DH/G/420

LE COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME POURSUIT L'EXAMEN DU RAPPORT DU BRÉSIL

10 juillet 1996


Communiqué de Presse
DH/G/420


LE COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME POURSUIT L'EXAMEN DU RAPPORT DU BRÉSIL

19960710

La délégation fournit des renseignements sur la démocratisation du pays, le fonctionnement du système fédéral, le respect des droits des autochtones

Genève, 10 juillet -- Le Comité des droits de l'homme a poursuivi, cet après-midi, l'examen du rapport du Brésil en entendant les renseignements complémentaires de la délégation de ce pays sur les mesures qui ont été prises pour assurer l'application des dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Pour certains experts, il semble exister un vide juridique quant à l'application du Pacte dans les 26 États fédérés. En dépit des initiatives encourageantes que le Gouvernement a prises pour améliorer la situation des droits de l'homme, les phénomènes persistants de violence, la criminalité, l'impunité, les cas de torture et de nombreuses violations donnent lieu à des inquiétudes. Selon le rapport d'Amnesty International, la police et les escadrons de la mort ont exécuté des centaines d'enfants, en toute impunité. Que fait le Gouvernement pour y remédier ? Est-ce qu'il existe un effort national, à l'échelle du pays tout entier, pour remédier à la violence exercée contre les enfants ?

Des experts se sont inquiétés du fait qu'au Brésil, de nombreux détenus demeurent incarcérés même après avoir purgé leur peine. Ils ont demandé quelles mesures le Gouvernement brésilien envisage de prendre pour réduire le surpeuplement carcéral et l'engorgement du système judiciaire. Certains experts ont estimé que le Brésil devrait montrer davantage de volonté à assurer la réadaptation et à la réhabilitation des détenus.

A propos des efforts d'intégration des populations autochtones, certains experts ont demandé si le Gouvernement tenait compte des risques d'acculturation et si l'identité culturelle des autochtones était protégée. Les communautés autochtones ont-elles participé au processus de décision qui a conduit à la délimitation de leurs terres? Le processus de délimitation des terres, qui aurait du être terminé en octobre 1993, n'est pas encore terminé,

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ont constaté les experts, soulignant le degré d'urgence que revêt l'achèvement de ce processus pour les populations autochtones. Quelles mesures sont prises pour faire respecter le droit constitutionnel des populations autochtones à la propriété de leurs terres, pour enquêter sur les violations dont elles sont victimes et pour poursuivre les responsables, ont encore demandé certains experts.

En ce qui concerne les personnes disparues sous le régime militaire, les experts ont demandé si les mesures d'identification et de réparation recueillent l'approbation de la population. Dans l'hypothèse où ces mesures sont satisfaisantes, elles pourraient servir de «modèle» pour d'autres situations de personnes disparues dans le monde, ont estimé certains experts.

A propos de la prostitution enfantine, dont on estime qu'elle compte environ 500 000 enfants, les experts se sont étonnés de ce que le Programme national pour les droits de l'homme n'inclut pas de moyens de répression. Tout en se félicitant de l'abrogation du certificat de stérilisation des femmes demandé par certains employeurs brésiliens, les experts voudraient savoir si l'annulation de ce certificat est respectée dans la pratique et dans tous les États de la fédération.

Dans ses réponses aux questions des experts, M. Saboia a rappelé que le Brésil était un pays qui souffrait encore des vestiges de son passé colonial et militaire. L'erreur a été de vouloir moderniser l'État sans garantir la primauté du droit. Le processus du changement a commencé en 1985 et surtout en 1988 par l'adoption d'une constitution progressiste. Le processus de démocratisation est lent, mais il est en bonne voie. M. Saboia en veut pour preuve la destitution d'un président de la République par la volonté du peuple, pour des motifs de corruption. La violence, fait observer M. Saboia, n'est pas une vocation du Brésil. Faute de dispositions applicables en droit interne, les tribunaux brésiliens accepteraient qu'on invoque les Pactes et normes internationales, a par ailleurs indiqué le représentant.

S'agissant de la question du fédéralisme, M. Saboia estime que cette structure est nécessaire au Brésil étant donné la taille du pays. Les États fédérés accuseront toujours un peu de retard par rapport à ce qui se passe à l'échelon supérieur en matière des droits de l'homme. Dans chaque État on a mis en place des organes pour compléter l'action fédérale. Une Commission est chargée de la coordination entre État fédéral et États fédérés. Le Programme national des droits de l'homme prévoit d'attribuer aux Gouvernements des États la responsabilité d'élaborer et de présenter au Ministère de la justice des rapports semestriels et annuels sur l'application du Programme et la situation des droits de l'homme dans leurs États respectifs.

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A propos des autochtones, M. Saboia rappelle que l'État de Para a connu des actes de violence de la part de ces populations. Le Gouvernement met tout en oeuvre pour aboutir à une solution pacifique. Le processus de délimitation des terres indiennes n'a pas de conséquences négatives sur la vie des populations autochtones. Soixante pour cent des terres, soit une superficie équivalent à celle de la France, ont déjà été délimitées, mais le processus est long et coûteux. La politique d'intégration va dans le sens du libre choix de ces populations de décider de leur avenir. Le Ministère de la justice a consulté les chefs autochtones et a tenu

compte de leur avis dans la préparation du décret portant délimitation des terres autochtones.

Répondant aux questions posées ce matin au sujet d'infiltrations des escadrons de la mort dans les autorités judiciaires, M. Saboia a affirmé que, selon le Ministère de la justice, il n'existe pas de telles infiltrations dans le corps judiciaire.

S'agissant du travail forcé, le système d'inspections mis en place n'est pas totalement efficace, en dépit de la volonté du Gouvernement de lutter contre le phénomène. En outre, certains patrons ont trouvé le moyen de contourner la loi. En ce qui concerne les personnes disparues sous le régime militaire, M. Saboia a indiqué que les membres des familles de ces personnes ont participé à l'élaboration des mesures législatives qui ont été adoptées pour l'identification des victimes et le paiement de réparations.

Le Comité se réunit demain matin à 10 heures pour achever son examen du rapport du Brésil.

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