LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL ADOPTE UN PROJET D'ARTICLES SUR LA RESPONSABILITÉ DES ÉTATS
Communiqué de Presse
CDI/G/18
LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL ADOPTE UN PROJET D'ARTICLES SUR LA RESPONSABILITÉ DES ÉTATS
19960723 Genève, 23 juillet -- La Commission internationale des droits de l'homme, qui tient sa quarante-huitième session du 6 mai au 26 juillet à Genève, a adopté en première lecture un projet de 60 articles sur la «Responsabilité des États» en cas de faits internationalement illicites.La responsabilité des États constitue un sujet important dont la complexité occupe les travaux de la Commission depuis 1963. Le projet d'articles sera soumis à l'examen de l'Assemblée générale et recueillera les commentaires des gouvernements. Son adoption par la Commission du droit international intervient peu après que la Commission ait eu terminé ses travaux sur un projet de Code des crimes contre la paix et la sécurité, autre sujet non moins important qui a mobilisé l'intérêt de la Commission depuis de nombreuses années.
Le texte portant sur la responsabilité des États comporte trois parties. La première traite de l'origine de la responsabilité des États et des circonstances dans lesquelles un État peut être tenu responsable de faits internationalement illicites. La deuxième partie traite des conséquences juridiques qu'un fait illicite peut entraîner au regard du droit international. La troisième partie évoque les types de procédures possibles applicables pour régler des différends pouvant découler de l'interprétation de ces articles.
- 2 - CDI/G/18 23 juillet 1996
Principes généraux
Le projet d'articles se fonde sur les principes généraux suivants : tout fait internationalement illicite d'un État engage sa responsabilité internationale; tout État est susceptible d'être considéré comme ayant commis un fait internationalement illicite engageant sa responsabilité internationale; un fait internationalement illicite de l'État consiste en une action ou en une omission attribuable d'après le droit international à cet État ou en une violation d'une obligation internationale de l'État; le fait d'un État ne peut être qualifié d'internationalement illicite que d'après le droit international et ne saurait être qualifié de licite d'après le droit interne. Chacun de ces principes est développé dans le projet d'articles.
Le projet d'article 19 distingue deux types de faits internationalement illicites : les crimes internationaux et les délits internationaux. Selon cet article, le fait internationalement illicite qui résulte d'une violation par un État d'une obligation internationale «si essentielle pour la sauvegarde d'intérêts fondamentaux de la communauté internationale que sa violation est reconnue comme un crime par cette communauté dans son ensemble constitue un crime international». Parmi les exemples de crimes internationaux cités dans le texte figurent l'agression, l'établissement ou le maintien par la force d'une domination coloniale, l'esclavage, le génocide, l'apartheid ou encore la pollution massive de l'atmosphère ou des mers. Tout fait internationalement illicite qui n'est pas un crime international conformément aux critères définissant ce crime, constitue un délit international.
Le projet d'articles prévoit également les circonstances excluant l'illicéité d'un fait telles que le consentement, les contre-mesures, la force majeure et le cas fortuit, la détresse, l'état de nécessité et la légitime défense.
Aux termes de l'article 41, tout État dont le comportement constitue un fait internationalement illicite ayant un caractère de continuité est tenu de cesser ce comportement. Par ailleurs, l'État lésé est en droit d'obtenir de l'État qui a commis un fait internationalement illicite une réparation intégrale sous une ou plusieurs formes de réparation : restitution en nature; indemnisation (couvrant tout dommage susceptible d'évaluation économique et pouvant comprendre des intérêts, et, le cas échéant, le manque à gagner); satisfaction (sous la forme d'excuses ou de dommages-intérêts symboliques); assurances et garanties de non-répétition.
Pour déterminer la réparation, il doit être tenu compte de la négligence ou de l'action ou l'omission délibérée de l'État lésé ou des ressortissants de l'État qui a contribué au dommage. En aucun cas, toutefois, la réparation ne saurait avoir pour effet «de priver une population de ses propres moyens de subsistance».
- 3 - CDI/G/18 23 juillet 1996
L'État lésé est en droit de prendre des contres-mesures si le fait internationalement illicite n'a pas cessé et si il n'y a pas eu de réparation intégrale. Dans le cadre de contre-mesures l'État lésé est en droit de ne pas s'acquitter d'une ou plusieurs de ses obligations envers l'État auteur dudit fait pour l'inciter à cesser ce comportement et à faire réparation. Ces contre-mesures ne peuvent être prises que sous réserve des conditions et des restrictions énoncées dans le projet d'articles.
Avant de décider de contre-mesures, l'État lésé doit avoir tenté de régler le différend par la voie de la négociation. Ceci ne doit pas l'empêcher de prendre des mesures provisoires destinées à protéger ses droits. Les contre-mesures prises par un État lésé ne doivent pas être hors de proportion avec le degré de gravité du fait internationalement illicite ou ses effets sur l'État lésé.
Le texte spécifie qu'il est interdit de recourir aux contre-mesures suivantes: la menace ou l'emploi de la menace; les mesures de contrainte économique ou politique extrêmes; tout comportement qui porte atteinte à l'inviolabilité des agents, locaux, archives et documents diplomatiques; tout comportement qui déroge aux droits de l'homme fondamentaux; tout comportement contrevenant à une norme impérative du droit international.
Dans le cas d'un crime international, s'appliquent toutes les conséquences juridiques découlant de tout autre fait internationalement illicite. Certaines limitations ou restrictions ne s'appliquent pas pour l'obtention de la restitution en nature ou de la satisfaction. D'autre part, tous les États ont obligation de ne pas reconnaître comme licite la situation créée par un crime; de ne pas prêter aide ou assistance à l'État qui a commis le crime; de coopérer avec les autres États pour énoncer les obligations précédentes et pour appliquer les mesures visant à éliminer les conséquences du crime.
La troisième partie du projet d'articles comporte un ensemble de procédures relatives au règlement des différents résultant de l'interprétation ou l'application des articles. Il s'agit notamment de la négociation, des bons offices et de la médiation, de la conciliation et de l'arbitrage. Selon ces dispositions, les parties au différend doivent s'efforcer de le régler à l'amiable par négociation. Si le différend n'a pas été réglé par accord, toute partie au différend peut le soumettre à la commission de conciliation. Si une commission de conciliation n'a pu être établie, les parties peuvent, d'un commun accord, soumettre le différend à un tribunal arbitral.
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