccupé par des informations d'où il ressort que l'opération de rapatriement forcé aurait lieu en coopération avec le Rwanda.
Le Conseil appuie les efforts déployés par le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et il invite instamment toutes les parties à travailler avec le HCR pour faire en sorte que les droits des réfugiés soient respectés. Le Conseil appelle la communauté internationale à répondre favorablement au récent appel concernant le financement des activités du HCR dans la région.
Le Conseil souligne qu'il appuie pleinement les efforts déployés par l'ancien Président Nyerere, notamment les accords conclus au Sommet régional d'Arusha du 25 juin 1996 (S/1996/557), et se félicite de ce que l'Organisation de l'unité africaine (OUA) appuie sans réserve ces accords. Il appuie également l'acceptation par le Sommet régional d'Arusha de la demande formulée par le Gouvernement du Burundi en ce qui concerne l'octroi d'une assistance pour la sécurité afin de compléter et de renforcer les pourparlers de paix de Mwanza et de créer des conditions de sécurité favorables permettant à toutes les parties de participer librement au processus de Mwanza. Le Conseil encourage toutes les parties à oeuvrer de manière constructive aux côtés de l'ancien Président Nyerere. Il demande instamment au Gouvernement du Burundi d'autoriser le Comité technique international, créé lors du Sommet d'Arusha, à entrer dans le pays afin de mettre au point les aspects logistiques du plan régional de paix.
Le Conseil souligne combien il est important que l'Organisation des Nations Unies continue de coopérer avec l'OUA, l'Union européenne, les États-Unis d'Amérique et les autres pays et organisations intéressés, l'ancien Président Nyerere assurant la coordination, afin d'instaurer un dialogue politique global entre les parties au Burundi. À cet égard, le Conseil déclare appuyer les efforts de l'OUA et de sa mission d'observateurs (MIOB) et se félicite de la prorogation du mandat de la MIOB.
Le Conseil réaffirme l'importance qu'il attache à la planification d'urgence recommandée au paragraphe 13 de la résolution 1049 (1996), et il prend note des consultations qui ont déjà eu lieu. Compte tenu des événements récents, il demande au Secrétaire général et aux États Membres concernés de poursuivre leurs efforts afin de faciliter la planification d'urgence en vue d'une prompte réaction humanitaire au cas où se produiraient des violences généralisées ou une grave détérioration de la situation humanitaire au Burundi.
Le Conseil rappelle à toutes les parties burundaises les responsabilités qui leur incombent en ce qui concerne le rétablissement de la paix et de la stabilité au Burundi, il souligne sa détermination de suivre de près les événements dans ce pays et il rappelle qu'il est prêt, comme il l'a indiqué dans sa résolution 1040 (1996), à envisager l'adoption de mesures supplémentaires au cas où les parties ne feraient pas preuve de la volonté politique nécessaire pour trouver une solution politique à la crise. Le Conseil restera saisi de la question."
( suivre)
- 3 - CS/715 24 juillet 1996
Aux fins de son examen de la question, le Conseil de sécurité était saisi d'une lettre du Secrétaire général datée du 22 juillet dernier (S/1996/591), dans laquelle celui-ci communique au Conseil de nouvelles informations "préoccupantes" sur la situation au Burundi et souligne que la communauté internationale doit prendre d'urgence des mesures concrètes pour mettre un terme au cycle de la violence et prévenir une autre catastrophe dans la région des Grands Lacs d'Afrique centrale. Il y juge nécessaire d'accélérer la planification d'une force multinationale d'intervention.
Dans cette lettre, le Secrétaire général indique notamment que depuis les explications orales qu'il a fournies sur le Burundi la semaine dernière, un nouveau massacre de civils a eu lieu, cette fois à Bugendana, dans la province centrale de Gitega, au cours duquel plus de 300 femmes, enfants et personnes âgées ont été massacrés. Le Secrétaire général rappelle qu'il a, par l'intermédiaire de son porte-parole, condamné dans les termes les plus vigoureux possibles ces massacres gratuits et ceux qui les avaient perpétrés, et demandé aux parties au conflit au Burundi de mettre immédiatement leurs actes de violence et de coopérer pleinement avec tous ceux qui cherchent à mettre fin au cercle vicieux des atrocités et des contre-atrocités.
Le Secrétaire général indique d'autre part que la vie à Bujumbura s'est arrêtée après que l'ex-Président, M. Jean-Baptiste Bagaza, qui préside actuellement le Parti pour le redressement national (PARENA), a appelé à une grève générale de deux jours pour protester contre le massacre et contre le plan d'"assistance en matière de sécurité" d'Arusha. M. Bagaza aurait également demandé le renversement du Gouvernement, qu'il a accusé de haute trahison, et la formation d'un front patriotique pour défendre la souveraineté du Burundi. Il semble que cette dernière réaction reflète un sentiment très répandu parmi les forces de sécurité du Burundi ainsi que parmi le CNDD, indique le Secrétaire général. Ces groupes antagoniques ont rejeté l'idée d'une force internationale de maintien de la paix au Burundi et ont juré d'en découdre avec tous les moyens à leur disposition. En conséquence, le Comité technique international, qui a été créé par le Sommet d'Arusha le 25 juin 1996 et chargé de mettre sur pied la logistique du plan de paix régional, n'a pas obtenu la permission de se rendre au Burundi. Le Conseil national de sécurité du Burundi lui-même n'a pas pu, la semaine dernière, se prononcer sur le déploiement et le mandat d'éventuels contingents, ni sur les différentes formules possibles en dehors du plan de paix.
Le Secrétaire général souligne que les rumeurs concernant un coup d'État imminent vont bon train, tandis qu'à Bujumbura, les manifestations sont devenues de plus en plus hostiles. Les groupes de jeunes Tutsis ont ouvertement exigé d'être admis dans les rangs de l'armée afin de combattre les rebelles hutus. Il estime par ailleurs que les opérations de sécurité menées actuellement pour fermer les camps de Kibezi et de Ruvumu aux réfugiés rwandais constituent un autre sujet de grave préoccupation. Selon les rapports reçus, plus de 3 000 réfugiés auraient été expulsés au Rwanda; 4 000 auraient fui dans les montagnes et plus de 12 000 seraient gardés dans
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- 4 - CS/715 24 juillet 1996
un stade de football local en attendant d'être expulsés. En outre, un grand nombre d'autres réfugiés auraient disparu à la suite des attaques lancées contre les camps et auxquelles ont participé des membres de la population tutsie locale. Le camp de Kibezi aurait été saccagé et les huttes détruites.
En début de séance, le Président du Conseil de sécurité avait adressé ses condoléances au Gouvernement et au peuple des Etats-Unis et des autres pays dont les citoyens ont perdu la vie dans la catastrophe aérienne du vol 800 de TWA.
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