DH/G/421

LE COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME ACHEVE L'EXAMEN DU RAPPORT DU BRÉSIL

11 juillet 1996


Communiqué de Presse
DH/G/421


LE COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME ACHEVE L'EXAMEN DU RAPPORT DU BRÉSIL

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Pour les experts, le Brésil doit se donner les moyens de mettre en oeuvre une réelle politique des droits de l'homme

Genève, 11 juillet -- Le Comité des droits de l'homme a achevé, ce matin, l'examen du rapport initial présenté par le Brésil en entendant les observations des membres du Comité sur l'application du Pacte international relatif aux droits civils et politiques dans ce pays. Les observations finales du Comité seront adoptées et rendues publiques à la fin de la session, le 26 juillet.

Dans leurs observations préliminaires sur le rapport du Brésil, la plupart des experts, tout en louant le processus de réformes démocratiques et la mise en place d'un Programme national des droits de l'homme, ont qualifié d'encore insatisfaisante la situation des droits de l'homme au Brésil. Le Gouvernement du Brésil n'ignore pas la nature des problèmes qui restent à régler. Les membres du Comité ont souligné la nécessité d'identifier les lacunes qui ont conduit à la situation actuelle et de suivre les recommandations du Comité pour parvenir à mettre un terme aux violations des droits de l'homme qui perdurent.

Selon certains experts, le Gouvernement fédéral n'a pas fait les efforts escomptés pour que le Pacte soit respecté dans tout le territoire brésilien. Il doit jouer un rôle plus déterminé pour veiller à l'application du Pacte. Les experts ont noté un fossé entre les bonnes intentions du Gouvernement et la réalité de l'application du Pacte au Brésil.

Les experts ont souligné les points sur lesquels le Gouvernement est appelé à prendre des mesures. Il s'agit principalement de la poursuite des violences perpétrées principalement par les forces de la police militaire; de l'impunité; de la «fédéralisation» des violations des droits de l'homme; de la situation des enfants soumis à la violence; des mauvaises conditions de détention des prisonniers.

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Au sujet de la structure fédérale de l'État, certains experts ont estimé

que, n'ayant pas fait de réserves lors de la ratification du Pacte, le Brésil a pour obligation d'appliquer le Pacte sur tout le territoire brésilien sans exception. Certains ont exprimé leurs craintes que le projet de «fédéralisation» des droits de l'homme ne crée une absence de garanties juridiques. Face au problème crucial de l'impunité, certains experts ont préconisé la poursuite judiciaire systématique de tout abus d'autorité. La protection des témoins et du ministère public doit être assurée.

Pour ce qui est de la surpopulation des prisons, le Brésil doit tout mettre en oeuvre pour trouver des solutions et notamment en prévoyant des peines alternatives à l'emprisonnement.

Un grand nombre des membres du Comité ont insisté sur la nécessité d'incorporer les dispositions du Pacte dans le droit interne. Des cours de formation et des séminaires devraient avoir lieu pour renforcer l'indépendance du judiciaire et faire connaître les critères des Nations Unies dans ce domaine.

Les experts ont été unanimes pour inviter le Brésil à se donner les moyens d'une vraie politique des droits de l'homme qui doit commencer par l'éradication des phénomènes de violence qui caractérisent le Brésil. Ils ont mis l'accent sur l'importance de l'éducation dans la promotion des droits de l'homme. Ils se sont inquiétés du nombre important d'armes qui circulent dans le pays et sur les rapports d'exécutions sommaires d'enfants et d'autochtones dans les milieux urbains et ruraux.

Ce qui préoccupe le plus, selon des experts, c'est le fossé entre les riches et les pauvres, fossé qui empêche une réelle promotion des droits de l'homme. Ce qui frappe aussi c'est le contraste entre les lois et l'application de ces lois dans la réalité.

En début de séance, le chef de la délégation du Brésil, M. Gilberto Vergne Saboia, a indiqué que, selon des informations qu'il venait de recevoir au sujet du processus de délimitation des territoires autochtones, le Ministère de la justice a reçu 386 contestations sur lesquelles 33 ont été adressées au groupe d'experts juridiques (FUNAI), tandis que 353 ont été réglées dans le sens des revendications des indigènes. La procédure de restitution est donc sur le point de prendre fin, ce qui prouve l'engagement du Brésil à mener à terme le processus de délimitation. M. Saboia a ajouté qu'il ne peut y avoir de recours pour ceux qui contestent la restitution de ces terres aux autochtones. Le programme de délimitation doit être compris comme étant à sens unique en quelque sorte.

Répondant à une question sur la place du Pacte dans le droit interne, M. Saboia a réaffirmé que la Constitution brésilienne de 1988 déclare que l'un des principes qui gouvernent les relations internationales du Brésil est la

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primauté des droits de l'homme. S'agissant des traités internationaux, l'application de leurs dispositions en droit interne suppose un acte ayant force de loi. Les droits garantis par les traités internationaux de protection des droits de l'homme auxquels le Brésil est partie, eux, sont directement applicables au niveau national. En cas de conflit entre droit interne et droit international, la norme du Pacte aurait préséance, car elle se situe à un échelon constitutionnel supérieur.

Répondant aux nombreuses questions sur la «fédéralisation» des droits de l'homme, M. Saboia a expliqué qu'un amendement constitutionnel est proposé

qui permettrait de transférer de l'échelon de l'État fédéré à l'échelon fédéral l'examen et le jugement de certaines violations des droits de l'homme. La proposition prévoit aussi que des cas soient examinés par le Conseil de la défense de la personne humaine.

A propos du pouvoir judiciaire, M. Saboia a indiqué que la carrière des magistrats est déterminée par le pouvoir judiciaire. L'accès à la magistrature est conditionné par des concours publics. Les juges sont nommés à vie. Ils peuvent toutefois faire l'objet d'un renvoi si une inspection détermine des manquements à leurs engagements.

En réponse à d'autres questions des experts, M. Saboia a fait valoir qu'au Brésil, les relations sexuelles avec des mineurs de moins de 14 ans sont considérées comme un crime. Pour ce qui est de l'assistance juridique aux plus démunis, prévue par la législation brésilienne, elle sera renforcée par l'action du Défenseur du peuple. Les populations autochtones ont naturellement le droit de faire appel aux services du ministère public, a encore précisé le représentant. Le projet de loi sur la définition et la sanction du crime de torture a été approuvé par la Chambre des députés et se trouve à l'examen au Sénat pour adoption. Pour les agents de la sécurité responsables de violations des droits de l'homme, outre des mesures administratives comme le limogeage ou la suspension, ils sont poursuivis par les tribunaux, a précisé M. Saboia. La ligne téléphonique «SOS, enfants martyrs» sera étendue à tout le pays.

En outre, malgré les garanties constitutionnelles de l'égalité des hommes et des femmes, la discrimination entre les sexes continue de dominer le marché du travail. Les femmes se retrouvent toujours au bas de l'échelle professionnelle, M. Saboia a rappelé la création par le Chef de l'État du Groupe de travail pour l'élimination de la discrimination dans le domaine de l'emploi. Bien qu'il n'y ait pas de femmes ministres dans le Gouvernement actuel, il y en a eu deux dans les gouvernements précédents. Par ailleurs, il y un nombre accru de femmes au Parlement.

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En ce qui concerne la violence contre la femme, M. Saboia a expliqué que des campagnes de sensibilisation ont été menées pour lutter contre ce phénomène et renseigner sur les moyens et services mis en place pour y faire face. Des postes de police spéciaux pour les femmes victimes de violence ont été mis en place. Gérés par des femmes policiers, ces postes offrent des services de police traditionnels et constituent un abri pour les femmes violées. Une autre mesure importante a été l'initiative du Gouvernement, le 8 mai dernier, d'introduire un projet de loi portant des amendements au Code pénal en vue de redéfinir le viol, non plus comme un «crime contre les coutumes et la morale», mais comme un «crime contre la personne humaine».

Au Brésil, a poursuivi M. Saboia, la liberté d'expression, de conviction religieuse ainsi que la liberté d'association sont largement respectées. La Constitution de 1988 a accru la liberté syndicale en n'exigeant pas que l'État donne son aval à la formation d'un syndicat.

Le Comité poursuivra ses travaux, cet après-midi, à 15 heures. Il reprendra l'examen d'un projet d'observation générale sur l'article 25 du Pacte, commencé à la cinquante-troisième session.

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